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ter la responsabilité des tergiversations du vieux pontife et notamment lui imputer l’échec de l’entrevue de Savone décidée à la convention de Marseille (9 mai liOT). Mais, sans compter l’inlluence parallèle des neveux du pape, quand on se replace dans les circonstances réelles où se déroulaient les événements et au propre point de vue des intéressés, on n’a pas trop de peine à comprendre les motifs de leurs répugnances : l’attitude de Benoit, la présence de Boucicaut, leurs négociations avec Florence, le bruit qui courait d’un coup de force médité par eux sur Rome et son pontife, l’entrée violente en celle-ci du roi Ladislas de Naples, tout cela devait leur donner à réfléchir ou les jeter dans la plus grande perplexité. Le pape, qui s’était arrêt- à Sienne depuis septembre 1 407, eut à cœur de s’en expliquer devant le peuple assemblé à la cathédrale, et ce fui Oominici qui s’acquitta pour lui de ce soin. Rcesler, p. lis sq., montre fort bien que rien ne permet de mettre en doute sa sincérité. Pendant ce temps, il prenait à la cour de Grégoire XII une place toujours plus considérable. L’archevêque de Raguse étant mort subitement en janvier 1 iOS, le pape lui imposa sa succession : le 12 mai, à Lucques, quelques jours après que les cardinaux qui avaient élu Corrario, de plus en plus mécontents de voir traîner les choses en longueur, se furent séparés de lui pour s’aboucher à Livouine avec ceux de Benoit, Oominici fut lui-même revêtu de la pourpre. Ses ennemis lui ont toujours reproché celle double promotion : il est pourtant difficile de lui faire un grief, à une époque aussi troublée, de sa fidélité au pape qu’il tenait pour légitime et que moins que jamais il pouvait abandonner dans les jours les plus sombres ; d’autant que la nouvelle dignité’dont il était investi allait sans doute lui permettre de travailler plus efficacement à la conciliation tant désirée de l’Église tout entière.

De fait, d’accord avec Malatesta, Oominici réussit tout d’abord à obtenir de Grégoire XII qu’il vint se mettre, à Riinini, sous la protection de cet excellent prince, particulièrement zélé pour la cause de l’union (novembre 1408). Œ là, le pape l’envoya en Pologne et en Hongrie pour y faire prévaloir son autorité ; c’est au cours de cette mission diplomatique qu’il se rencontra avec le roi Sigismond, une rencontre qui devait porter ses fruits. La situation pouvait paraître à cette époque plus désespérée que jamais : au lieu de deux préten dants à la tiare, on en avait maintenant trois, depuis l’élévation d’Alexandre V au concile de Pise (26 juin 1409). Pendant que se tenait celui-ci, Grégoire convoquait un synode à Cividale de Frioul ; à la troisième séance (5 septembre), il se déclara prêt à résigner le pontificat, si ses deux compétiteurs en faisaient autant : le champ resterait ainsi libre à l’élection d’un nouveau et unique pape par les collèges réunis des trois obédiences ; le choix du temps et du lieu serait laissé aux trois rois Robert (de Bavière), Ladislas et Sigismond. Si ce généreux dessein n’eut pas de résultat immédiat, la faute n’en est pas à Oominici, comme on l’a parfois prétendu, mais au désaccord des trois princes désignés par Grégoire, voir Rcesler, p. 167 ; au surplus, cette déclaration importante du vieux pontife peut être considérée à bon droit comme la première amorce des négociations qui devaient aboutir heureusement à Constance. Il fallut pourtant attendre trois années encore avant que l’idée ne reçût un commencement d’exécution, trois années des pires épreuves pour Grégoire XII et son fidèle cardinal, qui, retirés depuis la fin de 1409 à Gaète, furent obligés de s’enfuir de cette ville en octobre 1412 pour chercher de nouveau un reluge à Rimini, auprès de Ch. Malatesta. C’est alorsque celui-ci, reprenant le projet de Cividale, s’entendit avec Sigismond, devenu dans l’intervalle roi des Romains, pour y donner suite d’une manière ferme et définitive. Si DICT. DE THÉOL. CATHOL.

gismond parvint à imposer à Jean XXIII, le successeur (23 mai 1410) d’Alexandre V, la convocation d’un concile général à Constance ; l’ouverture en fut fixée au 1 er novembre 1414. Le choix que fit Grégoire XII de Oominici pour l’y représenter était déjà du meilleur augure, étant donnés les anciennes relations du cardinal comme légat avec Sigismond lui-même et le sincère désir de la paix qui avait toujours guidé ses démarches. Si, comme on l’a remarqué, « Grégoire poursuivit l’affaire de son abdication avec une logique, un esprit de suite et une dignité qui faisaient un singulier contraste avec la conduite et les procédés de Jean XXIII », L. Salembier, Le grand schisme d’Oceident, p. 360, il est permis de dire aussi que l’honneur en revient pour une bonne part à son sage conseiller, le cardinal de Raguse. La preuve en est d’ailleurs dans l’attitude de celui-ci au concile de Constance, où il sut faire reconnaître les droits de Grégoire XII et accepter toutes ses conditions avec autant de tact que de fermeté, notamment au cours de la fameuse XIVe session générale, 4 juillet 1415. Après communication de la bulle qui instituait comme procureurs du pontife Ch. Malatesta et le cardinal Oominici de Raguse, t le cardinal lui-même donna lecture de la convocation du concile, acte important qui montre bien que, dans la pensée du pape qui l’accomplissait aussi bien que des Pères qui y donnaient leur acquiescement, l’assemblée n’avait été jusqu’alors ni parfaitement légitime ni vraiment oecuménique… C’était la reconnaissance implicite de la légitimité de Grégoire et de ses prédécesseurs… Le synode étant ainsi régulièrement constitué, Malatesta lit connaître les pleins pouvoirs qu’il avait reçus de Grégoire XII pour renoncer en son nom à la papauté », pouvoirs dont il lit usage séance tenante en prononçant la formule de résignation… « Le vénérable cardinal de Raguse voulut alors descendre jusqu’au rang des simples évêques ; mais le Sacré-Collège ne le permit pas. Pour mieux affirmer la fusion des obédiences, Oominici reçut l’accolade fraternelle des cardinaux ses pairs et alla s’asseoir au milieu d’eux, o L. Salembier, op. cit., p. 361 sq. Il prit ensuite une part active et honorable aux délibérations du concile, dont les actes sont suffisamment connus. Voir Constance (Concile de).

La clôture de celui-ci ne le rendit pas, comme il l’avait espéré, à la paix du cloître. Justement honoré’par le nouveau pape, Martin V, de la même conliance que lui avait témoignée Grégoire XII, il fut nommé (16 juillet 1418) légat en Bohême et en Hongrie, avec charge d’employer tous les moyens légitimes pour réduire les révolutionnaires hussites, devenus un véritable danger social. La connivence de Wenceslas à leur égard et l’altitude hostile d’une partie du clergé’lui rendirent cette mission extrêmement difficile. Il se tourna alors vers Sigismond, qui ramena Wenceslas, son frère, à de meilleurs sentiments, mais qui, menacé à la fois par les Turcs et les Vénitiens, ne put envoyer, comme il aurait fallu, une armée pour rétablir l’ordre profondément troublé en Bohême. Oominici était auprès de lui à Buda, lorsqu’il fut atteint d’une lièvre violente, qui l’emporta le 10 juin 1419. Sa vie tout entière, écrit Rcesler, p. 180, avait été une préparation à la mort, et on peut lui appliquer ce mot relevé sur une tombe à Sainte-Sabine, le berceau des frères prêcheurs : moriens ut viveret, vixit xtt nwriturus. Sa mémoire fut dès les premiers temps célébrée par ses frères en religion comme celle d’un saint ; et le 9 avril 1832, Grégoire XVI reconnut et confirma solennellement le culte rendu à ce grand serviteur de Dieu, qui s’était tant dépensé pour l’Église et pour son ordre. Les œuvres de Oominici, inédites pour la plupart, comprennent de nombreux sermons (par exemple sur l’Ecclésiaste, le Cantique des Cantiques [llinerarium

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