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DOMICILE


présume pas, il faut l’établir clairement contre la présomption qui résulte de l’existence d’un domicile antérieur. Il est, en effet, plus difficile de prouver qu’un domicile a cessé d’exister que d’établir qu’il n’a jamais été réalisé. On déduit, en ell’et, l’existence de Vanimus de l’ensemble des faits extérieurs, puisqu’on ne peut atteindre directement les intentions. Or l’existence d’un domicile antérieur, unie à l’absence d’intention de se lixer ailleurs, crée un doute sérieux dans le sens de la permanence de l’ancien animus et par conséquent de l’ancien domicile. Cette présomption peut d’ailleurs tomber devant la preuve que l’ancien domicile a cessé de tenir celui qui l’a quitté.

Enfin, le droit canonique admet le domicile de droit (necessarium, ficlum). Le droit romain dressait une liste limitative de ces domiciles. En droit canonique, ils constituent aussi une catégorie d’exceptions, mais les canonistes ne se considèrent pas comme liés par la loi romaine. C’est aux législations modernes qu’ils demandent quels sont les domiciles de droit de la femme mariée, du fils de famille, du pupille, du fonctionnaire, etc.

Mais il faut noter que le domicile de droit peut persister, après que la loi a cessé de l’imposer. Il devient alors un domicile de fait et, par exemple, le fils de famille, devenu majeur, ne peut perdre le domicile de famille que par la perte du corpus et de Vanimus. Comme la loi canonique admet la pluralité des domiciles, il sera difficile au fils majeur, même s’il s’est constitué ailleurs un domicile personnel, d’avoir gardé l’esprit de retour au domicile familial, et par suite un domicile de fait là où était autrefois son domicile de droit.

Le décret A’e temere a diminué beaucoup l’intérêt pratique de ces situations un peu compliquées. Nous ne voulons donc pas nous arrêter à les détailler. Mais pour discuter la validité des mariages contractés sous le régime du décret Tanwtsi, il sera encore nécessaire pendant de nombreuses années de ne pas les ignorer et nous renvoyons le lecteur à notre ouvrage sur le Domicile matrimonial.

Une remarque cependant qui a son importance. Le domicile est défini par les anciens romanistes comme par les canonistes : habitalio in loco.

Quel est ce locus ? Pour les anciens Romains, c’était le territoire de la cité, puisque le domicilium n’est qu’une communication des droits et obligations des citoyens. Pour les glossateurs qui confondent civis et incola, origo et domicile, c’est la cité. Pour Boniface VIII, can. Is qui habet, De sepulturis, in 6°, c’est la localité, civitas, ville épiscopale, ou caslrum, ville non épiscopale.

Le lieu n’est donc en principe ni la paroisse ni le diocèse, mais la localité. Localité, tel est donc le sens qu’il faut attribuer au mot locus dans la définition du domicile canonique que nous avons citée : habitatio in loco.

Mais il importe de noter que le domicile général n’est pas plus en droit canonique qu’en droit civil exclusif de domiciles spéciaux relatifs à des affaires d’ordre’particulier. Le lien de droit qui me ratlaclie à une localité par mon domicile général me relie par voie de conséquence à d’autres circonscriptions, en sorte que le locus domicilii doit être étendu ou restreint en fonction des actes que j’entends faire ou que la loi exige de moi. Je suis domicilii dans une localité, mais en même temps dans le ressort de tel tribunal de première instance et de telle cour d’appel, dans tel ressort académique, dans telle subdivision militaire. Suivant la nature de l’acte que j’aurai à accomplir, l’autorité compétente fera abstraction, dans lu question domicile, de tout ce qui ne l’intéresse pas. La localité que j’habite peut être subdivisée en circonscriptions

administratives, judiciaires ou autres, et dans Paris, par exemple, pour les affaires municipales je suis domicilié sur un arrondissement et au point de vue judiciaire sur une justice de paix, dans mes rapports avec le fisc sur un arrondissement de perception.

Il en est de même dans l’Kglise, et si le domicile général d’un chrétien doit être défini comme nous l’avons indiqué, il est des actes qui le rattachent à une autorité dont la compétence s’étend à des circonscriptions plus étendues ou moins étendues que la localité : le diocèse ou la paroisse.

IV. Le DOMICILE MATRIMONIAL. —On le définit : habitalio in parochia cum intenlione ibi pcrpeluo manendi, siniliil avocel. Cf. Gasparri, De matrimonio. Le locus se trouve ici précisé dans le sens paroissial. Et, en ell’et, depuis Boniface VIII, un texte législatif est intervenu qui a fait du mariage un acte paroissial. C’est le célèbre décret Tametsi, porté par le concile de Trente, sess. XXIV, Ueref. matrim. : Qui aliter quant prsesente parocho vel alio sacenlole de ipsius parochi vel ordinarii licenlia et duobus vel tribus leslibus matrimoniaux contraherc atlentabunl, eos sancta synodus ad sic conlraliendum omnino inltabilesreddit. Le mariage est donc un acte du ressort du curé. Or, la juridiction du curé ne s’étend qu’aux paroissiens, et le locus du domicile matrimonial envisagé en fonction d’un acte paroissial va être la paroisse. Quand le domicilié in civilate vel Castro voudra contracter mariage, il ne pourra le faire que devant un curé et ce dernier ne sera compélent que si celui qui veut contracter mariage a domicile in parochia. Quand il n’y aura qu’une paroisse dans la localité, le lieu du domicile général se confondra avec celui du domicile matrimonial, en sorte qu’on n’aura pas à s’occuper du premier en matière matrimoniale ; dans le cas contraire, on n’y aura pas non plus égard, puisque seul le curé est compétent.

La pratique a donc fait perdre complètement de vue l’existence du domicile dans la localité, au point que plusieurs canonistes oubliant les textes législatifs qui l’établissent et ne s’apercevant pas qu’aucune loi postérieure n’a apporté de modification au droit en nient l’existence, à la suite de d’Annibale. Summula, t. i, n. 83, note 8.

Quoi qu’il en soit, les canonistes appliquent au domicile matrimonial in parochia toutes les règles qui concernent le domicile général et que nous avons indiquéesau paragraphe précédent. Les deux éléments, corpus et animus, sont requis pour sa constitution et suffisent sans résidence préalable exigée, etc. Les expressions corpus et animus ne sont d’ailleurs plus rattachées par les canonistes à la théorie générale de la possession. Mais une tendance se dessine déplus en plus d’accorder une importance prépondérante au corpus. Animus, dit le cardinal Gasparri, débet exterius manifeslari, ut Ecclesia de eo cerlior fiai, secus doniicilium nec in foro interno conlrahitur. On peut avoir deux domiciles dans deux paroisses différentes, ou se trouver sans domicile dans aucune paroisse.

Mais une nécessité pratique se présenta bientôt. Fallait-il donc que le chrétien, résidant dans une paroisse autre que celle de son domicile, entreprit un long voyage pour aller contracter devant le curé de ce domicile ? Nous savons, en ell’et, combien le domicile est tenace. Si, en le quittant matériellement, on n’a pas abandonné tout esprit de retour, il persiste et si on ne se trouve pas dans le cas toujours exceptionnel du double domicile, il arrive fréquemment que le lieu où on habile depuis longtemps, où on a de graves intérêts, n’esl pas pour cela celui d’un second domicile.

La difficulté n’était pas nouvelle. Les décrets de Latran qui astreignaient tout chrétien de l’un et de l’autre sexe à la confession annuelle au propre curé et