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DOGME


de progrès dogmatique, necompli non seulement dans l’expression ou dans la formule, mais encore dans une vérité plus explicitement crue ou enseignée, après une période plus ou moins longue de croyance ou d’enseignement moins explicite. On doit considérer comme tels, non seulement les dogmes récemment proclamés de l’immaculée conception de la bienheureuse Vierge .Marie et de l’infaillibilité pontificale, mais encore quelques dogmes plus anciens, définis à diverses époques, et que nous rencontrerons bientôt.

II. OCCASIONS ET FACTEURS PRINCIPAl X DE CE PROGRÈS, selon la teneur des documents historiques. — 1° Occasions de ce 'progrès. — Les documents historiques, démontrant le fait d’un progrès dogmatique, attestent en même temps l’existence de trois occasions principales, dont le mode d’influence a été très variable selon les diverses circonstances de personne, de sujet, de temps ou de milieu. — 1. Influence occasionnelle <les hérésies. — A. C’est un fait constant que chaque erreur ou hérésie nouvelle, en formant les défenseurs de la foi catholique à scruter et à analyser plus minutieusement l’enseignement catholique et à l'étudier plus attentivement dans l'Écriture et dans la tradition, a toujours puissamment contribué à son élucidation plus parfaite et à sa plus complète exposition. — a. Ainsi à la fin du nr et au commencement du ive siècle, après les diverses erreurs unitariennesdeThéodote deByzance, de Paul de Samosate et de Sabellius, après les affirmations subordinaliennes émises d’une manière plus ou moins complète par plusieurs auteurs du IIe et du me siècle, et en face de l’hérésie naissante d’Arius, les défenseurs de la foi catholique, particulièrement saint Alexandre, évoque d’Alexandrie, et saint Athanase, furent contraints de préciser les formules exprimant la nature du Verbe divin, sa distinction du Père, sa génération éternelle et sa consubstantialité avec le Père. Les expressions apparemment favorables au subordinalianisme, assez fréquentes chez, les Pères du H" et du nr siècle que l’on doit cependant reconnaître comme substantiellement orthodoxes sur les points principaux du dogme trinitaire, furent dès lors complètement abandonnées. L’expression ôjj.ooJ<jio ; , précédemment condamnée, au sens sahellien ou modaliste de Paul de Samosate, par un concile d’Antioche en 269 et employée depuis par le pape saint Denys en un sens orthodoxe contre l’erreur subordinatienne, Ilefele, Histoire des conciles, trad. Leclercq, Paris, 1907, t. I, p. 202 sq., 434 sq., fut choisie comme plus apte à exprimer la consubstantialité du Fils avec le Père, en même temps que la distinction des personnes, et définitivement approuvée par le I er concile de Nicée en 325. Depuis cette époque, les expressions subordinatiennes disparaissent entièrement chez les auteurs orthodoxes. Ce progrès dans renonciation du dogme trinitaire, à l’occasion de l’hérésie arienne, est spécialement signalé par saint Augustin. Enar ratio in ps. LIV, n.22, P. L., . xxxvi, col. 613. — b. Au Ve siècle, les erreurs pélagiennes aidèrent au développement du dogme du péché originel. La transmission du péché originel à tous les enfants d’Adam avait été affirmée d’une manière plus ou moins explicite par les auteurs des IIe, IIIe et IVe siècles, antérieurs à saint Augustin, notamment par ceux que mentionne l'évêque dllippone dans son Contra Julianunt, l. I, C. m sq., P. L., t. xi.iv, col. 643 sq. Mais la plupart de leurs affirmations présentent encore un caractère incomplet, surtout à cause des préoccupations dominantes chez ces auteurs, de mettre en garde contre les erreurs alors particulièrement dangereuses du gnoslicisme, du manichéisme ou de l’origénisme et qui exigeaient que l’on mît en relief l’absence de corruption de l’homme par nature, ou l’absence de faute, c’est-àdire de faute personnelle, avant l’existence actuelle. Schwane-Degert, Histoire des dogmes, 2e édit., Paris,

1903, t. iii, p. 32 sq. Tandis que ces auteurs avaient plutôt indiqué le côté pénal ou afflictif de la faute originelle, saint Augustin, dans sa lutte contre Julien d’Eclane et ses partisans, fut amené à mettre principalement en relief l’aspect moral de la faute du genre humain en Adam. Non content de montrer les conséquences qu’elle entraîne pour toute la postérité d’Adam, il expliqua comment elle est, dans chaque individu, une transgression moralement imputable, non par une rébellion actuelle de la volonté, mais par quelque dépendance de la volonté d’Adam chef de l’humanité, et quel rôle la concupiscence joue dans la transmission du péché originel. Voir Augustin, t. i, col. 2394 sq. Les souverains pontifes, en approuvant les conciles tenus en Afrique à cette époque, Denzinger-Bannwart, Enchiridion, n. 101 sq., ou en enseignant directement la doctrine catholique sur ce point, comme dans la lettre de saint Célestin I er aux évoques de Gaule en 431, Enchirid’wn, n. 130 sq., choisirent dans la doctrine de saint Augustin ce qu’ils jugèrent être l’expression exacte du dogme, en omettant certaines explications secondaires concernant surtout le rôle de la concupiscence dans la transmission du péché originel. Ces explications que les théologiens scolastiques n'écartèrent point entièrement, ne disparurent effectivement qu’après les définitions plus explicites du concile de Trente et la condamnation des erreurs de Daius et des propositions jansénistes. — c. Aux Ve et vr siècles, les erreurs pélagiennes et semipélagiennes aidèrent aussi au développement du dogme de la grâce. Les Pères antérieurs au ve siècle avaient substantiellement affirmé ce dogme, comme le prouvent les fréquents appels de saint Augustin à leur témoignage. Mais Augustin dut, contre les négations pélagiennes et semipélagiennes, insister plus fortement sur ces deux points fondamentaux : nécessité de la grâce pour la rénovation ou régénération intime de l'âme et pour l’accomplissement des actionsou œuvres ayant quelque rapport direct avec le salut surnaturel, cl gratuité absolue de cette grâce, dépassant essentiellement tout mérite provenant des forces naturelles de la volonté humaine, ce qui est plus particulièrement vrai de la première grâce d’illumination ou de conversion surnaturelle. En développant toutes ces affirmations doctrinales, solidement prouvées par l'Écriture et par la tradition des siècles précédents, Augustin mêle à l’expression du dogme catholique des opinions ou explications personnelles, particulièrement sur le mode d’efficacité de la grâce. L’Eglise, en approuvant la doctrine du grand docteur de la grâce, surtout par la confirmation spéciale donnée au IIe concile d’Orange tenu en 529, Denzinger, Enchiridion, n. 174 sq., laissa ce qui ne lui parut point apte à exprimer le dogme catholique et fit porter son enseignement uniquement sur la nécessité de la grâce pour tout acle surnaturel en rapport direct avec le salut et sur la stricte gratuité de cette grâce, à l’exclusion de tout mérite naturel, particulièrement pour Yinitium fidei et le credulilatis affectas qui l’accompagne. De ces définitions les théologiens déduisirent ultérieurement de nouvelles conclusions qui préparèrent les définitions plus complètes encore du concile de Trente, ainsi que les condamnations portées contre les erreurs de Baius et des partisans de Jansénius. — d. Aux IVe et Ve siècles, les erreurs des rebaptisants et des donatistes furent, particulièrement chez saint Augustin, l’occasion d’une distinction plus marquée entre la validité des sacrements et leur efficacité. Jusqu'à l'évêque dllippone, on s'était à peu près borné à l’affirmation de la pratique de ne point rebaptiser, sans en donner la véritable raison. Saint Optât avait, il est vrai, montré que l’effet du sacrement ne vient pas du ministre ou operarius, mais de Dieu lui-même ; toutefois il n’avait point expliqué ce que produit le baptême validement administré par un hérétique ou à un hérétique. Saint