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DOGME


1rs dogmes chrétiens définis par l'Église comme révélés, sans atteindre directement le développement doctrinal des vérités non proposées comme révélées.

I. FAIT BISTORIQUE DE CE PROGRÈS DEPUIS LA VIS I>F. LA PÉRIODE APOSTOLIQUE Jl SQU’A L'ÉPOQUE ACTUELLE. — 1° Nous commençons ce cadre historique à la fin de la période apostolique, car c’est alors seulement que la promulgation de la révélation chrétienne reçut sa pleine consommation. Billot, De virtutibus infusis, Rome, 1901, p. 252. C’est l’enseignement du concile de Trente, déclarant absolument que la vérité, enseignée par Jésus-Christ et transmise par les apôtres, est contenue dans les livres inspirés et dans les traditions non écrites reçues de Jésus lui-même par les apôtres ou communiquées parle Saint-Esprit aux apôtres et transmises par eux à l’humanité chrétienne. Concile de Trente, sess. IV, Décret, de canonicis Scripturis. C’est d’ailleurs une conséquence de l’inspiration des écrits du Nouveau Testament et de la mission spéciale du Saint-Esprit pour enseigner aux apôtres toute vérité. Joa., xiv, 26 ; xvi, 13.

2° En commençant notre esquisse à la fin de l'âge apostolique, nous ne voulons point écarter pendant cette période tout développement dogmatique aussi justifiable à cette époque qu'à toute autre. Mais nous nous abstenons de toute investigation dans ce sens, parce que les documents que nous possédons ne nous permettent point de distinguer nettement ce qui pourrait être un développement dogmatique, de ce qui est ou peut être une tradition provenant de l’enseignement oral de Jésus-Christ, ou d’une manifestation spéciale du Saint-Esprit, selon la définition précitée du concile de Trente. Pour les mêmes raisons, nous n’avons aucunement la prétention de déterminer le contenu précis ou la formule exacte de l’enseignement explicite de l'Église au moment où se clôt l'âge apostolique. Nous nous bornerons à mentionner ce qui, d’après la comparaison des documents écrits des diverses époques tels que nous les possédons actuellement, atteste clairement ou suppose évidemment, à un moment donné de l’histoire, un progrès dans renonciation ou la proposition oflicielle des dogmes catholiques.

1™ période, depuis la fin de l'ère apostolique jusqu' au commencement du iv siècle. — l.La principale caractéristique négative de cette période, c’est que l’on ne rencontre point de nouvelle définition dogmatique bien explicite, à s’en tenir du moins aux documents que nous possédons actuellement. Plusieurs erreurs, il est vrai, furent alors réprouvées par l'Église, notamment les diverses erreurs gnostiques, le montanisme, l’unitarisme de Théodole de ISyLance et de celui de Paul de Samosate, le patripassianisme de Sabellius et le novatianisme, condamnés par plusieurs papes et par plusieurs conciles. Mais ces condamnations consistèrent plutôt en une réprobation de doctrine et dans une exclusion de l'Église, qu’en une définition explicite. lien fut de même pour la condamnation de plusieurs pratiques abusives, comme la pratique de renouveler le baptême des hérétiques. Ici encore, selon nos documents actuels, l'Église, sans faire aucune déclaration doctrinale bien explicite, ne fit guère que condamner la nouvelle pratique, au témoignage de saint Cyprien de Carthage et de Eirmilien de Cappadoce qui nous ont conservé la réponse du pape saint Etienne. Voir Baptême, t. ii, col. 227.

2. La principale caractéristique positive de toute cette période est un progrès notable dans l’affirmation ou la manifestation de diverses pratiques en usage universel d ; , ns l’Eglise et contenant ou supposant la croyance à quelque dogme, comme l’administration de chacun des sacrements déjà bien attestée à cette époque, la soumission habituelle à l'évéque de Home, impliquant évidemment sa primauté effective et même son infaillible

magistère, l’exclusion constante de l'Église, prononcée contre quiconque n’accepte point la doctrine intégrale prêchée par l’autorité ecclésiastique au nom de JésusChrist, la célébration habituelle du saint sacrifice de la messe pour les fidèles morts en communion avec l'Église, l’invocation de la sainte Vierge et des saints, l’habitude d’exiger des candidats au baptême une formelle adhésion au symbole intégral, et beaucoup d’autres pratiques connexes dont l’histoire détaillée est mentionnée aux articles spéciaux. Si l'évidence plus grande dont ces pratiques sont alors entourées n’est point par elle-même une démonstration péremptoire de progrès dogmatique, elle fournit cependant un indice très important, quand on la considère conjointement avec le développement doctrinal que nous allons constater chez les Pères de cette époque.

3. Mais si aucune nouvelle définition bien explicite n’apparaît pas pendant toute cette période, on observe cependant chez les principaux Pères un travail considérable de préparation dogmatique, qui devait puissamment contribuer aux définitions explicites des siècles suivants.

Nous noterons particulièrement : a) Le progrès accompli, surtout par saint Irénée et Tertullien, dans l’exposé de l’argument théologique de tradition, si intimement lié avec le dogme de l’immutabilité substantielle de la doctrine confiée par Jésus-Christ à ses apôtres, pour être par eux fidèlement transmise jusqu'à la consommation des siècles. S. Irénée, Cont. Iiœr., l. III, c. iii, n. 1 et 2 ; c. IV, n. 1, P. G., t. VII, col. 818 sq., 855 ; Tertullien, De prsescript., c. XXI, xxiii, xxvi, xxxvi, P. L., t. ii, col. 33, 34, 36, 38, 49 ; Origène, De princip., pru’f., n. 2, P. G., t. xi, col. 116.

b) Le progrès accompli surtout par saint Cyprien dans l’exposition du concept de l’unité de l’Eglise et de la primauté effective du pontife romain successeur de Pierre. L’unité de l’Eglise, incidemment ou implicitement affirmée par saint Ignace, saint Irénée, Tertullien, Clément d’Alexandrie et Origène, est formellement énoncée par saint Cyprien et appuyée sur l’institution de Jésus-Christ, conférant d’abord à Pierre seul tout le pouvoir qu’il devait ensuite communiquer aux autres, dépendamment de Pierre. De catholicæ Ecclesim unitate, iv, P. L., t. iv, col. 499 sq. La primauté effective du pontife romain précédemment indiquée par saint Irénée, Cont. hær., l. III, c. iii, n. 2, P. G., t. vii, col. 848 sq., et Tertullien, De prsescriptionibus, c. xxxvi, P. L., t. ii, col. 49, est plus explicitement formulée par saint Cyprien, De habita virginum, x, P. L., t. iv, col. 449 ; De uuilate Ecclesia', iv, P. L., t. iv, col. 500 ; Epist., xliv, n. 3, /'. L., t. iii, col. 710 sq. ; LI, n. 8, col. 772sq. ; liv, n. li, col. 818 sq. ; LXVI, n. 2 sq., col. 993 sq. ; i.xix, n. 8, /'. L., t. iv, col. 406 ; lxxi, col. 410 ; i.xxii, n. 3, P. L., t. iii, col. 105ÛJLXXIII, n. 7, 11, col. 1114, 1110 ; De exhortatione martyrii ad Fortunalum, xi, P. L., t. IV, col. 668, bien que la nature du pouvoir inhérent à cette primauté ne soit pas nettement précisée dans l’ensemble des écrits de l'évéque de Carthage. Voir Cyprien', t. iii, col. 2468 sq.

Aussi doit-on rejeter la thèse très téméraire de M. Tunnel dans son récent ouvrage, Histoire du dogme de la papauté des origines à la fin du IV siècle, Paris, 1908, rejetant finalement tout témoignage vraiment démonstratif de la primauté effective du pape avant la fin du IVe siècle. E. Portalié, Etudes religieuses du 20 août et du 5 septembre 1908, p. 525, 606 sq.

c) Le progrès accompli dans les affirmations doctrinales relatives aux sacrements, notamment aux sacrements de baptême, d’eucharistie et de pénitence. Saint Justin avait déjà parlé plus explicitement que ses devanciers du sacrement de baptême, dont il nous fait connaître les éléments constitutifs, les effets et les cérémonies principales. Apol., i, n. 61 sq., P. G., t. vi,