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DOGMATIQUE — DOGME

point être négligés, si l’on veut avoir une idée bien exacte du mouvement théologique à une époque donnée ; tels furent, par exemple, Bossuet et Fénelon au xviie siècle particulièrement au point de vue de la théologie polémique, et le cardinal Pie au xixe, pour l’exposé du dogme catholique en face des grandes erreurs contemporaines.

Période postérieure au concile du Vatican.

Nous n’essayerons point de donner ici une esquisse, encore trop prématurée, de cette période qui s’annonce comme une époque de sage et féconde rénovation scolastique, en même temps que d’intense développement de la théologie positive. Ce mouvement, fortement encouragé et sagement dirigé par l’Eglise, promet de très heureux résultats pour la défense de la vérité catholique et pour le véritable progrès de la science théologique. En même temps que l’on perfectionne les instruments de travail par des éditions plus critiques d’ouvrages anciens et par de astes et complets répertoires des sciences théologiques, on se montre plus attentif à résoudre les difficultés bibliques, historiques ou philosophiques, soulevées contre les dogmes catholiques. De notables résultats ont déjà été obtenus par ce travail constamment soutenu dans beaucoup d’ouvrages ou de brochures théologiques et dans de nombreuses revues théologiques récemment créées à peu près dans tous les pays. Les articles spéciaux sur l’Allemagne catholique et sur la Belgique ont déjà fait connaître les principaux travaux dogmatiques récemment accomplis dans ces pays. Des renseignements complémentaires seront fournis par des articles similaires sur les autres pays. D’ailleurs, l’ensemble des monographies dogmatiques déjà publiées dans ce dictionnaire a rendu bien familiers à tous les lecteurs les noms des principaux représentants de la théologie dogmatique d.ui^ la période contemporaine.


VI. La dogmatique et le magistère ecclésiastique

Les principes, exposés à l’article Dépôt de la foi et ceux que nous développerons à l’article Dogme, nous autorisent à formuler ici les deux conclusions suivantes :

1° En vertu de son triple droit exclusif de garder intégralement le dépôt de la foi, de le défendre efficacement contre les erreurs nouvelles et de déclarer authentiquement son contenu intégral dans la mesure nécessaire ou utile pour le bien spirituel des fidèles, l’Église possède également le droit exclusif de surveiller et de diriger l’enseignement dogmatique des théologiens, pour en écarter ce qui est en désaccord avec la vérité révélée, ou pour déclarer et interpréter ce qu’exige impérieusement cette même vérité ou du moins ce qui est meilleur pour sa défense. Ce droit strict de l’Église impose aux théologiens dogmatiques le devoir rigoureux de se soumettre à toutes les décisions doctrinales de l’Église, non seulement à celles qui se rapportent directement au dépôt de la foi et qui définissent infailliblement ce que l’on doit tenir pour révélé, mais encore à celles qui, concernant le dépôt de la foi d’une manière seulement indirecte, définissent ce que l’on doit nécessairement admettre sur ce point, ou du moins indiquent ce que l’on doit rigoureusement préférer comme s’accordant mieux avec l’enseignement révélé ou comme plus utile pour sa défense. Cette stricte obligation est nettement formulée dans toute son ampleur par Pie IX, dans le bref à l’archevêque de Munich du 21 décembre 1863. Denzinger-Bannwart, Enchiridion, n. 1683 sq.

2° En fait, il est facile de constater historiquement que les interventions doctrinales du magistère ecclésiastique ont été éminemment utiles à la théologie dogmatique, pour la prémunir contre les séductions de l’erreur, parfois même pour la délivrer de quelque entraînement dangereux, et surtout pour aider efficacement son progrès constant dans la connaissance ou dans renonciation des dogmes et dans les conclusions que l’on peu ! en déduire légitimement. C’est ce que nous montrerons particulièrement à l’article suivant en analysant le progrès dogmatique accompli au cours des siècles chrétiens.

Les éminents services ainsi rendus à la théologie dogmatique par le magistère ecclésiastique, apparaissent encore bien plus manifestes, quand on compare l’histoire de la dogmatique catholique avec celle des secles hérétiques ou schismatiques, impuissantes à se défendre contre les multiples attaques du rationalisme, parce qu’elles sont privées de la salutaire et efficace direction que l’autorité doctrinale de l’Église peut seule donner.

Pour la bibliographie, on peut consulter les nombreux ouvrages indiqués au cours de cet article.

E. Dublanchy.


DOGME. —
I. Etymologie.
II. Définition.
III. Valeur objective et positive.
IV. Sources théologiques.
V. Immutabilité substantielle des dogmes chrétiens.
VI. Progrès accidentel dans la connaissance et la proposition des dogmes chrétiens.
VII. Conclusions relatives à l’histoire des dogmes.

I. Étymologie et usage ecclésiastique.

Le mot '>jy ; j.^, de Soxéu, d’après son étymologie et d’après l’usage habituel chez les anciens Grecs, signifie non seulement une opinion qui paraît fondée ou que l’on préfère, mais aussi une résolution formelle et bien arrêtée, comme un décret ou une loi. Chez les philosophes grecs antérieurs à l’ère chrétienne, ce mot est souvent employé dans le sens de vérités ou maximes fondamentales, ou dans celui d’enseignements lant spéculatifs que pratiques d’une école philosophique, au sens du terme latin décréta, sens encore employé par saint Justin, Apol., i, n. 26, P. G., t. vi, col." 369.

La version des Septante emploie plusieurs fois le mot Sôyiioc dans le sens de lois ou de décrets royaux. Esth., iii, 9 ; Dan., il, 13 : VI, 8. Chez les écrivains du Nouveau Testament, Sdyu.2 signifie tour à tour édit, décret, prescription, loi, comme l° édit de César Auguste, Luc, ii, 1, les décrets portés par les apôtres au concile de Jérusalem, Act., xvi, i, les décrets ou lois de César, Act., xvii, 7 ; un décret de condamnation, È ; a"/ ; i’l-a ; xo xaô" r, u.’ov jjêtpôfpayov toî ; $6yi.xa : v, Col., ii, 1 i, ou un jugement porté selon les maximes du monde, r : m : Çùvts ; èv iOffu.a) SoyiLaTiÇeirâ : . Col., ii, 20. Chez les Pères apostoliques du I effet du IIe siècle, l’on rencontre les divers sens de lois fixes de la nature, ir 81vo<TTaToCa<x >rfiï iP/v.o’JTa ti rtov BeSoYH.aTtfffJ.évwv Cm’ayTcrj, S. Clément, / Cor., xx, 1, Funk, Patres a/ ostolici, 2*édil., ïubingue, 1901, t. i, p. 126, de préceptes du Seigneur, Epis t. Barnabnp. 40, d’enseignements du Seigneur et des apôtres, S. Ignace, Ad Magn., xiii, 1, p. 240, ou d’enseignement humain : o-Jok Soy^oco ; iv6p uTi.voj zooiTtiaiv, mtkz ? svtot. Epist. ad Diog., 2, p. 398. Au iiie siècle, Clément d’Alexandrie, Strotft’., VII, P. G., t. ix, col. 514, et Origène, Periarchon, l. IV, n. 1, P. G., t. xi, col. 341 ; Contra Cclsum, l. I, n. 7 ; l. III, n. 39, col. 668, 972 ; Comment, in Matth., tom. xii, n. 33, P. G., t. xiii, col. 1036, emploient le mot goyaa pour désigner l’ensemble des enseignements chrétiens se rapportant aux vérités à croire ou aux commandements à observer.

Ce n’est qu’au ive siècle que plusieurs auteurs commencent à réserver le nom de dogme aux seules vérités qui sont l’objet de la foi, et qui sont nettement distinguées des lois ou obligations enseignées par la révélation chrétienne. S. Cyrille de Jérusalem, Cat., IV, n.2, P. G., t. xxxiii, col. 456 ; S.Grégoire de Nysse, Epist., xxiv, P. G., t. xlvi, col. 1089.

Au ve siècle, ce sens restreint est généralement adopté par les auteurs ecclésiastiques et passe dès lors