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DOGMATIQUE


culièrement ce qui concerne l’ordre surnaturel librement établi par sa munificence et connu seulement par la révélation. Toutefois l’on s’occupe fréquemment en dogmatique, d’une manière incidente ou secondaire, des vérités rationnelles concernant Dieu et ses rapports avec les créatures. Ces vérités ne sont point alors traitées comme relevant directement de la théologie dogmatique, mais plu tôt connue vérités philosophiques, adjointes à la théologie pour mieux manifester le solide fondement apologétique des vérités révélées, ou pour aider à une meilleure intelligence des mystères divins par l’analogie entre les vérités de l’ordre naturel et celles de l’ordre surnaturel. Ainsi l’étude de la providence divine dans l’ordre naturel donne une meilleure intelligence du gouvernement divin dans l’ordre de la grâce, el l’étude de la motion divine dans l’ordre de la nature fait mieux saisir le mode d’efficacité de la grâce surna’urelle.

2° Comme science spéciale, la dogmatique limite son champ d’étude aux vérités divinement révélées, contenant tout d’abord un enseignement spéculatif auquel est premièrement dû l’assentiment de la foi surnaturelle. Assurément les vérités divinement révélées, qui ont pour but immédiat de faire connaître les préceptes surnaturels imposés par Dieu, pourraient être, non moins que les vérités spéculatives, l’objet de la dogmatique, puisqu’elles nous sont immédiatement connues par la foi. Mais, depuis plusieurs siècles, on est communément convenu de réserver à la théologie morale toutes les vérités révélées qui peuvent être principalement considérées comme règles pratiques dirigeant notre volonté vers la fin surnaturelle. Cette division devenue classique a l’incontestable avantage d’élargir des cadres devenus trop étroits, vu le développement considérable des questions morales tant spéculatives que pratiques et les proportions plus vastes justement accordées à la dogmatique positive. Mais cette nécessaire division du travail ne doit jamais entraîner entre le dogme et la morale une séparation effective qui serait souverainement désastreuse. De fait, l’expérience a prouvé que la morale, étudiée sans aucune relation avec le dogme, courrait le grave danger d’être une pure casuistique, où les questions doctrinales seraient à peine mentionnées et qui ne mériterait guère le nom de science théologique, liouquillon, Moral theology al the end <>f ihe nineleenth century, dans le Catliolic University Bulletin d’avril 1899, Washington, 1899, p. 258 ; Kirchenlexikon, 2e édit., t. iii, col. 1892. Cet affaiblissement doctrinal de la théologie morale aurait aussi une funeste répercussion sur l’enseignement ascétique et mystique qui doit s’appuyer sur elle.

D’autre part, il est non moins nécessaire que la théologie dogmatique soit étudiée dans ses relations avec la fin surnaturelle à laquelle la théologie morale doit immédiatement diriger. C’est à ce prix seulement que la souveraine utilité pratique de la dogmatique apparaît manifestement, dans la direction effective qu’elle donne à la volonté pour s’orienter fortement vers la possession de la fin surnaturelle. En suivant une marche différente, on expose la dogmatique, surtout quand elle prête peu d’attention aux questions de théologie positive et s’adonne presque exclusivement à des questions spéculatives, à être considérée comme une science uniquement abstraite, sans portée réelle sur la vie chrétienne habituelle. Sans examiner ici si quelques théologiens scolastiques, surtout à l’époque de la décadence, ont suffisamment évité cet écueil, nous ferons simplement observer qu’à notre époque, en face des erreurs modernistes sur le dogme, simple règle de vie pratique, et du reproche d’intellectualisme oulrancier, il y a lieu d’insister davantage sur le vrai rôle pratique du dogme tel que nous le définirons à l’article suivant.

3e Ce que la dogmatique recherche principalement, c’est donc une connaissance surtout spéculative des vérités révélées. Cette connaissance doit être : 1. Tout d’abord une connaissance positive du dogme effectivement contenu dans la révélation. Cette connaissance s’acquiert par une étude régressive des sources de la révélation, faite particulièrement pour chaque enseignement divin, non pour aboutir à la production de l’acte de foi déjà existant, mais pour justifier cette foi contre les attaques des hérétiques ou pour consolider la piété des fidèles. S. Thomas, Cont. genl., l. I, c. ix. Dans cette étude régressive où l’exégète et le critique gardent toute liberté relativement à la méthode scientifique à employer, il y a toujours pour eux obligation stricte d’observer fidèlement les règles tracées par Léon XIII dans l’encyclique Providentissimus Dana du 18 novembre 1893 et par Pie X dans l’encyclique l’ascendi du 8 septembre 1907, et de se garder soigneusement de tous les excès réprouvés par le décret Lanientabili du 4 juillet 1907.

Au travail critique l’on doit joindre une solide exposition historique de la doctrine dont on poursuit la justification régressive. Cette exposition historique dont le but est de déterminer exactement l’objet de la controverse avec les hérétiques, le sens réel des arguments apportés contre eux par les défenseurs de la vérité catholique, ainsi que l’exacte teneur des définitions ecclésiastiques au cours des siècles, aide puissamment à une meilleure intelligence de la démonstration exégétique ou traditionnelle ou de la définition doctrinale de l’Église. Ainsi une histoire complète de la doctrine théologique du caractère sacramentel dans la période patristique enlève tout fondement réel à cette supposition de plusieurs théologiens spéculatifs du moyen âge que cette doctrine n’a aucune justification solide dans la tradition explicite antérieure au moyen âge. Pourrai, La théologie sacramentaire, Paris, 1907, p. 221 sq. Il serait non moins facile de prouver par un fidèle exposé historique du dogme de l’infaillibilité pontificale que les objections habituelles des gallicans n’avaient aucun appui dans la pratique ou dans le témoignage des siècles précédents.

2. La connaissance que recherche la dogmatique est surtout une connaissance scientifique provenant de déductions théologiques principalement empruntées aux analogies entre les vérités révélées et les données de la raison el à la comparaison des mystères entre eux et avec leur fin. — a) Cette connaissance est appelée scientifique, non dans un sens absolu, mais dans un sens purement relatif. Elle ne peut être scientifique dans un sens absolu, car toute connaissance des vérités révélées doit s’appuyer fondamentalement sur le témoignage divin qui peut seul nous en assurer authentiqueinent. S. Thomas, Suni. l/ieol., l a, q. i, a. 8. Cette connaissance est scientifique dans ce sens très restreint, que la raison, effectivement dirigée par la foi. se sert, pour perfectionner son concept des vérités révélées. de toutes les données fournies par les analogies créée-, par la comparaison avec les autres enseignements révélés, particulièrement avec la fin surnaturelle vers laquelle doit converger tout enseignement divin.

b) Connaissance scientifique provenant de déductions théologiques principalement empruntées aux analogies entre les vérités révélées et 1rs données de la raison.

— a. Parmi ces analogies, les unes sont explicitement ou implicitement révélées avec le mystère divin, les autres sont simplement employées dans les documents ecclésiastiques ou dans les écrits des Pères et des théologiens, pour mieux exprimer l’enseignement révélé. — a. Les analogies les plus importantes et les plus fécondes sont celles que la révélation appuie de son infaillible autorité’. Tels sont particulièrement les concepts de personne, de paternité et de filiation, de gêné-