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DOC ÊTES


la Sôxïjin ; le thème principal de son enseignement, et en prenant le nom de docètes pour distinguer ses partisans. Quand il veut expliquer les noms des diverses sectes, Clément d’Alexandrie range les docètes parmi celles qui ont tiré leur nom particulier, non de celui de leur chef ou du lieu qui les vit naître, mais de la matière de leur enseignement. Strom., vii, 11, P. G., t.xi, col. 553. Un autre personnage, nousdit Sérapion, évêqued’Antioche, vers 190 et peu de temps avant Clément, appartient à la secte i< de ceux que nous appelons docètes, » Marcion, Moepxiavdç. Eusèhe, H. E., vi, 12, P. G., t. xx, col. 545. Celui-ci se servait de l’Evangile de Pierre, qui était très favorable au docétisme, tandis que Cassius usait de l’Évangile selon les Égyptiens. Strotn., iii, 13, P. G., t. viii, col. 1193. Mais ici une difficulté se présente, celle de savoir si le chef anonyme de la secte, dont parlent les Philosophoumena, est le même que Cassius. Dans l’état actuel des documents, l’identification parait peu probable, elle est même impossible, car il n’est rien dit de ce chef qui rappelle le moins du monde ce que nous savons de Cassius. De plus, bien qu’il s’agisse de la même époque, c’est-à-dire de la fin du IIe siècle, l’explication du nom qu’on donne à ces hérétiques ou qu’ils prennent eux-mêmes, ne porte pas exactement sur le même point. Pourquoi ce nom, en effet ? En Orient, il rappelle bien l’erreur du docétisme ; mais, sous la plume de l’auteur des Philosophoumena, il signifie encore autre chose : il viendrait, non pas de ôoLr, T’. ; , apparence, par allusion directe à la théorie du docétisme, mais de SoLô. ; , poutre, par allusion à la poutre dont il est parlé dans l’Évangile, poutre que ces sectaires avaient dans les yeux, ce qui les empêchait de voir la vérité et faisait faire à quelques-uns des folies, non en apparence, mais en réalité. r Ûv o’j tù> Soxetv Eivat Tivà ; LaTavoo0tj.£7 ij.XTX’.^ovTa ; . àLLà xr, v èv. toaxitrit uXïjî Soxôv èv oçOaX(jLû ?spo|j.svY]vS ! £Àé-y^o(xev. Philosoph., VIII, i, 11, édit. Cruice, Paris, 1860, p. 408. C’est donc aux Philosophoumena, comme à l’unique source, que nous devons demander les renseignements indispensables pour connaître cette secte ; malgré leur brièveté et leur obscurité, on s’apercevra facilement que ces docètes furent des gnostiques sans grande originalité.

II. Exposé » v système. — Comme tous les gnostiques, ces docètes de la tin du IIe siècle ont une théogonie, une cosmologie, une christologie et une sotériologie à part : cadre semblable, explications un peu dillérentes. Nous allons en faire l’exposé aussi littéral que possible.

Théogonie.

Dieu est le principe de tout ; mais il est semblable à la graine du figuier, qui est très petite quant au volume et très grande par sa puissance de développement. Le figuier rappelle l’arbre qui servit de refuge, d’abri et de voile de pudeur (à Adam et à Eve), et auquel par trois fois le Seigneur demanda vainement du fruit et qu’il finit par maudire. Or, le figuier pousse une tige, déploie des feuilles et porte des fruits aux germes sans nombre. De même de ce Dieu si petit et si réduit sortent trois éons, qui sont, à leur tour, principe de tout le reste. C’est ce qu’a fait entendre Moïse quand il a dit que les paroles de Dieu sont au nombre de trois : o-xôto : , yvoço : , f JJî),).x. Deut., v, 22. Ils se développent, en effet, et atteignent leur perfection, qui est dans le nombre dix, et deviennent trente ; ils ne diffèrent entre eux que par la distance qui les sépare du premier germe, et leur puissance prolifique est en raison directe de ce voisinage avec Dieu. Ainsi le plus voisin, xsj.iTpr.To : , l’incommensurable, se décuple et devient cent ; le second, àxaTdtXr, tcto ; , l’incompréhensible, étant un peu plus loin, se ^sextuple et devient soixante ; quant au dernier, qui n’est pas désigné, étant le plus éloigné des trois, il se triple et devient trente. Ce développement rappelle celui

de la parabole du Sauveur. « Des grains tombèrent dans la bonne terre, et ils produisirent des fruits, l’un cent, l’autre soixante, l’autre trente. Que celui qui a des oreilles pour entendre, entende ! » Matth., xii, 8. Tous ces éons, les trois et ceux qui procèdent d’eux en nombre infini sont en même temps mâles et femelles. Sortis tous de ce premier germe de concorde et d’unité et s’étant tous concentrés à la fois dans un seul éon, ils ont engendré un fruit commun, le Sauveur de tous ceux qui sont au milieu, égal en puissance au germe du figuier, sauf qu’il a été engendré, tandis que le premier germe est incréé.

Cosmologie.

Grâce à ces trois éons et à ce fils monogène, toute la nature spirituelle a été ordonnée. Et toutes les choses spirituelles et éternelles sont de la lumière, mais une lumière qui n’est ni amorphe, ni rude ; n’ayant besoin d’aucun informateur, et possédant, à l’exemple du figuier, les idées sans nombre de tout ce qui vit ici-bas, et illuminant d’en haut le chaos sous-jacent. Celui-ci, illuminé et formé tout à la fois par ces idées supérieures, s’est solidifié et a reçu du troisième éon les idées supérieures. Mais ce troisième éon, voyant que tous ses types lumineux étaient enfermés dans la nuée ténébreuse sous-jacente et n’ignorant pas le pouvoir du (jxôtoç en même temps que la simplicité et la richesse de la lumière, n’a pas toléré qu’ils y fussent longtemps retenus et les a soumis aux éons. Ayant donc affermi le firmament, il a séparé la lumière des ténèbres et a appelé jour la lumière d’en haut et nuit les ténèbres d’en bas. Or, de toutes ces idées infinies du troisième éon, enfermées dans les ténèbres, est sorti un feu vivant, d’où est né le grand Archon (le démiurge), dont Moïse a dit : « Au commencement, Dieu créa le ciel et la terre. » Gen., i, 1. C’est ce Dieu igné que Moïse dit avoir parlé du sein du buisson, c’est à-dire du sein de l’air ténébreux. El c’est ce Dieu de feu, né de la lumière, qui a fait le monde, comme le raconte Moïse : Hieu non subsistant, mais ayant le tL6t’j ; pour substance et insultant les types éternels et supérieurs de la lumière qui étaient retenus dans les ténèbres. Et c’est jusqu’à la manifestation du Sauveur que ce Dieu, né de la lumière, ou ce démiurge igné a été cause que les âmes n’ont cessé d’errer ; car on appelle ainsi,’bu/ai, les idées parce qu’elles ont été refroidies dans les ténèbres ; ces âmes passant d’un corps dans d’autres corps, tous gardés par le démiurge. Qu’il en soit ainsi, c’est ce qui se voit d’après ces paroles de Job : « Et moi, errante, je passe d’un lieu dans un autre, d’une maison dans une autre maison ; » et d’après ces autres du Sauveur : « Si vous voulez le comprendre, lui-même est Élie, qui doit venir. Que celui qui a des oreilles pour entendre, entende ! » Matth., xi, 14-15.

Christologie.

Le Sauveur a mis fin à la migration des âmes et il a prêché la foi en la rémission des péchés. En effet, voyant les idées supérieures des éons passer à travers des corps ténébreux, ce fils monogène voulut descendre et les racheter. Mais, sachant que les éons ne peuvent soutenir la vue du plérorne et sont exposés à éprouver quelque dommage à cause de la grandeur et de la gloire de sa puissance, il se contracta à la manière d’un éclair dans un corps tout petit, ou plutôt à la manière de la lumière de l’œil qui se cache sous la paupière, et il va jusqu’au ciel et aux astres brillants, où il se contracte encore davantage. Et, ce faisant, ce fils monogène et éternel emprunta une idée à chacun des éons des trois éons ; quand il se trouva dans la trentaine (celle du troisième éon), il alla dans le monde, tout petit, invisible, inconnu, sans gloire et sans être cru. Mais, pour revêtir les ténèbres extérieures, c’est-à-dire la chair, un ange qui l’accompagnait d’en haut l’annonça à Marie, comme c’est écrit, et cela naquit de Marie. Il revêtit donc ce qui était né et fit tout commeErreur de référence : Balise <ref> incorrecte : les références sans nom doivent avoir un contenu.