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CONGRUISME


concordiam, Resp. ad object. 2* iii, ibid., p. 583, 587. Molina, sans doute, n’a pas allaché la même importance que Suarez à ce côté de la question et ne l’a pas développé avec la même ampleur ; mais, de toute évidence, il rentre dans sa synthèse doctrinale de l’efficacité de la grâce. — c) Le décret poursuit : De industriel Ipsc (Deus) ea média seligit alque eo modo et tempore eonferl quo videt effectum infalli biliter habitura :

    1. ALIIS USURUS##


ALIIS USURUS, SI BAEC INEFFICACIA rii.EVIDlSSET. Quare

semper moraliler et in ratione beneficii plus ali<iui<l in efficaci quam in sufficienti gratia et in actu primo contineri, alque liac ratione efficere Deum ut reipsa faciamus, non tantum quia dat gratiam qua facere possimus. Quod idem dicendum est de perseverantia quse procid dubio donum Dei est. C’est en ce point, nous l’avons dit déjà, que l’on peut marquer une réelle différence entre les congruistes à la façon de Suarez et les congruistes qui s’inspirent plutôt de Molina. Or, il faut le reconnaître, au sens obvie, le texte d’Aquaviva semble bien tenir pour les prédéfinitions absolues de Suarez, prédéfinitions tout à fait indépendantes de la science moyenne dans leur divine intention et leur ferme et absolue détermination, dépendantes seulement de la science moyenne dans leur humaine exécution. Mais, nous l’avons dit encore, de nombreux congruistes se refusent à accepter, pour chacun de nos actes, ce système de prédélinitions antécédentes et absolues. Tout en retenant la prédéfinition gratuite de la grâce, efficace comme telle, ils la soumettent à la science moyenne pour l’intention et la détermination divine comme pour l’exécution humaine. Quelle fut la pensée intime et personnelle du P. Aquaviva ? Fut-elle exactement conforme à l’expression de son décret, ou bien l’expression a-t-elle dépassé sa pensée ? Il serait difficile de donner une réponse catégorique. Notons cependant ce que rapporte le P. Schneemann et ce qu’avait aussi relaté Billuart, déclarant y découvrir pour ses assertions un confirmatur qui ne s’y trouve pas véritablement. A la congrégation générale, la septième, qui suivit le décret d’Aquaviva, la question fut posée du sens précis à donner à ce document en ce qui regarde les prédéfinitions divines. On fut d’avis que la théorie suarézienne des prédélinitions antécédentes et absolues ne rentrait pas dans la direction doctrinale imposée par Aquaviva, que l’interprétation de Valiis usurus si hme inefficacia preevidisset dans un sens suarézien était une erreur de fait et de droit, qu’il convenait de s’en tenir à une opinion plus modérée, plus proche de Molina et même de Lessius. Le nouveau général Multius Vitelleschi signifia la décision dans la lettre suivante du 7 juin 1C16 : Cum difficullas aliqua inler viros doctos super decreto R. P. Claudii (Aquavivœ) piæ memoriee anni 1613 decembris 14 de ef/icaria gratiee mi/a est, variis varie id interpretantibus, / ?. P. prseposilus generalis et qui ei assislentes erant, et secretarius, qui decreto illi pressentes interfuerant et mentem Claudii probe perspeclam habebant, itemque Patres ad id a congregalione deputati, censuerunl non intendisse II. P. Claudium hoc suo decreto decernere, Deum sua voluntate preedelerminasse vel prœdefinivisse aliquod nostrum opus bonum indépendant er a cooperalione libéra voluntatis, nec etiam quod in gratia efficaci sit aliqua eniitas realis aut aliquis mutins physicus in actu primo, qui non sit »i gratia sufficienti, sed hoc tantum quod fuerit spéciale beneficium Dei dédisse uni, v. g. Petro, ex proposito boni in eo faciendi, gratiam rn tempore et loco, quo per prmscienliam conditionalium prascivit illum ea gratia bene usurum ; quod beneficium non contulit alleri, v. g. Joanni, cui dédit gratiam eo tempore et loco, quo præscivit illum sua culpa ea non usurum. Schneemann, op. cit., p. 301 ; Billuart, op. cit., p. 336. De ce document il ressort clairement qu’il y a une dif férence très nette entre les prédéfinilions divines entendues au sens de Suarez et ces mêmes prédélinitions telles qu’elles sont appliquées dans le nouveau décret, conformément à l’opinion de Molina. Sur ce point particulier et précis, le P. de Régnon relève justement la dissemblance entre Suarez et Molina, mais il a tort de vouloir établir une sorte d’opposition irréductible entre congruisme et molinisme. Comme nous l’avons marqué, l’explication psychologique et réelle de l’efficacité de la grâce est identique de part et d’autre. Du côté de Dieu seul, il y a lieu de noter une différence entre les deux opinions, et elle se tient tout entière dans les intentions et les décrets divins. A notre avis, cette différence n’est pas d’ordre essentiel dans la question posée, qui est celle de l’efficacité de la grâce ; et, par suite, elle ne saurait suffire à spécifier deux systèmes au point de les opposer l’un à l’autre.

III. Le congruisme et la prédestination.

1° Suarez et plusieurs de ses partisans ont transporté le congruisme jusque sur le terrain de la prédestination à la gloire ; ils l’ont appelé à la rescousse pour expliquer leur manière très particulière de concevoir l’intention et l’exécution des plans éternels de la providence. La question sera traitée avec toute l’ampleur qu’elle réclame â l’article Prédestination. Nous rappelons simplement ici ce qui est nécessaire pour comprendre l’application du congruisme à la question. — En matière de prédestination, le système suarézien présente ceci de commun avec le thomisme, que, de part, et d’autre, l’on enseigne que Dieu prédestine les bienheureux à la gloire de façon totalement gratuite, antérieurement ou, si l’on veut, antécédemment à toute prévision de mérite.

1. Dans l’opinion de Suarez, le premier décret de Dieu, en ce qui regarde ses opérations extérieures, a pour effet de décider la constitution d’une cité céleste avec le Christ pour chef. L’incarnation est donc décrétée tout premièrement. En même temps, Dieu détermine le nombre à créer des anges et des hommes qui seront les citoyens de cette cité surnaturelle, avec la place et la gloire qui seront le privilège de chacun. Dico, écrit Suarez, primum actum voluntatis divines circa salvandos homines fuisse dilectionem qua voluit et intendit illis dare gloriam voluntate absoluta et efficaci. De divina prsedestinatione, 1. I, c. viii, n. 32, Paris, 1856, t. i, p. 208. Le grand théologien précise plus loin sa pensée en ces termes : Dicendum est Deum illo gratuito et absoluto decreto non tantum gloriam indefinite suis electis voluisse, sed illam etiam singulis in gradu certo ac défini to præparasse, eodem actu et modo prseordinando illam varietatem mansionum quam Christus dicit esse in regno Patris sui. Op. cit., I. I, c. x, n. 4, ibid., p. 279. En outre de ces heureux prédestinés ou de ces futurs élus, Dieu décide aussi la création d’autres anges et d’autres hommes. Sans exclure formellement ce second groupe de créatures de sa céleste cité, le divin créateur cependant par un acte positif de son irréfragable volonté, s’abstient de les élire ; il ne les prédestine pas pour la gloire. C’est précisément ce que l’on a appelé la réprobation négative, la volonté divine déniant la gloire, au

"lieu de dévouer positivement à la mort éternelle les malheureux en cause.

2. Parce qu’il a, au regard de ses élus, la volonté antécédemment et absolument arrêtée de les sauver. Dieu leur destine et leur prépare les moyens appropriés à cette fin, des grâces infailliblement efficaces. A la faveur de ces divins secours, ils ne pourront manquer de gagner des mérites et d’obtenir ainsi la récompense éternelle. L’on aperçoit ici la célèbre distinction introduite par Suarez entre l’ordre d’intention et l’ordre d’exécution des prédestinations divines. C’est une application malheureuse, et sans fondement aucun dans