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union avec l’empereur. Or, la conception autoritaire qu’avait Charles-Quint de ses prérogatives et l’excès de sa puissance en Italie ne permettaient guère au pape de la poursuivre. Aussi Clément VII, très préoccupé de faire échec à Charles-Quint, qui venait de conquérir la Lomhardie, se rapprocha de François I er après la bataille de Pavie et entra dans une « ligue sainte » contre les Impériaux avec la France, Milan et Venise. Charles-Quint lit expier au pape cette défection par l’horrible sac de Rome (6 mai 1527) et par une demi-captivité de sept mois au château Saint-Ange. Demeuré neutre dans le conllit qui mit de nouveau Charles-Quint et François I er aux prises en 1528, le pape se rapprocha enfin de l’empereur, dont il avait besoin en Italie même, pour ses desseins contre Florence d’où une révolution avait chassé le gouvernement des Médicis.

Cette esquisse des rapports de Clément VII avec Charles-Quint explique l’échec complet des interventions pontificales dans les affaires religieuses de l’Allemagne et l’impuissance des légats et envoyés pontificaux aux diètes de Nuremberg (1524), de Spire (1526)et d’Augsbourg (1530). Les forces de l’empereur étaient occupées sur trop de points à la fois par la rivalité avec François I er et par la menace des Turcs en Orient pour que Charles-Quint pût en imposer aux princes protestants. Une autre cause d’impuissance pour les catholiques naissait de la divergence de vues sur les meilleurs moyens de remédier à la situation de l’Allemagne. Charles-Quint demandait au pape la convocation d’un concile général ; mais les exigences des protestants rendaient la célébration d’un concile à peu près impossible à un pape qui n’abdiquerait point son autorité ; Clément VII partageait du reste les défiances traditionnelles à la cour romaine depuis les assemblées de Constance et de Bàle contre les conciles ; enfin l’hostilité de François I er pour un concile réuni sur les instances de l’empereur et dans une ville soumise à son inlluence ne permettait pas de se promettre une participation sérieuse de l’épiscopat français.

C’est au milieu d’une situation politique et religieuse si troublée que la volonté de Henri VIII, roi d’Angleterre, de faire déclarer par Rome la nullité de son mariage avec Catherine d’Aragon, tante de Charles-Quint, vint susciter de terribles complications. Le pape était assiégé au château Saint-Ange en 1527, lorsqu’il fut sollicité par Henri VIII en faveur de son divorce. L’envoyé de Henri devait demander en même temps une dispense de l’affinité contractée par le roi avec sa future épouse, en raison de relations avec la saur d’Anne de Rolejn. Le pape s’étant enfui de Rome à Orvieto consentit à l’expédition de celle dispense pour le cas où le mariage serait reconnu nul. On ne peut s’expliquer la singularité d’une pareille dispense préventive et conditionnelle que par le dé>ir du pape de plaire au roi, sans rien accorder de contraire à son devoir. Les circonstances difficiles où il se trouvait en Italie l’obligeaient à des ménagements ; mais l’ambiguïté de sa conduite avait l’inconvénient grave d’encourager chez le roi des espérances qu’il sciait impossible de satisfaire. Pareille prudence et pareille façon de se dérober se trouvent mêlées dans l’envoi du légal Campeggio à Londres pour examiner l’affaire du divorce, il était chargé de procéder avec Wolsej à l’examen, non à la décision de la cause ; pour calmer l’impatience du roi, il emportait une décrétale à loul le moins imprudente dont il pouvait montrer le texte, mais non laisser prendre copie, et qui semblait promettre au roi toutes les facilités nécessaires pour son divorce et son nouveau mariage. L’cxa i de la cause com ncée en Angleterre tourna en

a’d Catherine d’Aragon, qui put arguer non

ment de l.i bulle de dispense accordée pour son

mariage avec Henri VIII et qui mettait à néant IVin péchement né de la consommation présumée du premier

mariage, mais encore d’un bref de Jules II qui tenait compte du fait que le mariage de Catherine et d’Arthur n’avait pas été consommé et qui détruisait ainsi toutes les causes de nullité que d’ingénieux casuistes en pouvaient déduire. Bientôt l’appel de lareineau Saint-Siège vint mettre fin à l’enquête de Wolsey et de Campeggio (1529). L’échec des légats coûta au cardinal Wolsey la faveur du roi ; peut être fùt-il mort comme tant d’autres serviteurs de Henri VIII par la main du bourreau, si le chagrin et la maladie ne l’avaient conduit au tombeau (1530).

Justement à cette époque, le pape venait de conclure la paix avec Charles-Quint qu’il avait rencontré à Bologne et qu’il venait d’y couronner. La nécessité qui s’imposait au pape de ménager l’empereur, aussi bien que la justice évidente de la cause de Catherine interdisaient au roi tout espoir.

Fn janvier 1531, Clément VII menaça des peines ecclésiastiques ceux qui essayeraient de déférer la cause du roi à un tribunal anglais, et défendit au roi de procéder à un mariage avant que sa cause eût été jugée. Deux autres brefs du même genre suivirent en 1532. Toute la politique de Henri VIII, en présence de ces obstacles, fut de gagner du temps, d’empêcher qu’un jugement fût rendu à Rome et, en attendant, de procéder à une série d’actes qui mettraient complètement le clergé dans sa main et qui lui faciliteraient la rupture complète avec Rome. C’est ainsi qu’en 1531, il trouva moyen de lever une somme énorme sur le clergé comme prix de son pardon pour la peine encourue par sa soumission à la juridiction d’un légat pontilical. Le prétexte légal de cette demi-confiscation se trouvait dans le statut præmur nire ou d’atteinte aux prérogatives royales. Bientôt après le pape obtint du parlement, non sans user de pression, l’interdiction de payer les annales à Rome. La mesure ne devait entrer en vigueur qu’au bout d’un an, si aucun arrangement n’était intervenu avec le Saint-Siège. De plus grandes facilités furent données à Henri VIII pour ses desseins par la mort de Warham, archevêque de Cantorbéry (22 août 1532). Le 25 janvier 1533, le roi contracta secrètement mariage avec Anne de Boleyn, tout en leurrant le nonce pontilical en Angleterre, et en continuant de négocier avec le pape sur lequel il agissait par l’entremise amicale du roi de France et de qui il obtenait les bulles d’investiture pour le nouvel archevêque de Cantorbéry. Ce primat n’était autre que Thomas Cranmer, déjà gagné aux doctrines luthériennes et marié secrètement à la nièce d’Osiandre. La cour ecclésiastique bientôt convoquée par Cranmer eut à préparer les voies au divorce. L’évêque Fischer fut seul à offrir une résistance sérieuse. En même temps, les communes finirent par abolir les appels à Rome et par faire peser la menace redoutable du præmanire sur les sujets du roi qui introduiraient des bulles d’excommunication en Angleterre. L’archevêque Cranmer, ainsi couvert, demande au roi d’être autorisé à instruire la cause (Il avril 1533) ; la reine Catherine, citée devant le tribunal archiépiscopal, ayant l’ait dé faut, fui déclarée contumace le 10 mai, et le 23 mai une sentence prononçait que le mariage du roi était invalide. Une enquête secrète sur le mariage du roi avec Anne de Boleyn découvrit à l’archevêque que ce mariage était valide ; il conserva par devers lui les motifs de sa conviction ; mais la décision fut publiée en Angleterre et AnnedeBoleyn couronnée à Westminster le 1 er juin, en dépit du mécontentement populaire.

En présence de ces actes répétés, le pape Clément VII né put différer plus longtemps de rendre une sentence d’excommunication contre le roi. Fn même temps il déclara nul le divorce et le prétendu mariage du roi. Le Donce de BurgO, dont l’inaction et l’apathie axaient découragé les catholiques anglais, fut rappelé d’Angleterre, tandis que le roi retirait ses envoyés de Rome. Il n’en profila pas inoins de l’entrevue de François I er et