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CONCORDAT DE 1801

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lement aux libertés de l’Église gallicane » , que lui avaient dictée Richelieu et surtout Decazes. Les négociations, toujours ignorées du public, reprirent donc. D’elles sortit enlin le concordat du Il juin 1811, qui parut être un accord définitii. Il comprenait 15 articles. Les art. 1 et 2 reproduisaient les mêmes articles de la convention du 25 août. L’art. 3 maintenait l’abrogation des articles organiques, mais avec cette réserve « en ce qu’ils ont de contraire à la doctrine et aux lois de l’Église » ; ils étaient tous dans ce cas aux yeux de Rome. Les art. 4-7 et 9 traitent des circonscriptions épiscopales et de leurs titulaires. Les évèchés de 1801 sont maintenus ainsi que leurs titulaires, sauf, relativement à ceux-ci, « quelques exceptions particulières fondées sur des causes graves et légitimes. » Des sièges supprimés en 1801 seront rétablis ceux que jugeront nécessaires le pape et le roi, et le pape publiera le plus tôt possible la bulle de circonscription. L’art. 8 assure une dotation en biens-fonds et en rentes sur l’État « aussitôt que les circonstances le permettront » aux évèchés, chapitres, cures et séminaires. Les art. 12 et 13 traitent des anciennes abbayes dont le rétablissement du concordat de 1516 n’entraîne pas la restauration ; celles qui seront fondées à l’avenir seront soumises aux règlements prescrits en 1516. L’art. 10 est une promesse générale du roi d’employer « tous les moyens | qui seront en son pouvoir pour faire cesser le plus tôt possible les obstacles qui s’opposent au bien de la religion et à l’exécution des lois de l’Église » . Les art. 13 et 14 donnent un mois pour l’échange des ratifications, après quoi le pape publierait une bulle de confirmation et une bulle pour la circonscription des diocèses. Dans l’intervalle d’autres demandes du pape avaient reçu satisfaction : ainsi, des réfractaires de 1801, six s’étaient encore soumis ; quatre autres plus entêtés avaient dû repartir pour l’exil. L’exécution du nouveau concordat fut poussée rapidement : les ratifications sont échangées ; le 19 juillet, le pape publie la bulle de confirmation Ubi primitm ; le 27, il signe la bulle de circonscription Commissa divinitus : le nombre des archevêchés est porté à 18 ; Sens, Rennes, Albi, Auch, Narbonne, Arles, Vienne, supprimés en 1802, sont rétablis comme archevêchés ; Cambrai et Avignon, rétablis, mais comme évèchés en 1802, redeviennent archevêchés ; le nombre des -évèchés est porté à 74 ; auparavant, par une lettre du 12 juin, le pape avait demandé leur adhésion aux évêques et chapitres intéressés ; enfin, dès août 1817, il donnait l’institution canonique à 34 prélats présentés par le roi. Mais en France une question se posait : comment le concordat deviendrait-il obligatoire ? Parmi les ministres, Richelieu pensait qu’il suffirait d’une ordonnance royale ; Pasquier, Decazes et Laine affirmaient qu’il fallait une loi. Le roi finit par se ranger à cet avis. Or, à ce moment, l’opposition libérale et gallicane apprenait les arrangements du Il juin et menait contre eux une bruyante campagne de presse avec les Observations d’un ancien canonisle (Tabaraud) sur la convention conclue à Borne le Il juin 1811, in-S°, Paris, 1817 ; Le » quatre concordats, de de Pradt ; L’essai historique sur les libertés de V Église gallicane, in-8°, Paris, 1818, de Grégoire ; Le concordat de 1517 entre François 1° et Léon X et de 18Il entre S. M. Louis XV1I1 et S. S. Pie VU, in-8°, Paris, 1817, de Hurteau l’aine, etc. Puis la majorité modérée ou doctrinaire de la Chambre des députés n’eût jamais accepté tel ce concordat « ultraînontain » ; le garde des sceaux Pasquier encadra donc l’acte du II juin dans un projet de loi, n’éditant les articles organiques ou a peu près. Le projet fut déposé à la Chambre le 22 novembre. Mais il souleva de si -violentes oppositions de la paît des doctrinaires qui le jugeaient insuffisant, de la part des ultras comme Marcellus, qui en remit ; ni pape, qui le jugeaient attentatoire aux droits de l’Église, de la part du pape qui encouragea Marcellus, dans une lettre du 23 février 1818, à

combattre ce projet de toutes ses forces, qu’à la fin de mars 1818 le ministère le retira. Alors s’engagea avec la cour de Rome une négociation irritante, où fut mêlé l’épiscopat tout entier et qui ne prit fin qu’en août 1818, quand dans une lettre à l’épiscopat et dans une allocution consistoriale le pape eût fait connaître que le concordat de 1817 était non pas supprimé, mais suspendu, et qu’en attendant il maintenait proprio molu le concordat antérieur : les évêques actuellement en fonctions étaient autorisés à conserver l’administration des territoires, confiés à leurs soins en vertu de la bulle de 1801. Enfin, par une loi de mai 1821, le gouvernement fut autorisé à négocier avec Rome l’établissement de

30 nouveaux sièges. Le 10 octobre 1822, le pape lançait la nouvelle bulle de circonscription, Paternx caritatis, publiée en France en vertu d’une ordonnance royale du

31 octobre. Ainsi prirent fin les négociations entreprises par la Restauration. Ni le gouvernement de juillet, ni la république de 1848, ni le second empire ne touchèrent au concordat. Vers 1830, cependant, le concordat fut attaqué par Lamennais et ses disciples comme funeste à l’Église : dans l’état présent des choses, leur semblait-il, l’Église n’a besoin que de la liberté. Leur doctrine fut condamnée par l’encyclique Mirari vos, 15 août 1832. D’autre part, de 1833 à 1875, aux droits que lui reconnaissait le concordat, l’Église vit s’ajouter le droit d’enseigner : en 1833, en 1850, en 1875, les catholiques obtinrent en effet la proclamation de la liberté de l’enseignement, à ses trois degrés.

9° La fin de la loi du 18 germinal an X. — Vers 1869, le parti républicain mit à son programme « la séparation des Eglises et de l’État » , sous le prétexte de sauvegarder l’indépendance de la société civile. Maître du pouvoir en 1879, il commença, comme avait fait Louis XIV lorsqu’il préparait la révocation de l’édit de Nantes, par exiger « la stricte application du concordat » ou plus exactement de la loi du 18 germinal, et, derrière cette formule, par restreindre les légères améliorations obtenues par l’Église de France depuis 1802 et spécialement son droit d’enseigner. Puis il est arrivé à faire voter la loi du 9 décembre 1905, qui a aboli la loi du 18 germinal, c’est-à-dire les articles organiques qu’il était loisible à tout gouvernement d’abolir de lui-même et le concordat qui ne pouvait être régulièrement aboli que de l’aveu du pape, pour les remplacer par un soit disant régime de séparation. La France est ainsi revenue au régime religieux de l’an IV.

Boulay de la Meurthe, Documents sur la négociation du concordat et sur les autres rapports avec le saint-siège, 18001801, 6 in-8° Paris, 1891-1905 ; Consalvi, Mémoires, édit. Crétineau-Joly, 2 in-8° Paris, 1864 ; nouvelle édition, augmentée d’un fascicule inédit sur le concile de 1811, par P. Drochon, Paris, 1896 ; Pacca, Mémoires historiques sur Sa Sainteté Pie Vil avant et pendant sa captivité, trad. Jamet, 2 in-8° Paris, 1832 ; Napoléon, Correspondance, 31 in-8, Paris. 1869 ; de Banal, Fragments relatifs à l’histoire ecclésiastique des premières années du xix’siècle, Paris, 1814 ; Maury, Correspondance diplomatique et mémoires inédits, 2 in-8°, Paris, 1N01 ;.laulTret, Mémoires historiques sur les affaires ecclésiastiques de France pendant les premières années du xix" Siècle, 8 in-8’, Paris, 1823-1824 ; do Pradt, Les quatre concordats, 2 in-8° Paris, 1818 ; Portalis, Discours, rapports et travaux inédits sur le concordat de 1801, Paris, |s4.’i ; Talleyrand, Mémoires, Paris, 1890-1892 ; Crétineau-Joly, Bonaparte et le concordai de 1801, in-8% Paris, 1869 ; d’Haussonvilie, L’Église romaine et le premier Empire, 1810-18H, X> in-8° Paris, 1868-1870 ; Tlieiner, Les deux concordats, 2 in-8° Bar-le-Duc, 1K75 ; Lénn Séché, Les origines du concordat (hostile à Pie Vil), 2 in-8° Paris, 1894 ; de Broglie, Le concordat, 1893 ; cardinal Mathieu, le concordat de 1801, in-8° Paris, 1903 ; E. Sevestre, Le concordat de 1801, L’histoire, le te.rte, la destinée, in-8 % Angers, 1904 ; 2e édit., Paris, 1905 ; K. Binierl, I. « diplomatie pontificale au xtx 1 siècle, Le concordat entre l’ic Vil et le premier consul, 1800-180 ?, trad. de L’abbé J.-B, Verdior, in-8° Albi, 1903 ; L. Cronzil, Le

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