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CONCORDAT DE 1801


de leurs lettres au pape : tous devaient affirmer qu’ils donnaient librement leur démission et, en guise de rétractation, dire qu’obéissants et soumis vis-à-vis du successeur de Pierre, ils adhéraient « à la convention relative aux affaires ecclésiastiques de France et aux principes que le pape et le gouvernement y avaient consacrés. » Cette lettre, que quelques-uns rendirent encore moins expressive, ne satisfit pas le pape, et si le schisme allait s’éteindre par la démission de ses chefs, aucun d’eux ne sollicitait le pardon nécessaire. La question de la rétractation devait se retrouver entière au moment des nominations épiscopales. Des évêques constitutionnels qui avaient abandonné leurs sièges, 5 envoyèrent alors leur démission, dont Charrier de la Roche, ex-évêque de la Seine-Inférieure, qui joindra une rétractation formelle, et Montault des Isles, ex-évêque de la Vienne, qui, démissionnaire en octobre 1801, fera lui aussi une rétractation formelle, mais en mars 1802.

4° Mission d’un légat « alatere » . — L’envoi d’un légat, muni des pouvoirs mêmes du pape, était nécessaire pour régler toutes les questions de conscience ou de discipline soulevées, donner les dispenses voulues, réconcilier avec l’Église les ecclésiastiques mariés, par exemple, et même les constitutionnels, pourvoira l’admidistration des diocèses, fixer la nouvelle circonscription, etc. Dès les premières négociations, Bonaparte avait demandé l’envoi d’un légat de cette importance et même en avait fait un article du 3e projet ; Rome n’avait pu que consentir. Le concordat signé on s’occupa de la personne : Rome eût préféré Spina, Spina désignait le duc Braschi, Bonaparte demanda et obtint le cardinal Caprara, évêque d’Iesi dans la Marche, vieillard de 68 ans, « un peu mou, facile à impressionner, accessible aux flatteries et aux séductions » (Debidour), qui avait été nonce auprès de Joseph II en 1783 et qui avait déjà donné là des preuves de faiblesse. Ce caractère, Bonaparte voulait l’exploiter. Le pape céda ; il prit cependant ses précautions. Il eût voulu laisser à côté du légat Spina et Caselli, mais Ronaparle et même Caprara, dés qu’il fut arrivé, insistèrent pour leur rappel. En octobre, Spina rentrait à Rome rapportant le corps de Pie VI ; il allait être nommé cardinal, ainsi que Caselli, puis archevêque de Gênes. Pie VII restreignit du moins les facultés accordées à Caprara : divers pouvoirs dont il usera ne lui seront accordés que plus tard sur sa demande ou sur la demande du gouvernement français. Nommé solennellement au consistoire du 24 août et par la bulle Dextcra altissimi également du 24 août, Consalvi partit de Rome le 5 septembre et arriva à Paris le 4 octobre. Après hésitation, le pape lui avait aussi confié les pouvoirs de nonce. Plus tard, après que la Consulte de Lyon eut réglé les affaires religieuses dans la République cisalpine, Bonaparte demanda et obtint que Caprara, nommé archevêque de Milan, eût les mêmes pouvoirs qu’en France dans la Cisalpine. Cependant il n’exerça pas librement ses pouvoirs en France. Cet exercice fut subordonné, en vertu des précédents, à une autorisation du pouvoir civil, cette autorisation à l’i : iiregistrement de la bulle de nomination en Conseil d’État, à la prestation d’un sonnent, etc., en un mot a la reconnaissance officielle du légat, et cette reconnaissance elle-même ne devait être que le premier acte de la promulgation du concord.it, retardée jusqu’en avril 1802 par les combinaisons du premier consul. Il fallut donc bii’ii laisser Caprara user de ses pouvoirs avant toutes ces obligations remplies. Enfin, le 8 avril, le concordat étant devenu loi d’État, fut rendu le décret consulaire autorisant la mission du légat aux conditions susdites ; le 9, il était reçu par lis consuls en audience solennelle et prétail le serment ; le même jour, paraissaient au Moniti ui et au Bulletin des lois la bulle Dextera altis. b décret du 8 avril et le procès-verbal de la prestation du serment. L’allaire du serment fut grave. Le

gouvernement avait exigé un serment en vertu des précédents ; Pie VII avait autorisé Caprara à le prêter, à la condition que ce serment ne portât ni sur les lois de la République, ni sur les libertés de l’Église gallicane. Or, le serment qu’il prêta en langue latine parut au Moniteur du 20 germinal (10 avril), singulièrement altéré. Caprara avait dit : servaturum statuta et consuetudines Reipublicse et nunquam jurisdiclioni ac juribus gubernii derogalurum. Le Moniteur, évidemment pour flatter les antiromains du temps, lui fait dire : constitutionem, leges, statuta et consuetudines Reipublicx nec ullo modo gubernii Reipublicse auctorilati et jurisdictioni, jurions, libertatibus et privilegiis Ecclesiæ gallicanæ derogalurum. Caprara ne protesta pas, mais ce ne fut passa plus grande faiblesse.

Nouvelle circonscription des diocèses.

L’article

2 du concordat supposait une nouvelle division des diocèses qui devait être faite par le pape de concert avec le gouvernement français. Après avoir varié, le gouvernement adopta enfin le chiffre de 10 métropoles et de 50 évêchés. Rome trouvait que c’était peu ; il s’agissait, en effet, de la France de 1801. Les constitutionnels auraient voulu le maintien de la division de 1790, et dans les Observations du 28 août, Grégoire protesta, au nom des siens, contre la réduction des diocèses. La bulle pontificale qui devait sanctionner le nouvel état de choses ne parut que le 29 novembre 1801. Elle était théoriquement subordonnée à la démission des évêques titulaires ; or, leurs réponses n’étaient pas toutes arrivées à Rome pour la fin d’octobre. Bonaparte s’irrita vivement de ce retard : il eut voulu promulguer, affirmait-il, le concordat au jour anniversaire du 18 brumaire. Pressé, Pie VII, se tondant sur la présomption que tous les évêques ont dû recevoir le bref Tarn mulla et que le délai de dix jours est écoulé, crut pouvoir envoyer la bulle de circonscription, trop tard, il est vrai, pour être publiée au 18 brumaire, mais avant toutes les réponses reçues. Ce fut la bulle Qui Christi Domini. Caprara était chargé de l’exécuter et de régler toutes les questions soulevées. Cette bulle, avec le décret exécutorial où Caprara fut obligé sur plus d’un point de sacrifier aux prétentions gallicanes de Portalis, ne furent publiés régulièrement qu’après une autorisation rendue au Conseil d’État le 19 avril 1802. Le gouvernement, en vue de l’expédition de Saint-Domingue, avait demandé et obtenu avec la bulle de circonscription un bret donnant au légat le pouvoir d’ériger des évêchés dans les colonies françaises des Indes occidentales, mais la chose fut ajournée. En tous cas, au lieu des 24 métropoles et des 124 évêchés dont relevait la France de 1789 (cf. Brette, Recueil de documents relatifs à la convocation des États généraux de 1189, 3 in-8°, Paris, 1894-1904) ; des 2(5 métropoles et des 133 évêchés dont relevait la France de 1801, il n’y a plus que ces 10 métropoles avec ces 50 évêchés : Paris avec Troyes, Amiens, Soissons, Arras, Cambrai, Versailles, Meaux, Orléans ; Malines avec Namur, Tournai, Aix-la-Chapelle, Trêves, Gand, Liège, Mayence ; Besançon avec Autun, Metz, Strasbourg, Nancy, Dijon ; Lyon avec Mcnde, Grenoble, Valence, Charnbéry ; Aix avec Nice, Avignon, Ajaccio, Digne ; Toulouse avec Cahors, Montpellier, Carcassonne, Agen, Rayonne ; Bordeaux avec Poitiers, La Rochelle, Angoulème ; Bourges avec Clermont, Saint-I’lour, Limoges ; Tours avec Le Mans, Angers, Nantes, Rennes, Vannes, Saint-Brieuc, Ouimper ; Rouen avec Coutances, Bayeux, Séez, Hvri’ux.

Le nouvel épiscopat.

Le premier consul tenait

du concordat le droit de désigner des candidats à l’institution épiscopale donnée par le pape. Il désigna 16 anciens évêques, 12 prélats constitutionnels et 32 ecclésiastiques de second ordre dont pas un assermenté. Le nouvel archevêque de Paris, de lîelloy, ancien évéque de Marseille et alors doyen d’âge de l’épiscopat