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CONCINA

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ies plus difficiles le courage de Concina fut soutenu par le célèbre P. Eg. Giuli, S. J., secrétaire de la Congrégation pour l’examen des évêques, mort en 1749. Cf. Theologim christianse, t. i, pra-f., p. 131 ; Sandelli, op. cit., Epis t., xviii, p. 29 ; xix, p. 31 ; xx, p. 32 ; xxi, p. 33 ; xxiii, p. 35.

Concina moraliste.

Concina a été le personnage

principal dans le troisième acte de la lutte entre jésuites et dominicains sur les questions du probabilisme, lutte qui remplit tout le xviiie siècle. Dollinger-Reusch, Geschichte der Moralstr., t. 1, p. 305. A lui seul il tint tête à tous et laissa des théologiens formés à son école comme Patuzzi. Voici le jugement porté sur Concina par le P. Ben. Oliveri, 0. P., Storia ecclesiastica del secolo XVIII, in-8°, Rome, 1808, p. 228-229 : « Par leurs nombreux ouvrages, Concina et Patuzzi atlirèrent l’attention de l’Italie tout entière et même de l’Allemagne, de la France et de l’Espagne, où les éditeurs vénitiens envoyaient, avec de gros bénéfices, des cargaisons entières de leurs livres. Je ne sais pourtant s’ils furent toujours avisés, et cependant jamais leurs adversaires, au nombre desquels se trouvait un homme aussi saint que Liguori, n’obtinrent condamnation d’aucun de leurs ouvrages. » Cité par Dollinger-Reusch, op. cit., t. 1, p. 313. L’épithète d’imprudence conviendra peut-être au caractère souvent mordant des polémiques qu’ils soutinrent, mais du moins en ce qui concerne Concina, ce qualificatif ne saurait viser sa doctrine. D’ordinaire, quand on porte un jugement sur Concina, c’est moins par comparaison avec les adversaires qu’il eut à combattre et qu’on ne peut guère défendre de laxisme, que par comparaison avec saint Alphonse de Liguori, dans la doctrine duquel on prétend retrouver comme une condamnation de celle de Concina et de son école. Visà-vis des uns et des autres, Concina passe pour rigoriste. Il est vrai qu’il est nommé dans un document officiel probabilistarum flagellant, Approbalio illuslris. et reverendis. D. D. Silvestri episcopi Porpltiriensis et sacrarii apostolici præfecli. In rescriptum Benedicti XIV ad poslulala septem archiep. Compostellæ, commentarius théologiens, in-4°, Venise, 1745 ; d’ailleurs les épithètesde rigoriste, janséniste, pascalisle étaient alors appliquées à quiconque n’adoptait pas en morale les principes en vogue. Cf. Histoire du probabilisme, t. I, diss. I, p. 9-11 ; Explication de quatre paradoxes, paradoxe I er du rigorisme attribué à noire siècle, p. 87. Concina proteste en ces termes contre une sévérité excessive en matière de morale : « Rien n’est plus étranger à mon sentiment que cette sévérité trop grande dans les décisions des controverses morales et dans la direction des consciences. La seule loi que Jésus-Christ nous a donnée est la vraie et l’unique règle de notre conduite. Celui qui rend trop stricte l’obligation de cette loi pèche autant que celui qui la rend trop facile. » Histoire du probabilisme, diss. I, Introduction, t. i, § A, p. 7 ; cf. t. il, diss. IV, p. 223, 374, 171, 472 ; Explication des quatre paradoxes, paradoxe I er, p. 87. Mais il est naturel que Concina, luttant contre les opinions relâchées qui se glissaient sous le couvert du probabilisme, devait paraître rigoriste. « Jnant au jugement porté sur Concina et son école par saint Alphonse de Liguori, il suffit d’en établir la chronologie pour constater que l’évolution de la pensée du saint docteur fournit une justification et une approbation de la doctrine de Concina, en même temps qu’une condamnation des principes qu’on prétend lui opposer. Cf. Mandonnet, Le décret d’Innocent XI contre . p. 10, Dollinger-Reusch, op. cit., t. i, ! sq.

La carrière doctrinale de saint Alphonse comprend deux phases : dans la première, il est ardent proliabiliste, autant qu’il se montre dans la seconde probabilioris’c décidé. Eu premier iieu, il avait étudié et défendu

d ; ct. de t ; iéol. catiiol.

le probabiliorisme avec Fr. Genêt, évêque de Yaison († 1702). Cf. Summ., p. 426 ; Yind. Alphons., t. i, p. 12, 58. Puis, sous l’influence de préoccupations où le point de vue intellectuel n’était pas dominant, Vindic, t. i, p. 456, il tourne au probabilisme, encore qu’il conserve sur la légitimité de cette opinion de douloureux scrupules. Cf. Dilgskron, t. i, p. 473. Enfin, le 13 juillet 1748, il pousse la dévotion à l’opinion probable, jusqu’à faire le vœu de toujours la suivre sans scrupule. A partir de ce moment, il abandonne Genêt pour Busenbaum, S. J., dont il édile en l’annotant la Mednlla theologiie moralis, Naples, 1748. C’est de cette phase de la vie de saint Alphonse que datent ses jugements sévères sur Concina et son école. Le 15 février 1756, il écrit à son éditeur de Venise, Remondini, en lui envoyant le t. I er de sa Théologie morale : « De nouveau je vous recommande de ne pas faire revoir le livre par un théologien de l’opinion rigide (comme le sont la plupart des dominicains aujourd’hui), car je ne suis pas de cette opinion, mais je m’en liens à la moyenne. Ce serait mieux que ce fût quelque Père jésuite, parce que ceux-là sont vraiment maîtres en morale. » Cf. Lettere di S. Alfonso Maria di Liguori, in-8°, Rome, s. d. (1890), part. II, p. 20. De nouveau, le 30 mars 1750, dans une autre lettre à Remondini : « J’ai de la consolation à entendre que vous ferez revoir mon livre par un Père jésuite, car si c’était un des dominicains qui suivent aujourd’hui Concina, il réprouverait comme larges beaucoup d’opinions que j’ai émises. D’ordinaire-, je me tiens aux opinions des PP. jésuites (et non à celles des dominicains), les opinions des premiers n’étant ni larges, ni rigides, mais justes… Je tiens le système du probabilisme, non plus du probabiliorisme ou rigorisme. » Cf. Lettere, p. 23, 24. Il revient sans cesse sur cette recommandation à l’éditeur de prendre pour réviseur un Père jésuite, car, répète-t-il, ils sont maîtres en morale. Cf. Lettere, p. 26, 28. Plus loin, Liguori confesse que son livre est directement opposé à Concina, p. 32. Enfin dans toute sa polémique avec Patuzzi, ce sont les principes de Concina qu’il combat. Cf. Lettre à Eusebius Amort, p. 216 ; Dollinger-Reusch, op. cit., t. i, p. 424. Ces diverses attestations de saint Alphonse de Liguori nous montrent bien l’homme fidèle à sa promesse du 13 juillet 1748.

Sur ces entrefaites, une polémique active s’est engagée entre saint Alphonse et Patuzzi. Cf. Dollinger-Reusch, Gesch. der Moralstr., t. I, p. 425 sq. ; Lettere dt Alfonso di Liguori, passim, sur la valeur de la théorie probabiliste. Or peu à peu l’ardent défenseur du probabilisme lâche pied. Au mois de novembre 1768, il écrit : « Quand, l’opinion pour la loi est certainement plus probable, je dis qu’on ne peut suivre la inoins probable, d’où je suis le vrai probabilioriste, non tulioriste ; mais quand je sais que l’opinion rigide est plus probable, je dis qu’il faut la suivre et là je suis opposé au système des jésuites. » Lettere, p. 341, n. 217. Et encore : « Mon système de la probabilité n’est pas celui des jésuites, car je réprouve que l’on puisse suivre l’opinion moins probable une fois connue, comme prétendent liusenbaum, La Croix et presque tous les jésuites. » Lettere, m, p. 334 (30 juin 1768) ; cf. p. 335, 370. Il s’excuse d’avoir autrefois suivi les jésuites : « Il est vrai que j’ai fait les notes à Busenbaum, écrit-il en janvier 1772, mais tout le monde voit en combien d’opinions je suis opposé à Busenbaum et aux autres jésuites. » Lettere, p. 396, 104, 406.

Il en vint même à supprimer le nom de Busenbaum, qui figurait au frontispice de la Théologie morale, jusqu’à la 5e édition. Cf. Lettere du 30 juillet 1772, p. 420. Knlin pour se libérer di questa taccia de tenir la morale des jésuites, il fait imprimer un manifeste, Monitum pertinens ad qumstionem, an usus probabilium opinUmum sit vel ne licitus aliquando [1776. Cf. Lct III. - 23