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CONCILES

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en face d’une hérésie récente dont certaines prétentions trouvaient un appui auprès des princes séculiers.

La thèse de l’unanimité morale ne repose sur aucun fondement sérieux. Mais on peut aller plus loin, et le P. Wernz, Jus décret al., t. ii, p. 1074, à la suite de Phillips, de Douix, de Mazzella, ajoute que, dans certaines conjonctures, les décrets de la minorité, de la minor et saniorpars, qui aurait pour elle ou à laquelle viendrait se joindre le suffrage du souverain pontife, seraient de véritables décrets conciliai ?-es. En effet, dit cet auteur, il n’est pas impossible que la minorité, pourvu qu’elle ne soit pas réduite à quelques membres seulement, représente l’Église universelle mieux et plus adéquatement que la majorité opposée : ce serait le cas, par exemple, si la première était formée d’évêques des différentes parties de la catholicité, tandis que la seconde appartiendrait exclusivement ou presque exclusivement à une même contrée ou à un même continent ; d’ailleurs, la vraie et légitime représentation de l’Église universelle est nécessairement du côté du pape, puisque là se trouve, avec le collège épiscopal, son chef suprême, le centre et le fondement de l’unité, l’unique partie essentielle du corps mystique du Christ. Qu’une décision portée dans ces conditions ait force de loi œcuménique, cela n’est point douteux, car elle s’appuLerait en particulier sur l’autorité du pape, lequel pourrait toujours, absolument parlant, même sans le concours d’aucun autre évêque, trancher souverainement toutes les questions et commander à tous les chrétiens. Seulement, il reste peut-être permis de se demander si la loi ainsi décrétée serait bien, suivant l’appréciation et la façon de parler communes, l’expression d’une volonté de l’assemblée épiscopale comme telle, si donc elle mériterait d’être appelée loi conciliaire plutôt que loi pontificale. Mais, on le comprend, la question, réduite à ces termes, n’est plus qu’une question de mot. Cf. Mazzella, op. cit., p. 805 ; Wernz, loc. cit., p. 1076.

XII. Nécessité des conciles œcuméniques.

Les conciles œcuméniques ne sont pas nécessaires à l’Église, j’entends d’une nécessité absolue, d’une nécessité pure et simple. La raison théologique, comme l’histoire, nous le dit. L’Eglise possède dans la primauté du pontife romain l’organe à la fois ordinaire et essentiel de l’autorité suprême, et cet organe a par lui-même puissance et grâce pour décider toutes les questions, pour porler des lois universelles, pour parer à toutes les difficultés. Pendant les trois premiers siècles de son existence, c’est-à-dire jusqu’en 325, l’Église n’a pas eu de concile œcuménique. Ce fait n’est pas simplement, comme on pourrait le croire, la conséquence forcée de la situation précaire où elle se trouvait alors et des persécutions qu’elle subissait ; car il s’est reproduit au moyen Age et à l’époque moderne : plus de deux siècles et demi (870-1125) se sont écoulés entre le VIIIe concile œcuménique et le IX 1’; plus de trois siècles (1563-1870) séparent le concile de Trente du concile du Vatican.

Plusieurs auteurs admettent, il est vrai, une institution divine des conciles œcuméniques ; ainsi font Suarcz, Ve legibus, I. X, c. il, n. 16 ; Schmalzgrueber, Jus eccles. universum, proœni., n. 3Il sq. ; Wernz, op. cit., t. il, p. 1864. Mais cette affirmation, comme ils l’expliquent eux-mêmes, ne veut dire autre chose sinon que le corps épiscopal, avec et sous le pontife romain, est la Continuation voulue par le Christ du collège apostolique Byanl Pierre à sa tête, et que le concile œcuménique est une expression parfaite du corps épiscopal. Rien ne prouve d’ailleurs que le corps épiscopal, pas plus que le collège apostolique, ail reçu, pour certaines époques et pour certaines circonstances déterminées, la consigne de n’agir qu’en se réunissant et en associant ses membres dans une opération visiblementcommune. Un ne peut pas même dire que les papes soient liés en ceci par le décret de la XX XIXe session du concile de

Constance, décret qu’eux-mêmes ont approuvé et qui imposait un concile œcuménique tous les dix ans : les papes, à proprement parler, ne sont jamais liés, ils ne sauraient être liés par les décrets d’un concile, comme ils ne sauraient l’être par leurs propres décrets ; dépositaires d’un pouvoir suprême inaliénable et immuable, qu’ils tiennent directement du divin fondateur de l’Église, ils jouissent comme tels d’une liberté que rien n’est capable d’enchaîner, ils peuvent toujours en reprendre le plein exercice. Du reste, quant au décret de Constance, l’expérience en montra vite l’inopportunité et les dangers, et les papes ont été bien inspirés en le laissant tomber en désuétude.

D’autre part, il est évident que des assemblées universelles du corps épiscopal sont souvent fort utiles, que même, dans certaines conjonctures, elles deviendront indispensables pour assurer efficacement la répression des erreurs ou des abus, le triomphe du droit et de la vérité. Il peut arriver qu’en fait l’autorité légitime et souveraine du pape soit méconnue, au moins pratiquement, qu’elle ne parvienne donc pas à elle seule à réaliser l’unité doctrinale et disciplinaire qui est son but propre. Historiquement, les conciles œcuméniques prennent presque tous place dans des temps et des milieux particulièrement troublés, à des moments où les droits du pouvoir central sont moins respectés et ses avertissements moins écoulés, où les esprits sont travaillés par des ferments de révolte qui rendent leur obéissance plus diflicile et plus problématique. Si, dans des circonstances semblables, les évêques du monde entier ont été appelés à délibérer et à statuer d’un commun accord avec le pasteur suprême, chacun d’eux acceptera plus facilement, plus joyeusement, des décisions qui seront en partie son œuvre et dont il aura mieux pénétré les raisons, il les prendra plus sûrement et plus vivement à cœur, il les appliquera plus sagement, il les publiera, les exécutera elles recommandera plus ardemment ; et tous les fidèles, même ceux auxquels ces décisions déplairaient, ne manqueront pas d’être plus profondément impressionnés par des enseignements ou des préceptes émanant de ce corps vénérable et sage qu’est l’épiscopat catholique. Que s’il s’agit spécialement de décrets disciplinaires, on comprend encore mieux le rôle important et jusqu’à un certain point nécessaire que joueront dans leur préparation et leur rédaction les évêques des différentes contrées. Qui, en effet, pourrait aussi bien qu’eux renseigner sur les besoins divers de leurs diocèses, sur les abus à éliminer, sur les mesures et les remèdes qui, adaptés au tempérament et aux usages locaux, ont plus que d’autres chance d’être efficaces ? A tous ces points de vue, un concile apparaîtra quelquefois non seulement comme le moyen le mieux approprié, mais comme le seul approprié au but à poursuivre. Dans ce sens, on doit dire que les conciles œcuméniques pouvent être nécessaires d’une nécessité relative, d’une nécessité, non pas fondée immédiatement sur la constitution organique de l’Église, mais résultant de l’obligation qui s’impose à l’Eglise elle-même, qui s’impose donc aussi aux papes, de tendre, dans chaque cas, à la sauvegarde de la vérité et à la réalisation du bien par la meilleure voie possible. Cf. Palmieri, op. cit., p. 691 sq. ; Mazzella, op. cit., p. 809 sq.

XIII. SÉRIE CHRONOLOGIQUE DES CONCILES ŒCUMÉNIQUES.

On compte généralement dix-neuf conciles œcuméniques. Nous en donnerons la liste, avec une brève caractéristique de chacun. Pour les détails, voir les différents noms propres ChalcÉDOIKE, Constanti-NOI’I. k, etc.

I 6 Le concile de Nicée, en 325, réuni par Constantin, sous le pontificat de saint Sylvestre. Trois cent dix-huit évêques y assistent. Il définit contre Arius la consubstantialité du Verbe, laquelle trouve ses plus élo-