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L’autorité suprême est, dans le concile, exercée conjointement par tous les membres. Les évêques conciliairement assembles constituent autant de juges, de | législateurs et de définisseurs. Cette qualité, qu’exprime bien la formule traditionnelle : Ego N. N. de/iniens subscripsi, leur a été solennellement reconnue au concile du Vatican, elle est attestée par ces paroles de la constitution dogmatique Dei Filins : Sedentibus nobiscum cl judicanlibus nniversi orbis episcopis, surtout lorsqu’on les rapproche du commentaire officiel contenu dans les discussions conciliaires. Lesévêques ne cessent pas d’être juges et d’agir comme tels quand ils se trouvent en présence d’une question déjà tranchée définitivement par le souverain pontife, sur laquelle donc il n’y a pas lieu à dissentiment ; ils sont alors dans la situation de tout juge et de tout tribunal, qui font véritablement acte d’autorité judiciaire en déclarant authentiquement le droit, même lorsque les textes de lois sont absolument clairs et ne laissent place qu’à une seule solution. Il en va ici des conciles par rapport au pape comme il en va d’un concile œcuménique par rapport à un concile œcuménique antérieur, quand un point défini par celui-ci est réadmis en discussion et défini à nouveau par celui-là. Ainsi la vérité du Filinque et la primauté suprême et universelle du pontife romain avaient été définies, puis publiquement professées par les Grecs, au IIe concile de Lyon, Denzinger, Enchiridion, n. 382, 389, et l’examen de ces deux points fut cependant repris au concile de Florence, pour aboutir à une nouvelle définition de l’un et de l’autre, Denzinger, n. 586, 589 ; de même, le dogme de la transsubstantiation, défini au IVe concile de Latran, fut encore une fois discuté et défini dans la XIIIe session du concile de Trente. Saint Léon, en communiquant au concile de Chalcédoine une sentence irréformable de condamnation contre Nestorius, inculquait à la fois et le devoir absolu de soumission des évêques et leur droit de ne se prononcer et de juger qu’en connaissance de cause. Quant au premier, qu’on relise sa lettre aux Pères du concile, voir col. 654. Quant au second, il l’affirmait tout aussi nettement en écrivant à Théodoret, P. L., t. LlV, col. 1048 : « La vérité elle-même brille d’un plus pur éclat et se grave plus profondément quand cet examen (épiscopal) vient ensuite confirmer ce que la foi avait enseigné d’abord. En résumé, la dignité du ministère sacerdotal resplendit vivement chaque fois que l’autorité des supérieurs est respectée de telle façon que la liberté des inférieurs n’en souffre aucun détriment. »

Pour un concile appelé à se prononcer sur un point déjà réglé souverainement par le pape, l’acte même du pape est un des éléments de la cause, une des données qui devront servir de base à son étude et à son verdict. Fût-il seul, il suffirait ; mais il n’est pourtant pas le seul à prendre en considération. Il est possible et convenable de rechercher en outre sur quels témoignages luraires et traditionnels repose la vérité définie, quelle lumière elle emprunte aux faits historiques ou quelles difficultés elle y rencontre, quelle place elle occupe dans l’ensemble du dogme et quels rapports harmonieux la rattachent à d’autres vérités révéléi -, etc. Voilà pourquoi et en quel sens les théologiens reconnaissent au concile, dans ce cas, non le droit d’examen dubitatif, mais le droit d’examen approbalif ou confirmatif.

X. Valeur doctrinale des chapitres et des canons . —

Plusieurs conciles, notamment le concile de Trente et le concile du Vatican, ont rendu leurs décisions doctrinales, partie sous forme positive, partie sous forme négative ; ils distinguent des chapitres, consai l’eiposé de la véritable doctrine, et des canons, où s nt cond urinées les erreurs contraires, ramenées à leur formule la plus brese et la plus synthétique, Il y a

lieu de se demander si les chapitres et les canons se présentent à nous avec la même autorité. M. Vacant a très bien traité cette question dans ses Etudes théologi’jues sur les constitutions du concile du Vatican, 1. 1, p. 41-44. Voici la substance de ses conclusions.

Avant de répondre à la question posée, il convient de rappeler un triple principe théologique. D’abord, l’ampleur et le sens d’une définition se mesurent à l’intention de celui qui la porte ; c’est donc de cette intention qu’il faut s’enquérir avant tout. Ensuite, une vérité peut nous être enseignée. par l’Eglise soit comme étant de foi catholique, soit simplement comme certaine, vraie, etc. ; et de même une erreur peut être condamnée par elle soit comme hérétique, soit seulement comme fausse, téméraire ou méritant une autre censure théologique inférieure. Dans tous ces cas, le jugement définitif de l’autorité suprême est infaillible et exige des fidèles un assentiment absolu" ; il n’oblige cependant pas toujours de la même façon ni sous les mêmes peines. Lorsqu’une vérité est proposée comme de foi catholique, on doit la tenir pour divinement révélée, et cela sous peine d’hérésie ; si elle est simplement proposée comme certaine, on doit la tenir pour telle sous peine de péché. La condamnation d’une proposition comme hérétique équivaut à l’affirmation de la proposition contradictoire comme de foi catholique ; mais nulle autre condamnation n’a cette équivalence. Voir t. il, col. 2105-2106. Un troisième principe qu’il importe de ne point perdre de vue, c’est que, dans toute définition, la substance seule tombe sous la garantie du privilège de l’infaillibilité.

En tenant compte de ces remarques préliminaires, nous disons :

Dans les canons, un concile veut condamner comme hérétiques les erreurs qu’il regarde comme telles. Il ne peut exister aucun doute sur ce point, étant donné l’anathème qui accompagne chaque canon. Chacun de ces canons constitue donc une définition infaillible et de foi catholique. On ne saurait en contredire aucune partie essentielle sans tomber dans l’hérésie.

Quant aux chapitres doctrinaux, ils contiennent, eux aussi, un enseignement qui, imposé à tous par l’autorité suprême comme expression de la tradition constante et comme dogme obligatoire de la foi, est conséquemment infaillible. Les formules qui y sont employées le montrent clairement. Citons seulement quelques échantillons. Le concile de Trente dit, en tête des chapitres sur la justification, sess. VI, De justifications, proœm. : Sacrosancta synodus exponere intendit omnibus Christi fidelibus veram sanamque doctrinam ipsius jusli/icationis, quant Cltristus Jésus docuit, apostoli tradiderunt et catliolica Ecclesia, Spiritu Sanclo suggerente, perpetuo rctinuit ; districtius inhibendo ne deinceps audealquisijuam aliter cred ère, prxdicare, docere ; et il clôt ainsi son exposé doctrinal, sess. VI, De justificatione, c. xvi : I’osl liane calholicam de justificatione doctrinam, quant nisi quisque fideliter firniilerque receperit, juslificari non poterit, placuit sanctse synodo hos canones subjungere, ut omnes sciant non solum quid tenere et sequi, sed eliam quid vitare et fugere debeant. De même, à propos de la doctrine touchant la communion sous les deux espèces et touchant la communion des enfants, le concile formule cette sévère défense, sess. XXI, De com. sid) ulraque specie et parvul., proœm. : <Juapropter cunctis Christi fidelibus interdicit, ne postkac de lis aliter crrdrrc, veldocere, vel pnvdicare audeant quam est bis decretis explicatum atque definitum. Des déclarations analogues accompagnent les chapitres doctrinaux concernant d’autres matières.

Et ce qui est vrai ef prouvé des chapitres du concile de Trente est également vrai et manifeste des chapitres du concile du Vatican. Prenons ici, par exemple, la constitution Dei Filius, et jetons les yeux sur le coin-