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COMPÉTENTE (SCIENCE)


2. Les clercs doivent connaître la théologie selon les aspects principaux sous lesquels elle se présente : la théologie naturelle ou philosophique, hasée sur les principes de la raison ; la théologie révélée, ou celle qui emprunte ses données à la parole de Dieu ; elle s’appelle dogmatique, si elle explique les rapports de la foi et de la raison, et développe ce que le chrétien doit croire ; morale, lorsqu’elle a pour objet de diriger la conduite des fidèles, en prescrivant le devoir au nom de la loi divine, ordonnant de faire le bien et d’éviter le mal ; mystique, lorsqu’elle a pour but, non seulement de faire éviter le mal, mais bien d’engager le fidèle dans les voies de la perfection.

Si les maîtres es sciences profanes imposent à leurs disciples de longs exercices, des recherches de nuit et de jour, pour se perfectionner dans les lettres et les arts, combien plus les ecclésiastiques ne doivent-ils pas travailler à approfondir la science sacrée, l’aliment des âmes ! Une vie n’est pas de trop pour cela. Après une existence consacrée à l’élude des vérités révélées, saint Augustin répondait à ceux qui lui disaient : « Nous voudrions savoir ce qui manque à votre instruction ? — Je puis énumérer plus facilement ce que je sais que ce que je désire savoir : facilins possum enumerare quæ habeo, quam quæ habere desidero. »

3. Les prescriptions de l’Église obligent le clerc à s’attacher à la connaissance du droit canonique et de l’histoire ecclésiastique. Nulli saccrd<itum liceat canones iqnorare nec quicquam facere quod Patrum possit regulis obviare. Quæ enim a nobis res digne servabitur, si decvetalimn norma constilutorum, pro aliquorum libitu, Ucentia populis permissa frangatur ? Can. 4. dist. XXXVIII. Comment connaître, en effet, les prérogatives de l’Église, ses immunités d’ordre divin, sans étudier les caractères qui la distinguent des autres pouvoirs terrestres ? Comment apprécier son pouvoir législatif, judiciaire et coercitif, sans avoir examiné’sa constitution, ses lois, l’histoire de ses rapports, à l’extérieur avec les divers gouvernements, à l’intérieur avec les fidèles ; en un mot, sans avoir des notions suffisantes sur son droit public et privé ?

4. A la suite de ces connaissances essentielles aux ecclésiastiques, il en existe d’autres, d’un ordre secondaire, qu’on pourrait appeler les auxiliaires des sciences sacrées ; telles que l’histoire, la philosophie, les humanités, la rhétorique, la grammaire, les sciences exactes, les sciences naturelles, etc. L’Église encourage l’acquisition des connaissances de ce genre, mais dans ui.e certaine mesure, pour les ecclésiastiques.

En règle générale, elle n’admet pas que ces derniers s’adonnent exclusivement à ces sortes d’études, aptes à détourner de celles qui doivent faire l’objet constant des préoccupations du prêtre. Les canons anciens s’expriment avec énergie sur ce point. Les louanges à Jupiter s’allient mal avec la louange du Christ. Can. Quam midta, û, dist. LXXXVI. Ce serait une honte pour l’Église que l’obole de la veuve ne profitât qu’aux grammairiens et aux rhéteurs, et que les deniers du temple reçussent une destination vulgaire. Can. Quando presbyteri, 2, dist. XXXVIII. ÏS’oime vobis videtur in vanilate sensus et obscuritate mentis ingredi, qui diebus et noctibus in dialectica arte torqueturf (/ni physicus irutalor oculos trans cmlum levât et ultra profunilum terrarum et abi/ssi, in quoddam inane demergitur. (’H, dist. VIL Conformément aux paroles du législateur ancien, l’évéque n’a point reçu mission d’eues du langage et de la littérature, mais il conduin son troupeau et de l’instruire dans la parolede Dieu. Can. Quam multe, 5, dist. LXXXVI.

ttefois, l’Église n’a jamais cessé d’encourager l’acquisition de ces sciences secondaires, comme poui a la défense de la vérité et à une plus brillante exposition des dogmesdivins. Si quisartem gram D1CT. DE TlIliOL. CATHOL.

malicam noverit vel dialecticam, ut rationem recte loquendi liabeat, et inter falsa et vera judiccl, non improbamus. § 1. Geometria quoque et arilhmetica et musicà habent in sua scientia verilatem, sed non est scientia illa, scientia pietatis est, nosse legem, intelligere proplietas, Evangelio credere, apostolos non ignorare. § 2. Grammalicorum autem doctrina eliam potest pro/icere ad vitam, dum fucrit in meliores usus assumpta. C. x, dist. XXXVII.

Ces études ont toujours été tenues en estime par les autorités ecclésiastiques, tellement qu’Honorius III déposa un évêque convaincu d’ignorance grammaticale. Le jugement de déposition était fondé sur la notoriété de son insuffisance littéraire. Per evidenliam facti, usquo adeo de illiteratura etinsuf/icienlia sua conslet. C. Quamvis, 15, x. Voilà aussi pourquoi le concile de Trente fit aux évêques une obligation d’ouvrir des séminaires pour l’instruction des jeunes gens qui se destinaient à l’état ecclésiastique. Il déclare, sess. XXIII, c. XVIII, que les aspirants au sacerdoce, soumis à un régime spécial, doivent y étudier la grammaire, le chant, le comput ecclésiastique et toutes les autres sciences qui pourront leur être utile. Moïse et Daniel s’initiaient aux mystères d’Egypte et de la Chaldée pour y puiser ce qui pouvait servir à l’avantage du peuple d’Israël. Ainsi les jeunes lévites doivent se familiariser avec les sciences profanes, afin de les utiliser pour le bien des âmes.

Dans la Lettre au.r archevêques, évêques et au clergé de France, du 8 septembre 1899, Léon XIII délimite très clairement le cercle des études propres à parcourir par les aspirants. « Moins que jamais, à notre époque, les élèves de nos grands et petits séminaires ne sauraient demeurer étrangers à l’étude des sciences physiques et naturelles. Il convient donc qu’ils y soient appliqués, mais avec mesure et dans de sages proportions. Il n’est donc nullement nécessaire que dans les cours de sciences annexés à l’élude de la philosophie les professeurs se croient obligés d’exposer en détail les applications presque innombrables des sciences physiques et naturelles aux diverses branches de l’industrie humaine. Il suffit que leurs élèves en connaissent avec précision les grands principes et les conclusions sommaires, afin d’être en état de résoudre les objections que les incrédules tirent de ces sciences contre les enseignemenls de la révélation. » Quelques pages plus haut, le pontife avait déjà tracé les lignes suivantes qui caractérisent bien la situation actuelle : « Nous n’ignorons pas, vénérables frères, que dans une certaine mesure vous êtes obligés de compter avec les programmes de l’État et les conditions mises par lui à l’obtention des grades universitaires, puisque, dans un certain nombre de cas, ces grades sont exigés des prêtres employés soit à la direction des collèges libres, placés sous la tutelle des évêques et des congrégations religieuses, soit à l’enseignement supérieur dans les facultés catholiques que vous avez si louablement fondées. Il est d’ailleurs d’un intérêt souverain, pour maintenir l’influence du clergé sur la société, qu’il compte dans ses rangs un assez grand nombre de prêtres, ne le cédant en rien pour la science, dont les grades sont la constatation officielle, aux maîtres que l’État forme pour ses lycées et ses universités. « Toutefois, et après avoir fait à cette exigence des programmes la part qu’imposent les circonstances, il faut que les éludes des aspirants au sacerdoce demeurent

fidèles aux méthodes traditionnelles des siècles passés… En effet, c’est le propre des belles-lettres, quand elles sont enseignées par des maîtres chrétiens et habiles, de développer rapidement, dans l’âme des jeunes gens, les

germes de la vie intellectuelle et morale, en même temps qu’elles contribuent à donner au jugement de la rectitude et de l’ampleur, et au langage de l’élégance et de la distinction. t>

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