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557 COMMUNION EUCHARISTIQUE (SOUS LES DEUX ESPECES) 558

vent gardée par eux, là du moins où ne se trouvait aucun prêtre, ce qui était un cas fréquent surtout au début de l’anachorélisme. Le même témoignage est fourni par Rufin, Historia monachorum, c. ii, vii, P. L., t. xxi, col. 406, 419 ; et par saint Théodore Studite, Epist., 1. I, epist. lvii, P. G., t. xcix, col. 1115. — Il est cependant certain que plusieurs moines possédant le caractère sacerdotal célébraient le saint sacrifice auquel des anachorètes voisins pouvaient assister et recevoir la communion. L’eucharistie pouvait parfois aussi leur être apportée dans leurs solitudes. Dom Besse, Les moines d’Orient, Paris, 1900, p. 333. Il est non moins certain que plusieurs solitaires communiaient rarement, tout au plus une fois l’an, ou passaient même un assez grand nombre d’années sans recevoir la communion, suivant ce qui est rapporté de sainte Marie Egyptienne. Vita sancise Marisa sEgyptiacæ, c. xx sq., P. L., t. lxxiii, col. 685 sq. Jusqu’à quelle époque persista chez les solitaires cette coutume d’emporter le pain eucharistique dans leur solitude pour s’en nourrir suivant leur dévotion, il est difficile de le déterminer. Elle existait encore au temps de Jean Moschus (-j- 619), Pratum spirituale, c. xxix, xxx, P. G., t. lxxxvii, col. 2877 sq., et de saint Théodore Studite († 828), Epist., 1. I. epist. lvii ; 1. II, epist. ccxix, q. iv, P. G., t. xcix, col. 1115, 1661. b) Communion des malades habituellement administrée sous la seule espèce du pain. — Cet usage existait déjà au m siècle, au témoignage de saint Denys d’Alexandrie († 265), suivant Eusèbe de Césarée, H. E., 1. VI, c. xliv, P. G., t. xx, col. 629 sq. Au temps de saint Denys, un vieillard d’Alexandrie nommé Sérapion, qui avait été jusqu’à ses derniers moments privé de l’eucharistie parce qu’il avait sacrifié aux idoles pendant la persécution, reçut avant de mourir, avec la permission du prêtre et conformément aux instructions de l’évêque, la sainte eucharistie qui lui fut apportée par un enfant : (3pay_ù tt){ evr/apicrnaç ÈTiéStoxEv -Co Tta’.Sapt’w, anoêpE^ai xeX£v<ra{, xai xai TtpETo’JTï) xarà tov oTÔiiaTo ; èrtioraEai ; ce qui ne peut manifestement s’entendre que de la communion donnée sous l’espèce du pain. Au ive siècle, Paulin, secrétaire de saint Ambroise, rapporte qu’à ses derniers moments l’évêque de Milan reçut d’Honorat de Vcrceil Domini corpus, quo accepto, ubi glutivil, emisit spiritum, bonum vialicum secum ferens. Vita sancti Ambrosii a Pautino ad Augustinum conscripta, n. 47, P. L., t. xiv, col. 43. Ce qui ne peut s’interpréter que de la communion sub specie panis. La Vita de saint Basile, attribuée faussement à Amphiloque d’Iconium, rapporte, c. iv, P. G., t. xxix, col. cccxv, que le saint évêque de Césarée communia plusieurs fois le jour de sa mort, et il ne parle que de la manducation du pain consacré. Au xe siècle, Odon de Cluny (f942) rapporte que le comte Géraud d’Aurillac (f909) reçut avant de mourir le corps du Seigneur qu’il avait ardemment désiré. De vita sancti Geraldi comilis Aurilliacensis, I. III, c. vii, P. L., t. cxxxiii, col. 691. D’ailleurs, le simple fait de la réserve eucharistique, habituellement faite sous l’espèce du pain depuis les premiers siècles de l’Église et principalement en vue de la communion des malades, est une preuve suffisante que celle-ci était ordinairement administrée sous la le espèce du pain. Les deux documents déjà cités d’Eusèbe de Césarée et de Paulin, secrétaire de saint ambroise, témoignent du fait de cette réserve eucharistique au iv « et au m’siècle. Documents incontestables qu’ils restent presque isolés, ce dont nous ne devons point nous étonner, aucune raison ne s’offrant d’instruire les fidèles sur un point qui devait être très familier. Après les siècles de persécution, le fait de la réserve eucharistique destinée à la communion des malades est plus fréquemment mentionnée. Excerptioncs r diclis et canonibus sanctorum Patrum concin-’, fragment ou résumé d’un recueil attribué à saint

Egbert, archevêque d’York († 766), c. xx, P. L.., t. lxxxix, col. 382 ; Baoul de Bourges (f866), Capitula, c. vi, P. L., t. exix, col.707 ; Wautier d’Orléans († 891), Capitula, c. vii, col. 734 sq. ; Réginon de Prûm (f815), De ecclesiasticis disciplinis et religione christiana, 1. I, c. lxix, P. L., t. cxxxii, col. 205 ; Burchard de Worms († 1025), Décret., 1. V, c. x, P. L., t. cxi., col. 754. D’ailleurs, le fait de la réserve eucharistique est une nécessaire conséquence de l’obligation impérieuse de conférer le viatique à tous les mourants, obligation en faveur de laquelle le 13e canon du I er concile de Nicée rappelait déjà l’ancienne règle canonique, 6 rcaXaiô ; xac xavovixô ; vôfxo^, défendant de priver les mourants du dernier et nécessaire viatique. Hefele, Histoire des conciles, t. i, p. 593 sq.

Bien que la communion fût habituellement portée aux malades sous la seule espèce du pain, elle était parfois administrée sous les deux espèces, quand une occasion était immédiatement fournie par la célébration de la sainte messe. C’est ce qui paraît indiqué par le texte de saint Justin. Apol., I, n. 65, 67, P. G., t. VI, col. 428 sq., affirmant que le pain et le vin du sacrifice étaient distribués par les diacres aux fidèles présents et portés aux absents. L’on peut entendre dans le même sens le fait de saint Exupère de Toulouse cité par saint Jérôme : Nihil in illo ditius qui corpus Domini canistro vimineo, sanguinem portât in vitro. Epist., cxxv, n. 20, P. L., t. xxii, col. 1085. Il est également rapporté dans la vie de sainte Marie Égyptienne que l’abbé Zosime, prié par la sainte de lui apporter la communion aux rives du Jourdain en face de sa solitude, mit à cet ellet in modico calice intemerali corporis portionem et pretiosi sanguinis Domini noslri Jesu Christi. Vita sancise Marias /Egyptiacæ, c. xxi sq., P. L., t. lxxiii, col. 686 sq. Aux époques subséquentes, l’histoire ecclésiastique rapporte encore quelques faits semblables. Au témoignage de saint Grégoire le Grand, Dial., 1. II, c. xxxvii, saint Benoit de Nursie mourut, en 543, après avoir reçu le corps et le sang du Seigneur. P. L., t. lvi, col. 202. Le pape parle encore, ibid., 1. IV, c. xxxv, P. L., t. lxxvii, col. 577, d’un Éleuthère qui, à l’heure de la mort, mysterium dominici corporis et sanguinis accepit. Au viie siècle, Céadda, évêque des Merciens, reçoit avant de mourir le corps et le sang du Seigneur. S. Bède, Hist. eccles., ]. IV, c. ni, P. L., t. xcv, col. 117. En 714, l’anachorète anglais Guthlac immédiatement avant sa mort est réconforté par la communion du corps et du sang de Jésus-Christ. Mabillon, Annales ordinis S. Bencdicli, 1. XIX, c. LXXVI, Lucques, 1739, t. ii, p. 36. En 776, Grégoire, abbé d’Utrecht, rend le dernier soupir après avoir reçu la communion du corps sacré et du sang du Seigneur. Ibid., p. 218. En 1137, Louis le Gros, roi de France, reçoit en viatique le corps et le sang de Jésus-Christ qu’on lui avait apportés après la célébration d’une messe. Suger, Vita Ludovici Grossi, P. L., t. cxxxxvi, col. 1337. Parfois [aussi on se faisait transporter à l’église pour y recevoir le saint viatique sous les deux espèces. Chardon, Histoire du sacrement d’eucharistie, c. v, Migne, Théologies cursus complétas, t. xx, col. 282. Nous devons encore observer que les malades qui ne pouvaient consommer la sainte hostie étaient quelquefois autorisés à communier sous la seule espèce du vin ; cette permission fut donnée pour l’Espagne par le Xe concile de Tolède en 675, can. ii, Mansi, t. xi, col. 143-144 ; Hefele, op. cit., t. iii, p. 313. Exception qui est encore un témoignage en faveur de la non-nécessité de la communion sous les deux espèces.

c) Communion sous lu seule espèce du pain quelquefois usitée à l’intérieur des églises soit en Orient soit en Occident. — A Constantinople, cette coutume parait avoir existé au temps de saint ban Chrysostome, d’après le fait rapporté par Sozomène, II. E., 1. VIII, c. v,