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445 COMMUNION DES SAINTS (ASPECT DOGMATIQUE ET HISTORIQUE) 446

C. H, P. L., t. CLXXVI, col. 416. L’Église de la terre étant l’habitation de Dieu ne fait qu’un avec celle du ciel. Quum igitur habitationem ejus cogitas, unitatem cogita congregalionemque sanctorum maxime in cxlis. lbich, 1. II, part. I, c. xiii, col. 415. A l’heure de l’immolation mystique sur l’autel, les anges descendent des cieux et l’union devient parfaite entre l’Église visible et l’Église invisible. In illo Jesu mysterio angelorum choros adesse, summis ima sociari, terrena cselestibus jungi, unum quoque ex visibilibus fieri. IbicL, 1. II, part. XVI, ex, col. 594.

Pierre Lombard met largement à profit la doctrine augustinienne sur le corps mystique de Jésus-Christ, dont tous les membres vivent d’une même vie commune, qui est celle de l’Esprit-Saint. L’union des membres est due à l’action de l’Esprit, car il est par nature le lien d’amour entre le Père et le Fils..4d Ipsum ergo perlinet societas qua efficimur unum corpus itnici FiliiDci. In Epist. ad Eph., c. iv, P. L., i.cxcu, col. 197. Entre les saints du ciel et les fidèles de la terre, il y a communication non seulement de prières, mais de mérites, mérita eurum nobis su/fragantur, Sent., 1. IV, dist. XLV, n. 7, P. L., t. exen, col. 950, et le lien de charité qui unit entre eux vivants et défunts comprend aussi les anges, qui sont pour nous les auteurs de tant de bienfaits, lbid., 1. III, dist. XXVIII, n. 2, col. 815. Le Maître des Sentences ne se prononce pas sur le sens précis des mots communio sanctorum, mais l’ensemble de sa doctrine indique suffisamment qu’il les entend de la société qui unit entre eux et à Jésus-Christ tous les membres de l’Eglise. Cf. Bandinus, Sent., 1. III, dist. XXVIII, XXIX, P. L., t. cxcii, col. 1083 ; 1. IV, dist. XXXVIII, XLI, ibid., col. 1110, 1112.

L’explication de cette formule est abordée enfin directement par Alexandre de Halès, pour qui le mot communio a le sens de participation. Il est naturel dès lors que le terme sanctorum s’applique à un ensemble de biens, qui puissent faire l’objet d’un partage. Pour le docteur irréfragable, ces biens sont les sacrements, qui confèrent la rémission des péchés, et ces deux choses doivent être l’apportées l’une à l’autre dans la formule symbolique. Est sensus, credo quod sacramenta et participatio sacramentorum, quai sancti communicant, conférant remissioncm peccatorum. Summa theolorjiæ, part. III, q. lxix, a. 1, Cologne, 1622, p. 548. Toul fuis une explication subsidiaire vient se joindre à cette exégèse pour l’étendre et aussi la modifier. Ces mots pourraient signifier aussi une participation à tout ce qui appartient au corps mystique du Sauveur, « une participation au Christ comme à ses disciples. » Vel credo quod unitas Ecclesiee lanla est, quod unusquisque q » i membrum est, particeps est omnium quse sunt lolius corporis… Tanta igitur virtus unitaHx, quod m s’il particeps Christi, humiliter dicitur particeps ilorum Christi. lbid. Alexandre de Halès ne se prononce pas entre ces deux acceptions. Mais il convient de remarquer que dans l’un et l’autre cas le mot sanctorum est pris au masculin.

Plus décisif est l’enseignement d’Albert le Grand : il s’agit nettement pour lui d’une communication des biens de tous les saints opérée individuellement par l’Esprit sanctificateur. Non enim potest fieri communio sancto, n bonis nisi per Spiritum Sanction tolum corpus mysticum unienlem et vivificantem. In IV Sent., 1. HI, di-t. XXIV. (|. I. Paris, 1891, t. XV, p. 256. La doctrine fondamentale de la communion des saints est d’ailleurs parfaitement résumée dans tout ce passage : par celle communication des bien.^ spirituels entre les fidèles, l’insuffisance des uns s’enrichit de la surabondance des autres.

3. La synthèse.

L’esprit mystique de saint fîonaventure devait particulièrement se plaire au dével

ment de ces pensées, qui se retrouvent en maint endroit des Commentaires comme des Opuscules theologiques. Les fidèles sont mystiquement unis enlre eux dans le corps social du Christ, et le principe de cette union ne peut être qu’un principe incréé, l’Esprit de sanctification, un et identique en tous. In 1 V Sent., 1. I, dist. XIV, a. 2, q. i, Quaracchi, 1882, t. I, p. 249. Cette union qui est celle des volontés dans la charité réciproque a pour exemplaire l’unité des personnes divines. Ibid., 1. I, dist. X, a. 1, q. iii, p. 199. Elle est signifiée par l’union sacramentelle du corps réel du Christ avec les espèces eucharistiques, 1. IV, dist. VIII, p. i, a. 2, q. ii, p. 185, et la fraction du pain en trois parts symbolise les trois parties de ce corps mystique, l’Eglise triomphante, l’Eglise souffrante et l’Église militante, 1. IV, dist. XII, p. i, a. 3, q. ni, dub. iv, p. 287. Entre ces trois catégories d’une même Église universelle, qui comprend tous les temps et se continue jusqu’au ciel, 1. IV, dist. VIII, p. i, a. 2, q. i, p. 184, règne une étroite connexion, comme entre les organes du corps naturel, 1. IV, disl.XX, p. ii, a. I, q. i, p. 530. Tous les fidèles dépendent les uns des antres : le bien de chacun est le bien de tous. lbid., p. 531. Cꝟ. 1. IV, dist. XLV, a. 2, q. i, p. 911. Non seulement par ses prières, l’Église vient efficacement à notre aide et nous préserve maintes fois du péché, 1. IV, dist. XVII, p. ii, dub. i, p. 495, mais par les satisfactions surérogatoires des saints et par l’application de leurs mérites elle acquitte encore une partie de notre dette pénitentielle envers Dieu, I. IV, dist. XV, p. ii, a. 1, q. ii, p. 364. En ajoutant à ces données celles qui ont trait à l’intercession et au culte des saints, aux sull’rages pour les morts, et qui n’ont point à entrer dans le cadre de cet article d’ordre plus général, on possède toute la théorie scolastique de la communion des saints, dont personne n’a mieux parlé au moyen âge que le docteur sérapbique.

Il serait superllu de rechercher dans saint Thomas tous les éléments d’une doctrine désormais fixée, et en dehors de lui. Mais il n’est pas sans intérêt de relever l’explication exégétique qu’il donne de la formule sanctorum communionem attribuée par lui aux apôtres et l’application restrictive qui en résulte. C’est au sens neutre du mot sanctorum que s’arrête le docteur angélique, sans que l’on puisse voir à quelles inlluences traditionnelles il se rattache. Pour lui, la communion des saints est une communion des biens dans l’Église. Unde et inler alia credenda quse tradiderunt apostoli, est quod communio bonorum sit »i Ecclesia ; et hoc est quod dicitur sanctorum communionem. Expositio in symboluni apost., a. 10. Parmi ces biens, il faut noter en première ligne ceux que le Christ nous a acquis par sa passion et qui nous sont communiqués par les sacrements. Mais en même temps il y a les mérites de la vie du Christ et tous ceux des saints, mérites dont la répartition est faite à toutes les âmes unies par la charité. Et inde est quod qui in caritale vivit, particeps est omnisboni quod fit in toto mundo. lbid. Cependant cette dernière participation peut être conditionné par l’intention de l’agent qui pose l’acte méritoire. Sic ergo per liane communionem consequimur duo : unum scUicet 7101/ merilum Christi cornininncaliir omnibus, aliud quod bonum unius communicatur alteri. lbid. Cf. lu IV Sent., 1. III, dist. XXV, q. 1, a. 1, 2 ; Sum. theol., * II 1’, q. 1. a. 9. Saint Thomas ne l’ait donc pas rentrer dans le concept de la communion des saints l’idée de l’union des membres de. ! < sus-Christ entre eux, mais seulement les fruits de celle union, il rattache la première idée à la conception même de l’Église, dont la catholicité s’étend au delà des limites de cette terre, jusqu’aux membres de 11 souffrante et de l’Église triomphante. Expos, in sijnib. apost., a. 9. Si la méthode est différente, la s nthèse est la même. Cf. Pierre de Taivnlaisc, In IV Sent., I. III,