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CURES


direction do son peuple, au for interne et au for exterm 1, nul ne pouvait exercer les fonctions sacrées dans une paroisse, sans l’autorisation du curé. Ce sont là les droits exclusifs, divins du parochiat, prétendaient-ils.

Cette erreur cherche un point d’appui sur quelques textes bibliques : Qui bene præsunt presbyteri duplici honore digni liabeantur. I Tim., v, 17. Et constituas per civitates presbyteros, sicut et ego disposui tibi. Tit., i..">. Et ipse dédit quosdam quidem apostolos…, alios vero evangelislas, alios autem paslores. Eph., iv, 11. Seniores ergo qui in vobis sunt obsecro…, pascile qui in vobis est gregem Dei. I Pet., v, 1. Il est certain que ces textes ont hesoin d’être interprétés, afin de préciser leur indétermination. Mais aucun d’eux ne se prête à la démonstration de l’institution divine des curés. La raison fondamentale de cette conclusion, c’est que, de longs siècles durant, il n’a pas été question d’établissement de curés dans l’Église catholique. Rome à raison de sa division en tili’es et Alexandrie à cause de ses taures (quartiers) possédaient une organisation paroissiale emhryonnaire. Mais en dehors de ces deux grands centres, on ne trouve nulle part trace d’institution d’ecclésiastiques ayant une circonscription déterminée, des droits et des pouvoirs curiaux. Par suite, l’interprétation traditionnelle a donné à ces passages scripturaires un sens tout différent. Le premier texte n’a aucun rapport avec la prétendue origine des curés ; il s’agit du double honneur, c’est-à-dire du respect, et de l’entretien matériel dus aux prêtres, presbyteri, chargés du ministère des âmes. Le second parle également des prêtres, presbyteri, qu’il fallait établir dans les cités. Dans les temps apostoliques, on comprenait sous ce vocable les évêques et les simples prêtres, bien que la supériorité d’ordre et de juridiction épiscopale fut incontestée. Les évêques eux-mêmes se transportaient, selon les besoins de l’évangélisation, d’une région à une autre, parfois d’un royaume à un autre royaume. Il en était de même des simples prêtres ; par conséquent, l’envoi des prêtres avec mission spéciale dans les villes, n’impliquait l’établissement des curés, ni au point de vue divin ni au point de vue apostolique. Ainsi, le presbylérat, qui est un sacrement, est d’ordre divin ; le paroc/iiat est simplement un office, une création de la discipline ecclésiastique : deux points de vue essentiels qu’on ne saurait confondre. Dans le troisième texte, le terme alios autem paslores est en vérité trop général, trop indéterminé pour qu’on puisse en déduire la fondation de l’ordre curial. Ce mot signifie, dans son étymologie, paître, nourrir un troupeau. Or, l’application de ce titre était amplement justifié par le ministère des évêques et des prêtres délégués. C’était presque la seule fonction usitée dans les temps apostoliques et longtemps après ; les obligations curiales étaient absolument inconnues. Enfin, le dernier texte de saint Pierre, seniores obsecro, pris dans sa signification littérale, contient une prière aux vieillards déjà instruits, évêques, prêtres, fidèles ordinaires, de répandre l’enseignement sacré dans le milieu où ils se trouvent. Comme il est facile de le voir, essayer d’en tirer une conclusion favorable à la thèse de l’institution divine des curés, serait abusif. Autant déduire de ces paroles que la vieillesse, seniores, est d’institution divine.

2. Les curés ne sont pas les successeurs des soixante-douze disciples. — Les gallicans et les jansénistes, toujours désireux de battre en brèche l’autorité suprême, avaient imaginé le système de l’égalité absolue des ordres dans l’Église.

Ils se basaient sur le texte : Designavit Dominus et alios sepluaginta duos ; et misit illos binos ante facieni suam. Luc, x, 1. Certes, nous sommes là en face d’une institution divine ; il est plus exact de dire, d’une

mission divine temporaire ; car ces envoyés reviennent rendre compte de leur opération. Heversi sunt autem septuaginta duo cum gaudio, dicentes : Domine, etiam dsemonia subjiciuntur nobis in nomine tuo, x, 17. A l’instar des prophètes et du saint précurseur, ils devaient annoncer l’approche du royaume des cieux : Appropinquavil in vos regnum Dei, x, 9. Ces disciples n’étaient pas prêtres ; le sacrement de l’ordre n’ayant été établi que le jeudi saint. Rien ne prouve que, même plus tard, quelques-uns de ces disciples aient été ordonnés. — Ils ne pouvaient non plus avoir été délégués pour administrer les sacrements, qui n’étaient pas encore institués. Us ne furent chargés de cette mission que plus tard, en des circonstances diverses. Par suite, aucune analogie ne saurait être établie entre le ministère paroissial et les fonctions des soixante-douze délégués. Vouloir trouver en eux les prédécesseurs des curés, serait œuvre de pure imagination. Les considérations précédentes répondent amplement aux objections tirées de quelques expressions d’Isidore Mercator, du Vénérable Bède et du pontifical romain faisant allusion aux soixante-douze disciples, à propos de l’organisation du synode. La doctrine de la Sorbonne était absolument erronée sur ce point, inspirée qu’elle était par les préjugés et par un esprit de mesquine rivalité. Quant aux assertions de Gerson, de Guillaume de Saint-Amour, de Jean de Poliac, de Juenin, etc., elles ne reposent sur aucun fondement sérieux.

3. Les curés sont-ils des pasteurs au sens strict du mot ? — Les jansénistes affectaient d’attribuer aux curés le titre de pasteur ; ils voulaient, par ce titre évangélique, confirmer leur théorie du droit divin du parochiat. En toute rigueur, cette dénomination de pasteur ne convient qu’aux évêques. Dans les princes de l’Église se réalisent les prérogatives contenues dans cette expression. Aux évêques a été confié, dans la personne des apôtres, le pouvoir divin de paître le troupeau du Christ, d’instruire les fidèles et de les régir. Les textes évangéliques en font foi ; les commentateurs n’hésitent pas sur ce point, l’enseignement traditionnel est unanime. Faut-il donc condamner l’application du titre de pasteur faite aux curés ? Oui, si on donnait à ce vocable la signification janséniste. On explique ainsi les paroles sévères de quelques théologiens qui réprouvent l’application de ce titre aux chefs spirituels des paroisses. Certum est pastoris titulum j>arochis non quadrare ; unde et ipsum hodie nunquam impartit Ecclesia romana. Per pastorcs palam intelliguntur soli episcopi. Parochiales presbyteri nequaquam a C.hristo Domino auctorilatem habent in plebem suam, sed ab episcopo… hic eminens litulus solisepiscopisdebetur. Marius Lupi, De parochiis, Venise, 1789, t. il, p. 314. Xardi partage aussi ce sentiment. Mais les inconvénients résultant de l’emploi de ce qualificatif durant l’époque jansénienne ont définitivement disparu. Le peuple, en attribuant le titre de pasteur à ses curés, sait très bien qu’ils ne sont point’tels au détriment de l’autorité des évêques ; loin de là, il connaît qu’ils ne sont pasteurs que grâce aux évêques et tant qu’ils restent en union avec eux, soumis à leur juridiction. Leur situation dérivée est tellement notoire, que d’excellents théologiens, des conciles provinciaux, approuvés par Rome, n’ont pas hésité à faire usage du titre de pasteur, pour désigner les curés. Suarez, dont l’autorité est considérable, a rédigé une dissertation spéciale, afin de démontrer que les ecclésiastiques préposés à la direction stable des paroisses, méritent à certains égards le nom de pasteurs véritables, bien qu’ils ne possèdent pas juridiction au for exterme.

4. Les curés ne forment-ils pas un troisième degré dans la hiérarchie divine ? — La hiérarchie ou principauté sacrée es composée de personnes consacrées à Dieu et placées dans îles situations subordonnées. Cette