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CRÉDIBILITÉ

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attentivement les réflexions suivantes. Le semblable instruit suit semblable ! Réponds au sot selon sa sottise, dit Salomon. A ceux qui demandent qu’on leur parle selon leur sagesse il faut leur répondre en la manière qui leurest familière, afin que, en prenant comme point de départ leurs propres conceptions, on puisse les amener plus facilement à croire à la vérité. » Strom., V, c. ni, P. (, t. ix, col. 36. La foi dont il s’agit ici est bien la foi au Dieu révélateur, cf. Protreplic, c. x, P. G., t. VIII, col. 215, etc., la foi d’autorité, comme le constate le P. de la Barre, Clément d’Alexandrie, t. iii, col. 189. Là n’est pas, du reste, la difficulté pour Clément d’Alexandrie qui, reprenant l’idée de saint Justin, tient pour la continuité du magistère révélateur du Verbe sous les trois formes de la philosopbie, des prophéties de l’Ancien Testament et de l’Evangile, témoin ce texte : « Il est naturel que la foi au Verbe qui se trouve à l’origine de la spéculation pbilosopbique dans l’acceptation des premiers principes, se retrouve au début de ce complément parfait qu’apporte à la philosophie la gnose chrétienne. » Strom., II, c. iv, P. G., t. viii, col. 946. La difficulté serait plutôt dans l’identité de fond qui, selon Clément, semble parfois exister entre la raison et la foi surnaturelle, difficulté commune à toutes les doctrines chrétiennes à tendance néoplatonicienne, si elle ne trouvait sa solution dans la théorie qui, nous l’avons dit déjà, bien loin de réduire la connaissance de foi à n’être qu’une connaissance rationnelle, considère celle-ci comme une première grâce, loc. cit., col. 9-46, « un don de Dieu, » Strom., V, c. xiii, P. G., t. ix, col. 123 sq., « une révélation encore imparfaite du Verbe. » lbid. D’où, le tour que prend chez Clément la démonstration apologétique : a) Vis-à-vis des Grecs, elle consistera à montrer l’harmonie de la révélation chrétienne avec ce que la philosophie renferme de plus pur, de plus beau, de plus choisi, (tô IxXexTtxbv çtXoaoçiav çy|[ « , ) Strom., I, c. viii, P. G., t. viii, col. 732, à manifester, sous le même rapport, sa supériorité et sa transcendance. b) Vis-à-vis des Juifs, il sera fait appel à la réalisation des prophéties. Voir Clément d’Alexandrie, t. iii, col. 182, 183. c) D’une manière plus générale, la recherche de Dieu et la reconnaissance de sa doctrine véritable s’opère cependant par les signes : « Le signe que notre Sauveur est le Fils de Dieu, ce sont les prophéties qui ont prédit son avènement, les témoignages qui l’ont accompagné, les miracles qui ont suivi son ascension. Le signe que la vérité est parmi nous, c’est que le Fils de Dieu nous a instruits. » Strom., VI, c. xv, col. 345. Il n’est qu’exact d’ailleurs de dire qu’à aucun moment Clément d’Alexandrie n’isole la preuve de la crédibilité de son milieu psychologique, moral et surnaturel. La préparation morale qui va au devant du don divin demeure l’un des facteurs décisifs de la foi. Il a davantage étudié l’usage de la raison qui suit la foi et constitue la gnose que celui qui la précède et la prépare. Il n’est pas un théologien attitré de la crédibilité. C’est en quoi il diffère d’Origène et d’Eusèbe.

Origène (-j- 254). — Sa controverse avec Celse l’oblige à envisager la préparation à la foi, ou, selon son langage, sa démonstration ; sous ce rapport, il apparaîtra à tout esprit non prévenu comme l’ancêtre direct de l’apologétique traditionnelle moderne, ce qui tient sans doute à ce qu’il a pour adversaire le païen dont la position et les objections rappellent davantage l’incrédulité moderne en regard de laquelle s’est constituée cette apologétique, Celse, que Mfl’Freppel compare justement à Voltaire. Origène, t. ii, leçon xxx. Déjà, dans le lkpi àpx<Sv, 1. IV, in principio, P. G., t. XI, col. 31l sq., qui représente la gnose d’Origène, nous rencontrons une démonstration complète de l’inspiration divine des saintes Écritures. Ses arguments sont tirés de la propagation merveilleuse de la doctrine chrétienne, col. 344 345 ; cf. col. 351 ; de la réalisation par le Christ des prophéties de l’Ancien Testament, col. 345-353. Ils aboutissent, selon l’auteur, à prouver que ce ne sont pas ici paroles d’hommes, mais paroles de Dieu, ov » àvOpwrwv a’vai vj-c ; ç, y.].’j.-x-.z r.i-’.i-.i-jy.vi’j^ ; 0e « O’/ v ; ov :, etc., col. 353, expressions qui sont l’équivalent de la crédibilité rationnelle.

A une objection tirée d’un texte, où Platon déclare difficile de trouver l’architecte et père de l’univers, Origène répond que cela est impossible, si l’on n’est aidé par celui qu’on cherche, et que l’on ne trouve qu’après avoir fait son possible, avouant ainsi qu’on a besoin de lui. Conl. Cels., I. VII, n. 42, col. 1482. C’est reconnaître comme cause de la foi la grâce et les dispositions morales ; à Celse qui demande que l’on fasse appel à la raison pour admettre les dogmes, il répond que les philosophes eux-mêmes débutent par une foi sans raison, ilôyui nvl, dans leur philosophie, ibid., 1. I, n. 10, col. 673, et de cette conduite qu’il montre être la loi générale des choses humaines approuvée par la raison, voir col. 2254, saint Augustin il conclut qu’il est bien plus conforme encore à la raison de croire à Dieu, le maître de toutes choses, et à celui qui déclare que Dieu seul doit être honoré. lbid., n. 11, col. 676. « A la vérité si, dans l’histoire, un autre se présentait comme l’envoyé de Dieu, il y aurait lieu à comparaison, mais Jésus est le seul. » lbid., 1 : VI, n. 14, col. 1306. D’ailleurs il est faux que les chrétiens croient sans preuves. « Il y a chez eux autant qu’ailleurs examen des dogmes, des prophéties, des Évangiles, etc. Demandez plutôt à ces foules qui se sont converties, si elles ont corrigé leurs mœurs sans avoir auparavant, à l’exception de quelques ignorants, examiné à fond les principes de la doctrine. » lbid., 1. I, n. 9, col. 673. « Ce changement total de vie prouve d’ailleurs à lui seul que le médecin providentiel des âmes est intervenu. » lbid. t Nous pouvons reprendre en notre faveur le mot de saint Paul : En rien ous n’avez cru témérairement. » lbid., 1. VI, n. 10, col. 1308. Toute cette suite est une mise en œuvre parfaite du mouvement d’âme aboutissant au jugement prudentiel de crédibilité. En dehors de la démonstration par la confrontation avec la philosophie, dont Celse avoue l’efficacité (c’est celle qu’alfectionnait Clément d’Alexandrie), la doctrine chrétienne a, selon Origène, « sa démonstration propre, à laquelle ne peut être comparée la dialectique grecque. C’est, comme dit l’apôtre, la manifestation de l’esprit et de la puissance, de l’esprit par les prophéties, de la puissance par les miracles, » ibid., 1. I, n. 2, col. 656 ; « surtout par le miracle de la victoire du christianisme malgré les persécutions. » Ibid., n. 3, col. 661. Origène revient souvent sur fis miracles et l’impossibilité d’attribuer ceux du Christ ; ï la magie. Ibid., !. I, n. 38. col. 733 ; n. 46. col. 744 : I. 11. n. 8, col. 806 ; n. 49, col. 873. « Faire rentrer une âme dans son corps déjà fétide depuis quatre jours quV lie l’avait quitté, voilà qui n’appartient à personne si ce n’est à celui qui avait entendu le Père dire : Faisons l’homme à notre image et ressemblance… Et cette doctrine qui portait à l’amour du créateur selon la loi et les prophètes, qui réprimait les vices et formait les mœurs à la piété, que manifestait-elle d’autre à témoins, sinon qu’il était vraiment Fils de Dieu, celui qui faisait de telles choses, a In Maltli.. tom. xii, n. 3, P. G., t. xiii. col. 979. Autre texte : « Il faut remarquer, à l’adresse de ceux qui estiment que la divinité du Sauveur ne peut être fortement prouvée par l’Évangile de saint Matthieu…, que la connaissance de leurs peu dont Jésus fait ici preuve n’est pas une chose humaine. Seul le Seigneur connaît les cœurs des hommes. » In Matth., tom. xii, n. 6. /’. G., t. xiii. col. 989.

Mais Origène insiste surtout sur le miracle intérieur de la conversion morale, ibid., n. 18, col. S69 ; sur la supé-