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sième question, Quand Valentia déclare devoir se ranger : ’i leur sentiment, parce qu’ils ont dû avoir quelque raison cachée, aliquam mtionem licet ea nondum salis compevla videatur, Comment, theolog., disp. III, q. iii, q. il, in-fol., Lyon, 1003, col. 832, il semble qu’il y ail là quelque confusion. Pareille réserve est de stricte sse en certains problèmes où le sens catholique peut trancher d’instinct sans pouvoir expliciter une raison précise ; mais on hésitera à remettre au sens catholique la solution de théorèmes aussi abstraits.

c) Aperçu historique. — Les Pères ont occasion de se prononcer en réfutant les hérétiques qui niaient le fait d’une création temporelle ; c’était le cas du dualisme et du panthéisme. ïertullien contre Hermogène ne paraît avoir en vue qu’une éternité indépendante de Liieu et en tous points égale à l’éternité divine. Adv. Hernwg., c. iv, P. L., t. ii, col. 201. Saint Ambroise touche du moins une raison qui vaudrait pour toute créature en tant que telle : tout ce qui a une fin a nécessairement un commencement. Hexæm., 1. I. c. ni, n. 11, P. L., t. xiv, col. 127. Saint Augustin fait allusion au raisonnement d’Arislote affirmant l’éternité du monde pour écarter de l’acte pur toute ombre de mutabilité, et il le réfute. Confess., 1. XI, c. x, n. 12, P. L., t. xxxii, col. 811 ; ibid., 1. XII, c. xv, n. 19, col. 833 ; De civil. Dei, 1. XII, c. xvii, t. xli, col. 367 ; voir Augustin (Saint), t. i, col. 2329, 2350. En dépendance de ce saint docteur, saint Fulgence écrit : dédit rébus… ut sint, non tamen sine initio, quia nulla creatura ejusdem naturse est cujus est Trinitas. De fide ad Pet., c. iii, n. 25, P. L., t. XL, col. 761.

Les Pères grecs ont une autre occasion d’exposer leurs vues sur ce sujet dans la controverse arienne. Le Verbe est éternel, proteste saint Athanase ; donc il est incréé. Oral., i, contra arian., n. 29, P. G., t. xxvi, col. 72 ; n. 14, col. 42 ; Orat., H, n. 1, col. 148 ; n. 22, col. 193 ; n. 57, col. 269. Partout la même pensée, la créature ne saurait être éternelle, kl o-j-x. ovxtov -jâp ètti xai oJx f, v upiv yÉvrjTat. Epist. ad Afros, n.l, col. 1044. Saint Athanase ignore manifestement cette distinction a nihilo et post nihilum, être néant de par nature, être néant avant que d’exister ; l’un pour lui entraîne l’autre. Même manière de voir chez saint Basile, Adv. Eunom., 1. II, n. 17, P. G., t. xxix, col. 608 ; chez saint Grégoire de Nysse, Contra Eunom., 1. I, P. G., t. xlv, col. 364 ; chez saint Cyrille d’Alexandrie surtout, Thésaurus, assert, xxxii, col. 492, 496, 497, 513, 529, etc., et dans le traité de Zacharie de Mitylène : si le monde est coéternel à Dieu, il est impossible qu’il ait Dieu pour cause efficiente. De mundi opi/icio, col. 1112, 1113 ; cette coéternité est impossible, à moins que ce qui procède ne soit ou consubstantiel à son principe, comme le Fils au Père, ou n’en soit le complément nécessaire, comme l’ombre au corps, l’éclat au soleil. Ibid., col. 1113. Même restriction, col. 1096, pour ce qui procède comme l’ombre ou la lumière par nécessité de nature. N’est-ce pas faire brèche à sa thèse : que la cause libre soit actuée de toute éternité et l’on ne voit plus pourquoi l’effet ne pourrait être coéternel ?

Pour saint Maxime, la créature est nécessairement temporelle, puisqu’il est de sa nature d’être finie sous tous les rapports. De charitate, cent, iv, n. (i. P. G., t. xc, col. 1049. Pour saint Jean Damascène, la création procédant, à la différence de la génération du Fils, de la volonté libre de Dieu, ne saurait être éternelle ; car ce qui est tiré du néant ne saurait avoir une commune éternité avec ce qui est sans principe et toujours, àvapxii xat àel ovtc. De fide orlliod., 1. I, c. vii, P. G., t. < : iv. col. 813. On peut critiquer le raisonnement et cette union des deux termes àvip/w ; el iii du moins est-il clair que notre auteur n’a pas cru possible de les séparer. Sur l’opinion des Pères, voir Petau, Theol. iluam., De Deo, 1. III, c. VI, in-fol., Venise, 1745, 1. 1, p. 145 sq.

L’éternité du monde fui remise n question avec l’averroïsme. Les arguments d’Âristote revenaient amplifiés des gloses de ses commentateurs arabes, Avicen ne, De definitionibus et quæsilis, Venise, 1546, fol. 138, et Averroès, Destructio destructionum, Opéra, in-fol., Venise, 1550, t. ix, fol. 8. Algazel et Maimonide les réfutent. Ce dernier dont on exagère parfois l’influence sur saint Thomas, Michel, Philos. Jahrbuch der Gôrres-Gesellschaft, IV, v, prélude à la sage réserve du docteur angélique, quando enim defeclus et in/irmitas ratinnum illarum deteyitur, tum anima debilitatur ad /idem adhibendam eirei de qua probaliones affermitur, des raisonnements faibles, à son sens, nuisant plus qu’ils ne servent. Doctor perplexorum, part. II, c. xvi sq.

Saint Bonaventure se prononce avec grande sévérité pour la négative. In IV Sent., 1. II, dist. I. p. i, a. 1, q. ii, Quaracchi, t. ii, p. 19 sq. Il rappelle et résout les principales objections tirées d’Aristote, p. 19, 20, et prenant l’offensive, argue des répugnances diverses d’un nombre infini, p. 21, et de la nécessité absolue d’un commencement pour tout être, quod habet esse post non esse, qui possède l’existence étant néant de par soi. La question est, dit-il, si claire, ut nullum philosophorum quantumcumque parvi intellectuscrediderini hoc posuisse. Ibid. Chose curieuse, il admet cependant aussitôt que la répugnance cesse dans l’hypothèse d’une matière éternelle. Deux images éclairent sa pensée et, ce semble, le jeu d’imagination qui le séduit : la créature est à la fois et le vestige et l’ombre du créateur ; or posez comme éternels et le pied qui puisse imprimer sa trace ou la lumière qui puisse éclairer, et la matière qui puisse recevoir l’empreinte ou l’illumination, rien n’empêche plus que ces deux effets ne soient éternels. — On se demandera sans doute ce que devient dans sa pensée la raison invoquée plus haut esse post non esse. Si la contradiction existe pour l’être produit sècundum tolum esse, comment ne se pose-t-elle pas pour une quelconque de ses modifications, et réciproquement, s’il est possible qu’une forme soit reçue ab œterno dans une matière éternelle, comment est-il impossible qu’une forme subsistante, ou même un être quelconque soit produit de toute éternité.’Cf. Alexandre de Halès, Summa, part. I. q. xii. m. vin ; part. II, q. XIV, m. i, a. I, 2 ; q. ix. m. ix ; Pierre de Tarentaise, In IV Sent., 1. II, dist. I, q. ii, a. 3.

Albert le Grand, après avoir professé la non-éternité comme plus probable, probabilius etiam sècundum rationem, avec Maimonide, In IV Sent., 1. II, dist. I, a. 10, est beaucoup plus affirmatif dans la suite. Summa, part. II, tr. I. q. IV, m. ii, a. 5. partie. 1 sq., in-fol., Lyon, 1651, p. 53. 58, 59 sq.. 62. La question est du moins posée avec une netteté parfaite : utrmn liœc duo sint compossibilia sècundum intellectum… foetus.. : et (cternus.

Les averroïstes entre temps enseignaient non seulement la possibilité mais le fait de l’éternité du monde. Nous les voyons condamner par F. Tempier, en 1270, Denifle, Chartul., t. i. p. 186, 187, et en 1277. Ibid., p. 510. 517.

Siger de Brabant expose ses idées sur ce point dans l’opuscule spécial De œtemilate m midi ; cf. Handonuel. Siger de Brabant et l’averroïsme latin, in-’c. Fribourg. 1899. p. 71-84, et dans le De anima intellectiva, p. 99-104. Cf. ibid., Introd., p. cli sq., Clxxx sq.j Revue thomiste, 1896, p. 135 sq. Tout en se retranchant derrière le philosophe, recilando non assermdo, il nie la possibilité de la création, I>e atemitate, p. 80. affirme l’éternité de la matière, p., s 2. du mouvement, De anima, p. 101, et du temps, p. 71. Gilles de Borne, dans son bref traité De s philosophorum, a

très bien noté le principe de ces erreurs : conception de la création comme une mutation, op. cit., p. 5 sq.