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CREATION

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col.’.VA. 338. Le saint docteur confirme sa pensée par une comparaison tirée de l’activité humaine. In Joa., tr. I. c. i. n. 9, l’. I.., t. xxxv. col. 1384. Toutes ces idées sont en Dieu dans l’unité, car il est simple ; et les choses, identifiées ainsi quant à leurs types avec l’essence divine, sont en Dieu plus parfaites qu’en elles-mêmes. De civitate Dei, 1. XI. c. xxix, P. L., t. xli, col. 343. Cf. Proclus, Inslit. theolog., c. cxxiv, édit. Didot, p. xci. Remarque profonde, par où saint Augustin cor.rige ou précise le platonisme et répond aux difficultés de saint Ambroise : les créatures dans le Verbe ne sont pas créées mais engendrées, non facla sed genita, De Gen. ad litt., 1. II, c. viii, n. 16, P. L., t. xxxiv, col. 269 ; cf. c. vi, n. 12, col. 268. Il semble admettre pour l’âme purifiée certaine possibilité de contempler les idées, quarum visione fit beatissima, Lib. quæst. i.x.xxiii, q. xxvi, P. L., t. XL, col. 31 ; cf. Plotin, IV Enn., 1. IV, c. i sq., édit. Didot, p. 221 ; mais il le nie. De Gen. ad litt., 1. V, c. xvi, n. 31, col. 333.

La théorie de l’exemplarisme est ainsi résumée dans Boèce, De consol. philos., 1. III, metr. ix, P. L., t. lxui, col. 758 :

Tu cuncta superno

Ducis ab exemplo, pulchrum pulcherrirnus ipse Mundum mente gerens, similique in imagine formans.

Nul, pas même saint Augustin, n’a pénétré d’une vue plus profonde et ne s’est mieux assimilé ce qu’il y avait de meilleur dans l’exemplarisme alexandrin, que le pseudo-Denys. Cf. Petau, op. cit., 1. IV, c. xi, xii, p. 190 sq. ; cꝟ. 1. I, c. xiii, § 9 sq., p. 81 sq. Nous aurons l’occasion de renvoyer à ses écrits en exposant les thèses médiévales. Dubois, op. cit., t. i, part. III, 1. I, c. II, m.

Les scolastiques.

L’École aura pour les élaborer

outre les belles pages de saint Anselme, Monolog., c. ix sq., xxix sq., P. L., t. CLVIII, col. 157 sq., 182 sq., les textes du pseudo-Aréopagite, de saint Augustin, ceux d’Aristote et les commentaires de saint Thomas. L’averroïsme arabe la pressera d’étudier le problème en reprenant à son compte, pour expliquer l’origine du fini, la solution néoplatonicienne des intermédiaires. C’est là le point délicat de l’exemplarisme et on ne pourrait esquiver la difficulté.

1. Existence des idées.

Les docteurs voient dans cette doctrine, avec saint Augustin, une pure conséquence de ce fait que Dieu est intelligence. S. Anselme, Monolog., c. ix, P. L., t. clviii, col. 157 ; quia mwidus non est casu factus, S. Thomas, Sum. t/ieol., I", q. xv, a. 1 ; Cont. gent., 1. I, c. L, n. 2, non ignorans agit. De ventate, q. ni, a. 1. En ce dernier endroit se trouvent réunies presque toutes les autorités invoquées par l’École. Artifex non potest producere nisi præcognoscat. S. Bonaventure, In 1 VSent., 1. I, dist. I, p. i, a. i, q. I, object. 3 ; cꝟ. 1. I, dist. XXXV, XXXVI. Sur ce point accord complet, S. Bonaventure, Opéra, Quaracchi, t. i, p. 602, scholion.

Les difficultés commencent dès qu’il s’agit de donner à cette théorie une expression plus philosophique. Sous ces mots « Dieu crée d’après ses idées » se cacherait un anthropomorphisme inacceptable, si après avoir prouvé par analogie avec l’activité des êtres intelligents que Dieu a son modèle, on n’essayait pas de déterminer comment on peut concevoir dans l’Infini la notion de cause exemplaire. On dit donc :

2. Les idées sont en Dieu, tirées de lui-même, et Dieu même. — C’est une première conclusion qui s’impose, à faute de concevoir Dieu comme dépendant de quelque chose hors de soi, et d’admettre quelque réalité subsistant indépendamment de lui. L’ouvrier humain emprunte à l’expérience les éléments de ses créations, comjionoulo partes quas ex rébus cognitis in memoriam attraxit, S. Anselme, loc. cit., c. xi, col. 160 ; Dieu ne s’inspire que de soi-même. Nouvelle différence :

-i l’un ne veut porter atteinte à l’absolue simplicité l’Infini, en supposant en lui des déterminations multiples analogues à celles que nos pensées introduisent

en nous, il Tant dire que les idées ne sont en rien distinctes, quant à leur réalité, de l’essence divine. En Dieu, le principe de l’action immanente, l’action elle-même et son terme sont une seule immuable réalité. « Et de la sorte les idées, formai rerum, sont éternelles parce qu’elles sont Dieu. El si Platon l’a conçu ainsi, il faut l’approuver ; c’est là ce que lui fait dire saint Augustin, et sic imponit ei Auguslinus. S’il a été plus loin, ut imponit ei Aristoleles, sans nul doute il a erré… car, comme dit le Philosophe, des formes hors de Dieu, séparées des individus, n’ont d’utilité aucune ni pour l’action ni pour la connaissance. » S. Bonaventure, In IV Sent., 1. II, dist. I, p. I, a. 1, q. i, ad 3, lm. Ainsi tous les scolastiques prennent-ils parti pour Aristote et saint Augustin contre Platon. S.Thomas, Sum. theol., I a, q. xv, a. 1, ad 2um ; Cont. gent., I. I. c. li, n. 2 ; c. lu ; Scot, In IV Sent., I. I, dist. XXXV, q. i ; dist. III, q. iv.

3. Les idées, selon leur notion propre, formaliter, sont l’essence divine en tant qu’imitable. — Si l’on demande, non plus à quelle réalité physique, entitative, mais à quelle essence ou concept, formaliter, et par conséquent à quel aspect ou perfection spéciale de l’essence divine correspond notre terme d’idée, saint Thomas répond que l’idée n’est point cette essence précisément en tant qu’essence, nonquidem ut essentia, sed ut est intellecta. De verilate, q. iii, De ideis, a. 2. Dans l’essence il n’y a rien que l’être simple, un seul acte et une seule note. Mais si l’intelligence divine considère cette essence suivant toutes les perfections qui lui conviennent, elle l’atteint comme participable à tel ou tel degré : ce degré, c’est précisément le concept de telle ou telle créature, et ideo ipsadivina essentia cointellectis diversis proportionibus rerum ad eam est idea uniuscujusque rei. Ibid. Cf. Sum. theol., I 1. q. xv, a. 2, in c. et ad l ura ; Cont. gent., 1. I. c. lui. liv. L’idée c’est donc l’essence connue en tant qu’imitable. Telle est aussi, ce semble, l’opinion de saint Bonaventure. Cf. Trigosus, Siiwhki. q. xi. a. 3, dub. h. Au contraire, Barthélémy de Barberiis, Cursus theol., I. disp. V. q. ii, vi, prétend constater quelque divergence. Cf. S. Bonaventure, Opéra, Quaracchi. 1. 1, p. 602. Sur l’essai de conciliation de Juvénal d’Anagni, cf. Couailhac, Ductrina de ideis divi Thomcc divique Bonarenturx conciliatri. c, in-8°, Paris, 1897.

Scot, considérant qu’une relation suppose un terme, ne veut pas définir l’idée l’essence divine selon ses relations aux créatures, puisque la créature n’existe pas encore ; il la définit : « les créatures elles-mêmes, selon leur caractère d’être possible, connues dans l’intelligence divine. » In IV Sent., 1. I, dist. XXXV. q. i ; 1. IV, dist. L. q. iii, n. 4 ; cf. S. Bonaventure, loc. cit., Kleutgen, Philosophie scolastique, dis-. VI. n. 582, 583, trad. Sierp, t. iii, p. 96 sq. A cette manière de voir peuvent se ramener Durand. In IV Sent., 1. I, dist. XXXVI. q. ni, et bon nombre de nominalistes.

Cela n’empêche pas l’accord sur les points essentiels : existence des idées, rôle, indistinction absolue de leur être et de l’essence divine.

4. Les idées, quant à leur origine, ont leur fondement premier dans l’essence divine. — Ayant exposé ce que sont proprement les idées, formaliter, si l’on cherche à concevoir quel principe ou quelle opération les constitue, causaliter ou priucipialive, dans leur existence de cause exemplaire, on peut dire que l’essence divine est leur fondement premier, remole, l’intelligence leur constituant définitif et immédiat, proxime.

L’essence divine, en tant que telle, ne contient que virtuellement, éminemment, l’idée de toutes chos