Page:Alfred Vacant - Dictionnaire de théologie catholique, 1908, Tome 3.2.djvu/28

Cette page n’a pas encore été corrigée
1327
1323
CONSTANTINOPLE (ÉGLISE DE)


provinces, bien que dans un ordre différent, au débat du règne de Justinien, vers l’année 535, dans le Hieroclis Synecdemus, édit. Burckhardt, Leipzig, 1cS9 : î ; ce qui prouve que, depuis les premières années du

Ve siècle, les divisions administratives de l’empire byzantin ne s’étaient presque pas modifiées, il est probable que cet ordre se maintint encore, au moins d’une manière générale, jusqu’à l’invasion arabe et à la conquête d’une bonne partie de l’empire par les enfanls du désert. La Dcscriptio or bis romani de Georges de Chypre, que nous n’avons plus dans son texte original, mais seulement dans une adaptation du IXe siècle, faite par le clerc arménien Basile, nous en fournit une dernière preuve. Or, ce document, ainsi que l’a démontré son dernier éditeur, M. Gelzer, Georgii Cyprii descriplio orbis romani, Leipzig, 1890, p. xiii-xvi, remonte aux premières années de l’empereur Phocas, 602-610, mais nous a conservé l’état de l’empire byzantin sous Maurice, 582-602. La seule remarque à faire, c’est que les grandes divisions en diocèses sont tombées peu à peu en désuétude, que les provinces ou éparchies qui les composaient autrefois ont changé de temps en temps de nom et que toutes n’étaient pas absolument sur le même pied et n’avaient pas à leur tête des fonctionnaires d’un même rang.

S’il y avait eu toujours dans l’empire byzantin corrélation absolue entre la province civile et la province ecclésiastique, il s’ensuivrait que nous aurions du même coup dans ces trois documents le tableau exact de la hiérarchie ecclésiastique ; mais il n’en est pas ainsi. Bien que, d’une façon habituelle, la métropole civile fut également la métropole ecclésiastique, l’évêque de cette métropole ne commandait pas nécessairement à tous les évoques de sa province. Dans la Bithynie, par exemple, dont Nicomédie était la métropole civile et ecclésiastique, l’évêque de Nicée réussit à faire ériger son siège en métropole, sans doute à cause du premier concile œcuménique ; bien plus, il s’annexa quelques évêchés voisins et avec eux constitua une autre province ecclésiastique, au détriment de Nicomédie. Le concile de Chalcédoine eut beau lui enjoindre de restituer le bien mal acquis, Nicée n’en resta pas moins, à partir de 451, à la tête d’une seconde province de Bithynie. Dans la même province, après le IVe concile œcuménique, Chalcédoine fut affranchie de la tutelle de Nicomédie et constituée en métropole indépendante, sans suffragant il est vrai, mais relevant directement de Constantinople. Dans d’autres provinces, le même exemple fut suivi et si peu de villes réussirent, comme Nicée, à se faire nommer métropoles d’une province ecclésiastique, ou comme Chalcédoine, métropoles indépendantes, un bon nombre obtint le rang d’archevêché autocéphale, qui les soustrayait à la juridiction de la métropole et les plaçait sous l’autorité immédiate du patriarche. C’était, en somme, bien qu’à un moindre degré, la situation de Chalcédoine et un acheminement direct au litre de métropole. Il serait malaisé de déterminer à quel moment ces sortes de changements se sont produits, mais, dès le règne d’Héraclius, 610-641, nous en trouvons l’attestation formelle, puisque nous avons alors 31 archevêchés autocéphales enlevés à la juridiction des métropolitains et soumis à celle du patriarche. H. Gelzer, Vngedruckle und ungenùgend verôjfenlUchte Texte der Kolilise episcopatuum, dans les Abhandl. der K. bayer. Akademie der Wissenschaften, I’e classe, iii « section, Munich, 1900, p. 535.

C’est à partir de Nectaire, 381-397, que fonctionna à Constantinople le synode dit permanent ou aûvoSo ; iv-Sï )ij.oûo-a. Ce concile d’un genre tout particulier devait son existence à un fait des plus étranges. De lionne heure, les prélats d’Orient s’étaient habitués à venir entretenir la cour des affaires de leurs diocèses. Querelles dogmatiques ou querelles personnelles avec leurs parois siens leurs prêtres ou leurs métropolitains, ils soumettaient tout à l’empereur. Souvent même, il ne s’agissait que d’obtenir des honneurs et des dignités pour eux, pour leurs familles ou pour leurs créatures séjours devenaient si nombreux et si fréquents que, parfois, on compta jusqu’à soixante évéques dans la capitale et qu’on fut contraint, à la longue, de leur imposer à tous un certain temps de résidence. L’empereur. qui ne pouvait naturellement traiter toutes les allaires ecclésiastiques, se déchargeait de ce soin sur l’évêque de sa capitale, et celui-ci devenait ainsi l’arbitre oi entre la cour et l’épiscopat de l’empire. D’ordinaire, il tenait un svnode avec les évéques qui séjournaient depuis plus longtemps à Constantinople, et, avec eux, il examinait et solutionnait les affaires que lui avait confiées l’empereur. Il se forma ainsi une sorte de tribunal ecclésiastique permanent, que l’on nomma ovvoSoç èvî-, [jioûa-a, c’est-à-dire le concile des évéques résidant à Constantinople. C’était l’évêque de Byzance qui, en sa qualité d’ordinaire du lieu, en avait la présidence et se trouvait amené, par les circonstances mêmes, à trancher les différends entre les métropolitains des provinces et les exarques, ses supérieurs en temps ordinaire. Situation privilégiée qu’imposait pour ainsi dire la force même des choses et qui soumettait en dernier ressort les grands hiérarques d’Orient au tribunal de l’évêque byzantin, quitte pour les plaignants à en appeler à Borne, si la sentence de l’arbitre leur paraissait trop arbitraire.

Il serait assez difficile de préciser à quel moment et pour quelle allàire commença à fonctionner ce tribunal. En quelques pages d’une psychologie profonde et d’une ironie mordante, M3 r Duchesne, Eglises séparées, p. 170177, en a vu les origines dans cet épiscopat de cour qui, au IVe siècle, lit de la maison impériale le centre attractif de l’Église. Il a montré comment les groupements naturels des Églises d’Asie, d’Orient et d’Egypte, s’étaient effacés, dès qu’il y eut « une cour chrétienne et un évêque de la cour. A celui-ci, dit-il, était naturellement dévolu le rôle de conseiller, de conlident religieux des princes et princesses. Son influence prit peu à peu le dessus sur toutes celles du monde ecclésiastique oriental. Déjà sous Licinius et Constantin, l’évêque de Nicomédie, Eusèbe, était plus puissant que son collègue d’Antioche. Celui-ci reprit l’avantage au temps de Constance, précisément parce que la cour se transporta à Antioche. Mais une fois que l’empire se fut installé définitivement à Constantinople, Antioche ne tarda pas à s’éclipser. Au IVe siècle, l’évêque de la cour, qu’il résidât à Nicomédie, à Constantinople ou à Antioche. l’ut toujours le centre et l’organe de la résistance au symbole de Nicée et de l’opposition à saint Athanase. Une sorte de concile permanent, tantôt plus, tantôt inoins nombreux, est constamment assemblé à portée du palais impérial. Si le souverain croit utile de le mettre en rapports directs avec les évéques occidentaux, comme il le fit, en 313, pour le grand concile de Sardique, il l’expédie en bloc au lieu de la réunion, dans un lon_ : convoi de voitures postales, sous la protection d’un officier général. L’empereur se déplace-t-il lui-même’? Son épiscopat s’ébranle avec lui ; on le voit s’assembler fort loin de l’Orient, à Sirmium, à Milan, à Arles. Il est difficile d’imaginer un corps épiscopal mieux organisé, plus transportable, plus aisé à conduire » .

Dès que la résidence de la cour devint plus stable, le lieu de réunion de la ctjvoôo ; èvor, u.o0<7a fut aussi mieux précisé. Et ceci accrut d’autant l’autorité de l’évêque de Byzance. Car les déplacements continuels de l’empereur et de son conseil n’avaient pu qu’affaiblir et diminuer son rôle en mettant mieux en relief la personnalité d’éminents confrères. Du reste, il importe de noter que ce rôle d’arbitre et de conseiller dévolu par tradition à l’évêque de la cour impériale n’avait rien de fixe et de