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CONTROVERSE


doit être en mesure de réduire la contradiction et les contradicteurs : Amplectentem eum qui secundum doclrinam est fideler » sermonem, ut païens sil exkortari

in doctrina sana et eos qui conlradicunt arguere, Tit., i, 9 ; par le témoignage de saint Pierre quand il dit des chrétiens, sans distinction, qu’ils doivent pouvoir rendre à qui la demande raison de leur espérance : l’arati semperad satisfaclionem, Trpo ; àizo’i.oyioL-/, omn’t poscenli vos ralionem de ea quæ in vobis est spe. I Pet., ni, 15. Aussi bien, Noire-Seigneur lui-même a-t-il donné l’exemple en discutant avec les pharisiens sa divinité et avec les Juifs d’autres sujets. Saint Etienne et saint Paul, nous l’avons vu précédemment, ont marché sur ses traces, et à leur suite d’illustres docteurs et de grands apôtres de l’Eglise. En réalité, on ne voit pas comment de telles discussions seraient mauvaises en elles-mêmes. Bien mieux, il apparaît clairement qu’elles sont, de la part du controversiste catholique, une vérilable profession de foi. Objectivement, elles sont donc bonnes. Ajoutons qu’elles peuvent s’entreprendre pour les fins les plus élevées ; qu’il n’est pas impossible de prendre des mesures pour qu’elles n’apportent aucun dommage et qu’elles soient réellement utiles. Ex liac parte est honesta ex objecto. Item de se ad oplimos fines ordinatur, scilicet ad honorem ipsius fidei et majorent notitiant ejus, ad hæreticorum conversionent et calkolicorum confirmalionem ; et in aliis circumslanliis potest ila fieri ut et fructus speretur, et damna non timeantur. Suarez, op. cit., n. 7, p. 495. Enfin, puisque l’Église a pris soin de régler les conditions de ces disputes, c’est donc qu’elle les suppose parfois légitimes et par conséquent bonnes en elles-mêmes.

b) Il faut aller plus loin, et reconnaître que certaines conférences publiques et contradicloires sur des matières religieuses peuvent non seulement être bonnes, mais devenir obligatoires en conscience. L’on conçoit, en effet, qu’en des circonstances données, en de certains milieux, elles peuvent se trouver nécessaires pour le bien des âmes. Alors elles deviennent obligatoires en conscience, tantôt par raison de justice, tantôt par raison de charité : Interdum potest talis actio esse necessaria ad bonu.ni fidei et salutem animarum. Tune ergo erit débita, vel ex juslitia respectu pastorum Ecclesix, vel ex charitate respectu eorum qui sufficientes fuerint ad talem aclionem. Nam ut dixit Léo, epist. xciii, c. xv : Qui alium ab errore non revocat, seipsum errare demonstrat ; et Ambrosius, l Officior., c. ni : Sicut pro otioso verbo, ita pro otioso silenlio ratio est reddenda. Suarez, op. cit., n. 16, p. 499.

2. Licéité, au point de vue juridique. — A cet égard, il y a lieu de distinguer les controverses publiques et les controverses privées.

a) Une controverse est privée ou occulte, quand elle se passe secrètement entre deux personnes, l’une catholique et l’autre hérétique. Elle est encore privée, quand elle se passe entre ou devant plusieurs personnes, mais en telles conditions qu’il n’y a pas de publicité, qu’on ne sort pas du cercle de l’intimité ou de la famille. En règle générale, tout laïque ou prêtre doit, autant que possible, éviter les discussions de ce genre. Nous avons vu qu’elles sont formellement interdites aux laïques par un texte du droit, bien que la coutume ait quelque peu relâché la rigueur de la prohibition. En tout état de cause, on ne peut accepter ces disputes qu’en cas de provocation et sous certaines conditions que nous exposerons plus bas. Disons seulement qu’il faut un cas de nécessité urgente, soit pour éloigner le scandale des faibles, soit pour confirmer les simples dans la foi, soit pour réprimer l’audace et l’impudence des provocateurs. De plus, il faut qu’il y ait espoir d’atteindre un heureux résultat, du côté des provocateurs ou du côté des auditeurs : faute de quoi, la reli gion risquerait d’encourir le mépris, et les hérétiques se trouveraient confirmés dans leurs erreurs. Dispulatio privala cuni hæreticis, écrit E. Millier, riiari débet nisi : a) sil urgens nécessitas ad advertendum scandalum pusillorum, ad simplices in fide confirmandos, ad pelulantiam provocantium reprimendam ; et b) adsit spes fructus, sive in provocantibtts, sive in audientibus. Secus enim religio catltolica facile despectui exponeretur, alque hseretici in suis erroribus confit*marentur. 7 heologia moralis, 1. II, tit. I, §10, Vienne, 1884, t. il, p. 45. Pour ce qui regarde les prêtres, il leur sera toujours difficile, sinon impossible, de garder le silence quand devant eux la foi se trouverait attaquée, Leur silence serait souvent un réel scandale. Ipsa tacilurnilas eorum qui resistere deberent perverlentibus fidei veritatem, essel erroris confirmalio. Unde Gregorius in Il Pastoral, (c. ivin princip.) : Sicut incauta locutio in errorem pertrahit, ila indiscretum sih ntium eos qui erudiri poterant, in errore derelinquit. S. Thomas, Sum. tlieol., IIa-IIæ, q. x. a. 7.

6) Une controverse est pttblique, quand elle sort, en quelque façon, du domaine intime et privé ; quand elle prend un caractère de publicité à raison de circonstances diverses, de sa provocation par exemple, de son acceptation, de son organisation, de son fonctionnement, de son assistance surtout. Au regard de ces Conférences publiques avec les hérétiques, nous mentionnons ici les conclusions qu’imposent les textes juridiques précédemment cités. — a. Personne, ecclésiastique ou laïque, n’a le droit d’exposer ou de défendre les vérités surnaturelles ou religieuses, sans l’autorisation de l’évêque, qui est le gardien officiel du dépôt de la foi dans son diocèse. — b. Cette obligation générale se trouve spécialement confirmée, pour les laïques, par une défense expresse, contenue dans le droit canon. — c. Cette même obligation est plus stricte encore pour certaines régions, soit à raison de promulgations spéciales ou de rappels dont elle a été l’objet, soit à raison de prohibitions particulières. Ainsi en est-il des territoires soumis à la Propagande, à cause des décrets que nous avons rapportés ; ainsi en est-il de l’Italie, à cause de Y Instruction que nous avons pareillement exposée.

— d. En conséquence de ces principes et de ces documents, l’on peut avancer, d’une manière générale et sans exagération, qu’il est interdit aux catholiques de provoquer des conférences publiques et contradictoires sur les vérités qui touchent à la religion. S’il arrive qu’ils soient eux-mêmes provoqués, ils doivent faire en sorte de ne pas répondre. Que s’ils se croient obliges de relever tel ou tel défi à eux porté, ils doivent demander l’autorisation expresse soit du souverain pontife, soit de l’évêque, son représentant. Ces conférences, en effet, emportent des conséquences trop graves pour qu’il n’appartienne pas à l’autorité suprême du saintsiège de décider à leur sujet. — e. Tout catholique, qui n’est pas couvert par une autorisation régulière, et qui, dans une conférence publique et contradictoire, s’expose à causer la baisse de la foi, à ternir la pureté intellectuelle et morale dans i’àme de ses auditeurs, encourt une responsabilité réelle. Elle peut être grave, si l’on prévoit que le dommage causé aura lui-même un caractère de gravité. — f. Les catholiques qui savent qu’une conférence est plus ou moins régulière dans telles ou telles circonstances, et qui néanmoins y prennent part, se font ainsi plus ou moins les complices des promoteurs de la reunion. Par conséquent, ils pèchent plus ou moins grièvement.

3. Conditions.

L’on comprend sans difficulté que ces conférences publiques, pour mériter l’autorisation, pour commencer et s’achever de façon légitime, supposent la présence simultanée de conditions multiples. Il y faut, d’abord et tout naturellement, celles qui sont communément exigées pour qu’un acte quelconque