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CONTROVERSE


La Faye ne pouvait se soustraire. On se rendit donc sur une place publique, dite du Molard. Là, trois heures durant, le ministre promena la dispute, à son gré, sur l’unité de l’Église, le sacrement de l’eucharistie et le sacrifice de la messe, sur les bonnes œuvres, le purgatoire, le culte des saints et divers autres points. Mais, poussé toujours dans ses divers retranchements et incapable d’échapper aux étreintes successives de son adversaire, il rompit tout à coup la conférence dans une colère violente et un torrent d’injures. Ce que voyant, le baron d’Avully observa, séance tenante, que la cause des ministres devait être bien mauvaise puisqu’ils ne savaient répondre à d’excellentes raisons que par de pitoyables injures. Ibid., p. 209211. C’est encore à saint François de Sales qu’il faut rattacher la dispute publique qui eut lieu à Tbonon, le 13 mars 1598, entre le ministre Lignarius, professeur de théologie à Genève, et le P. Chérubin, capucin. Le professeur, sachant François de Sales absent deThonon, s’empressa de venir provoquer les capucins, espérant ainsi une victoire plus facile. La discussion se poursuivit, correcte et modérée, toute une première journée sur les livres canoniques et sur l’autorité qui doit, en matière de foi, décider du vrai sens des Écritures. Des secrétaires avaient noté les objections et les réponses. Finalement la partie fut remise au lendemain. Mais, quoi que l’on pût faire, malgré les plus énergiques sommations, le ministre n’osa jamais plus se représenter. Ibid., p. 288-289. Voir Chérubin de Maurienne, t. il, col. 2360-2361.

3° Conférences 2^’ivées et contradictoires de saint François de Sales’avec les réformés. — Comme il estimait les conférences privées incomparablement plus utiles que les disputes publiques, l’apôtre du Chablais s’y prêtait avec bonheur et sans compter. Il obtint de la sorte d’innombrables conversions ; mentionnons simplement le baron d’Avully ; l’avocat Poncet ; Pierre Fournier, 1 er syndic de Tbonon (1595) ; le gentilhomme vaudois, Ferdinand Bouvier (1598) ; le colonel Brotty ; Gaspard de Faverge (1600), proche parent de Calvin ; le baron d’Yvoire (1683) ; M rae de Saint-Sergues (1610) ; le baron de Monthelon (1611). Rappelons aussi qu’en 1596, le pape Clément VIII donna mission à saint François de Sales de travailler à la conversion de Théodore de Bèze. Le vaillant apôtre eut, l’année suivante, avec le ministre, trois longues conférences ; il l’amena à reconnaître intimement la vérité de la religion catholique, mais des considérations trop humaines arrêtèrent jusqu’à la fin Théodore de Bèze sur la voie du retour public et avoué à l’Église catholique. Des conférences avec le ministre Galletier obtinrent un résultat semblable.

IV. Controverse récente a Rome.

Dispute solennelle sur la venue de saint Pierre à Home, entre MM. Fabiani, Cipolla et Guidi, catholiques, et MM. Sciarelli, Ribelti et Gavazzi, ministres évangéliques, 9-10 février 18112. — Le soir du 31 janvier 1872, le journal La Capitale, l’un des plus mauvais de Rome, publiait dans son numéro 492, portant la date du lendemain, l’avis suivant en gros caractères :

Lectures populaires. — Demain jeudi 1° février, dans le local de ta via Barbieri, n° 20, près du théâtre Argentina, M. Francesco Sciarelli, ministre évangélique, fera une leçon publique, dans laquelle il montrera, par des arguments tirés de la Bible et des saints Pères, que saikt Pierre n’est jamais v’.vr.4 Rome. — L’entrée est libre pour tous les hommes et femmes. Tout prêtre, qui voudrait combattre la thèse, aura la liberté de parler.

On voit sans peine où tendait la question ainsi soulevée. Nier le fait historique de la venue de saint Pierre à Rome, c’est fausser à la fois tous les titres de la papauté. Si saint Pierre n’est pas venu à Borne, il n’y a pas établi son siège et les papes ne peuvent pas avoir

recueilli son héritage. Dès lors, leur infaillibilité est un mythe et leur autorité sur toutes les Églises prend le caractère d’une usurpation. Rien ne peut plus justifier leur rôle dans le monde, si on fait disparaître le principe fondamental de leurs droits. Les adversaires de l’autorité pontificale avaient bien saisi cette situation et compris qu’une simple négation suffirait pour expliquer leur révolte et les mettre à l’abri contre toutes les menaces du pouvoir spirituel. Cette négation, ils n’ont pas hésité à la produire, mais au prix d’un mensonge. Ce fut, pour la première fois, au commencement du xive siècle. Au xvie, la Réforme reprit pour son compte la négation, sans varier les arguments et vingt fois l’on a répondu aux attaques sans fondement, fausses ou calomnieuses, des régalistes et des protestants. En cette année 1872, c’est à Rome même, auprès du pape prisonnier, sous les auspices d’un roi excommunié, que des ministres se flattaient à nouveau de prouver publiquement et à rencontre de toutes les démonstrations acquises, que saint Pierre n’est jamais venu à Rome. Plusieurs savants romains daignèrent ne pas rester spectateurs oisifs de la comédie nouvelle qu’on prétendait ainsi jouer sous leurs yeux. On leur portait le défi d’une discussion publique. Le défi leur parut vraiment trop insolent, cette fois, pour n’être pas relevé. Ils acceptèrent donc la provocation, et le 1 er février. M. Sciarelli recevait, de leur part, une déclaration ainsi conçue :

Les soussignés, prêtres romains, en leur nom et en celui de leurs collègues, se déclarent prêts à accepter l’invitation qui leur est faite, dans le journal La Capitale d’hier par le sieur Sciarelli, de discuter avec lui sur la venue de saint Pierre à Rome. Mais comme il est nécessaire, pour cette fin, comme c’est l’usage en pareille circonstance, afin que tout procède avec ordre, d’établir les parrains de la dispute et de prendre d’autres dispositions d’un commun accord, les soussignés invitent le sieur Sciarelli à choisir lui-même un jour, le plus rapproché possible, pour faire connaître à ceu.r qui lui présentent cette déclaration, quelles sont ses intentions à ce propos. Rome, 1° février 1812. Vincent Anniviti, Henri

C. Fabiani, Auguste Guidi, Etienne Ciccouni, J. Cipclla, Renauld Deggiovanni.

Les ministres évangéliques furent grandement surpris de recevoir cette réplique et ces propositions inattendues. Mais ils s’étaient trop avancés pour songer à reculer. Il leur fallut donc bien entrer en pourparlers avec les prêtres catholiques, et ils en vinrent à signer un protocole contenant les conditions et les règles de la discussion à intervenir. Le voici :

Art. 1°. La discussion roulera uniquement sur la question de la venue de saint Pierre à Rome, conformément à l’annonce qui a paru dans le journal La Capitale, » WJ2, de la 3’année, 1° février 1812.

Art. 2. Il n’y aura pas plus de trois personnes de chaque parti qui prendront part à la discussion.

Art. 3. La discussion seia réglée par une commission de quatre présidents ; chaque parti en élira di

Art. 4. La discussion commencera après le. t position de la thèse faite par le sieur Francesco Sciarelli le proposant.

Art. 5. Des billets à distribuer en égal nombre par chaque parti, donneront accès à autant de personnes que le local choisi pourra en contenir.

Art. G. Les deux partis auront la faculté d’admettre des sténographes.

Art. 1. Il appartiendra à la commission des présidents de choisir le local, le jour et l’heure de la dispute, et cela dans le délai le moins long possible.

Rome, le 2 février 1872.

Ont signé : Pour les catholiques : D. Etienne Ciccouni,

D. Joseph Cipolla.

Pour les évangéliques : François Sciarelli. Henri PlGGOTT.

Les catholiques choisirent pour présidents le prince deCampagnano-Chigi et l’avocat Jean-Baptiste de liominicis-Tosti ; les évangéliques prirent Henri Piggotl et le docteur Philipps. Ces présidents se réunirent en commission chez le prince de Campagnano, et ils arré-