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CONTEMPLATION — CONTENSON


œuvre scientifique, la sainte inaugura un système de critique qui ruine toutes ces classilications échafaudéi au hasard. La loi de ce système n’a pas été formulée par elle ; mais la voici telle qu’elle se dégage clairement de son œuvre : Joui degré de la contemplation est constitué par un fait nouveau s’ajoutant aux faits des degrés précédents ; et il est nécessaire que ce l’ait soit directement et facilement observable

C’est en vertu de cette loi que sainte Thérèse réduisit à quatre les degrés de la contemplation infuse. A l’échelon le moins élevé se trouve la quiétude ; et ce nom doit être appliqué à toute union mystique dans laquelle l’âme éprouve encore des distractions. Plus haut, nous rencontrons Vunion pleine, dans laquelle le sentiment de Dieu présent est assez fort pour empêcher toute distraction. Néanmoins, dans ce second degré de contemplation, on peut encore recevoir les impressions des sens, et exécuter des mouvements volontaires, et par suite sortir de l’oraison. Dans le troisième degré, au contraire, l’extase, les sens n’agissent plus et tout mouvement corporel est devenu impossible. Vunion transformante, aussi appelée du nom de mariage spirituel, occupe le sommet de la vie mystique. Deux faits la caractérisent : l’àme jouit presque sans interruption de la vue intellectuelle de Dieu ; de plus, elle a conscience d’être déifiée, de participer dans ses actes à la vie divine. Sauf variantes de peu d’importance, cette classification de sainte Thérèse est aujourd’hui généralement admise ; elle est devenue presque classique, et les écrivains qui traitent de la mystique auront intérêt à ne s’en écarter jamais.

Tous les écrivains mystiques ont disserté longuement sur la contemplation, et une foule d’auteurs ascétiques ont touché incidemment à cette question. Une bibliographie complète du sujet serait donc disproportionnée avec le cadre d’un simple article. Nous renvoyons les lecteurs désireux de se documenter d’une façon sérieuse à la savante bibliographie que le P. Poulain a insérée à la suite de son très remarquable ouvrage, Les grâces d’07’aison, Paris, 1901.

P. Le.ieune.


CONTENSON ou CONTENSOUS(Guillaume de), dominicain, naquit en 1641, à Auvillar (Altavillaris), village de la province de Guyenne, faisant alors partie du diocèse de Condom. Il était (ils de Jean de Contenson, bachelier en théologie et docteur en droit, qui plus tard devint prêtre à son tour. Guillaume commença (1649) ses études, en qualité d’externe, au collège des jésuites de Montauban, ville où son oncle était prévôt du chapitre et en même temps grand-vicaire de l’évêque. Il ne manqua jamais de rendre hommage à ses anciens maîtres pour le soin qu’ils avaient pris de son éducation intellectuelle et morale. Theologia mentis et cordis, 1. IV, diss. III, c. n. Ses études achevées, vers la fin de septembre 1655, il fit les premières démarches pour entrer dans l’ordre des prêcheurs, à Montauban, dont le couvent, ruiné par les protestants en 1565, puis rétabli en 1632, sous l’épiscopat d’Anne de Murviel, n’avait pu être définitivement installé qu’en 1653, avec une chapelle et seulement trois religieux. Quand il se présenta, il n’avait que 15 ans. C’est en vain qu’il sollicita de son père la permission d’entrer en religion, sa famille demeura inllexible et il dut s’enfuir. Il se retira au couvent de Toulouse (1656) et fit profession le 2 février 1657. Il parcourut le cycle ordinaire des études théologiques, puis, pendant deux ans, s’appliqua plus spécialement à l’étude de l’Écriture, du droit canon, des Pères, de l’histoire ecclésiastique. A peine âgé de 24 ans, il fut envoyé sur la demande de Gaspard de Daillon de Lude, premier archevêque d’Albi, dans cette ville pour y occuper la chaire publique de philosophie (1664-1665). Sans cesse en controverses avec les protestants très nombreux en cette partie du royaume, il se servit avec le plus grand succès du Contra gentiles de

saint Thomas d’Aquin. Il ne farda pas à être rappelé à Toulouse, pour y enseigner la théologie ? (1666). Il professa également dans plusieurs diocèses où la confiance des évêques l’avait appelé. Vers la fin de l’année 1666 ou 1667, il fut chargé d’une mission à Rome où il fut accueilli avec faveur par le général de son ordre, alors le P..1.-1 ;. de Marinis. C’est à son retour qu’il continua la composition de sa Theologia mentis et cordis, dont la première partie parut in-fol., Lyon, au mois Htfévrier 1668. La date de l’approbation indique qu’il a dû commencer la composition de son ouvrage avant son voyage de Rome. Le P. Jean-Thomas Rocaberti, qui succéda dans le gouvernement général de l’ordre au P. de Alarinis († 1669), favorisa d’une façon toute spéciale Contenson dont il appréciait la valeur. Le 6 juillet 1670, il lui écrivit lui-même, pour lui renouveler la permission d’imprimer son ouvrage. En même temps, afin de lui donner plus de facilité pour travailler, il l’attira à Paris, au couvent de Saint-Honoré. Cf. Lettre de Contenson à son frère, lieutenant de la judicature royale d’Auvillar, dans Rezaudun, appendice. En même temps qu’il écrit, Contenson prêche avec le plus grand succès à Toulouse, Rordeaux, Rennes, Reauvais, etc. Sa santé fort compromise ne put suffire à tant de travaux. Pour lui procurer un changement d’air, ses supérieurs l’envoyèrent à Creil. Il n’en continua pas moins la composition de son ouvrage. L’évêque de Reauvais, Mur de Ruzenval, lui ayant demandé de faire quelques instructions aux fidèles de Creil, il prêcha tous les jours de l’avent 1674. C’est a l’issue de cette prédication qu’il mourut d’épuisement, le 26 décembre 1671. à peine âgé de 33 ans. Il fut enterré dans l’église de Creil.

L’unique ouvrage de Contenson est sa Theologia mentis et cordis seu speculaliones universx doctrinse sacrée. Quelques années auparavant, Louis Rail (1610-1669) avait donné La théologie affective ou saint Thomas en méditations, in-fol., Paris, 165 !. Voir t. H, col. 36. Il est possible que la lecture de cet écrit ait amené Contenson à composer un ouvrage analogue. Tout en conservant à peu près l’ordre de la Somme théologique, il fait suivre chaque section de considérations ascétiques et mystiques, reflexiones, naissant naturellement de l’intelligence du dogme, et plus généralement empruntées aux Pères. Surpris par la mort, il ne put achever complètement son ouvrage. Le P. Massoulié, de la même maison de Saint-Honoré. le termina en partie sur les notes de Contenson, en partie de son propre travail. Les principales éditions de la Theologia mentis et cordis, 2 in-fol., sont celles de Lyon, 16681669, 1687 ; Cologne, 1687 ; Venise, 1727, cuni sup/ilemento de ex tréma une tione, ordine et matrimonio ; Cologne, 1722 ; Venise, 1787 ; 4 in-4o, 1790 ; Turin, 1768 ; Paris, 1874-1875, 1886.

Comme points particuliers de la doctrine de Contenson, signalons la position hostile qu’il a prise, un des premiers, contre le probabilisme, qu’il attaqua dans une longue dissertation, Theologia, 1. VI, diss. III, De noveilo probabilitatis comment o, t. ii, p. 94-206, à la fois sur le terrain historique et doctrinal. Aussi est-il communément rangé au nombre des théologiens rigoristes et tutiorisles. L’attitude de Contenson en face du jansénisme fut moins franche. Avec les papes, il condamna nettement la doctrine contenue dans les cinq propositions extraites de VAugustinus. Theologia, 1. VII. diss. VI, t. il, p. 436-451. Mais il cherchait à sauver l’orthodoxie de Jansénius lui-même, en prétendant qu’il n’avait voulu soutenir que la doctrine catholique de la grâce efficace ; aussi expliqua-t-il dans ce sens les cinq propositions. Puisque Alexandre VII exigeait l’adhésion à la condamnation de ces propositions, non seulement prises dans leur sens obvie, mais dans le sens même de l’auteur, il faut recevoir la décision ponti-