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CONSTANTINOPLK (ÉGLISE DE)


mont Athos forme, en effet, une fédération monastique ou république, dont les intérêts reposent entre les mains d’un conseil ou parlement de vingt membres siégeant à Karyès, la capitale de la péninsule. Le président de ce conseil est toujours le représentant du plus ancien monastère, de Lavra habituellement. Or, les vingt députés, dont se compose le conseil de la fédération, sont élus par les vingt monastères, seuls propriétaires légitimes du sol. De la sorte, les Slaves ne disposent que de trois voix dans le conseil et ils ont naturellement toujours le dessous dans les délibérations. Grâce à cette représentation fictive, le couvent russe de Saint-Pantéléïmon, qui compte 1500 moines, c’est-à-dire presque autant que les dix-sept couvents grecs réunis (1575), ne dispose que d’une voix, tout comme Stavronikita qui a 40 religieux seulement. Et le skite russe de Saint-André avec ses 400 moines, le skile russe également de Saint-Élie avec ses 300, ne sont pas représentés au conseil, alors que pas un des dix-sept couvents grecs ne compte plus de 200 religieux. On le voit, ce n’est pas précisément la représentation proportionnelle qui fleurit à l’Athos.

Le conseil de l’Athos porte le nom d’anliprosopie, parce que chaque délégué des vingt monastères se nomme, en grec, un antiprosope. A côté, fonctionne pour l’expédition des affaires une commission executive de quatre membres, dite épistasie, parce que les moines qui la composent sont des épislales. Le choix des épistates a lieu de la manière suivante. Les vingt monastères sont répartis en cinq groupes de quatre couvents chacun : 1° Lavra, Dokhiar, Xénoph, Esphigménou ; 2° Vatopédi, Koutloumousi, Karakallou, Stavronikita ; 3° Iviron, Pantocrator, Philothéou, Simopétra ; 4° Khilandar, Xiropotamo, Saint-Paul, Grigoriou ; 5° Dionysiou, Zograph, Rossico, Kastamonite. Chacun de ces cinq groupes nomme à tour de rôle et annuellement les quatre épistates, mais le premier membre de la commission, le protépistate, est toujours désigné par les cinq premiers monastères de chaque groupe : Lavra, Vatopédi, Iviron, Khilandar et Dionysiou. D’ordinaire, les monastères de Lavra, Vatopédi et Iviron désignent comme protépistate un moine différent de l’antiprosope, alors que les dix-sept autres monastères cumulent sur la même personne les deux fonctions ; toutefois, chacun d’eux a le droit d’agir comme les trois couvents précités. Le protépistate est donc le vrai chef du gouvernement, du ministère, s’il est permis d’employer ce mot ; à ce titre, il a remplacé le protathos du moyen âge, c’est-à-dire le premier homme de l’Athos, ou mieux le protatos, le tout premier. Il faut avouer toutefois que son pouvoir se trouve de nos jours considérablement réduit. Tout en portant la canne noire à pomme d’argent avec une frange de soie noire, le protépistate n’exerce qu’une dignité purement honorifique et, dans la visite annuelle des monastères, il laisse la première place à l’higoumène ou au président du conseil visité. Le conseil de l’Athos, lui, se réunit trois ou quatre fois par semaine, dans la matinée ; pour que le quorum soit atteint, la présence de 14 membres est requise. Les travaux commencent entre le 15 et le 20 janvier, pour se terminer le 20 décembre ;  ! ils ne sont interrompus que pendant la semaine-sainte et à l’occasion des fêles patronales de chaque couvent.

Au point de vue du genre de vie suivi dans chaque monastère, les vingt couvents de l’Athos se divisent en y.oivéêia ou couvents et en monastères idiorrythmes. Onze monastères appartiennent à la première catégorie. Xénoph et Ksphigménou depuis 1796, Simopétra depuis 1801, Rossico depuis 1803, Dionysiou et Kastamonite entre 1807 et 1809, Karakallou depuis 1813, Saint-Paul depuis 1839, Zograph et Grigoriou après 1810, Koutloumousi depuis 1857. Les neuf autres, à savoir : Lavra, Vatopédi, Iviron, Khilandar, Pantocrator, Xiropotamo,

Dokhiar, Philothéou et Stavronikita, sont soumis an régime idiorrythme. Comme on le voit par les dates données, l’idiorrythmie a régné presque seule à l’Athos du xve au xix » siècle et c’est seulement depuis une centaine d’années que l’on assiste à un retour assez marqué’vers le cénobitisme. Il existe entre ces deux genres de vie des différences considérables. Les deux principales sont qu’un couvent vit sous le régime monarchique, sous l’autorité d’un higoumène ou supérieur, et que ses religieux ne possèdent rien en propre, alors que, dans le monastère idiorrythme, on jouit d’un gouvernement démocratique et que les membres ont le privilège de la propriété privée. Dans les premiers couvents « préside un higoumène élu à vie. Cet higoumène, toujours prêtre, n’a rien d’un supérieur autocratique, parfois même il n’a que les apparences d’un supérieur. Le meilleur de l’autorité, sinon toute l’autorité, appartient en fait à un conseil d’une dizaine de membres, lequel gouverne tout, au moyen de deux épitropes et d’un secrétaire choisis dans son sein. Il n’empêche que le couvent, ainsi constitué, offre encore l’image d’une communauté religieuse, où tous les moines sont frères, vivent de la même vie et prennent place à la même table » . Dans un monastère qui mène la vie cénobitique, le temps du postulat dure trois mois ; après quoi, le solliciteur est revêtu de l’habit religieux, c’est-à-dire d’une robe noire serrée aux reins par une ceinture de cuir, d’une longue veste sans manche et d’un bonnet de laine grossière. Le noviciat dure deux ou trois ans, sans que personne soit chargé spécialement de la formation du jeune religieux ; on l’applique aux mêmes occupations que les autres et aux mêmes offices. L’épreuve terminée, le novice devient rassophore, c’est-à-dire que, devant la communauté réunie, le supérieur le revêt du rasso, sorte de douillette à larges plis et à larges manches. De ce fait, il n’est plus novice, sans être encore profès, et toute liberté lui est laissée de quitter la vie religieuse ou de rester éternellement en cet état. S’il aspire à monter plus haut, il lui faut encore cinq, huit et même dix ans, pour devenir stavrophore, c’est-à-dire profès à vo-ux solennels. Le mariage lui est alors interdit. Il existe encore une classe au-dessus de celle des stavrophores. c’est la classe des anciens qui portent le paya <7/î, iJ.a ou grand habit et qu’on appelle pour ce motif |a£ya>ôo-/T, [j.ot ; c’est comme qui dirait les pères jubilés dans certains ordres mendiants. Les vieillards qui sont revêtus de cet habit n’exercent plus de charge ; leur journée se passe à l’église et au réfectoire, les longues heures de loisir sur un divan ou dans des causeries familières. Ces diverses sortes de religieux n’ont pas tous les mêmes privilèges, il n’y a que les stavrophores et les |i&yaX4" o/r, (jioi qui aient le droit d’élire l’higoumène. Un premier vote désigne les candidats qui peuvent prétendre à la charge suprême ; un second, secret cette fois, désigne le supérieur qui doit être élu à la majorité des suffrages. Cette dignité confère au titulaire le droit de présider toutes les assemblées des moines, à l’église et au réfectoire.

La journée d’un cénobite se compose de l’assistance à l’office, du travail manuel et de prières particulières dans sa cellule, ainsi que de maigres repas et de longues heures de repos ; elle commence avant l’aube en ioute saison, entre une heure et deux heures, par la récitation ou mieux le chant de l’oflice, auquel tout le monde est tenu d’assister. Cependant, tous les religieux n’ont pas l’obligation de le réciter ou mieux de le chanter ; cette fonction incombe à une catégorie de moines, qu’on appelle psaltes ou chantres, catégorie forte de sept à huit membres pour cent religieux et dont tout le travail au monastère consiste dans la psalmodie au chœur et la lecture au réfectoire. Les autres moines restent bouche close, alignés en longues