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BANQUEROUTE

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voulu que dans les cas prévus pir l’article 585 le délit soit déclaré, indépendamment de toutes les circonstances de la cause ; si au contraire il s’agit d’un fait compris dans l’article 586, les magistrats peuvent tenir compte des différentes circonstances et apprécier s’il y a lieu ou non de condamner.

III. Conditions de la banqueroute frauduleuse. — Ici la faute, quelque grave qu’elle soit, n’est plus suffisante ; la fraude est toujours nécessaire. Par conséquent le jury ne doit pas être appelé seulement à statuer sur l’existence des faits de banqueroute frauduleux reprochés au prévenu, mais il doit encore se prononcer sur la question de bonne foi, élément constitutif de la fraude.

Aux termes de l’article 591 du code de commerce est déclaré’banqueroutier frauduleux tout commerçant failli : 1° quia soustrait ses livres ; 2° qui a détourné ou dissimulé une partie de son actif ; 3° qui, soit dans ses écritures, soit par des actes publics ou des engagements sous signature privée, soit par son bilan, s’est frauduleusement reconnu débiteur de sommes qu’il ne devait pas.

Les agents de change et les courtiers sont soumis à des règles spéciales. En effet, en thèse générale, la faillite n’est pas pour le commerçant un fait punissable par lui-même ; elle n’est qu’un des éléments constitutifs de la banqueroute. S’agit-il d’un agent de change ? alors le seul fait de la faillite, d’après l’article 484 du code pénal, constitue un crime, et l’agent de change est poursuivi comme banqueroutier. (Art. 89 du code de commerce. ) S’il y a faillite simple, il est puni de la peine des travaux forcés à temps, en cas de banqueroute frauduleuse la peine est celle des travaux forcés à perpétuité. (Code pénal, art. 404.)

La loi ne se contente pas de punir les banqueroutiers, elle assimile encore à la banqueroute certains crimes ou délits commis dans les faillites. 1° Sont condamnés aux peines de la banqueroute frauduleuse, les individus convaincus d’avoir, dans l’intérêt du failli, soustrait, recelé ou dissimulé tout ou partie de ses biens, meubles ou immeubles. (Code de commerce, art. 593.) 2° L’article 593 punit des peines de la banqueroute frauduleuse, les individus convaincus d’avoir frauduleusement présenté dans la faillite et affirmé, soit en leur nom personnel, soit par interposition de personnes, des créances supposées. Il n’est pas nécessaire d’ailleurs que cette présentation et cette affirmation aient lieu dans l’intérêt du failli. 3° Enfin, sont condamnés comme banqueroutiers frauduleux, les individus qui, faisant le commerce sous le nom d’autrui ou sous un nom supposé, se rendent coupables des faits prévus par l’article 591. (Code de commerce, art. 593.)

IV. Action judiciaire.

Poursuites.

En droit

commun, la poursuite est exclusivement réservée au ministère public, les particuliers ont seulement le droit de la provoquer par le dépôt d’une plainte. Ils peuvent en outre se porter partie civile ; mais soit qu’ils agissent par voie accessoire, soit qu’ils saisissent directement la juridiction répressive, comme la loi les autorise à le faire en matière correctionnelle, leur action a toujours un caractère purement privé.

Cependant l’article 597 du code de commerce contient une dérogation aux règles ordinaires, lorsqu’il s’agit de banqueroute simple ; il reconnaît, en effet, le droit de poursuivre non seulement au ministère public, mais encore aux syndics dûment autorisés à cet effet par la masse des créanciers et même par un créancier agissant individuellement. Encore qu’elle appartienne à plusieurs, la poursuite ne peut être exercée qu’une seule fois. Cette solution s’applique (gaiement au cas où la juridiction répressive n’aurait pas statué sur tous les faits susceptibles d’être reprochés au failli. Si, en effet, la banqueroute est complexe dans ses éléments, elle ne constitue néanmoins qu’un délit unique. Aussi bien les actions en banqueroute simple et en banqueroute frau duleuse étant absolument distinctes, l’acquittement sur l’une ne fait pas obstacle à l’introduction de l’autre ; pourvu que la nouvelle poursuite soit fondée sur des faits différents de ceux qui avaient motivé la première.

Suivant les règles générales du code pénal, la banqueroute simple, rangée parmi les délits, ressortit au tribunal correctionnel ; la banqueroute frauduleuse, étant comptée parmi les crimes, est justiciable de la cour d’assises.

Tentative et complicité.

La plupart des faits qui

constituent la banqueroute simple n’admettent ni tentative ni complicité. En ce qui concerne la tentative, la question se trouve nettement tranchée par le silence même de la loi. En matière de délits il n’y a jamais tentative punissable, en l’absence d’une disposition spéciale. (Art. 3 du code pénal.)

Quant à la complicité, on pourrait, au contraire, argumenter du silence de la loi pour soutenir qu’elle est punissable. (Art. 59 du code pénal.) Il n’y a là qu’une epparence ; en réalité, la loi s’est prononcée d’une manière complète sur la complicité en matière de banqueroute dans l’article 573 du code de commerce. Or ce texte ne prévoit de complicité que dans le cas de la banqueroute frauduleuse ; il écarte donc dans le cas de banqueroute simple toute complicité. Dans la banqueroute frauduleuses la tentative est punissable comme le crime lui-même. (Art.2 du code pénal.) L’article 593 du code de commerce admet comme cas de complicité de banqueroute frauduleuse, tous les cas définis par l’article 60 du code pénal ; de plus il assimile aux complices et punit des peines édictées par l’art. 402 du code pénal ceux que nous avons nommés dans le paragraphe précédent.

Peines.

La peine de la banqueroute simple est

l’emprisonnement pendant un an au moins et deux ans au plus. (Code pénal, art. 402.) De plus, le tribunal doit ordonner l’affichage du jugement et son insertion dans les journaux de l’arrondissement. (Code de commerce, art. 584, 600, 42.)

La peine édictée pour la banqueroute frauduleuse est celle des travaux forcés à temps. (Code pénal, art. 402.)

Frais.

Dans le cas de la banqueroute simple les

frais sont à la charge du Trésor, si les poursuites sont intentées par le ministère public ; si l’action est engagée par les syndics, ils sont supportés par la masse des créanciers en cas d’acquittement et par le Trésor en cas de condamnation.

Si la poursuite est faite à la requête d’un créancier, celui-ci n’en supporte les frais que s’il y a acquittement, en cas de condamnation ils sont à la charge du Trésor. (Code de commerce, art. 587, 588, 590.)

Pour la banqueroute frauduleuse, les frais de poursuite ne peuvent jamais être portés au compte de la masse. Mais si un ou plusieurs créanciers se sont rendus parties civiles en leur nom personnel, les frais en cas d’acquittement demeurent à leur charge. (Code de commerce, art. 592.)

Prescription.

Comme pour les délits de droit

commun, l’action en banqueroute simple se prescrit par trois ans ; le délai court du jour où l’infraction a été commise, si elle est postérieure à la date de la cessation des paiements. Quand, au contraire, le l’ait délictueux est antérieur à la faillite, la prescription court de la date de la cessation des paiements, l’ourla banqueroute frauduleuse, le délai de prescription est de dix ans, le point de départ étant le même que pour la banqueroute simple.

Laine, Commentaire sur les faillites et banqueroutes, 1839 ; Saint NVxi’iit, Traite des faillites et haiiq lier, ailes. A vol., Is’i.t ;

Boulay-Paty, Traité des faillites et banqueroutes, nouvelle i tli tion entièrement retondue par M. Boiteux, 2 vol., 1854 ; Renouard, Traité des faillites et banqueroutes, 8e édit., 2 vol., 1*07 ; Mascarel, De la banqueroute (en droit français), thèse,

Poitiers, 1878 ; Alauzet, Commentaire des faillites et banqueroutes, 2 viiiI., 1s7’.I ; Clossot, Ite/orme pratique. Livre III du code de commerce : des faillites et banqueroutes, IHTJ ;