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BOLGENI — BOLINGBROKE


de Magistris, évoque de Cyrèrie, Jean Marchelti, Marie Buchetti, Laurent ïhiulen, Jean-Baptiste Gentili. Bolgeni essaya d’abord de se disculper, tout en opérant une diversion, dans les Metamorfosi del dott. Gio. Marchelti, da penitenzière mutalo in pénitente, in-8°, s. 1., 1800, où il réédite deux brochures sur l’aliénation des biens ecclésiastiques parues en 1798, mais sans indication de date ni de lieu : Tiirere del ciltadino exgesuita Gio-Vincenzo BolgenisuW alienazione de' beniecclesiastici, in-i", et Schiarimenti dati dal cittadino Gio-Vincenzo Bolgeni in difesa et conferma del suo Parère sopra l’alienazione de' béni ecclesiastici, in-4°. La brochure fut condamnée et l’auteur adressa sa rétractation aux cardinaux alors assemblés à Venise pour l'élection d’un pape : Rilrattazione di Gio-Vincenzo Bolgeni dirctla a Monsignor lllr’no et Rmo Vicegerente di Ronia, in-8°, s. 1. n. d. Il réprouve surtout ses écrits sur le serment civique, en faisant remarquer qu’ils sont antérieurs à la condamnation du serment par Pie VI,

Destitué par Pie VII de ses fonctions, Dolgeni mourut à Rome le 3 mai 1811, assez malheureux, mais soutenu dans l’infortune par une piété qui ne se démentit point. Motelli composa son épitaphe ; elle est rapportée par Caballero, ' Bibliotlieca scri ptorum Soc Jesu supplementa, in-4°, Rome, 1814 (suppl. i, p. 100) ; on a publié sous son nom après sa mort : Dissertazione sopra l’impiego del danaroe l’usura, in-18, Lugano, 1835, et Dci lirniti délie due potestù ecclesiasticae secolare, in-8°, Florence, 1849. Ce dernier ouvrage, édité par L. M. Rezzi, a été mis à l’Index, le 19 décembre 1850, donec corrigatur ; mais vraisemblablement (cf. La Civiltà cattolica, 1850, t. il, p. 451 sq.) il est apocryphe.

Outre les auteurs cités, Cernitore, Biblioteca polemica degli scritlori clie dut 1770, fino al 1793, hanno o di/esi, o impugnati idogmi delta cattolica romana Chiesa, Rome, 1792, p. 19 sq. ; L’ami de la religion, t. xxxii, p. 1316 ; Sommervogel, Bibliothèque de la C" de Jésus, t. i, col. 16Il sq. ; Hurler, Nomenclator literarius, t. iii, col. 530 sq. ; Reusch, Der Index, t. ii, p. 959, 960, 906, 1012.

P. Bernard.

    1. BOLINGBROKE (Harry Saint-John##


BOLINGBROKE (Harry Saint-John, lord, vicomte de), homme d’Etat, orateur parlementaire, écrivain politique et philosophe anglais, né en 1672 à Battersea (comté de Surey), mort à Battersea le 25 novembre 1751.

Saint-John appartenait à une famille de vieille aristocratie. Doué d’une intelligence supérieure, il fit de brillantes études au collège d’Eton et à l’université d’OxIord. Mais il ne donna d’abord « qu’un parlait roué » . Enfin en 1700 il entrait à la Chambre des communes. Sa vie politiquecommençait. Son éloquenceet sestalentsallaient lui faire jouer un grand rôle pendant un demi-siècle. Il se mêla très ardemment aux luttes politiques entre wighs et tories, jacobites et partisans de la maison de Hanovre, et aux luttes religieuses. D’une façon générale, l’on peut dire qu’il soutint les tories, bien que son père fût un wigh, et l'Église établie, bien que sa première éducation religieuse eût été faite par des non-conformistes. Le beau moment de sa vie politique est le règne de la reine Anne (1702-1714). Il est deux fois ministre alors : de 1704 à 1708, il est ministre de la guerre et de la marine ; de 1710 à 1714, il est chargé du P’oreigrï Office avec le titre de secrétaire d'État. Il fut ainsi mêlé à la guerre de succession d’Espagne et ce fut lui qui rendit la paix à l’Europe occidentale en préparant et négociant la paix d’Utrecht (1713). Ce fut durant ces négociations, en 1712, qu’il fut créé pair sous le nom de vicomte de Bolingbroke. A la mort de la reine Anne (1714), ses tendances jacobites le firent frapper de proscription par les wighs et par le roi George I er de Hanovre. Il se réfugia en France, intrigua avec le Prétendant, l’abandonna, le décria dans un pamphlet et parvint à rentrer dans sa patrie en 1723, mais non à la Chambre des pairs. Il n’en redevint pas moins le chef du parti

tory et mena contre le ministère wigh d’alors, le ministère Walpole, une violente campagne de presse qu’il interrompit cependant pour faire un second séjour en France (de 1735 à 1738). En 1742 il assistait à la chute de Walpole. Mais c'était un nouveau venu dans le domaine de la politique, William Pitt, qui prenait le pouvoir. Bolingbroke vécut encore neuf années, sinon dans la retraite, du moins dans un calme relatif.

Le nom de Bolingbroke appartient aussi aux lettres, à côté des noms de Pope et de Swift. Bolingbroke écrivit d’abord contre ses adversaires politiques. A partir de 1710, dans sa lutte contre la politique belliqueuse des wighs et de Marlborough, il collabore avec Prior, Atterbury et Swift au journal The Examiner ; dans sa lutte contre Walpole, c’est-à-dire dès 1723, il collabore au journal The Crafstman.

Dans les loisirs de son exil ou dans les trêves que lui accordaient les événements il composa aussi des écrits politiques, mais où, malgré son génie, il est bien inférieur à Locke ou à Hobbes : les grandes vues générales lui manquent en effet. La plupart ont été traduits en français sous ces titres : 1° Lettres sur le patriotisme, sur l’idée d’un roi patriote, trad. par de Bissy, in-8°, Londres (Paris), 1750 ; 2° Lettres sur l’histoire, suivies de Béflexions sur l’exil et de la lettre sur le véritable usage de la retraite et de l'étude, trad. par BarbeuDubourg, 3 in-12, Londres (Paris), 1752 ; 3° Mémoires secrets sur les affaires d’Angleterre depuis 1710 jusqu’en il 10, trad. par Favier, 3 in-8°, Londres (Paris), 1754, etc.

Philosophe, Bolingbroke est bien de ce xviiie siècle qui ne fut difficile ni sur la qualité des idées, ni sur la valeur des arguments. Il fut l’un des représentants les plus avancés et les plus influents du déisme anglais : il a dicté, pour ainsi dire, à Pope l’Essai sur l’homme. Il fut aussi l’un des maîtres de Voltaire qu’il vit en France et à qui il offrit l’hospitalité en 1726, dans le séjour forcé que Voltaire fit alors en Angleterre. C’est là que Voltaire prépara ses Lettres pldlosophiques. Bolingbroke fut ainsi l’un des précurseurs de l’encyclopédisme.

Ce qui caractérise le déisme c’est la négation de toute révélation. Bolingbroke ne croit à aucune religion révélée ; toutefois, par une contradiction à laquelle nous a habitués Voltaire, cet ennemi des religions positives veut une religion d'État. Les libres-penseurs sont « les pestes de la société » , et durant sa vie c’est à peine si le public soupçonna ses sentiments intimes. Quand ses écrits philosophiques eurent été publiés, Voltaire put lui attribuer impunément un de ses plus violents pamphlets contre la révélation qu’il publia en 1767 sous ce titre : Examen important de mi lord Bolingbroke ou le tombeau du fanatisme écrit sur la fin de 1730, et avec cet « Avis mis au-devant des éditions précédentes de Y Examen important de milord Bolingbroke » : « Nous donnons une nouvelle édition du livre le plus éloquent, le plus profond, et le plus fort qu’on ait encore écrit contre le fanatisme… Ce précis de la doctrine de milord Bolingbroke, recueillie tout entière dans les six volumes de ses Œuvres posthumes, fut adressé par lui, peu d’années avant sa mort, à milord Cornsbury. « 

Si la révélation n’existe pas, que nous dit la raison de Dieu, de l'àme et de la vie future ?

La doctrine de Bolingbroke ne forme pas un tout cohérent et systématique. Il a sur les procédés et sur les limites de l’intelligence les doctrines de Locke : nos connaissances nous viennent des sens et de la réflexion. Les métaphysiciens Platon, Descartes, Berkeley se sont bercés d’illusions et de pures chimères. Dès lors pouvons-nous être certains de Dieu ? Il y a, répond Bolingbroke, une intelligence créatrice que l’expérience suffit à nous prouver. Il y a de l’ordre et de l’art dans le monde : il existe donc de toute nécessité une intelligence toute-puissante. C’est d’ailleurs ce que l’humanité entière.