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BLASPHEME CONTRE LE SAINT-ESPRIT

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abstraction faite do leur union avec Dieu el à raison do leur excellence personnelle, unt droit à noire respect el méritent le culte spécial de dulie. C’est ce droit que l’on viole en les outragi ant. Pour la même raison, l’outrage adressé à la sainte Vierge, à qui convient le culte à'hyperdulie, serait lui aussi d’une espèce particulière. Lessius, loc. cit., n. 33 ; Suarez, loc. cit., n. 19 ; Lelimkuhl. Theol. mor., part. I, 1. I, tr. II. n. 369. Pratiquement, on peut suivre le sentiment de saint Liguori : ciuii ii qui blasphémant sanctos, dit-il, vérins (communiter loquendo) eos injuria afficcre intendant non ob prsecisam propriamque ipsorum excellentiam, sed quatenus ad Ueum immédiate referuntur : ideo, juxta probabilem Salmanticensium sententiam, non contra duliam sed tantum contra latriam peccant ac propterea non tenentur explicare an Deum vel sanctos blasphemaverint. Theol. mor, 1. III, n. 132.

Formules blasphématoires douteuses.

On trouve

chez les peuples de langue française, anglaise, allemande, italienne, bon nombre de locutions plus ou moins singulières où le nom de Dieu, irrespectueusement prononcé, quelquefois altéré et à peine reconnaissable, se trouve accompagné d'épithètes équivoques ou forme avec d’autres substantifs un mot composé dont le sens étymologique est ou paraît inconvenant pour Dieu. Le plus suspect de ces jurons, l’expression française s… n… de D…, est considéré par plusieurs moralistes comme un vrai blasphème, et par conséquent comme gravement coupable, soit à cause du sens injurieux qu’elle a ou du moins qu’elle paraît avoir, soit à cause de l’horreur qu’elle inspire à toutes les consciences un peu délicates. Gury, Compendium theologixmoralis, tr. de præceptis Decalogi, n. 302 ; Marc, lnstilutiones morales, part. II, tr. II, De 2° Decalogi præcepto, n.598 ; Gaume, Manuel des confesseurs, p. 219 ; ^Ertnys, Theol. mor., 1. III, tr. II, n. 66 ; Génicot, Theol. mor., tr. VI, sect. ii, c. i, n. 295. D’autres, observant que le sens obvie des mots est seulement équivoque, disent que l’intention seule peut transformer en blasphème cette manière de parler. Gousset, Theol. mor., tr. du Décalogue, c. i, n. 400 ; Scavini, Theol. mor., tr. V, disp. III, c. ii, q. i ; Ballerini, loc. cit., n. 31, défendent cette opinion. C’est donc au confesseur à juger chacun des cas particuliers. D’autres expressions du même genre, mais dont le sens obvie, bien que singulier ou inouïe offensif des oreilles pies, n’est pas une injure à Dieu, sont communément regardées comme véniellement coupables. Cf. Gury, Marc, Gousset, loc. cit. Sur le sens plus ou moins blasphématoire des expressions italiennes, voir Herardi, Praxis confessar., tr. II, c. il, n. 187 ; Marc, loc. cit. ; des formules allemandes, Reiffenstuel, Theol. mor., tr. V, dist. III, q. v, n. 61 ; Lehmkuhl, Theol. mor., part. 1, 1. I, tr. II, n. 371-373 ; pour les locutions anglaises ou flamandes, Sabetti, Theol. mor., tr. VI, De 2° Decalogi præcepto, n. 220221 ; Génicot, loc. cit., n. 295 ;.Krtnvs, loc cit., n. 67 ; pour lis formules espagnoles, Th. Sanchez, Opus morale, I. ii, c. xxxii, n. 15 sq.

III. Peines. - Sous l’ancienne loi, le blasphémateur devail être puni de mort. Lev., xxiv, 15 ; Josué, x, :  !.' !. L’Evangile compte le blasphème parmi les fautes qui souillent particulièrement le cœur de l’homme. Matth., xv, 19 ;.Mare., vii, 21-2 :  !. Dans la législation ecclésiastique, des peines sévères sont portées contre les blasphémateurs. Sain ! Pie V les a rappelées et renouvelées dans la constitution Cnm primum apostolatus, § 10. Les laïques blasphémateurs étaient d’abord condamnés à l’amende, puis en ras de récidive à l’exil ; les gens du peuple, incapables « le payer I amende, étaient condamnés d’abord à un jour de pénitence publique aux portes de l'église, puis à la bastonnade ; enfin ils devaient avoir la langue percée et on les envoyait aux galères. Les clercs liaient

privés d’abord des revenus de leur bénéfice, puis des

bénéfices eux-mêmes et de leurs dignités, et enfin condamnés à l’exil. Les clercs n’ayant aucun bénéfice étaient condamnés pour une première faute à une amende ou à quelque peine corporelle, puis à la prison, puis à la dégradation et enfin à l’exil. Justinien, plus sévère encore, condamnait au dernier supplice quiconque oserait jurare per aliquod membrum Dei aut capillos aut blasphemare Deum. L’ancienne législation civile française bien (rue moins rigoureuse était encore fort dure. Cf. Merlin, Répertoire universel et raisonné de jurisprudence, art. Blasphème. Louis XII t par ordonnance du 9 mars 1510, voulait que les blasphémateurs qui insultent le nom de Dieu fussent condamnés pour la première fois à une amende arbitraire, en doublant toujours jusqu'à la quatrième fois ; qu'à la cinquième, outre l’amende, ils fussent mis au carcan ; qu'à la sixième, ils eussent la lèvre supérieure coup e d’un fer chaud et qu’ils fussent mis au pilori ; qu'à la septième la lèvre inférieure leur fût coupée et la langue à la huitième. Louis XIV confirma par une ordonnance du 7 septembre 1651 celle de Louis XII et eommanda de dénoncer le blasphémateur. Le code pénal du 25 septembre 1791 ne prononce aucune peine contre le blasphème. En Angleterre, en Allemagne et en d’autres pays, la loi civile punissait ou punit encore le blasphème. Voir André, Dictionnaire de droit canonique, art. Blasphème ; Ilauck, Bealencyklopâdie, art. Goltestasterung.

Tous les moralistes traitent du blasphème en étudiant le Décalogue et les vertus. Qu’il suffise de citer ou de rappeler ici : Antonin de Florence, Summa, II", tit. vu. c. i ; S. Thomas, Sam. tlieol., Il* H', q. xiii, a. 3 ; q. cv, a. 2 ; III", q. i.xxx, a. 3 : I' II", q. x, a. 2 ; S. Liguori, Theol. mor., . III, tr. II. c. I ; Jaugey, Prætectiones theoloyiæ moralis, tr. île iv virtutibus cardinalibus, sect. ii, p. I, c. vin. § 11. n. 1 ; Didiot. Murale surnaturelle spéciale, Vertu de religion, théor. lxxvi.

V. Oblet.

    1. BLASPHÈME CONTRE LE SAINT-ESPRIT##


2. BLASPHÈME CONTRE LE SAINT-ESPRIT. — I. Nature. II. Espèces. III. Irrémissibilité.

I. Nature.

C’est de la bouche même de Jésus-Christ qu’est sortie l’expression : « blasphème du Saint-Esprit, » f. Se to’j ir/E’Ju.aTo ; 6).airyr, a : a oùx KÇsBïjffSTai. Matth., XII, 31. Pour déterminer le sens précis de cette expression, il faut recourir au contexte. Jésus venait de guérir un démoniaque qui él ait à la foi aveugle et muet, et en le délivrant, il lui avait rendu la vue et la parole. Ce miracle éclatant avait joli dans la stupeur les assistants qui se demandaient si le thaumaturge n'était pas le lils de David ou le Messie attendu. En entendant ces paroles de la foule, les pharisiens y répliquaient en disant ; « Celui-ci ne chasse les dénions que par la puissance de Béelzébub, le prince des démons, s Jésus, connaissant la malice de leurs pensées, les réfuta directement en montrant que, s’il chassait les dénions parla puissance de Béelzébub, Satan serait lui-même son adversaire et détruirait son propre royaume. L’expulsion des démons, qu’elle soit faite par Jésus ou par les exorcistes juifs, ne peut donc pas être l'œuvre de leur prince. C’est l'œuvre de Dieu et elle s’accomplit par son esprit. Si donc Jésus chasse les démons par l’esprit et la puissance de Dieu. il fonde et établit sur terre le royaume de Dieu, opposé à l’empire du démon sur les âmes, et il remplît ainsi une fonction de sa mission messianique, celle d’anéantir la domination des esprits de ténèbres parmi les hommes. Le démon est lié par lui et sa maison est dévastée. Les

I es, par Conséquent, s’ils ne veulent pas perdre le

fruit de sa mission terrestre, doivent s’unir ; m Christ et se proclamer manifestement pour lui ou conlre lui. Parvenu à ce point de son argumentation, Jésus en lire celle conclusion : « C’est pourquoi je unis le dis ; 'fout péché et tout blasphème sera remis aux hommes, mais

le blasphème du Saint-] spril ne sera pas remis. » Il y a donc à côté des péchés et des blasphèmes des hommes