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BIENS ECCLÉSIASTIQUES


vilèges des patrons, qui sous Charlemagne et ses successeurs deviennent très nombreux parmi les laïques.

Reste à voir ce qu’est devenue, sous le régime des bénéfices, l’ancienne règle : I lie us d’Église, biens des pauvres. Il es ! clair qu’à partir du moment où les pauvres eurent leur budget spécial et leurs institutions particulières, les donations n’avaient plus, saut’déclaration expresse, l’atïectation exclusive des premiers temps. Saint Thomas, Quodl, VI, a. 12, ad 3um, distingue avec soin, quant à l’emploi des revenus du bénéfice, entre les biens ecclésiastiques cjux principaliter sunt altribuendanecessitalibus pauperum, et ex conséquent ! necessitatibus ministrorum et ceux qute principaliter sunt attributa usibus ministrorum. Les premiers seuls restent soumis de droit naturel aux anciennes régies, et leur usage indu donne lieu à restitution. Quant aux autres, qui sont destinés à l’usage du bénéficier, c’est la positive ecclésiastique qui interdit d’en employer le superflu à autre chose que des œuvres pies. Sum. theol., IIa-IIæ, q, clxxxv, a. 7. Voir ce que dit sur toute cette question, Fagnan, In c. Si quis sanc, 5, Depeculio clericorum, III, xxv, Venise, 1709, t. iii, p. 245 sq. Après avoir apporté huit solutions aux diflicultés tirées des textes de l’antiquité, le docte canoniste tire et justifie les conclusions relatives aux droits du bénéficiera vivre de son bénéfice quelle que soit l’imporlance de son patrimoine personnel ; montre qu’il n’est tenu qu’en religion et en charité de faire un usage pieux des revenus qui lui restent après qu’il a subvenu à toutes les dépenses qui conviennent à sa situation dans l’Église, la société et la famille. Le droit de meltre en réserve les biens patrimoniaux, et de vivre du bénéfice en faisant abstraction des ressources patrimoniales, s’étendit successivement aux fruits industriels, aux distributions quotidiennes et aux autres revenus d’origine ecclésiastique, qui ont le caractère d’un salaire représentant un travail effectif. Cf. S. Liguori, Tlieol. mur., 1. IIL, t. v, n. 491 sq.

Il est évident que, dans notre pays, en admettant même que les traitements ecclésiastiques soient pleinement substitués aux anciens bénéfices, les clercs ont toute liberté de disposer de tous les autres revenus et d’affecter à leur entretien l’indemnité concordataire.

111. LES ADMINISTRATEURS ECCLÉSIASTIQUES. — Pour

la période qui précède le partage des fonds entre les bénéficiers, administrateurs nés de la portion du patrimoine ecclésiastique dont ils sont usufruitiers, la situation est résumée en quelques lignes par Thomassin, Ancienne et nouvelle discipline, part. III, I. II, c. v : « Il est certain : 1° que les évêques avaient une autorité souveraine dans l’administration des biens et des revenus de l’Église, qui étaient alors possédés par les communautés ; 2° que les évêques se faisaient soulager dans cette pénible dispensation par les prêtres, ou par les archidiacres et diacres de leur église ; 3° que les prêtres et les diacres rendaient compte aux évêques de leur administration ; 4° mais les évêques n’étaient comptables qu’à Dieu seul ; 5° bien que les conciles provinciaux aient pris quelquefois connaissance de leur administration lorsque le public en avait été scandalise. »

L’évêque, comme son nom l’indique, est l’intendant général des choses d’Église. Puisqu’on a eu assez de confiance en lui pour lui abandonner la conduite spirituelle de tous, comment pourrait-on hésiter à lui donner pleins pouvoirs sur le patrimoine commun’.' Cf. Canons apost., can. 41, P. G., t. cxxxvii, col. 124 ;

llelele, Hist. ili’s ri mil 1rs, Irail. Ilelarc, t. I, p. 630. Il

reste donc le chei suprême, mais, par la force des choses, il doit se choisir des auxiliaires. Les apôtres en avaient donné’l’exemple, Act., vi, 1-6,

en imposant les mains aux sept élus de la c mimante

préposés au soin des pauvres. L’Écriture ne leur donne pas le nom de diacre, ou du moins ne le leur réserve pas ;

car s’ils exercent le ministère des tables (Staxovetv -rpa-TuéÇai ; ), les apôtres conservent le ministère de la parole (Scaxovîa to-j Xôyou), et les Cotislit. ai>nst., 1. Y, c. viii, P. G., t. i, col. 853, supposent, dans un passage qui ne se trouve pas dans la Didascalie, que les apùtres donnent à saint Etienne le titre de r, acôv vuvSiâxovo ;. Les diacres dont parle saint Paul, Phil., i, 1 ; I Tim.. iii, 8, 12, sans compter les personnages désignés sous le nom de ôtàxovoî, et dont plusieurs, comme Tychique, Eph., VI, 21, comme Epaphras, Col., i, 7, sont peut-être des diacres au sens hiérarchique du mot, les diacres aussi auxquels fait allusion la Didachè, c. xv, p. 32, ne sont désignés nulle part comme chargés du temporel ; les qualités qu’on exige d’eux sont exactement celles qu’on demande à l’évêque. Les Canones xii apostolorum, qui dépendent de la Didachè, commencent à indiquer pour les diacres non seulement des fonctions d’assiduité ou d’assistance (TrapîSpsia) dont le sens est assez vague, cf. c. xxi, 2 ; c. xxiii, 1, Eunk, Doctrma xii apostolorum, p. 50, 68, mais de secours aux pauvres, c. xxii, p. 68. Le canon 41e des apùtres, que nous avons cité plus haut et qui fait partie d’un ensemble de textes reflétant la discipline du IIIe siècle, après avoir représenté l’évêque comme un administrateur sans contrôle humain, et avoir noté que c’est par son autorité que se fait la répartition des ressources entre les pauvres, déclare que c’est à la fois par les prêtres et par les diacres qu’est opérée la distribution. La Didascalie, c.ix, trad. Nau, p. 58, défend de demander des comptes à l’évêque, et montre les diacres intermédiaires obligés entre le peuple et l’évêque qui semble constituer avec eux tout le clergé ; certaines choses sont de leur ressort, c. xi, p. 67 ; mais rien n’indique qu’ils aient la charge des pauvres quant à la répartition des aumônes. Au siècle suivant, les Constitutions apostoliques, 1. II, c. xxvi, xxx, P. G., t. i, col. 668, 677, déclarent, après la Didascalie. que le diacre doit être soumis à l’évêque en toutes choses et, c. xxxi, col. 677, qu’il ne doit rien faire que par l’évêque. Il n’y a pas d’exception pour la distribution des aumônes. L’évêque détermine personnellement les pauvres qui auront part aux secours, c. xxxii, col. 677. Si le c. xix du 1. III parle du soin des pauvres, le contexte montre qu’il s’agit de soins corporels d’une telle nature, qu’auprès des femmes les mêmes fonctions doivent être remplies par des femmes. Les diacres ont comme modèle, dans ces fonctions, le Sauveur lavant les pieds à ses apôtres. S’ils découvrent dans le cours de leurs visites une misère intéressante, ils doivent en référer à l’évêque. Les canons 3’t-37 d’Ilippolyte placent aussi le diacre sous la dépendance de l’évêque et des prêtres, même pour le soin îles infirmes et des pauvres. Ma r Duchesne, Origines du culte chrétien, 3e édit., Paris, 1902, p. 5°27 ; Achelis, Die Canones Hippolyti, dans Texte und Vnters., Leipzig, 1891, t. vi, fasc. 4, p. 64-65. La Constitution apostolique égyptienne déclare aussi que le diacre ne doit faire que ce que l’évêque lui ordonne. Achelis, lac. cit. Cependant le Testament de N.S., édit. lialiniani, Mayence, 1899, p. 80, recommande au diacre de ne pas troubler l’évêque au sujet du soin des pauvres, des malades, des étrangers, etc., et de ne lui rendre compte que le dimanche seulement. Tous ces textes établissent uniquement que les évêques. seuls responsables, devant Dieu, de l’administration temporelle, se faisaient aider par les membres de leur cierge, prêtres ou diacres. Le concile d’Antioche (341) en est encore à ce système du contrôle discret de corps des prêtres et des diacres, can. 24, 25. Mansi, t. n. col. f>l7, 1320 ; en cas de prévarication, le clergé en appelle au Bynode de l’éparchie. Le concile de Gangres (entre 330 et 370) suppose déjà, au contraire, l’existence d’un fondé de pouvoir ili’L’évêque (vf*.vxjupiai>.ivoi) chargé de la répartition des oblalions (can. 7) et que le canon 8’appelle è7ttT£rayu.évo ;