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BIENS ECCLÉSIASTIQUES

n’apparaît en Afrique qu’au temps de saint Augustin, introduite par les fidèles qui tendent à réduire leurs libéralités à 1/10 de leur revenu. L'Église latine tolère d’abord cette pratique, Yaccepte ensuite comme un pis aller, et enfin l’impose. Vient ensuite la sanction pénale au fur et à mesure que le besoin s’en fait sentir. Le premier exemple que nous en puissions citer en Occident est le concile de Màcon (585), Mansi, t. ix, col. 947, qui menace de l’excommunication les prévaricateurs. Les capitulaires des rois francs reviennent sans cesse sur cette matière, et veillent à ce que les canons soient observés sur ce point. Les dîmes ont subsisté sous diverses formes jusqu'à nos jours, où elles sont encore obligatoires dans certains pays.

Les dîmes apparaissent tarifées exactement à 1/10 dans la Didascalie. Les curieuses raisons mystiques qu’en donne l’antique document sont à lire. Cf. E. Hauler, Didascalise apostolorum -fragmenta Veronensia latina, Leipzig, 1900, p. 36-37, 40. Mais les dîmes chrétiennes se distinguent des dîmes juives dès le temps de saint Augustin, en ce qu’elles portent sur tout, même sur les fruits civils. La coutume des lieux modifia dans la suite des âges la quantité de la dîme et la matière imposée, tout en conservant son nom traditionnel à la contribution ecclésiastique par excellence ainsi transformée. Si le mot dime est employé plus souvent chez les Latins qu’en Orient, où cependant l’institution avait pris naissance, c’est pour des motifs d’ordre philologique.

Redevances à l’occasion des ordinations.

Ce sont

les ordinations qui donnèrent lieu les premières, parmi les sacrements, A la perception régulière de droits pécuniaires. Ces derniers sont destinés à la fois : 1° à dédommager l'évêque et ses officiers du labor exlrinsecus annexé à l’ordination ; 2° à reconnaître la dépendance du consacré à l'égard du consécrateur. Ces usages ne s'étaient pas introduits sans difficulté de la part de l'Église, qui linit par réglementer ces oblations après avoir essayé en vain de les interdire. Les lettres de saint Grégoire, tout en réprouvant les abus simoniaques, approuvent sans réserve les Novelles de Justinien qui prornulgent le tarif des droits légitimes. Ces droits sont considérables et vont, pour l’ordination-installation d’un simple clerc, jusqu’au revenu d’une année. A la faveur de cette tolérance, de nombreux abus s’introduisirent, contre lesquels l'Église lutta dans tous les temps. Le concile de Trente y mit fin en interdisant toute redevance, même spontanée, à l’occasion des ordinations. Sess. XXI, De réf., ci.

Redevances à l’occasion des funérailles.

Elles

ne s’introduisent que très tard, et ne revêtent que dans les temps modernes un caractère d’obligation, d’ailleurs tout relatif. Les taxes prévues par la Novelle lix établissent bien, qu’au temps de Justinien, certains clercs grecs, ou officiers inscrits au canon de l'Église, touchaient des honoraires à l’occasion des funérailles ; mais il y avait là plutôt un salaire pour un travail matériel effectué, et non une contribution ecclésiastique, impôt somptuaire perçu à l’occasion d’un décès. En Occident, où aucun texte n’autorise à penser que les fonctions des anciens vespillones étaient remplies, comme en Orient, par les clercs, on ne trouve pas tra.ee de ces salaires. Le concile de Braga (563), Mansi, t. ix, col. 773, parle seulement d’offrandes spontanées pour Jes morls, en dehors des funérailles. Saint Grégoire insiste pour faire disparaître l’abus qui consistait à vendre les sépultures dans l’intérieur des églises ; il défend aussi de rien accepter des familles sinon les offrandes pour le luminaire. Epist., 1. IX, epist. iii, P. L., t. lxxvii, col. 941. Au ixe siècle, nous voyons par Hincmar de Reims que la défense de rien exiger subsiste toujours, mais que la faculté d’accepter les offrandes volontaires est étendue à tout. On en vint enfin à tarifer les oblations à l’occasion des obsèques ;

et au xvie siècle, l’usage est généralisé. Saint Charles se contente de demander qu’on s’en tienne aux coutumes reçues et approuvées par l'évêque.

Les revenus des biens-fonds.

L’Eglise assura de

très bonne heure l’avenir, par l’acquisition de biens frugifères, destinés à pourvoir aux besoins dans les moments difficiles où les misères augmentent en même temps que diminuent les ressources provenant de l’impôt sur le revenu des fidèles. Cette préoccupation ne se fit jour qu’au moment où l’attente de la venue prochaine du Christ devint moins générale. Cependant, dès le IIIe siècle, l'Église possède, en dehors de ses lieux de culte, des biens immeubles. Lampride en cite un exemple, dans sa vie d’Alexandre Sévère, Hist. Aug., Leyde, 1671, t. i, p. 1003. La seconde partie de l'édit de Milan (313) se préoccupe de ces propriétés pour en ordonner la restitution. Lactance, De mort, persec, 48, P. L., t. vii, col. 267. L’histoire de Constantin par Eusèbe, un contemporain, fait allusion à des maisons, posses^ sions, champs et autres biens restitués à l'Église. L. II, c. xxxix-xli, P. G., t. xx, col. 1010, 1017. Après la paix, les acquisitions d’immeubles se multiplient. Elles proviennent surtout de dons à titre universel : 1° Beaucoup de clercs et d'évêques donnent l’exemple de l’abandon total de leurs biens, et les fidèles suivent souvent dans cette voie les pasteurs. 2° Donner à l'Église est le seul moyen de donner aux pauvres, car il n’existe jusqu’au ve siècle aucune institution de charité distincte, capable de recevoir des fondations. 3° De plus, sans chercher à enlever de son mérite à la générosité des fidèles de ce temps, il faut reconnaître que la multiplicité des impôts accable la propriété foncière au ive siècle, la menace de confiscatio et la rend très précaire. Ce sont naturellement les donations testamentaires qui sont les plus fréquentes. La factio testamenti passiva accordée à l'Église dès 321, L. 1, Cod., I, ii, par Constantin, lui permet de recueillir les hérédités, legs et (idéicommis. Les empereurs tiennent la main à ce que les legs pieux soient exécutés ; et sauf une disposition transitoire de Valentinien (390), L. 27, Cod. thôod., XVI, ii, l’ensemble des documents législatifs nous montre les empereurs bien plus soucieux que les évêques d’augmenter le patrimoine ecclésiastique. La législation de Justinien. qui resta d’ailleurs lettre morte pour l’Occident jusqu'à la résurrection du droit romain par l'école de Bologne, veille avec plus de soin encore sur le patrimoine de l'Église. Justinien fait profession de pourvoir à tout ce qui peut manquer au clergé ; il est donc intéressé à ce que les églises ne se ruinent pas, et pour cela observent les dispositions conciliaires destinées à assurer la bonne administration et l’intégrité du domaine ecclésiastique. Il superpose les pénalités de la loi civile à celles des canons, frappe les délinquants d’amendes au profit de l'Église, et sauf une disposition toute de circonstance, interdisant d’augmenter le patrimoine immobilier de l'Église de Constantinople (Novelle iii), tout conspire, dans le dernier état de la législation romaine, à enrichir l'Église. Le pouvoir civil organisa même tout un système de présomptions de droit en faveur de l'Église, surtout en matière de succession ab intestat et de prescription. Ajoutez à cela les acquisitions que des évêques prévoyants faisaient du surplus des revenus ordinaires.

C’est surtout au sujet de Rome, de Constantinople, d’Alexandrie, de Jérusalem, de Ravenne, de Thessalonique et d’Antioche que les documents nous fournissent des détails, mais tous les textes juridiques sur les biens d'Église en général, laissent l’impression qu’on s’y préoccupe surtout de l’administration et de la conservation de biens-fonds.

Nous avons dit que les innovations de Justinien ne produisirent leur effet que dans l’empire d’Orient, dont les Églises allaient bientôt tomber en décadence sous