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BERNARD (SAINT)

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après. L’abbé de Clairvaux y laisse paraître les préoccupations qui assiègent son esprit, selon la date. C’est ainsi qu’au début du 1. ii, il se disculpe de l’insuccès de la seconde croisade. L’ouvrage a pour objet de tracer au pape une sorte d’examen de conscience. Le premier objet de la considération d’un pape, c’est lui-même ; le second, c’est sa maison, qui comprend les officiers subalternes et au sommet le sacre-collège. « Dans la curie, soyez pape ; chez vous, soyez père. » Il taut pourtant craindre que la familiarité ne blesse le respect. « Que vos familiers vous aiment, sinon faites qu’ils vous craignent. » Le troisième objet de la considération, c’est l’Église universelle. Le pape est l’évêque des évêques ; il gouverne l’Église par le moyen des légats, sorte de missi dominici, chargés de visiter les provinces ecclésiastiques ; par le moyen des appels et par les exemptions. Bernard dénonce les abus que cette triple institution a engendrés, et exhorte Eugène III à y remédier. Au delà de l’Église catholique, il semble qu’il n’y avait plus rien. Mais il reste encore les infidèles, les juifs, les sehismatiques et les hérétiques ; le pape est leur « débiteur » , et sa sollicitude doit s’étendre jusqu’à eux. C’est là un autre objet de sa considération. En qualité de souverain temporel et de « successeur de Constantin » * que le pontife considère aussi quels sont ses devoirs à l’égard du peuple romain, si difficile à gouverner. Enfin, que dans les rapports entre I Eglise et les États, il tienne ferme le glaive que le Christ a placé entre ses mains. Le 1. V a pour objet Dieu et le mystère de la Trinité. Bernard y fait de mystiques considérations et réfute, en passant, les théories de Gilbert de la Porrée. Vacandard, Vie de saint Bernard, c. xxxii, t. ii, donne une analyse détaillée de tout l’ouvrage.

III. EPITRES. —

Du vivant même de saint Bernard, on se disputait ses lettres. Vers 1145, son secrétaire Geoffroy en fit un premier recueil, qui comprenait non pas trois cent dix lettres, comme on l’a dit, Huffer, op. cit., p. 186 ; cf. Bréal, Historiens des Gaules, t. xv, p. 542, mais seulement deux cent trente-cinq. La dernière lettre de ce Corpus epistolarum était vraisemblablement l’épître ad Bomanos, écrite en 1145, qui porte dans l’édition Mabillon-Migne le n. 243. Cf. Vacandard, Vie de saint Bernard, 1™ édit., p. xi, note 1. Une collection très ancienne olfre trois cent dix épilres. L’édition Migne, qui a pour fonds principal celle de Mabillon de 1690, augmentée par Martène, fournit quatre cent quatre-vingt-quinze lettres, parmi lesquelles on en compte trente-sept qui sont des correspondants de l’abbé de Clairvaux ou parlent de lui. Des lettres qui portent le nom de Bernard, cinq sont des doublets par suite d’une erreur de Martène ; ce sont les épîtres ccccxxviii, ccccxxx, CCCCXLIV, CCCCLII, CCCCLIII. P. L., t. clxxxii, col. 626, note 1087. Huit sont apocryphes ou douteuses : Epist., CCCCLVI, CCCCI.X, CCCCIXI, CCCC’.XII-CCCCXXVI, CCCCLXX.Ce déchet est largement compensé par un appoint de trente-six pièces, éditées dans d’autres recueils et ainsi décomposées : sept lettres de Bernard et vingt-neuf de ses correspondants. Cf. Kervyn de Lettenhove, Bulletin de V Académie royale de Belgique, 2° série, t. XI, n. 2 ; t. XII, n. 12. La liste ainsi grossie comprendrait cinq cent huit lettres authentiques, auxquelles il faut ajouter une lettre éditée par le P. Satabin dans les Etudes religieuses, juin 1894, vingt-quatre lettres (vingt de Bernard et quatre de ses correspondants) découvertes par M. G. Huffer, Der heilige Bernard, t. i, p. 228-237, une êpître aux abbés réunis à Citeaux, Neues Archiv, t. v (1888), p. 459, s.. il au total cinq cent trente-quatre (’pitres. Signalons en outre deux lettres de Bernard encore manuscrites, la première ail geuteni Anglorum, à propos de la croisade, Biblioth. nation. Paris, fonds lat., H815, p. 2x7 » -288 1 >, la seconde adressée à l’archevêque et au clergé de Cologne, même sujet. Biblioth. de Munich, mss. 22201, fol. 257. Du reste, nous savons par des témoignages explicites, non moins que par des conjectures solides, que la correspondance inédite ou perdue de l’abbé de Clairvaux est fort considérable.

Ce n’est pas le lieu d’indiquer le contenu et la date de toutes les lettres que nous possédons. Nous avons vu que les 243 numéros qui furent compris dans le recueil de Geoffroy sont antérieurs à ll16. Mais le secrétaire de saint Bernard a tenu fort peu de compte de l’ordre chronologique, sauf pour la période qui correspond à son séjour à Clairvaux, c’est-à-dire de 1140 à 1145. Souvent, les lettres sont groupées par sujets traités ou par destinataires ; les numéros 113 à 120, par exemple, sont tous adressés à des femmes, bien qu’ils appartiennent à des époques différentes. Ce désordre chronologique est plus sensible encore dans les additions successives qui sont venues grossir le Corpus epistolarum. Ceux qui voudraient connaître les dates des lettres de l’abbé de Clairvaux, devront se reporter à la première édition de notre Vie de saint Bernard, t. il, p. 564 sq,

IV. ŒUVRES SUPPOSEES. —

L’abbé de Clairvaux était trop riche en œuvres pour qu’on ne lui prêtât pas des écrits dont on ignorait la paternité, pourvu qu’ils ne parussent pas trop indignes de son génie ou de sa piété. Presque tout un volume de Migne, P. L., t. clxxxiv, est rempli de ces ouvrages supposés.

Dans la Bibliographia Bernardina de Janauschek, p. v sq., les titres des ouvrages en prose soit imprimés, soit manuscrits, faussement attribués à saint Bernard, s’élèvent au nombre de cent vingt. Il est vrai que plusieurs forment double emploi. Nous citerons Vlmitatio Jesu Christi, la Bigle des Chevaliers du Temple, œuvre de Jean de Michel ; un Psalterium B. Marise Virginis ; et le Memorare qui a été composé assez tardivement avec quelques phrases empruntées à saint Bernard, sermon iv sur l’Assomption, n. 8, et sermon dans l’octave de l’Assomption, n. 15, P. L., t. clxxxiii, col. 428, 438.

On a aussi attribué à l’abbé’de Clairvaux quelques ouvrages métriques ou rythmiques. Pierre Bérenger l’accuse d’avoir composé dans sa jeunesse des chansonnettes légères. Peut-être s’agit-il de quelques essais de versification. Il ne nous en reste rien. Dans la Bibliographia Bernardina de.Ianausehek, p. xi-xiv, le nombre des poèmes faussement attribués à saint Bernard s’élève à cinquante-si’pt. Nous citerons seulement l’antienne Aima Redemptoris mater, qui est de Hermann Contract ; l’hymne Ave maris Stella ; l’antienne Ave Begpia cselorum ; e Salve Regina, qu’un moderne, le docteur Eladio Oviedo Arce, Memoria sobre et autor de la Salve, Compostelle, 1903, attribue à San Pedro de Mezonzo ; la prose Lœtabundus exultet fidelis chorus. Sur Les poèmes latins attribués à saint Bernard, par Hauréau, Paris, 1890, cf. Vacandard, Revue des questions historiques, 1er janvier 1891, p. 218 sq.

Le xv siècle ne donna pas d’édition complète des Œuvres de saint Bernard. En 1508 parut la suivante : Melliflui deeotique sa>tcti Bernardi abbatis Clarevallensis Cisterciensis ordinis opus preclarum complectens serrnones de tempore, île sanetis et super Gantica canticorum. Aliosque pluresejus serrnones et sententias nusquam hactenus impressas. Ejusdem insuper epistolas, ceteraque universa <jus opuscula, Domini quoque Gilleberti abbatis de Hoilandia m Anglia prelibati ordinis super Cantica serrnones. Omnia eecundum serietn hic inferius annotatam collocata, vigilanter et accurate super vetustissimii Clarevallis exemplaria apprime correcta. Janauschek, Bibliographia Bernardina, n. : >.">t>, p. M, donne le détail des titres. En 1513, 1515 et 1517, Jean l’eiit donna de nouvelles éditions des œuvres complètes. Ci. Janauschek, op. cit., n. 879, 886, W2. Wec la Bibliographia Bernardina de Janauschek on suit aisément la série des éditions jusqu’à celle d’Horstlus.

Mabillon, après Horstius, a donné, au xvir siècle, plusieurs éditions des ouvrages de l’abbé de i ilairvaux. La meilleure figure sous le n. 1306 de Janauschek : ^<in<ti Bernardi, abbatis primi Clarx-Vallensis, Opéra omnia cutn genuina, (uni spwia, dubia i’-. 2 ln-iol., Paris, I690,