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BENOIT XIV — BENOIT D’ANIANE


sur toutes ses églises cathédrales. Médiateur heureux entre les chevaliers de Malte et le roi de Naples, le pape lit cesser les difficultés entre Venise et l’Autriche en remplaçant le patriarcat d’Àquilée supprimé par les deux archevêchés de Gœrz (autrichien) et d’Udine (vénitien). Les relations chj Venise avec Rome n’en demeurèrent pas moins brisées ; les deux États en vinrent à une double hostilité religieuse et économique. Benoit reconnut officiellement le roi de Prusse, qualifié jusqu’alors par la curie de « margrave de Brandebourg » , et entretint avec plusieurs protestants une correspondance amicale.

Le même esprit conciliant animait Benoit XIV dans les affaires purement religieuses. Il réduisit les fêtes, devenues trop nombreuses, en Espagne (1742), en Sicile et en Toscane (1748), plus tard aussi en Sardaigne, en Autriche et dans ses propres États. Il eut à terminer l’affaire embrouillée des rites chinois et maintint les défenses portées par ses prédécesseurs ; il retira les concessions faites par le patriarche Mezzabarba et fit obliger les missionnaires par serment à la suppression des usages condamnés. La bulle Ex quo singulari qui condamnait les rites chinois (1742) eut pour suite une persécution qui fit beaucoup de victimes dans le clergé et parmi les Chinois. La bulle Omnium sollicitudinum de 1744 interdit pareillement les rites malabares. En Orient, où Benoît XIV, dès le commencement de son pontificat, avait apaisé quelques troubles parmi les maronites (1744), il eut la consolation de voir se fonder de manière durable à Antioche le patriarcat grec-uni, dit des gréco-melchites ; il donna le pallium au patriarche en 1741.

La grande piété du pape édifia les pèlerins venus à Borne pour le jubilé de 1750. Benoit XIV réprouva le relâchement en morale, les sociétés secrètes des francs-maçons (1751), certaines pratiques contraires à la bonne discipline en matière de confession et de mariage. Il demanda aux curés de célébrer la messe de certains jours à l’intention de leurs ouailles.

A la suite de l’Assemblée du clergé de France de 1755, Benoît XIV fut invoqué comme juge par l’Assemblée, dont la commission spéciale ne pouvait s’entendre sur la conduite à tenir dans l’affaire des refus de sacrements. L’archevêque de Paris, Christophe de Beaumont, avait été banni de Paris et persécuté par le parlement pour sa persévérance à interdire les derniers sacrements à tous les opposants de la bulle. Benoit XIV, par la huile Ex omnibus christiani orbis regionibus (1756), déclare que la soumission à la constitution Unigenitus était un devoir, mais qu’il ne fallait refuser les sacrements qu’aux opposants notoires pouvant être considérés comme des pécheurs publics. Sans rien décider sur les billets de confession, il ressortait de la bullequ’il n’y avait pas lieu ordinairement de demander une déclaration par écrit de soumission.

Des négociations nouées avec les schismatiques d’Utrecht ne donnèrent aucun résultat.

Benoît XIV avait peu de sympathie pour les jésuites, dont il confia la réforme, pour le Portugal, au patriarche de Lisbonne, Saldanha (1758), mais son successeur annula presque aussitôt la mesure qu’il avait prise.

Œuvres de Benoit XIV : édition du jésuite Azevedo, 12 in-4° Rome, 1747-1751 ; éditions plus complètes : 15 in-fol., Venise) 1767 ; 17 in-4° Prato, 1839-1846. Ses bulles dans l’édition des œuvres, de Prato, t. xv-xvii, et précédemment dans la Continuatio Bullarii magni, Luxembourg, 1752-1758, t. xvi-xix. Ses Lettres éditées par Kraus, Fribourg, 1884 ; Acta Benedicti XIV, coll. R. de Martinis, Naples, 1884 sq. ; Acta hist. eccl., t. I, p. 144 ; t. V, p. 1058 ; Vie du pape Benoit XIV, Paris, 1783. Les ouvrages, mentionnés pour Benoit XIII, de Sandini, t. ii, p. 716 ; de Guarnacci, t. II, p. 487 ; de Petrucelli délia Gattina, t. IV, p. 108 ; de Brosch, t. il, p. 68 ; de Sentis, p. 191 ; L. v. Ranke, Die rœmischen Pâpste, 6’édit, Leipzig, 1874, t. iii, p. 125 ; v. Arnelli, Geschichte Maria Theresias, Vienne, 1864 sq., t. II, p. 178 ;

t. iv, p. 54 ; Heigel, Der œsterreichische Erbfolgestreit, Nordlingen, 1877, p. 284.

H. Hemmer.

II. BENOIT XIV. Encyclique sur l’usure. Voir Usure.

III. BENOIT XIV. Lettres sur le baptême des infidèles. Voir XL Baptême des infidèles d’après Benoit XIV, col. 31l sq.

IV. BENOIT XIV. Propositions condamnées sur le duel. Voir Duel.

16. BENOIT D’ANIANE (Saint).- 1. Vie. II. Œuvres.

I. Vie.

Benoit Wittiza, surnommé d’Aniane, fils du comte de Maguelone, naquit en 751. Après avoir été élevé à la cour de Pépin le Bref et attaché au service de Charlemagne, il embrassa la vie monastique à Saint-Seine (774), d’où il alla sur les bords de l’Aniane (vers 780) fonder un monastère, qui devint bientôt un foyer intense de vie religieuse et intellectuelle. Il y fit revivre la règle de saint Benoit et les meilleures traditions monastiques. Grâce à son exemple, à son action personnelle et à la protection de Louis le Pieux, cette réforme s’étendit à un grand nombre de monastères de l’Aquitaine d’abord, puis de tout l’empire. Devenu empereur, Louis attira Benoit auprès de lui pour avoir ses conseils et il le chargea de la réforme de tous les monastères. Le concile d’Aix-la-Chapelle, réuni à cet effet (817), fut un grand chapitre général, dont les canons tendaient à unifier dans tous les monastères de l’empire la pratique de la règle bénédictine. Le monastère d’Aniane fut un centre d’études, pourvu d’une riche bibliothèque. Benoît d’Aniane fut l’un des premiers à découvrir et à combattre l’adoptianisme. Il contribua à le faire condamner au concile de Francfort. Charlemagne l’envoya à Urgel avec Leidrade de Lyon et Nébride de Narbonne essayer de ramener à la vérité catholique l’évêque Félix, l’un des docteurs de l’adoptianisme.

Benoît d’Aniane mourut le Il février 821, à Kornelimiïnster, monastère que l’empereur lui avait fait bâtir. Sa vie a été écrite par son disciple et successeur Ardon Smaragde († 813). Mabillon, Acta sanct. ord. S. Benedicti, scec. iv, part. I, Venise, 1735, p. 184-215 ; Vie de saint Benoit d’Aniane, traduite du latin avec notes par M. Classan, Montpellier, 1876.

II. Œuvres. — 1° Saint Benoît d’Aniane, voyant la vie monastique abandonnée dans la pratique à l’arbitraire de chacun, voulut en fixer la pratique traditionnelle. C’est dans ce but qu’il réunit le texte des règles écrites et observées jusqu’à son époque en Orient et en Occident. Ce recueil forme son Codex regularum monasticarum et canonicarum, quas SS. Patres monachis, canonicis et virginibus sanctimonialibus servandas prsescripserunt, édité par Holsten, in-4°, Rome, 1661 ; Paris, 1663 ; etreproduit par Migne, P. L., t. ciii, col. 393702. — 2° Pour augmenter aux jeux des moines l’autorité de la règle de saint Benoît et lui donner un commentaire utile, il rapprocha de chacun des chapitres de cette règle les passages de ces règles diverses qui présentaient avec lui une analogie. Cette Concordia regirfarum est par le fait un véritable commentaire de la règle bénédictine. Dom Hugues Ménard l’a publiée, d’après le ms. de Fleury, qui est du ixe siècle, en y ajoutant des notes précieuses, in-8°, Paris, 1638 ; Migne l’a rééditée, P. L., t. ciii, col. 703-1380. — 3° Deux lettres écrites par le saint à George, abbé d’Aniane, et à Nébride, archevêque de Narbonne. Ibid., col. 1739-1382. Baluze a publié sous son nom des opuscules d’une authenticité plus que douteuse. Ils ont été reproduits par Migne, P. L., t. ciii, col. 1381-1420.

Sa vie par Smaragde est reproduite P. L., t. ciii, col. 353-384 ; Histoire littéraire de la France, édit. Palmé, t. IV, p. 447-459 ; dom Ceillier, Histoire générale des auteurs ecclésiastiques, édit.