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BENOIT XII


Armenos un écrit diffamatoire de l'Église arménienne, il faudrait supposer que Iienoit XII prétendait y consigner autant d’erreurs de l'Église arménienne elle-même. Mais cette supposition est en opposition formelle avec le préambule du Libellits, où les erreurs sont attribuées aux Arméniens ou à quelques-uns d’entre eux : inventum est diclos Armenos vel aliquos e.r eis tenere, credere et docere articulos infrascriptos. L’expression Dicunt Armera, par où débutent la plupart des propositions n’a donc pas, dans la pensée du pape, un sens universel et absolu, mais un sens partitif et indéterminé. On avait dénoncé, sous la foi du serment, tonds ces erreurs comme ayant cours en Arménie ; Benoit XII demande aux évêques de les proscrire pour donner un témoignage irrécusable de leur orthodoxie et conserver la pureté de la foi dans leur Église. Si les dénonciateurs ne sont pas toujours restés dans les bornes de la vérité, de la prudence ou de la charité, ils portent eux-mêmes une double responsabilité, celle qui viendrait de pareils procédés et celle qu’ajouterait le tort qu’ils pouvaient faire ainsi à la grande cause de l’unilé religieuse.

Aspect dogmatique de la réponse.

Le pape avait

invité les évêques arméniens à proscrire les erreurs contenues dans les cent dix-sept articles ; ils le font et sont amenés par là même à émettre sur les problèmes en jeu des professions de foi explicites. Sous ce rapport, la réponse du concile de Sis est, dans ses grandes lignes, précieuse et intéressante pour l’histoire du dogme catholique.

1. Procession du Saint-Esprit, a. 1, col. 446 sq. — On lit rarement, il est vrai, dans les anciens monuments de l'Église arménienne, que le Saint-Esprit procède du Fils ; cependant ce dogme s’y rencontre parfois exprimé, comme dans une oraison pour la Pentecôte où l’on dit à cette personne divine : « Vous qui procédez inellablement du Père et du Fils, in te procedens inscrulabiliter ex Pâtre et Filio. » Ce dogme n’a pas été rejeté dans le synode de Manazkert ; il a été accepté, à des époques différentes, dans des conciles de la Grande et de la Petite-Arménie. Notre Église n’est donc pas opposée à ce dogme, bien qu’il y ait eu des contradicteurs. Cf. Galano, op. cit., part. II, t. i, p. 398 sq. ; F. Nève, L’Arménie chrétienne et sa littérature, in-8°, Louvain, 1886, p. 78 sq. ; L. Petit, art. Arménie, t. i, col. 1919.

i.Biialité des natures dans le Christ, a. 3, 35. — Le synode de Manazkert, tenu sous le catholicos Jean Otznelzi, en 719, a vraiment rejeté le concile de Chalcédoine, mais par une erreur de fait, les membres de l’ancien s^.ode arménien étant dans la fausse persuasion que ce concile favorisait le nestorianisme. Depuis lors, deux synodes tenus à Sis en 1307 et à Adana en 1316, l’un et l’autre beaucoup plus considérables que celui de Manazkert, ont pleinement accepté la doctrine des deux natures et le concile de Chalcédoine. Pour apprécier l’ancienne attitude, il faut tenir compte de l'équivoque que présente le mot nature en langue arménienne ; ce qu’on a rejeté, ce sont deux natures divisées, mais non pas deux natures unies dans l’unique personne du Verbe, a. 20, 25, 52, col. 466, 474, 495. Voir dans la réponse à l’article 21, col. 469 sq., une longue profession de foi, d’après les saints Athanasc et Grégoire de Nazianze. Cf. Galano, op. cit., t. i, p. 18 sq. ; Nève, op. cit., p. 77 ; L. Petit, loc. cit., col. 1931, 1950 sq.

3. Ame humaine, a. 5, 43, col. 452, 489. — L'Église arménienne a toujours réprouvé le traducianisme, et ail mis la création de l'âme humaine au moment même où elle est unie au corps qu’elle doit animer. Le libre arbitre est, de sa nature, exempl de nécessité, el nulle cause extérieure oe peut lui faire complètement violence. Cf. Galano, op. cit., I. il, p. 1 sq. ; T. Lamy, art.

Ame chez les Arméniens, t- i, col. 1019 sq.

i. Péché originel, a. i, 6, 13, col. 451, 453, 459. — La

croyance de l’Eglise arménienne à l’existence et aux effets du péché originel est surabondamment attestée par ses livres liturgiques et les prières qu’ils contiennent à propos du baptême. Quand il s’agit d’enfants morts sans le sacrement de la régénération, elle ne fait aucune différence entre ceux qui sont nés de parents chrétiens et les autres ; elle les exclut tous du royaume céleste et de la gloire, mais elle ne les croit pas punis de peines sensibles. Cf. Galano, op. cit., t. il, p. 497 sq.

5. Grâce et justification, a. 41, 42, col. 488 sq. — Qui a perdu la grâce peut la recouvrer dans un degré égal ou supérieur à celui qu’il possédait avant sa chute. Pas de justification sans le don de la grâce sanctifiante ; la grâce actuelle est nécessaire pour faire le bien et éviter le mal.

6. Église, a. 34, 37, 109, col. 482, 484, 532 sq. - Les Arméniens se reconnaissent en état d’inimitié avec l’Eglise grecque, mais non pas avec l’Eglise romaine, sauf la fraction schismatique qui ne veut pas l’union et persévère dans ses attaques calomnieuses et ses injustes prétentions. Il n’y a jamais eu en Arménie trois catholici. L’institution du catholicos d’Alnanc (Etschmiadsin, traduit dans le Libellas par columbarum), remonte à saint Grégoire l’Illuminateur ; l’archevêque d’Agthamar (île sur le lac de Wan, dans la Grande-Arménie) s’est illégitimement attribué le titre de catholicos et, pour ce motif, a été et reste excommunié. Tous reconnaissaient autrefois la suprématie du catholicos de la Petite-Arménie, et lui étaient unis dans la foi. La différence qu’il y a maintenant entre ce dernier et ses rivaux consiste en ce que le catholicos d’Alnanc et l’archevêque d’Agthamar s’obstinent à ne pas mettre d’eau dans le vin à la messe, à célébrer la fête de la Nativité et de l’Epiphanie le 6 janvier, à garder la formule una natura Verbi, tout en proclamant le Christ Dieu parlait et homme parfait, à rejeter le concile de Chalcédoine, à ne pas employer le terme de purgatoire et à ne pas reconnaître la primauté de l'Église romaine. Cette situation explique en partie l’impuissance où sont les évêques unis de réprimer toutes les erreurs qui circulent en Arménie.

7. Primauté papale, a. 78, 84, 91, col. 517, 520 sq., 524. — Le catholicos de la Petite-Arménie n’aspire pas à la primauté en Orient ; sa charge se borne aux Arméniens : « D’après le droit canonique et civil, les successeurs ont l’autorité de leurs prédécesseurs ; le pape, étant le successeur de l’apôtre Pierre, a donc l’autorité de Pierre, et le catholicos, étant le successeur de l’apôtre Thaddée, en a l’autorité… Nous savons par les écrits que nous possédons que, dans le premier et le second concile, les Pères de Nicée ont défini que l'Église romaine est la tête des autres Églises, et que le pontife romain l’emporte sur les autres évêques. Voilà ce que nous disons et croyons, non seulement parce que cela a été défini dans le saint concile, mais parce que c’est à Pierre que le Christ a recommandé de paître ses brebis. » Cf. Galano, op. cit., t. ii, 228 sq. ; L. Petit, loc. cit., col. 1954.

8. Sacrements en général, a. 38, 42, 67, col. 487 sq., 508sq. —L'Église arménienne, celle de Cilicie surtout, a toujours admis sans restriction les sacrements de l'Église romaine. Elle voit dans les sacrements des remèdes spirituels qui servent à notre salut, et en reconnaît la vertu sanctificatrice onsolum signant, velostendimt, sed eliam dont gratiam sanctificationis digne recipientilius. Tous les sacrements se rattachent à la tradition primitive de l'Église arménienne ; seule L’extrémeonction fait quelque difficulté, si l’on en considère la pratique, mais les évêques sont prêts à siconformer de plus en plus, sur ce point particulier, à l’usage de l'Église romaine. Cf. Galano, op. cit. t. il, p. Hfl sq.

9. Baptême et confirmation, a : 36, 59, 7(1, col. 184, 499 sq., 514 sq. — Les Arméniens orthodoxes ne nient pas la validité du baptême latin ou grec ; ils admettent