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BELLARMIN


serves aux archives secrètes du Vatican. Dans le premier, la I a, q. i-CXix, 618 p. ; dans le second, la I a II æ, q. LVcxiv, 760 p. ; dans le troisième, la II a II", q. i-lxiii, a. 1-2, 780 p. ; dans le quatrième, la suite de la II a II æ, ]. lxiii, a. 3-cxlvii, 1668 p. Bellarmin nous a fait connaître lui-même le temps qu’il passa sur chaque partie de la Somme. Autob., § 22. Dans ces commentaires, il s’attarhe constamment à l’ordre des questions et des articles de saint Thomas, mais d’après une méthode qui rappelle, dans l’ensemble, le genre du P. Grégoire de Valentia. Après avoir proposé le sujet, le professeur en entreprend par lui-même l’exposition, la preuve et la discussion. Dans la suite des articles, il passe légèrement sur ceux qui sont faciles ou purement métaphysiques, mais quand une question importante se présente, il la discute ex professo, soit en la divisant en propositions ou conclusions, soit en posant des dubia qu’il résout. Divers manuscrits, dénommés.Awno/a^’o/iesiw Summam ou Rhapsodies in D. Thomam, ne sont vraisemblablement que des copies ou des extraits des Commentant répandus par les élèves de Bellarmin ; on voit, par exemple, par le Diarium secundum du collège anglais de Douai, qu’en 1577 les professeurs de théologie y dictaient dans leurs cours les Commentaliones P. Roberti ilali, docte, breviter et perspicue elaboratas, ac non ita pridem Lovanii prælectas. T. F. Knox, Records of ihe English Catholics under the pénal Laws, Londres, 1878, t. i, p. 117, 128. Ce qu’il y a d’important dans les leçons de Louvain se retrouve, en grande partie, dans les Controverses.

2° SententiiB D. Michaélis Baii doctoris lovaniensis a duobus ponlificibus damnatre et a Robcrto Bellarmino réfutâtes. — A la Bibliothèque royale de Bruxelles, mis. 4320, fol. 144 sq. Ce manuscrit comprend quinze chapitres, où les propositions de Baius sont groupées par ordre de matière, et réfutées à l’aide de passages extraits des Commentant in Summam. J’ai utilisé ce travail dans l’article Baius, col. 64 sq.

3° De novis controversiis inter patres quosdam ex ordine preedicatorum et P. Molinam, 1597 ( ?). — Manuscrit dont deux copies existent à Borne, aux bibliothèques Corsini, Mise, cod. 1323, et Vittorio Emmanuele, mss. Gesuitici, n. 1493 (3622). C’est, à n’en point douter, YOpusculum dilucidum dont Bellarmin parle dans son autobiographie et qu’il composa, à la demande de Clément VIII, sur la censure portée, en 1596, par des frères prêcheurs contre neuf propositions extraites du livre de Molina et une autre relative à la confession par lettres. Liévin de Meyer, op. cit., t. I, p. 197 sq. Cet écrit contient un jugement motivé sur les propositions incriminées, en même temps qu’une exposition vraiment claire des points essentiels du débat : grâce efficace, science des futurs contingents, concours de Dieu avec le libre arbitre, prédestination, providence et grâce du premier homme. Je reviendrai sur cet opuscule, en parlant de la doctrine de Bellarmin.

Éditions complètes des œuvres de Bellarmin : 71n-fol., Cologne, 1617-1620 ; Paris, 161’J ; Venise, 1721-1728 ; 8 in-4° Naples, 18561862, 1872 ; 12 in-4°, Paris, 1870-1874. Pour les éditions, réimpressions et traductions des différents ouvrages, ou les livres publiés pour ou contre les Controverses et autres écrits du cardinal, voir la très riche bibliographie contenue dans la Bibliothèque de la Compagnie de Jésus, édit. C. Sommervogel, S. J., Bruxelles et Paris, 1890 sq., t. I, col. 1151-1254, avec les Addenda, p. x-xi, t. viii, col. 1797-1807.

Ct. Niceron, Mémoires pour servir à l’histoire des hommes illustres, Paris, 1715, t. xxxi, p. 2 sq. ; Ellies du Pin, Nouvelle bibliothèque des auteurs ecclésiastiques, in-4° Utrecht, 1745, t. XVII, p. 18 sq., analyse détaillée des Controverses ; Dollinger et Reusch, Die Selbstbiugraphie, beaucoup de notes utiles ; Hurler, Nomenclator literarius, 2’édit., Inspruck, 1892, t. i, p. 228-229.

III. Caractéristique, doctrine, influence de Bellarmin. — U ne s’agira ici ni des œuvres exégétiques ou

DICT. DE THÉOL. CATIIOL.

ascétiques, ni des œuvres oratoires ou pastorales, bien que toutes aient contribué pour leur part à la renommée de leur auteur ; l’étude vise le théologien dans sa physionomie propre.

I. CARACTÉRISTIQUE ET TRAITS GÉNÉRAUX.

On doit

les chercher dans le rôle apologétique du cardinal, dans son œuvre et sa méthode.

Rôle apologétique.

Prosper Lambertini, parlant

comme promoteur de la foi dans la cause du vénérable serviteur de Dieu, lui a rendu ce témoignage, qu’il a mérité le nom de marteau des hérétiques, en contondant l’erreur par ses écrits. C’est bien là ce qui parait au premier plan dans l’auteur des Controverses. Mais son rôle apologétique n’est pas tout entier dans la lutte contre l’hérésie ; Bellarmin a été encore, dans les luttes politico-religieuses auxquelles nous l’avons vu mêlé, le grand champion du siège romain et des droits inhérents à la primauté du vicaire de Jésus-Christ. Sur ce double terrain il eut un rôle de premier ordre ; amis et ennemis en conviennent. « Il est sûr, a écrit Bayle, qu’il n’y a point de jésuite qui ait fait plus d’honneur que lui à son ordre, et qu’il n’y a point d’auteur qui ait soutenu mieux que lui la cause de l’Église romaine en général, et celle du pape en particulier. Les protestants l’ont bien reconnu. » Dictionnaire historique et critique, 2e édit., Paris, 1820, t. iii, p. 261. Banke l’a proclamé « le plus grand controversiste de l’Église catholique, auquel on rend la justice de dire que nul ne mena une vie plus apostolique » . Histoire de la papauté, t. ii, p. 108. II y a là pour Bellarmin un titre d’autant plus réel à la reconnaissance des catholiques, qu’il comprit de bonne heure sa mission et s’y donna sans réserve. Il fut aidé, assurément, par ses qualités naturelles, cette riche mémoire, cette facilité à tout saisir et à tout s’approprier, cette netteté de pensée et cette clarté méthodique dans l’exposition qui se manifestèrent dès son enfance ou pendant ses études. Les circonstances l’aidèrent aussi ; son enseignement et ses prédications à Louvain, dans un milieu où l’inlluence protestante cherchait à pénétrer, furent pour lui comme une première orientalion. Mais il sut mettre à profit les dons reçus et les circonstances providentielles ; ses études de patristique l’armèrent d’une érudition remarquable pour l’époque ; la lecture des auteurs protestants le prépara encore plus directement à son rôle futur. Et quand il monta dans sa chaire de controverse au Collège romain, il fut à sa place et dans sa vocation. Enfin une idée apostolique le guida dans la publication de ses Disputationes ; il comprit qu’il fallait multiplier les livres pour la défense de la vraie foi : llla prima ratio me movit, dit-il dans l’avis au lecteur, quod non solumnon obesse, sedetiam prodesse censeam ecclesiasticse caussee, si plurimi hoc tempore scribant. La publication venait, du reste, à son heure.

2° L’œuvre et la méthode. — Beaucoup de doctes travaux avaient paru sur les points controversés en matière de religion, mais des travaux de détail, isolés et éparpillés dans un grand nombre d’ouvrages ; Bellarmin jugea qu’il serait grandement utile de les réunir en un seul corps. On a vu comment il réalisa ce plan. L’idée apologétique se retrouve dans l’application, comme elle fut au début ; partout, à côté des données traditionnelles, l’adaptation aux besoins du temps. Ainsi paraissent, dans le traité De verbo Dei, la canonicité des Livres saints, l’authenticité de la Vulgate, l’interprétation des divines Écritures qui ne pourrait être laissée à l’examen privé, mais relève de l’Église, de son magistère vivant, l’existence enfin et la nécessité de la tradition. De même, dans les autres traités ; rien n’échappe au controversiste de ce que l’hétérodoxie d’alors avait avancé contre la personne du Christ, ses attributs et son rôle de médiateur, ou contre l’Église catholique, son chef, ses membres, ses usages, sou culte, ses sacrements, sa doctrine sur

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