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BELLARMIN

nal BeUarmino, in-S Rome, 1678, p. 361. Ce mémoire n’est pas à proprement parler une biographie, mais plutôt une série de notes ou de récits qui se succèdent dans un ordre chronologique et portent en général sur des événements extérieurs déjà connus, mais qu’il importait de préciser. Document d’ailleurs plein de simplicité et de candeur où, suivant une remarque faite au cours du procès de béatification, l’auteur « a fait entrer non seulement les choses importantes et graves, mais encore des détails personnels et des anecdotes où la note joyeuse et plaisante a sa part, comme c’est l’usage entre amis » . I’osilio super dubio an constet de virtutibus, Rome, 1712, document F, Nova informatio, p. 4. Apprécié d’un point de vue faux, parfois même pharisaïque, cet écrit est devenu, aux yeux des adversaires du cardinal jésuite, la pierre de scandale et, dans leurs mains, l’arme offensive par excellence.

Comme membre du Saint-Office, Rellarmin fut mêlé à une affaire des plus brûlantes, le premier procès de Galilée. Il avait suivi avec intérêt les découvertes de ce savant ; on en a la preuve dans une consultation qu’il adressa, le 19 avril 1611, aux mathématiciens du Collège romain, plusieurs lettres écrites à Galilée et l’hommage que celui-ci fit au cardinal, en août 1612, de son discours sur les corps llottants. Galilei, Opère, in-8°, Florence, 1851, t. viii, p. 160, 216, 384. Une lettre écrite le 12 avril 1615 au P. Foscarini, carme, qui lui avait adressé une apologie du système de Copernic, nous renseigne exactement sur la pensée de Rellarmin. Il ne pouvait croire qu’il fût question de proscrire le système, mais il estimait qu’il fallait, en le proposant, se contenter « de parler ex suppositione, et non d’une manière absolue » ; autrement, ce serait « courir grand risque, non seulement d’irriter les philosophes et les théologiens scolastiques, mais de nuire à notre sainte foi, en accusant l'Écriture d’erreur… S’il était vraiment démontré que le soleil est au centre du monde, et la terre dans le troisième ciel, que le soleil ne tourne pas autour de la terre, mais la terre autour du soleil, il faudrait apporter beaucoup de circonspection dans les passages de l’Ecriture qui paraissent contraires, et dire que nous ne les comprenons pas, plutôt que de déclarer faux ce qui est démontré. Mais, pour croire à une telle démonstration, j’attends qu’on me la présente » . Le cardinal ajoute même qu’il doute fort qu’on puisse faire cette démonstration, et conclut : « Or, dans le cas de doute, on ne doit pas abandonner l’interprétation de l'Écriture donnée par les saints Pères. » D. Rerti, Copernicoe le vicetide dcl sistevia copernicano in Italia…, in-8°, Rome, 1876, p. 121 sq. Quand Galilée se rendit à Rome, en décembre 1615, Rellarmin l’accueillit avec beaucoup de bienveillance. L’affaire avait été déférée au Saint-Office ; le 24 février 1616, les théologiens consulteurs de cette congrégation qualifièrent d’absurde en philosophie, et d’hérétique ou du moins erronée en théologie, ces deux propositions : Sol est centrum mundi, et omnino immobilis motu locali. Terra non est centrum mundi nec immobilis, sed secundum se totam movetur, eliani molu diurno. H. de l’Fpinois, Les pièces du procès de Galilée, in-8°, Paris, 1877, p. 38 sq. Bellarmin fut chargé par le pape de notifier ce jugement à l’intéressé ; ce qu’il exécuta, deux jours après, dans sa propre demeure. Le 3 mars, il lit un rapport à la Congrégation sur l’accomplissement de son mandat et la soumission de Galilée. Les adversaires de Celui-ci firent bientôt courir le bruit qu’il avait été forcé' d’abjurer ses idées et d’accepter une pénitence ; le cardinal rétablit les faits par cette attestation donnée par écrit le 26 mai : « Galilée n’a abjuré entre nos mains, ni entre celles de nul autre à Rome ou ailleurs que nous sachions, aucune de ses opinions et doctrines ; il n’a pas non plus reçu de pénitence salutaire ; on lui a seulement dénoncé la déclaration, faite pur le pape et

publiée par la Congrégation de l’Index, où il est dit que la doctrine attribuée à Copernic, que la terre tourne autour du soleil et que le soleil reste au centre du monde sans se mouvoir d’orient en occident, est contraire à la sainte Écriture et ne peut en conséquence ni se défendre, ni se soutenir. » H. de l’Epinois, op. cit., p. 72. Telle fut lu part prise par le cardinal Bellarmin au premier procès de Galilée ; cela ne suffit pus pour qu’on puisse voir en lui l'âme de toute cette affaire, der geistige Urheber, comme a dit Reusch, Der Process Galilei' s und die Jesuiten, in-8°, Bonn, 1879, p. 125.

Ni les années, ni les infirmités n’affaiblissaient l’ardeur du vaiilani athlète. De 1615 à 1620, il composa les divers écrits ascétiques dont le détail sera donné plus loin. En 1616, il prêta son concours ù suint François de Sales, l’un de ses grands admirateurs, pour obtenir l’approbation de l’ordre de la Visitation. Œuvres complètes de saint François de Sales, édit. Peltier, in-8°, Paris, 1875, t. VI, p. 372, 391. Il ne fut pas étranger aux mesures prises, en 1616 et en 1617, par le pape Paul V en faveur de la doctrine de l’immuculée conception. Lui-même eut l’occasion de dire toute sa pensée sur ce sujet dans une réunion du Saint-Office, tenue, en présence du souverain pontife, le 31 août 1617 : « A mon avis, dit-il, on peut définir que la doctrine d’après laquelle la très sainte Vierge a été conçue sans péché, doit être acceptée par tous les fidèles comme pieuse et sainte, de sorte qu’il ne soit plus permis de soutenir ni d’adopter le sentiment contraire sans témérité ni scandale et sans être suspect d’hérésie. » Il justifia ensuite son avis et répondit aux principales objections. « Si l’on ne veut pas, conclut-il, en venir maintenant ù une définition formelle, il faudrait du moins imposer à tous les ecclésiastiques, séculiers et réguliers, le précepte de réciter l’office de la conception, comme l'Église le récite. De la sorte on arriverait au but sans définition. » Idée qui, par la suite, fut réalisée. H. Maracci, Purpura mariana, c. xv, § 7, rééditée dans Summa aurea de laudibus B. V. M., édit. Rourassé, Paris, 1862, t. x, col. 1340 ; J. Perrone, De immaculato B. V. M. conceptu, an dogmalico decrelo definiri possil, disquisitio tlieologica, in-8°, Rome, 1847, p. 174 ; C. Passaglia, De immaculalo Deiparxsempervirginis conceptucommentarius, in-îo., Rome, 1855, p. 1908, note 5. En 1621, le cardinal prit part au conclave, qui, le 9 février, élut Grégoire XV. Comme ce pontife lui témoignait la plus entière confiunce, il en profita pour rendre à l’Eglise un éminent service, en suggérant d’utiles mesures tendant à réformer les abus qui se produisaient trop facilement dans l'élection des papes ; l'élection se ferait désormais en conclave fermé et, en principe, par les suffrages secrets des deux tiers des cardinaux présents. La constitution de Grégoire XV, réglant le cérémonial qui est encore en vigueur, parut le 15 novembre 1621, quelques semaines seulement après la mort du serviteur de Dieu. Voir Couderc, op. cit., t. II, p. 305 sq.

Après de longues instunces, Bellarmin avait enfin obtenu, au mois d’août de la même année, la faveur de résigner toutes ses fonctions, sauf la cause du bienheureux Philippe de Néri dont il voulut s’occuper encore, par affection pour ce saint et par attachement à la mémoire du cardinal Baronius. Il se retira au noviciat de Saint-André, pour s’y préparer ù la mort ; depuis longtemps il avait fait ses dernières recommandations dans un testament plein de piété et d’humilité. Atteint mortellement à la fin du mois, le cardinal ne songea plus qu’au ciel ; on a l’impression d’assister à la mort d’un saint en lisant ses derniers jours, racontés en détail dans une sorte de bulletin quotidien qui figure dans V Informatio de 1749, p. 377 sq. Visité' par le pape Grégoire XV, il témoigna de son respect pour le vicaire du Christ en répétant les paroles du centurion. Il mourut, âgé de près de quatre-vingts ans, le 17 septembre, en