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BELLARMIX

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gnage do Bellarmin se trouve corroboré par celui d’Ange Rocca. secrétaire de la commission chargée de préparer l’édition de la Vulgate. Voir F. Prat, La Bible de Sixte-Quint, dans les Etudes religieuses, septembre 1890, p. 47 sq. ; Couderc, op. cit., 1. II, c. XV, Et sur l’autre chef, la difficulté n’a-t-elle pas été grossie et exagérée à plaisir’.' Sans doute, dans ce document strictement privé qu’était l’autobiographie, Bellarmin parle plus librement que dans la préface officielle d’une Bible destinée à la plus grande publicité ; mais cette différence de langage, dans des écrits d’un caractère si différent, se comprend fort bien, sans qu’il soit nécessaire d’incriminer l’écrivain ; c’est ce qui a été longuement établi dans les débats soulevés à ce sujet au procès de béatification. L’expression même de la préface, prseli vitium, ne serait-elle pas susceptible d’un sens plus large que l’expression française de « fautes d’impression » ? Positio super dubio an constet de virtutibus theologalibus, part. III, c. i, § S, in-fol., Borne, 1749. En tout cas, il n’y a dans un tel langage qu’une réticence parfaitement motivée et digne de louange, comme l’a remarqué le cardinal Cavalchini dans sa Relatio, in-4°, Borne, 1753, p. 178 ; car c’est un langage dicté par la réserve et la charité, ut nimirum modestiore, quoad posset, minusque invidiosa loquendi formula uteretur, ubi nécessitas non ex poscebat aperlius ac liberius loqui.

6° Emplois et travaux divers ; V élévation au cardinalat, 1593-1599. — Après son retour de France, Bellarmin avait repris au Collège romain la charge de père spirituel, qui lui avait été confiée en 1588, quand il eut terminé son cours de controverse. C’est dans cet office qu’il eut le bonheur de diriger et d’assister à sa mort, dans la nuit du 20 au 21 juin 1591, saint Louis de Gonzague. Plus tard, il rendit à son illustre pénitent les plus précieux témoignages ; d’abord, dans une lettre adressée au P. Cipari le 17 octobre 1601, et qu’on trouve citée dans presque toutes les histoires du saint patron de la jeunesse ; puis, dans un panégyrique prononcé en 1608 dans l’église du Collège romain, au jour anniversaire de la mort de Louis ; surtout, dans la S. C. des Bites, où son zèle et son autorité furent d’un grand poids pour promouvoir la cause de béatification. Autob., appendice. En 1618, il eut enfin le bonheur de vénérer sur les autels son illustre pénitent.

Bientôt commença pour Bellarmin l’élévation aux plus hautes charges dans la Compagnie de Jésus, puis à la cour pontificale. Nommé recteur du Collège romain en décembre 1592, il assista l’année suivante, comme député, à la cinquième congrégation générale de son ordre. Choisi en premier lieu pour faire partie de la commission chargée de mettre la dernière main au Ratio studiorum, il proposa plusieurs règles fort sages qui furent approuvées à l’unanimité, en particulier celle qui prescrit aux professeurs jésuites d’avoir saint Thomas pour maître en théologie scolastique. Provincial de Naples, en 1595, il montra dans l’exercice de sa charge une prudence, une douceur, un ensemble de vertus qui lui méritèrent cet éloge du bienheureux Bernardin Réalino : « C’est véritablement un grand saint. » Mais, au début de l’année 1597, il fut rappelé à Borne ; le cardinal Tolet, théologien du pape, venait de mourir et, sur le conseil de Baronius, Clément VIII lui destinait pour successeur celui que Sixte-Ouint avait jadis donné pour théologien au cardinal Gaétani. En même temps, il le nommait consulteur du Saint-Office ; il joignit ensuite à cette fonction celle d’examinateur des évéques. Bellarmin, de son côté, n’oubliait pas sa mission d’écrivain. Outre la publication, en 1597, du dernier tome de ses Controverses, il composa plusieurs ouvrages : en 1596, la Réfutation d’un libelle sur le culte des saints ; au début de 1597, sa Doctrine chrétienne, et, l’année suivante, l’Exposition jilus complète de lu doctrine chrétienne, en d’autres termes, son petit et son grand catéchisme ;

en 1599, un traité Sur les indulgences et le jubilé, un autre Sur l’exemption des clercs, enfin la Courte apologie de son travail contre le livre de la Concorde. L’hymne Pater superni luminis, insérée au bréviaire romain dans l’office de sainte Marie-Madeleine, date plus ou moins de la même époque ; elle fut composée à Frascati dans une sorte de joute poétique provoquée par Clément VIII entre son théologien et le cardinal Antoniani.

Bellarmin venait d’être nommé recteur de la Pénitencerie, quand, le 3 mars 1599, le pape le créa subitement cardinal, en lui enjoignant sous peine de faute grave de s’abstenir de toute résistance. Dans le consistoire, Clément justifia son choix en des termes fort honorables pour l’élu : « Celui-ci, dit-il, nous l’avons choisi, parce que l’Église de Dieu n’a pas son pareil pour la doctrine, et qu’il est le neveu d’un excellent et très saint pontife. Hune eligimus, quia Ecclesia Dei non Itabet parem in doclriua, et est neposoptimi et sanctissimi pontificis. » Bellarmin reçut le titre cardinalice de Sainte-Marie in via ; il l’échangea plus tard contre celui de Sainte-Praxède, par un sentiment de dévotion envers saint Charles Borromée qui avait eu ce dernier titre. Il fut nommé membre du Saint-Office, des Rites sacrés, de l’Index et de deux autres Congrégations nouvellement instituées, l’une pour la réforme du bréviaire romain, l’autre pour l’examen du mariage du roi Henri IV. Bientôt il eut la joie et l’honneur de faire réhabiliter un innocent, calomnié par ceux qu’il avait voulu réformer Jean de la Barrière, abbé de Feuillant dans l’ancien diocèse de Rieux. Couderc, op. cit., t. I, p. 285 sq.

L’élévation de Bellarmin ne diminua en rien sa ferveur ni ses habitudes de vie simple et austère ; on en peut juger par les résolutions qu’il prit alors et qu’il observa fidèlement, de ne rien changer au genre de vie qu’il avait eu dans son ordre, de ne point thésauriser ni d’enrichir ses proches, de ne rien solliciter du pape en dehors de ce qui lui serait attribué et de ne pas accepter de présents de la part des princes. Autob., § 38 ; cf. Epist. famil., XIV, XVIII, Cix, et lettre du 16 juillet 1599, dans Couderc, op. cit., t. I, p. 276 sq. Conseiller écouté de Clément VIII, il fit preuve d’une noble franchise et ne recula jamais devant la crainte de déplaire, quand il crut devoir déconseiller des mesures préjudiciables ou signaler des réformes urgentes ; ainsi dissuada-t-il le pape de fonder, au collège de la Sapience, une chaire pour enseigner la philosophie de Platon, en montrant les inconvénients de ce projet ; ainsi surtout, dans un mémorial resté célèbre, De rébus reformandis, exposa-t-il nettement les abus qu’il avait remarqués dans le gouvernement de l’Eglise et de l’état ecclésiastique. C’est l’écrit qui se trouve, avec les humbles et édifiantes réponses du pape, à la fin des EpisloLv familiares, sous ce titre : Clemeyiti VI II P. R. De of/icio primario summi pontificis, et cjusdem pontificis responsioncs. Bientôt les circonstances allaient mettre plus délicatement à l’épreuve la franchise du cardinal.

7° Congrégation De auxiliis ; Bellarmin à Capoue, 1600-1605. — La publication du livre de Molina sur la Concorde du libre arbitre arec les dons de la grâce, en 1588, avait donné le signal de la grande controverse, dite De auxiliis. Bellarmin, alors professeur au Collège romain, avait pris position dans le débat ; tout en faisant sur des points de détail les réserves qu’on verra plus loin, il s’était franchement rallié à la science moyenne, dont Molina faisait en quelque sorte le pivot de son système sur la prédestination et sur la nature de la grâce efficace ; par contre, il s’était fortement prononcé contre la prédétermination physique, soutenue par Bafiez. Au fort de la mêlée, il rédigea, sur le désir de Clément VIII, un mémoire très net, opuseuliim dilucidum, qui plut d’abord beaucoup au pape ; il y faisait voir en quoi consistait toute la controverse, et comment l’opinion des