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BELLARMIN

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ses études de théologie ; il y passa deux ans, ayant pour maîtres un dominicain et un jésuite. Dans un acte public qu’il soutint à Gènes, il lit preuve des mêmes qualités et obtint les mêmes succès qu’au Collège romain.

2° Sermons et Irions de Louvaln, 1569-1076. — L’hérésie menaçait alors les provinces de Flandre ; on demandait à Louvain un prédicateur qui pût tenir tête. Dans les divers endroits où il avait passé, Bellarmin s'était signalé par ses succès oratoires ; il fut désigné par le général de la Compagnie de Jésus, saint François de Borgia, mais il devait en même temps continuer, pendant un an, ses études de théologie. Il partit de Rome au printemps de 1569, et fit route avec le célèbre William Allen, plus tard cardinal. A Louvain, le nouveau prédicateur obtint un succès remarquable, et par le nombre des auditeurs qui se pressaient autour de sa chaire à l'église Saint-Michel, et par les fruits de grâce ou de conversion qui s’ensuivirent parmi les étudiants, le peuple et même les hérétiques. Voir la lettre d’un témoin, Thomas Sailly, dans Y Annuaire de l’université catholique de Louvain, 1841, p. 169 sq. Au ministère de la prédication s’en joignit bientôt un autre, non moins important. Ordonné prêtre à Gand, par l'évêquede cette ville, Corneille Janssens, le 25 mars 1570, Bellarmin inaugura, au mois d’octobre suivant, l’enseignement public de la théologie au collège des jésuites. Il remplit cet office jusqu’en 1576, prenant pour texte de ses leçons la Somme théologique de saint Thomas d’Aquiu. En même temps, il composa pour ses élèves ou pour son usage personnel deux ouvrages d’inégale importance : une grammaire hébraïque, imprimée peu de temps après son retour à Rome, et une sorte de patrologie, publiée en 1613, sous le titre De scriptoribus ecclesiasticis. Au lob., S 23 et appendice.

Comme prolesseur de théologie, le futur controversiste eut à lutter contre un adversaire de marque, Michel Baius, dont les erreurs, condamnées par saint Pie V, le 1 er octobre 1567, n’en continuaient pas moins d’exercer une pernicieuse influence à Louvain. Lutte courtoise et qui n’eut d’autre objet que les vérités en jeu ; sans nommer jamais son adversaire, le jeune professeur profilait des occasions que son cours lui offrait naturellement, pour réfuter les erreurs baianistes. De retour à Rome, il ne cessa pas de suivre cette affaire avec la plus grande attention ; on en peut juger par le rapport, intéressant et instructif, qu’il composa en 1579 et qui se trouve dans la continuation des Annales de Raynaldi par Ladercbi. Annales ecclesiastivi ab anno 1566, Rome, 1728, t. xxii, p. 366 ; t. xxiv, p. 183 sq. Bellarmin n’en resta pas moins en bons termes avec l’université de Louvain. Lorsqu’en 1600, celle-ci eut à défendre ses privilèges en cour de Rome, il y eut échange de lettres et d’aimables procédés entre les docteurs lovanistes et l’ancien adversaire de Daius, devenu cardinal inlluent. Annuaire de l’université, 184-1, p. 164 sq. La correspondance imprimée de Bellarmin contient même une lettre amicale, adressée en 1606 au fameux Jacques .lanson. Venerabilis servi Dei Roberti Bellarmini S. R. E. cardinalise Soc. Jesu epistolse familiares, epist. xi.vn, in-12, Borne, 1650. Plus tard, quand on traita en cour de Rome de la béatification du vénérable serviteur de Dieu, une requête favorable fut adressée au saint-siège, en 1713, par le vicaire capitulaire de l’archevêché de Malines. Annuaire de l’université, 181l, p. 172.

3° Cours <lf controverse au Collège romain, 1570-1588.

— Les troubles excités en Flandre par l’invasion du prince d’Orange, Guillaume le Taciturne, avaient été pour Bellarmin l’occasion de grandes souffrances et de graves dangers. Autob., S 21 sq. Sa santé, toujours chétive, s’affaiblit tellement que, la dernière année de son séjour dans l’Athènes brabançonne, il dut renoncer à lu prédication ut se borner au travail de l’enseigne ment. Mais, comme ses forces ne cessaient de décliner, en 1576, le P. Everard Mercurian, quatrième général de la Compagnie de Jésus, le rappela en Italie. Des demandes vinrent de divers cotés : à Paris, on offrait au P. Robert les chaires les plus considérables ; à Milan, saint Charles Borromée le désirait pour prédicateur de sa cathédrale. Le P. Mercurian avait d’autres vues ; il se proposait de créer au Collège romain une chaire de controverse, dont les leçons s’adresseraient surtout aux jeunes gens du Collège germanique et du Collège anglais. Grégoire XIII bénit ce projet, et Bellarmin tut désigné pour occuper la chaire. A la fin d’octobre s’ouvrit le célèbre cours, d’où sortit le principal ouvrage du grand controversiste : Disputationes de conlroversiis christianæ jidei adversus hujus temporis fisereticos. Dès le début, le nouveau professeur se fit admirer par sa méthode claire et compréhensive, son érudition, la franchise et la dignité de sa polémique. Aussi l’enseignement d’abord, puis la publication de ce cours de controverses, eurent, chez les protestants comme chez les catholiques, un immense retentissement. Bellarmin se trouva dès lors au premier rang parmi les champions de l'Église romaine, mais il eut surtout la joie d'être l’instrument de nombreuses et insignes conversions ; les Epistolse familiares nous en font connaître quelques-unes. Epist.

XI, XLVI, LXI, CVH, CL.

D’autres travaux s’ajoutèrent à l’enseignement pendant cette période d’intense activité. Pendant ses vacances, du mois de mai au mois d’octobre 1579 ou 1580, le P. Bobert revisa à Naples les quatre premiers livres des commentaires de Salmeron sur l'Écriture sainte et lui suggéra beaucoup de corrections. Autob., appendice. Les circonstances l’amenèrent ensuite à publier divers ouvrages de polémique : en 1581, l'écrit Sur la translation de l’empire romain des Grecs aux Francs ; en 1585, le Jugement du livre de la Concorde, augmenté plus tard d’une Courte apologie ; en 1586, sous le nom de François-Bomulus, la Réponse aux principaux arguments d’une apologie, faussement intitulée catholique, en faveur du droit de succession d’Henri de Navarre au trône de France. Enfin, un livre anonyme, paru à Monaco en 1586 et dirigé contre le pape Sixte V, à l’occasion de la bulle qu’il avait lancée contre Henri de Navarre le 9 septembre 1585, donna lieu à la Réponse au livre anonyme qui a pour litre : Aviso piacevole dalo alla bella Italia. Vers la même époque, Bellarmin se trouva mêlé, comme censeur et comme apologiste, à la controverse survenue à Louvain entre la faculté de théologie et deux professeurs jésuites, Léonard Leys ou Lessius et Jean Duhamel. La faculté avait censuré, en septembre 1587, trente-quatre propositions, dont trois se rapportaient à l'Écriture sainte, et le reste aux matières brûlantes de la grâce et de la prédestination. Sans endosser personnellement toutes les opinions des professeurs incriminés, Bellarmin émit sur la censurede Louvain un jugement motivé, où il en dénonça le côté arbitraire et excessif ; il composa en même temps, pour la défense de Lessius, un petit traité dont il sera question dans la seconde partie de cette étude.

La considération dont le P. Bobert jouissait à Rome avait depuis longtemps porté le pape et les cardinaux à s’aider de ses lumières et de son concours. Il fut l’auxiliaire du cardinal Montalto dans l'édition des œuvres de saint Ambroise que le futur Sixte-Quint entreprit en 1580. Il travailla, dit-on, avec d’autres savants à l'édition du Rituale, imprimée à Rome sous Grégoire XIII, en 1581. Son nom figure enfin parmi ceux des consulteurs que le même pape adjoignit à la congrégation précédemment instituée par Pie IV pour la revision de la Vulgate, et i|ui, en guise de travail préliminaire, édita en 1587 l’Ancien Testament d’après les Septante. Mais bientôt une mission extérieure écarta momentanément de Rouie le P, Bellarmiu.