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BAUSSET — BAUTAIN


    1. BAUSSET (Louis-François de)##


BAUSSET (Louis-François de), né le 14 décembre 1748 à Pondichéry où son père, le marquis de Bausset, occupait une haute position administrative. Il vint étudier en France, d’abord chez les jésuites, au collège de La Flèche, puis à Saint-Sulpice. Après son ordination sacerdotale, il devint vicaire général de M. de Boisgelin, archevêque d’Aix, ensuite administrateur du diocèse de Digne, en 1778, enfin évêque d’Alais en 1784. Il assista à plusieurs assemblées des notables, mais ne fut pas député aux États généraux. En 1791, après avoir donné son adhésion à l’Exposition des principes sur la constitution civile du clergé, rédigée par M. de Boisgelin et présentée par les évéques de l’Assemblée constituante, il émigra en Suisse. Bevenu à Paris en 1792, il est arrêté et reste en prison jusqu'à la chute de Bobespierre. Après le 9 thermidor, il se retire à Villemoisson, près de Longjumeau, et publie quelques écrits de circonstance : des Réflexions sur la déclaration exigée desministres du eu lie par la loi du 7 vendémiaire an IV, in-8°, Paris, 1796 ; un Exposé des principes sur le serment de liberté et d'égalité et sur la déclaration exigée des ministres du culte par la loi du 7 vendémiaire an IV, in-8°, Paris, 1796, avec un avertissement de M. Émery. A l'époque du Concordat, il se démit sans difficulté de son évêché d’Alais. Cédant aux instances de son ami M. Émery, il publia en 1808, son Histoire de Fénelon, d’après les documents originaux, mis à sa disposition par M. Emery lui-même qui s’en était rendu acquéreur, 3 vol., Versailles ; 4 in-12, Paris, 1823 ; édit. Migne, in-4°, 1862. Encouragé par le succès de cet ouvrage qui reçut en 1810 le second grand prix décennal, décerné par l’Institut aux meilleures biographies, il publia en 1814 son Histoire de J.-B. Bossuet, évêque de Meaux, composée d’après les manuscrits originaux, 4 in-8°, Paris, 1814, 1819 ; Versailles, 1821 ; Besançon, 1847. Napoléon l’avait nommé en 1808 membre du conseil de l’université ; Louis XVIII lui donna la présidence de ce conseil et le combla d’honneurs et de dignités ; il obtint pour lui en 1817 le chapeau de cardinal.

Ce n’est pas le lieu d’apprécier la valeur littéraire ou le mérite historique des deux grands ouvrages du cardinal de Bausset ; au point de vue théologique, il convient de noter ses sympathies non suspectes pour les idées gallicanes de Bossuet. Le VIe livre de son Histoire de Bossuet est consacré à l’assemblée de 1682 ; il y déclare dès le début que cette date est « la plus mémorable de l’histoire « le l'Église gallicane ; c’est celle où elle a jeté son plus vif éclat ; les principes qu’elle a consacrés ont mis le sceau à cette longue suite de services que l'Église de France a rendus à la France » . Ailleurs, il célèbre la fameuse déclaration comme « un des plus beaux titres de la gloire de Bossuet et de l'Église dé France » . Il en donne le texte complet, estimant « qu’elle doit être inscrite dans sa vie comme le plus beau monument de son histoire » .

On doit encore au cardinal de Bausset une Notice liisliirtt/ue sur le cardinal de lloisgelin, in-12, Paris, 1804 ; une Notice historique sur l’abbé Legris-Duval, in-8 ii, l’aris, 1820 ; une Notice historique sur S. É. Mgr de Talleyrand, archevêque île l’aris, in-8 ii, Paris, 1821. Il se proposait encore de donner une histoire du cardinal de Fleury ; mais la maladie le força de renoncer à son projet. Il mourut le 21 juillet 1824.

Ami de lu religion, année 1824 ; Notice historique sur le eu dmal de Hausse !, in-8 Marseille, 1824 ; de Quélen, Discours

de réception « l’Académie française sur le cardinal Huasse !  ;

Ilil.i, Nouvelle l/ioi/ruplue iieneiale, l’aris, fséit ; l’Vller, limfraphie universelle. Lichtenberger, Encyclopédie des sciences religieuses, l’aris, is~7, t. u.

V. Oblet.

    1. BAUTAIN Louis Eugène-Marie##


BAUTAIN Louis Eugène-Marie, né' à Paris le 17 février 1796, d’une famille très chrétienne, entra a 18 ans à ILcole normale, où il se lia d’amitié avec Jouffrov et

Pamiron. Trois ans après, il était nommé professeur de philosophie au collège royal de Strasbourg, et peu après à la faculté des lettres, où il enseigna avec un grand succès. La foi et la piété de sa première enfance avaient subi une éclipse assez forte, et il fallut des circonstances providentielles pour le ramener aux pratiques religieuses. Mais sa conversion fut solide, et il voulut se donner à Dieu d’une taçon encore plus complète en recevant le sacerdoce, sans cesser d’ailleurs ses études philosophiques. Esprit fin et pénétrant, d’une grande puissance de travail et jouissant déjà d’une réputation méritée, il aurait pu rendre des services éminents à la science catholique, si sa philosophie avait été' plus sûre. Malheureusement, elle était imprégnée de cette erreur dangereuse qu’on a appelée le fidéisme, parce qu’elle attribue à la foi seule le pouvoir de nous donner une vraie certitude des principes de la raison. L'évêque de Strasbourg, Mst r de Trévern, après lui avoir retiré la direction de son grand séminaire qu’il lui avait confiée, s'émut du danger qu’offrait l’enseignement de l’abbé Bautain, et l’invita à répondre par écrit à six questions très précises qu’il lui posait sur la valeur de la raison humaine relativement à la démonstration des préambules de la foi et des motifs de crédibilité concernant la révélation. Les réponses du professeur ne furent pas satisfaisantes, et l'évêque se vit obligé de le condamner le 15 septembre 1834, dans un Avertissement adressé à son clergé et communiqué à Borne ainsi qu'à tout l'épiscopat français. Un bref pontifical du 20 décembre approuva la conduite de l'évêque. Quelque temps après, grâce à l’intervention de Ma r Donnet, coadjuteur de l'évêque de Nancy, l’abbé Bautain signait avec empressement, le 18 novembre 1835, les six propositions suivantes, qui expriment bien la doctrine catholique.

1° Le raisonnement peut prouver avec certitude l’existence de Dieu. — La foi, don du ciel, est postérieure à la révélation ; elle ne peut donc pas être alléguée vis-à-vis d’un athée en preuve do l’existence de Dieu.

2' La révélation mosaïque se prouve avec certitude par la tradition orale et écrite de la synagogue et du christianisme.

3° La preuve de la révélation chrétienne tirée des miracles de Jésus-Christ, sensible et frappante pour les témoins oculaires, n’a point perdu sa force et son éclat vis-à-vis des générations subséquentes. Nous trouvons cette preuve dans la tradition orale et écrite de tous les chrétiens. C’est par cette double tradition que nous devons la démontrer à ceux qui la rejettent.ou qui, sans /admettre encore, la désirent.

4° un n’a pas le droit d’attendre d’un incrédule qu’il admette la résurrection de notre divin Sauveur, avant de lui en a"ir administré des preuves certaines, et ces preuves sont déduites de la même tradition parle raisonnement.

5° L’usage de la raison précède la foi, et y conduit l’homme par la révélation et la grâce.

6* La raison peut prouver avec certitude l’authenticité de la révélation laite aux Juifs par Moïse et aux chrétiens par Jésus-Christ.

L’affaire paraissait terminée, lorsque des malentendus regrettables renouvelèrent le différend. L’abbé Hautain, se voyant menacé d’une condamnation générale de tous ses ouvrages, se décida, sur le conseil du P. Lacordaire, à faire le voyage de Borne et à soumettre ses écrits au saint-siège. Le pape Grégoire XVI fit examiner par le cardinal Mezzofanti et le P. Perrone le principal ouvrage incriminé' de l’abbé Bautain, la Philosophie du christianisme. L’examen traîna en longueur ; et, par égard pour un prêtre aussi méritant, il fut décidé qu’on lui signalerait simplement les propositions qui demandaient à èlro corrigées ou modifiées, mais que le livre lui-même ne serait pas condamné. Sur ces entrefaites, l'évêque de Strasbourg ayant pris un coadjuteur, Mo r Rsess, celui-ci termina le différend, en obtenant de l’abbé Bautain qu’il souscrivit à nouveau, le 8 septembre 18M), les six propositions de 1835, avec quelques légères modifications que nous indiquons en italiques :

1- Le raisonnement peut prouver avec certitude l’existence do Dieu ci l’infinité de ses perfections, etc.