Page:Alfred Vacant - Dictionnaire de théologie catholique, 1908, Tome 2.djvu/206

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
403
404
BAR HÉBRÆUS

Ṭegraṭ ṭégroṭo, ou résumé de logique, de physique et de théologie, ouvrage non publié encore dont il existe des manuscrits à Florence, à Berlin (Sachau 211), à Londres (Or. 4080), à Paris (syr. 330).

ii. ouvrages théologiques. — 1o  Théologie dogmatique. — Bar Hébræus a écrit un ouvrage intitulé Le candélabre des sanctuaires, Menoraṭ qûdšé, dans lequel il expose les bases, ou principes, sur lesquels l’Église est fondée. Il n’est pas encore publié, pas plus que le Livre des rayons, Kṭaba dezalgé, qui en est une sorte d’abrégé, mais de nombreux manuscrits de ces ouvrages existent à Rome, Paris, Londres, Berlin, Cambridge, etc.

Les bases sur lesquelles l’Église est fondée sont la science en général, la nature de l’univers, la théologie (De Deo uno et trino), l’incarnation, les anges, le sacerdoce, les démons, l’âme intellectuelle, le libre arbitre, la résurrection, le jugement dernier, le paradis d’Éden.

La partie consacrée à l’incarnation expose la doctrine monophysite telle que la comprend Bar Hébræus. Elle est divisée en six chapitres : 1. possibilité de l’incarnation ; 2. du principe de l’unité de N.-S. le Messie ; 3. caractère de l’incarnation de Dieu le Verbe d’après la tradition et réponse aux objections ; 4. qu’il y avait en Notre-Seigneur unité de nature et de personne et pas seulement de volonté ; 5. que la sainte Église des jacobites confesse une nature provenant de deux natures, les marques distinctives de chaque nature étant conservées, et sans mélanger les deux natures ensemble ; 6. que le corps, après l’unité, ne fut pas changé en la nature du Verbe et qu’il ne devint pas (comme le Verbe) infini et impassible avant la résurrection, comme le disent les partisans de Julien (d’Halicarnasse). Chaque chapitre est subdivisé en sections.

Certains de ces énoncés, franchement monophysites, semblent faire de Bar Hébræus un hérétique formel, mais on ne peut plus être aussi affirmatif quand on lit l’exposé de son opinion. Il suppose en effet que la nature ne peut pas exister sans la personne, et, cette erreur philosophique une fois posée, il ne peut plus placer deux natures en Notre-Seigneur sans y placer par là même deux personnes et devenir nestorien. Personam seu hypostasim cum substantia seu natura singulari perperam confundit, dit Assémani, Biblioth. orient., t. ii, p. 284-297.

Voici la traduction faite par Assémani d’un texte du Livre des rayons, dans lequel Bar Hébræus expose sa conception de la nature de Notre-Seigneur : Non unam simpliciter naturam dicimus, sed unam naturam ex duabus naturis substantialiter diversis. Objectio : Si consubstantialis est Patri, idemque cunsubstantialis Mariæ, quomodo duas non habebit naturas, quibus utrique inæquali, æqualis sit ? — Responsio : Duplex est illa una natura, non simplex : secundum diversas igitur ejus significationes inæqualibus illis ipse æqualis est. loc. cit., p. 297. Aussi Assémani est obligé de conclure, p. 297-298 : Vides Jacobitas cum catholica Ecclesia fere de nomine pugnare et omnia quæ calholici de hypostatica unione docent et credunt, eosdem docere et credere, naturam duplicem appellantes, quam nos duas naturas, ut vere surit, esse affirmamus.

Ce n’est pas seulement Assémani, mais Bar Hébræus lui-même qui croyait à une simple querelle de mots entre lui, les catholiques, les nestoriens et les monothélites. Il écrivait, en effet, de ces diverses confessions, d’après Assémani, loc. cit., p. 291 : Reliquæ vero, quæ hodie in mundo obtinent, sectæ, quum omnes de Trinitate et incolumitate naturarum ex quibus est Christus absque conversione et commistione æque bene sentiant, in nominibus unionis solum secum pugnant. Nous laissons à Bar Hébræus la responsabilité de son opinion, mais il nous semble résulter de ces textes, qu’il est indispensable, si l’on veut porter un jugement solide sur la culpabilité formelle des hérétiques orientaux, de commencer par publier et par étudier leurs ouvrages. On y trouvera leurs formules dans leur cadre naturel, expliquées par le contexte, et on pourra peut-être leur donner parfois un sens un peu différent de celui qu’elles ont quand on les transplante, en dehors du contexte, dans le cadre de la philosophie occidentale pour lequel elles n’ont pas été faites.

Nous avons constaté nous-même, qu’au commencement du VIe siècle déjà, les monophysites confondaient la nature et la personne. Ils regardaient donc le concile de Chalcédoine comme une revanche des nestoriens, et s’imaginaient que ce concile avait promulgué, avec un autre mot équivalent, la doctrine de Nestorius. Nau, Les plérophories de Jean, évêque de Maiouma, Paris, 1899, c. VII, XIV, XX, XXVII, XXXIII, XXXVI, XL, LII, LVII, LIX, LXI, LXII, LXIII, LXXIII, LXXXI.

2o  Théologie morale. — Nous plaçons sous ce titre l’Ethicon seu moralia publié par le R. P.  Bedjan, in-8o, Paris, 1898. Bar Hébræus y distingue, p. 1-2, la science théorique, qui n’a pour terme que la connaissance, et s’occupe de discerner la vérité du mensonge, de la science pratique qui a pour terme la connaissance et l’action, et s’occupe de discerner le bien du mal. Il traite dans l’Éthique de la science pratique ou d’action. Comme d’ailleurs toute action est corporelle ou spirituelle et que l’action corporelle a pour but l’éducation et la discipline du corps ou bien les opérations qui découlent de sa constitution, tandis que l’action spirituelle a pour but d’écarter l’âme des passions mauvaises ou bien de l’orner de vertus choisies, il divise l’ouvrage en quatre parties : 1. de l’ordonnance des mouvements qui concourent à l’éducation et à la discipline du corps (prière, veille, offices, chants, jeûnes, retraite, solitude, pèlerinage à Jérusalem) ; 2. des opérations du corps (du manger et du boire, du mariage légal, de la pureté du corps, des devoirs d’état, du travail des mains, de l’aumône) ; 3. des passions mauvaises et du moyen de s’en débarrasser (de l’âme et de ses passions, de l’éducation de l’âme, de la gourmandise, de la luxure, des péchés de la langue, etc.) ; 4. des vertus et de la manière de les acquérir (de la science, de la foi, de la patience, etc.).

3o  Théologie ascétique. — Le R. P.  Bedjan a publié à la suite de l’ouvrage précédent, p. 519-599, un petit traité ascétique de Bar Hébræus intitulé Liber columbœ, Kṭaba d’iûna, seu directorium monachorum. Il existe des livres, dit Bar Hébræus, p. 521-522, qui apprennent aux malades de corps ce qu’ils doivent faire lorsqu’ils n’ont pas de médecin auprès d’eux, il convient donc aussi d’écrire un livre qui apprenne aux malades d’esprit ce qu’ils doivent faire lorsqu’ils n’ont pas de directeur ou lorsque leur directeur est éloigné. L’ouvrage est divisé en quatre parties : 1. des exercices corporels que l’on doit faire dans un monastère ; 2. du travail spirituel qui s’accomplit dans la cellule ; 3. de la quiétude spirituelle qui échoit à « la colombe » , qui la place sur le degré royal et l’introduit dans la nuée divine où il est dit que le Seigneur habite ; 4. cette partie est surtout personnelle, Bar Hébræus raconte qu’il fut ramené au bien par la lecture des écrits d’Évagrius et des ascètes ; il ajoute donc cent sentences spirituelles qui doivent produire le même salutaire effet sur l’âme de ses lecteurs. Ces quatre divisions correspondent à quatre parties de la vie de Noé : a) à sa belle conduite qui lui fit trouver grâce devant Dieu ; b) à son entrée dans l’arche pour fuir le déluge ; c) à sa sortie de l’arche, quand la colombe lui annonça que les eaux avaient diminué sur la face de la terre ; d) aux révélations qu’il reçut et à l’alliance que Dieu contracta avec lui. Le P.  Cardahi a publié aussi le Livre de la colombe, Kithabha Dhijaunâ, seu liber columbae, Rome, 1899.

Signalons encore ici : 1. le commentaire de Bar Hébræus sur le Livre d’Hiérothée, conservé dans plusieurs