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BAPTÊME DES INFIDÈLES


lionne politique d’obliger des infidèles qu’il a vaincus à recevoir le baptême ou à s’exiler. B, 38, 39.

3° Le baptême conféré à un adulte malgré sa volonté est-il valide

… Hoc sacramentum non esse… Le sacrement conféré à

validum in adulto palam ac un adulte qui le refuse ouverlibere dissentiente. B, 43. tement et librement n’est pas

valide.

Le baptême, en effet, oblige à pratiquer la religion catholique, et un adulte ne s’engage validement que s’il le veut. Recevoir ce sacrement, comme l’a fait remarquer saint Thomas, Siw>. theol., III a, q. lxviii, a. 7, c’est renoncer au vieil homme, commencer une vie nouvelle ; cette renonciation, ce bon propos sont les actes d’une volonté libre. Être baptisé, c’est encore recevoir la justification ; une donation n’est valide que si elle est acceptée. B, ïii.

Des qualités du consentement requis pour la validité du baptême.

Benoît XIV les énumére. Il faut

vouloir recevoir le sacrement non pas comme une ablution profane, mais comme un bain usité dans l'Église, propre à l'Église, quoddam veluti lavacrum in Ecclesia solitum, B, 44, non quodcumque lavacrum sed unius Ecclesise proprium ac peculiare. B, 45.

Si l’adulte a l’intention actuelle, le rite est valide. B, 45. Il l’est encore, quand l’infidèle a voulu recevoir le sacrement et n’a pas rétracté cette intention, si bien que moralement elle persévère, ubinulla prsecesserit retractatio et moraliter perdurare intentio videatur. B, 46. Le pape reproduit la décision d’Innocent III au sujet de l’adulte baptisé par force ou par surprise. Voir col. 279. Que penser de celui qui s’approcherait du sacrement sans avoir l’intention de le recevoir, mais avec une attitude extérieure convenable, vultu atque oculis ac toto corpore ad modestiam composilo ? Autrement dit, l’intention nommée externe par les théologiens est-elle suffisante ? Benoît XIV se contente de répondre que cette question est très embarrassante, qu’ici il serait plus facile de soutenir l’affirmative que lorsqu’il s’agit du ministre, il remarque enfin qu’Alexandre VIII, 28e proposition condamnée le 7 décembre 1690, voir t. i, col. 761, n’a pas imposé une solution. Ainsi la question reste en suspens. B, 47. Par contre, Benoit XIV rejette la théorie de Cajetan, sur l’intention neutre, neutra voluntate : d’après ce théologien, In 111*™, q. lxviii, a. 7, Anvers, 1612, t. XII, p. 218, l’adulte qui ne refuse pas le baptême, mais qui n’y consent pas, le reçoit validement. Le pape montre que Cajetan s’appuie à tort sur la décision d’Innocent III déjà citée et constate que les théologiens ont rejeté cette singulière opinion. B, 47. Enfin, pour décider si le baptême reçu par force est valide, le pape renvoie encore à la décrétale d’Innocent III. Si, vaincu par les menaces et la crainte, un adulte, après résistance, finit par consentir, il reçoit réellement le sacrement. Si, au contraire, jusqu'à la fin, il s’oppose au sacrement, proteste intérieurement contre la violence qui lui est faite, il n’y a pas eu baptême. B, 48.

Ainsi lorsqu’un infidèle aura reçu le sacrement sans l’avoir demandé, il y aura lieu de rechercher quelle a été son attitude. A-t-il oui ou non consenti ? Quel consentement a-t-il donné? Cette enquête faite, si le baptême paraît douteux, on le réitérera sous condition. B, 42-51. Ainsi, d’ailleurs, doit-on faire chaque fois que la validité de la première collation n’est pas certaine. B, 5'i. Voir col. 274.

De la préparation des adultes au baptême.

Le

pape rappelle très sommairement quelles sont les dispositions requises, il insiste seulement sur deux d’entre elles. — La volonté' de l’adulte qui demande le sacrement doit être éprouvée. N’obéit-il pas à des mobiles intéressés ? A Rome plus d’un juif passait an christianisme pour

contracter un mariage avantageux, se libérer d’une situation financière embarrassée. B, 41. Le pape trace des règles très sages et très minutieuses sur l’admission des israélites de la ville au catéchuménat. B, 51-57. Il est donc nécessaire d'éprouver la volonté de l’adulte, opportum de ne pas accéder immédiatement à son désir. B, 41. — Il laut aussi le préparer à recevoir avec fruit le sacrement. Les dispositions requises sont indiquées par le concile de Trente, sess. VI, c. VI. Le pape insiste seulement sur la nécessité de la connaissance des vérités de foi. Cette science est ce qui rendra le baptême vraiment fructueux, ce qui convertira en fait l’infidèle, transformera ses mœurs. Elle est si nécessaire que la S. C. du Saint-Office, 10 mai 1703, défend aux missionnaires de baptiser un adulte moribond si on ne lui a pas expliqué auparavant les mystères dont l’acceptation est indispensable au salut, nécessaire de nécessité de moyen, il ne suffit pas que cet infidèle promette de se faire instruire, s’il revient à la santé. B, 41. Voir dans la Collectanea de la S. C. de la Propagande, les nombreuses et importantes décisions rendues par le SaintOffice et la Propagande sur le baptême des adultes, n. 551, 552, 553, 562, 579, 589, etc. Une instruction de cette dernière Congrégation du 18 octobre 1883 résume les conditions requises. Dans les cas ordinaires et en dehors du danger de mort, le catéchumène doit connaître les principaux mystères de la foi, le symbole, l’oraison dominicale, le décalogue, les préceptes de l'Église, l’effet du baptême, les actes des vertus théologales et leurs motifs. Il doit être prémuni contre les dangers particuliers auxquels sa foi est exposée dans les pays où il se trouve. Si, en raison de sa vie passée, des réparations s’imposent, il faut qu’il en soit averti et qu’il accepte de les faire. Lorsque, dans le milieu auquel il appartient, sont en usage des coutumes contraires à la morale chrétienne, il devra les avoir en horreur ou par des signes certains montrer qu’il s’est amendé. Enfin sa volonté sera éprouvée, aussi longtemps que le jugera à propos l’Ordinaire. Collectanea, n. 594. Le 30 mars 1898, la S. C. du Saint-Office a rappelé qu’on ne pouvait baptiser les infidèles ayant encore l’usage de leurs sens, si on ne les a pas entretenus des mystères chrétiens. Il ne suffit pas de les exhorter à la contrition et à la confiance, même si ces infidèles connaissent par la révélation l’existence de Dieu.

Conclusion. — Petite somme sur le baptême des infidèles, surtout sur celui' des enfants, les lettres de Benoit XIV présentaient un enseignement traditionnel, définitif et à peu près complet. Les principes sont, à la lettre, ceux qu’a posés saint Thomas. Les conclusions sont empruntées aux décisions des papes et des conciles, à l’enseignement commun des théologiens : Benoit XIV cite, de préférence, Suarez, Sylvius, Dominique Soto. Quelques cas nouveaux sont résolus ; mais les réponses données s’harmonisent avec les solutions qu’avaient reçues les problèmes précédemment étudiés. L’enseignement du pape a fait loi : il a donné le coup de grâce à quelques thèses singulières, il a été adopté par saint Alphonse et les moralistes, recommandé par la S. C. du Saint-Office, 12 janvier 1769. Collectanea, n. 567. La S. C. de la Propagande a même pris la peine de déclarer et de prouver que les avis des théologiens ne sauraient prévaloir contre l’enseignement de Benoit XIV, 17 août 1777. Collectanea, n. 571. Ajoutons que cet enseignement a eu un retentissement singulier. En 1858, un enfant juif de liologne, Edgar Mortara, ayant été baptisé par une servante chrétienne, la règle posée par Benoit XIV fut appliquée : le gouvernement pontifical fit enlever l’enfant aux parents pour qu’il fût élevé chrétiennement. Les juifs, les libéraux, les ennemis du pouvoir temporel attaquèrent 1res vivement cette mesure. Un moment, on prétendil même qu’elle était en contradiction avec l’enseignement de Benoit XIV : les journaux