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BAPTÊME DANS L'ÉGLISE ANGLICANE


baptême des enfants. Le premier contient la prière suivante à réciter après le baptême : « Nous te remercions… de ta grâce que tu as accordée à cet enfant de l’appeler par le saint baptême à la régénération, de le recevoir dans la communion de ton Fils Jésus-Christ, notre Sauveur, et de l’adopter pour ton enfant et pour héritier de tes biens célestes. » Dans le second, on lit : « Le but et l’effet du baptême est de donner à celui qui reçoit le baptême une assurance et un signe visible de l’amour inépuisable et de la grâce de Dieu dont il devient participant, en entrant par là dans la communion de l'Église du Christ. »

La liturgie de l'Église évangélique de Prusse, Agende fur die evangelische Landeskirche, Berlin, 1895 ; cf. G. Goyau, L' Allemagne religieuse, le protestantisme, Paris, 1898, p. 152-164, laisse le choix entre des formulaires d’origines et de doctrines diverses. Le premier formulaire pour le baptême des enfants est rédigé d’après Luther ; on y prie Dieu, après le baptême, de fortifier par sa grâce l’enfant qu’il a régénéré par l’eau et par l’Esprit-Saint, et auquel il a pardonné ses péchés, et on le remercie d’avoir incorporé cet enfant à son Fils bien-aimé, Xoire-Seigneur et unique Sauveur, d’en avoir fait son enfant et l’héritier des biens éternels. Un deuxième formulaire remercie Dieu d’avoir, par NotreSeigneur Jésus-Christ, institué le baptême comme un bain de régénération et de renouvellement dans l’EspritSaint ; après le baptême, on y prie le Dieu de toute grâce, qui a appelé l’enfant à sa gloire éternelle dans le Christ Jésus, de le préparer par la foi à la vie éternelle. Le troisième formulaire s’inspire d’anciens formulaires réformés. Le Christ, y est-il dit, a promis qu’il nous laverait de nos péchés, qu’il ne nous les attribuerait pas, et qu’il renouvellerait notre nature à son image ; pour confirmer et sceller ces promesses, il a institué le baptême. Le baptême nous est un témoignage certain que nous avons une alliance éternelle avec Dieu. On doit le conférer aux enfants, bien qu’ils ne puissent pas encore connaître cette alliance : par le baptême, Dieu les prend pour ses enfants et ses héritiers. — Deux formulaires sont indiqués pour le baptême des adultes ; d’après l’un, le baptême est accompagné d’une régénération spirituelle ; d’après l’autre, il est un gage de la rémission des péchés et un sceau de l’incorporation dans la communauté du Seigneur.

2. Opinions des théologiens.

Tant que dura la période d’orthodoxie rigide, la doctrine du baptême excita beaucoup d’intérêt parmi les protestants. Mais, dès le xviie siècle, une réaction se produisit en Allemagne contre le dogmatisme luthérien, et l’on ne parla plus guère du baptême. Les piétistes n’attachaient pas d’importance à ce rite ; ils prétendaient reconnaître le moment de leur régénération aux consolations que leur apportait la grâce, au bonheur dont la foi remplissait leur âme. Au xviiie siècle, les supernaturalistes et les rationalistes, divisés sur bien des points, s’accordaient pour regarder le baptême comme un pur symbole, un simple signe de l’entrée dans l'Église. Pour des raisons différentes, Schleiermacher nia l’efficacité du baptême ; à ses yeux, le baptême en lui-même n’exerce aucune action sur l'âme ; la foi est éveillée par une série d’actes spirituels qui peuvent précéder ou suivre la cérémonie baptismale. Depuis, le mouvement libéral inauguré par Schleiermacher a eu pour contre-coup une réaction néoluthérienne, et le baptême est de nos jours l’objet de vives discussions.

Les partisans de la régénération baptismale sont d’autant plus actifs que leurs adversaires les traitent avec plus de dédain. On leur oppose l’usage traditionnel du baptême des enfants, et c’est de ce côté que se porte surtout la bataille. Ils conviennent que le baptême ne peut, sans la foi, produire la régénération : mais quelle loi peuvent avoir les enfants, avant l'éveil de la raison ?

DICT. DE TIIÉOL. CATIIOL.

— F. H. Harter, Manuel de la doctrine chrétienne ou Explication de la doctrine de Luther, Paris, 1900, p. 77, admet que « le baptême purifie notre âme des souillures du péché et lui communique la vie divine » , que « par le baptême, le Saint-Esprit nous régénère, pourvu que nous acceptions et que nous conservions, par la foi, la grâce baptismale » . Mais il ne dit pas ce qu’est la foi dans l’enfant. Il déclare toutefois que les parents chrétiens « ont le droit et le devoir » de faire baptiser leurs enfants, car : 1° les enfants héritent non seulement des biens terrestres, mais aussi des biens spirituels de leurs parents (Abraham et sa postérité) ; 2° les plus petits enfants ont besoin d’un Sauveur, car ils sont nés dans le péché originel ; 3° rien n’empêche le Saint-Esprit d’agir sur le plus petit enfant (Jean-Baptiste) ; 4° la vie entière, depuis la naissance jusqu'à la mort, doit être consacrée au Seigneur (p. 78). — D’après A. Weber, Le saint baptême, Paris, 1880, p. 21, la regénération par le baptême est enseignée par l'Écriture ; le baptême est l’acte créateur de la vie chrétienne ; il est nécessaire ; dans l’ordre normal établi par le Seigneur, « il n’y a ni pardon ni adoption sans son intermédiaire. » Le baptême produit sur l’enfant les mêmes effets que sur l’adulte croyant. « En affirmant la régénération de l’enfant par le baptême, nous proclamons un mystère, qui ne peut être compris ni expliqué » (p. 76). « Dieu peut donner à l’enfant, qui ne manifeste ni repentance ni foi, ce qu’il ne peut donner à l’homme qu’après sa conversion » (p. 69). — R. Clément, Étude biblique sur le baptême, Lausanne, 1851, p. 309, est d’avis, lui aussi, que l’enfant baptisé « est croyant pendant les années de son enfance au moins » . — D’autres auteurs, ne voulant pas s’en tenir à des affirmations auxquelles ceux qui admettent la notion protestante de la foi ne voient pas de sens, parlent de la foi en des termes qui font penser à la grâce des théologiens catholiques. D’après H. Cremer, Taufe, Wiedergeburt und Kindertaufe in Kraft des heiligen Geistes, Gutersloh, 1901, 1e baptême n’exerce pas son efficacité sans la foi ; mais cette foi est elle-même produite par le baptême. « Être régénéré, c’est croire, et pas autre chose » (p. 84). « Ceux qui considèrent la foi comme le libre effet d’une décision personnelle insistent par-dessus tout sur l’acte libre, et veulent en définitive que ce soient eux qui fassent tout » (p. 154). Cremer établit cependant une distinction entre la foi et la grâce : « Ce n’est pas la foi, dit-il, qui produit l'état de grâce, c’est la grâce qui produit la foi » (p. 19). — « Notre peuple, dit de son côté A. Freybe, Die heilige Taufe und der Taufschatz in deutscheni Glauben und liecht, Gutersloh, 1899, n’a jamais admis de différence entre le baptême des enfants et celui des adultes… La foi des enfants ne fait aucune difficulté si l’on entend par la foi ce qu’on doit entendre, c’est-à-dire la réception de l’Esprit et de la force du Seigneur, et si l’on se débarrasse de la manie qu’a notre temps de vouloir faire intervenir partout la réflexion, comme si l’Esprit de Dieu ne pouvait être accordé qu'à travers la réflexion. »

E. Bunke, Der Lehrstreit ùber die Kindertaufe innerhalb der lutherischen Kirehe, Cassel, 1900, attaque, au nom de la morale, les théories de Cremer. A son avis, le seul pont qui conduise de la mort à la vie, c’est la conversion. Le baptême a pourtant de l’importance. « L’action de l’Esprit est liée au baptême chrétien ; si l’offre de la grâce, faite dans le baptême, amène la première éclosion de la foi, le baptême produit alors la régénération dans toute son étendue, c’est-à-dire la justification et la communication de l’Esprit ; il en scelle la possession dans la conscience du baptisé'. Si la justification du pécheur a déjà eu lieu par la grâce de la Parole, acceptée par la foi, le baptême complète la régénération par la communication de l’Esprit-Saint, principe de la vie nouvelle, et par la ratification de la justification

II.

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