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BAPTÊME DANS L’ÉGLISE LATINE DEPUIS LE VHP SIÈCLE


dite. Or, la tache du péché originel et la privation de la vision intuitive, qui en est la conséquence pénale, affectant surtout la personne, bien que par L’intermédiaire de la nature, le baptême nous en délivre tous aussitôt ; tandis que les souffrances, la concupiscence et la mort, affectant par elles-mêmes la nature, et n’étant pas autre chose, pour ainsi dire, que son apanage normal, au moins depuis la chute, ne doivent régulièrement disparaître d’une façon complète qu’au moment de la résurrection glorieuse. Loc. cit., ad 3um.

/II. grâce et dons SURNATURELS. — En même temps qu’il remet les péchés, le baptême confère la grâce habituelle, les vertus infuses, les dons du Saint-Esprit, et, selon plusieurs théologiens, le droit de recevoir en temps opportun certaines grâces actuelles.

1* Grâce habituelle et vertus infuses. — Les théologiens ont toujours enseigné que le baptême régénère l’homme par la grâce. Aussi l’appellent-ils souvent, à la suite de l’Écriture et des Pères, grâce de régénération, ou encore de rénovation. Cette formule, au reste, ne désigne pas seulement, chez ceux qui l’emploient, la grâce habituelle ou sanctifiante, mais aussi la rémission des péchés et même des peines dues au péché. Voir, entre autres, Pierre Lombard, Sent., 1. IV, dist. III, P. L., t. cxcii, col. 846. Nous n’avons pas d ailleurs à rechercher dans cet article s’il y a une différence, et laquelle, entre le pardon des péchés et la grâce proprement dite. Voir Grâce sanctifiante et Justification. En même temps que la grâce habituelle ou sanctifiante, le baptême confère aussi les vertus infuses, qui l’accompagnent Toujours dans l’âme juste. Voir Vertus infuses. En effet, dit saint Thomas, Jésus-Christ, devenant notre chef parle baptême, doit répandre en nous ses membres l’abondance de la grâce et des vertus, selon la parole de saint Jean : De plenitudine ejus nos omnes accepimus. Joa., 1, "16. Unanimes à enseigner que le baptême confère la grâce habituelle et les vertus infuses, quand il s’agit des adultes, les scolastiques ne l’ont pas toujours été, quand il s’agit des enfants. Plusieurs d’entre eux, au xiie siècle, et même au commencement du xine, leur refusaient ce privilège, sous prétexte que Dieu ne fait rien d’inutile, et que la présence de la grâce et des vertus n’a pas sa raison d’être chez les enfants. Pierre Lombard semble avoir partagé cette opinion, bien qu’il ne s’exprime pas clairement à ce sujet. Sent., 1. IV, dist. IV, P. L., t. cxcii, col. 850. Il mentionne d’ailleurs, l’opinion contraire, mais comme celle d’un petit nombre. Quidam putant gratiam operantem et cooperantem cunctis parvulis in baptismo dari in munere, non in usa, ut cuni ad majorent venerint aetatem, ex munere sortiantur usum. Loc. cit. Au commencement du xme siècle, le pape Innocent III constate encore l’existence des deux opinions. Il revendique les droits de la seconde, sans vouloir d’ailleurs se prononcer entre les deux : lllud vero quod opponentes inducunt, fidem aul caritatem aliasque virtutes parvulis, utpote non consentienlibus, non infundi, a plerisque non conceditur absolute, cum propter hoc inter doctores theologos quæstio referatur, aliis asscrentibus per virtutem baptismi parvidis quidem culpam remitti, sed gratiam non conferri, nonmdlis vero dicentibus et dimilti peccatum et virtutes infundi, habenlibus illas quoad habitum, non quoad usum, donec perveniant ad setatem aduttam. Majores, 3, de baptismo. Les nonnulli dont parle le pape allaient bientôt compter dans leurs rangs les grands maîtres de la scolastique, Alexandre de IJalès, Sunnna, part. IV, q. VIII, m. viii, a. 3, Venise, 1576, t. iv, fol. 100 ; AlbertleGrand, In IV Sent., ]. IV, dist.IV, a. 13, Opéra, Lyon, 1651, t. xvi, p. 56 ; Duns Scot, In IV Sent., 1. IV, dist. IV, q. ii, Opéra, Lon, 1039, t. viii, p. 222 ; et surtout saintThoinas, Sum.theol., III a, q.LXix, a. 6. Le docteur angélique n’a pas depeine à réfuter la doctrine qui refuse aux enfants la grâce et les vertus du baptême.

Elle est fausse, dit-il, pour deux raisons : parce que les enfants, tout aussi bien que les adultes, devenant membres du Christ par le baptême, doivent recevoir de leur chef l’influx de la grâce et des vertus ; et parce que, s’ils venaient à mourir aussitôt après le baptême, ils ne pourraient pas, privés de la grâce, parvenir à leur fin dernière, ce qui est inadmissible. Le fondement de cette opinion singulière paraît avoir été l’oubli de la distinction nécessaire qui existe entre la vertu proprement dite, et l’acte qu’elle est appelée à produire. Voyant les enfants incapables de produire des actes vertueux, on en a conclu à tort qu’ils ne recevaient pas la vertu elle-même, ou la faculté de les produire. Le docteur angélique réfute d’un mot cette conclusion : Ista impotentia operandi non accedit pueris exdefectu habituum, sed ex impedimenlo corporali ; sicut etiam dormientes quamvis Itabeanl habitus virtutum, impediuntur tamen ab aclibus propter somnum. Sum. tlieol., loc. cit. Ce fut désormais l’enseignement commun, surtout après que le concile général de Vienne eut déclaré, contre le P. Pierre-Jean 011vi, que cette doctrine était la plus probable, la plus conforme à la saine théologie, et celle qui avait ses préférences. Le P. Olivi fut accusé, le 1 er mars 1311, d’avoir enseigné, quod gratia et virtutes non videntur conferri parvulis in baptismo, veritatem catholicam in dubium revocando. Ubertin de Casale réfuta les accusations portées contre Olivi. Il remarque habilement qu’Olivi enseigne, conformément à la foi catholique, que la grâce est donnée aux enfants par le baptême. Quant à savoir si les vertus infuses leur sont conférées en même temps, il expose les deux opinions soutenues librement par les docteurs, et s’il préfère l’opinion négative, il use de son droit et ne révoque pas en doute une vérité catholique. F.Ehrle, Zur Vorgeschichte des Concils von Vienne, dans Archiv fur Litteratur und Kirchengeschichte des Mittelalters, Berlin, 1886, t. il, p. 369, 390-391, 395-396. Contre le sentiment d’Olivi, le concile de Vienne fit la déclaration suivante : Verum quia quantum ad effectum baptismi in parvidis reperiuntur doctores quidam theologi opiniones contrarias habuisse, quibusdam ex ipsis dicentibus per virtutem baptismi parvulis quidem culpam remitti, sed gratiam non conferri, aliise contra asserentibus quod et culpa cisdem in baptismo remittitur, et virtutes ac informans gratta infunduntur quoad habitum, etsi non pro Mo tem~ pore quoad usum : Nos autem atlendentes gêneralem efficaciam mortis Christi quseper baptisma applicatur pariter omnibus baplizatis, opinionem secundam, quse dicit tam parvulis quant adultis conferri in baptismo informantem gratiam et virtutes, tanquam probabiliorem, et diclis sanctorum et doctorum modernorum theologiæ magis consonam et concordent, sacro approbante concilio, duximus eligendam. Denzinger, Encliiridion, n. 411. Les déclarations du concile de Trente ont donné à cette doctrine, non seulement une probabilité sérieuse, mais la certitude définitive, plus ou moins voisine d’une vérité de foi. Voir Baptême d’après le concile de Trente.

Dons du Saint-Esprit.

En même temps que la

grâce sanctifiante et les vertus infuses, le baptême nous donne les dons du Saint-Esprit, qui en sont inséparables et font partie de toute justification. La plupart des théologiens, il est vrai, n’en parlent qu’à l’occasion du sacrement de confirmation, ou de la grâce et des vertus infuses. Mais ils n’ont pas pour cela l’intention d’en laire l’apanage exclusif de la confirmation ; ils veulent dire simplement qu’on y reçoit ces dons avec une abondance et une plénitude nouvelle. Cl. L. Billot, De sacramentis Ecclesise, Rome, 1890, l. i, p.’253. Voir Confirmation.

3° Y a-t-il des grâces actuelles attachées au baptême ?

— Saint Thomas semble le dire dans ce passage : Dcus