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CHYPRE (ÉGLISE DE)


plus que dix paroisses. Les centres les plus importants se trouvaient dans les villages de Sainte-Marina, Cormakiti et Asomatos. Les archives des franciscains de Nicosie contiennent les listes des villages administrés par des curés latins de 1690 à 1759. Cette intervention du clergé latin prouve que les maronites manquaient de prêtres de leur rite. Ces relations avec le clergé latin et leurs sympathies pour la domination latine les rendaient suspects au gouvernement turc. Cyrilli, p. 90-91. Le P. Dandini demanda qu’on leur envoyât un évêque et des objets du culte en raison de leur pauvreté, p. 25, 107, 131-132. Ces demandes furent accueillies favorablement. En 1598, le patriarche maronite consacra évêque le prêtre Moïse Anaisi d’Acura, et fixa sa résidence à Nicosie. En 1062, la maison de Savoie octroya aux évêques maronites de Chypre une pension de 200 écus d’or par an. En 1668, l’historien Etienne Aldoensi, devenu plus tard patriarche des maronites, visita Chypre, dont il avait été consacré évêque. Monté au trône patriarcal, il nomma évêque un certain Luc, natif de Chypre (1670). A la mort de celui-ci, le siège maronite de l’ile resta vacant, personne n’ayant voulu l’occuper. Les évêques qui lui succédèrent s’établirent au Mont-Liban. Depuis cette époque jusqu’à 1848 la communauté maronite fut abandonnée à elle-même et privée de secours spirituels. Certains villages passèrent entièrement à l’islam, comme ceux de Kitréa et de Saint-Romain. Cyrilli, p. 91. Les évêques grecs se montrèrent acharnés à poursuivre ces maronites, dont le sang coula. Pendant cette longue vacance, l’autorité épiscopale resta au protopapas de Cormakiti. Histoire de Chypre, t. i, p. 111. Le synode du Mont-Liban de 1736, ayant réduit le nombre des diocèses, réunit Chypre au Mont-Liban sous le rapport de la juridiction ecclésiastique, et détermina ainsi les limites du diocèse cypriote : Hujus jurisdictio coniplcctitxr universa insulse illius castella, ac præterea in Chosroena regione habet Bacasfaiam, Beth-Scliebabam earumque villas, nec non villas Chosroense usqtie ad ponton Beryti. Colleclio Lacensis, 1876, t. ii, p. 451. Le diocèse de Chypre était rangé le sixième parmi les évêchés de cette Église. En 1845, le patriarche maronite, par l’entremise de son procureur à Constantinople, Elias eflendi Hava, et du consul français à Chypre, M. Toread, obtint de la Sublime Porte que les maronites fussent soustraits à l’oppression du clergé grec, et autorisés à se constituer en Église indépendante des grecs orthodoxes et soumise à la juridiction de l’évêque maronite de Chypre. En 1848, Mo r Jajah fit la première visite pastorale de l’Ile ; il en fit d’autres en 1867, 1878 et 1879. Son successeur Joseph Zogbi se rendit deux fois à Chypre, et après sa mort, Ma r Nemallah Selouan, préconisé en 1892 évêque maronite de l’ile, visita son troupeau l’année qui suivit sa consécration (1893). Le recensement de 1891 donne le chiffre de 1 131 maronites, groupés surtout dans le district de Cérines. Ils possèdent quatre monastères, Saint-Élie, près de Sainte-Marina, et Sainte-Marie de Nicosie, Sainte-Marie de Marghi, près de Myrtou, et S.iint-Itomain à Vouna. Hackett, p. 528. La relation de Mb » Cyrilli, publiée par La Terre-Sainte, porte à 3000 lu nombre des maronites cypriotes, dispersés un peu partout. On en rencontre à Nicosie, à Larnaca, à Famagouste, à Limassol, à Baffo (Paphos). D’après colle relation, les églises maronites sont pauvres, et il faudrait des écoles pour relever le niveau intellectuel et religieux de la population. Celle-ci parle grec, mais son clergé a conservé l’usage de la liturgie syriaque. Le dUecesia cyprensis maronite, qui comprend les fidèles de Chypre et une partie du Mont-Liban, compte 30 000 âmes. Wcrner, Orbis terrarum ralliolicus, l’ribourg-en-Brisgau, 1890, p. 159-160 ; Histoire de Chypre, t. i, p. 111 ; Cyprien, p. 587-5.S.S.

7° Les Latins depuis l’occupation ottomane jus qu’aujourd’hui. — Les hordes musulmanes, s’établissant d’abord à Nicosie, ensuite à Famagouste, s’acharnèrent contre les églises latines et les catholiques latins de l’île. Elles leur firent une guerre sans merci ; la défense héroïque de l’ile par Marc-Antoine Bragadino les avait exaspérées. A Nicosie la célèbre cathédrale gothique de Sainte-Sophie, où étaient couronnés les rois Lusignans, fut convertie en mosquée ; les autres églises latines de la capitale subirent le même sort, et on épargna quelques églises grecques pour les donner aux orthodoxes. A Famagouste, le parjure Moustapha défendit absolument aux Latins d’avoir des églises, des monastères et des biens. Ceux qui voulaient pratiquer leur culte étaient obligés de fréquenter les églises grecques. La cathédrale de Saint-Nicolas de Famagouste fut changée en mosquée, les autres églises en écuries ou en magasins. Philippes, p. 68-69. Les Grecs ne furent pas étrangers à cette sévérité des Turcs contre l’Eglise latine. Ils se rappelaient l’ancienne servitude, et il leur était donné de prendre revanche sur leurs persécuteurs d’antan. La plupart des prêtres et des religieux latins furent massacrés par les Turcs, d’autres cin menés en esclavage, d’autres échappèrent ou se réfugièrent dans des endroits montagneux et déserts. Deux évêques périrent dans la tourmente : celui de Paphos, Contarini, d’illustre famille vénitienne, Lusignan, Histoire générale, p. 16 ; Oriens christianus, t. iii, col. 1220 ; et le frère Séraphim, dominicain, évêque de Limassol, « mort plein de louange et de gloire. » Histoire générale, p. 20 ; Oriens christianus, t. iii, col. 1230. L’Église latine disparut tout à fait. « L’an mil cinq cens septante, dit Lusignan. p. 90, que le Turc subjugua l’isle, tout le clergé latin fut extirpé et chassé, et il n’y a en Chypre aucun Latin. » Ceux qui purent échapper à la jalouse surveillance des vainqueurs, ou parvinrent à ne point quitter l’ile, furent obligés de dissimuler leur religion. Ibid., p. 289. Cependant les franciscains ne tardèrent pas à retourner à leur poste de combat. Ils s’établirent à Larnaca, en 1572, et y desservirent l’église de Saint-Lazare, ayant d’abord appartenu aux Francs et dans la suite aux Grecs. Ils remplissaient les fonctions religieuses pour les commerçants latins, qui en très petit nombre résidaient dans l’île, et pour les pèlerins et marchands qui y abordaient de passage. En 1593, le P. François de Spello érigea un couvent et une église, rebâtie en 1842-1818 par le frère Séraphim de Roccascalegna, qui en traça les plans. En 1596 le couvent de Larnaca reçut la visite du P. Dandini qui y séjourna, p. 220, et en 1598 celle de von Kotowik, qui dans son ltinerarium, p. 96, fait le plus bel éloge des vertus et du zèle de ces intrépides missionnaires. Leurs ressources provenaient de la générosité des marchands francs et des olfrandes des pèlerins. Tout bateau vénitien qui abordait à Larnaca leur laissait un sequin d’or. Ils desservaient l’église et le cimetière, et donnaient l’hospitalité aux pèlerins. Ibid., p. 95-96.

A Nicosie, à la fin du xvie siècle, il y avait une seule chapelle latine desservie par un prêtre séculier que les marchands francs entouraient de soins et de vénération. Dandini, p. 23.

En 1636, sous Urbain VIII (1623-163’.). le P. Jean-Baptiste de Todi, franciscain de l’observance, visita l’ile de Chypre. Il y trouva que les maronites catholiques, si nombreux autrefois, avaient embrassé l’islamisme en grand nombre et d’autres étaient retournés à leurs anciennes erreurs. Orbis seraphicus, Quaracçhi, 1886, t. i, p. 637. Il demanda à demeurer dans l’ile et travailla à Nicosie à ramener les maronites au catholicisme. Il fonda pour eux une église et une résidence au hameau de Marghi, Dans la suite il fut nommé évêque de Paphos. A Nicosie, il avait fixésa résidence dans l’ancien hospice franciscain de la Sainte-Croix, et comme l’église de cet hospice tombait en ruines, il se rendit à