Page:Alfred Vacant - Dictionnaire de théologie catholique, 1908, Tome 2.2.djvu/567

Cette page n’a pas encore été corrigée
2443
2444
CHYPRE (EGLISE DE)


prévenu par un autre moine ami du patriarche, qui l’emporta dans cette course aux honneurs. Il dut borner son ambition à l’évêché de Paphos, après avoir dépensé plusieurs centaines de sequins d’or, empruntés à ses amis ou à des usuriers. L’higoumène du monastère de Koutzoventi fut élevé au siège de Limassol, tandis qu’un moine crétois, curé (èç-^jxéptoç) de l’église de Saint-Siméon, obtenait celui d’Ammokhostos. Ces événements se produisirent en 1572.

L’histoire de l’Église cypriote depuis la conquête ottomane jusqu’à la guerre de l’indépendance grecque est une suite presque ininterrompue de querelles intérieures et de luttes d’ambition. En 1592, éclata un différend entre les évêques et la communauté grecque au sujet de la nomination du nouvel archevêque. Léonce Eustratios, higoumène du monastère de Saint-Jean de Pipé à Leucosie, y prit une part très active. Sathas, NeoeMyjvixyi yù.oloyia, Athènes, 1867, p. 182. On l’accusa d’avoir sur l’eucharistie et sur la procession du Saint-Esprit des sentiments contraires à ceux des théologiens orthodoxes et favorables aux Latins. Mélétios Pighas, patriarche d’Alexandrie, interrogé à ce sujet, recommanda aux Cypriotes de tenir aux croyances de leurs ancêtres, et de ne pointadhérer à des nouvautés dangereuses. Philippes, p. 77-78. En 1598, l’archevêque de Leucosie, Athanase, fut accusé auprès du patriarche Mélétios Pighas de plusieurs méfaits. Si nous en croyons les plaintes de ses ouailles, il avait détruit les vieux anlimensia, voir t. i, col. 1389-1391, pour en faire de nouveaux et retirer de l’argent de leur vente ; il avait brisé le trône de Germain, patriarche de Jérusalem, conservé à Chypre, pour s’emparer des reliques qui y étaient enfermées ; il avait violé les canons orthodoxes relatifs aux mariages prohibés par l’Eglise grecque. Hypsilanli, p. 119. Mélétios Pighas, qui était alors à Constantinople en qualité de vicaire du patriarche œcuménique (1597-1599), Gédéon, IlaTpiapy.ty.oi IL’vay.eç, Constantinople, 1890, p. 540-541, demanda des informations à Athanase lui-même ; il attendit en vain la réponse. Sur de nouvelles instances des Cypriotes, il envoya dans l’ile des délégués y faire une enquête. Les accusations portées contre l’archevêque étaient fondées. Il fut déposé. Mathieu II (1599-1602), patriarche de Constantinople, renouvela cette sentence de déposition par une lettre synodale datée du mois de juin 1600. Gédéon, p. 542 ; Sathas, Mscraiumy.ri pttëXioOiîy.r, , t. iii, p. 549 ; Philippes, p. 80-83. A cette occasion, Joachim, patriarche d’Antioche, revendiqua ses droits de suprématie sur IKylise de Chypre. A l’appui de ses prétentions, il cita un canon du concile de Nicée (le canon arabique) qui lui réservait la consécration de l’archevêque de Chypre. Mélétios Pighas pritla défense de l’autocéphalie cypriote et fit observer que le canon invoqué était inconnu dans l’Église orthodoxe, et que des documents apocryphes n’étaient pas de nature à aflermir ses prétendus droits. Philippes, p. 81-85. Au siège archiépiscopal de Chypre, laissé vacant par la déposition d’Athanase, fut appelé Benjamin (1602), dont l’élection fut confirmée par Mathieu II et Néophyte II M602-1603).

Vers le milieu du xviie siècle, le patriarche de Constantinople, Joanniliios, d’accord avec son synode, promulgua une lettre patriarcale qui fixait les relations de dépendance des évoques cypriotes vis-à-vis de leur archevêque. Par ignorance ou par ambition, les évêques des éparchies de Chypre s’étaient arrogé le droit de jouir, dans les limites de l’archevêché, des prérogatives et des honneurs dont l’archevêque jouissait dans les diocèses de ses suffragants. La constitution de Joanniliios est en vigueur encore de nos jours. Philippe ?, p. 87-93. En 1668, l’archevêque Nicéphore réunit un synode de prêtres et de moines et condamna les erreurs des protestants. Les décrets du synode, selon Philippes, furent recueillis par le hiéromoine llilarion Cigalas, an D1CT. DE TIIKOI.. CATIIOL.

cien élève du collège grec de Rome, Sathas, Neos^Xovwî ) tpcXoXoyia, p. 300, 301, traduits en latin, et publiés dans la Perpétuité de la foi, t. XII, édit. Migne, t. I, col. 1221-1224. Lequien, Oriens christianus, t. il, col. 1056 ; Hackett, p. 661-674. En 1674, Hilarion Cigalas, qui, après le synode de Leucosie, avait travaillé de concert avec Nectarios, patriarche de Jérusalem († 1676), à la rédaction du fameux ouvrage Ilep’t t ?, ç àpx’^ ? T0’-' Ilàna, Jassy, 1682, fut élevé au siège archiépiscopal de Chypre, Philippes, p. 96, et mourut à Constantinople en 1682. Il n’y eut pas d’événements marquants sous ses successeurs Jacques I er (1679-1689), Germain II (1690-1705), Jacques II (1710). Sylvestre (1718-1731) se rendit à Constantinople avec ses suffragants pour implorer la clémence du sultan en faveur de ses ouailles accablées de lourds impôts, et éprouvées par la famine. Philothée (1734-1759) montra beaucoup de zèle pour la discipline et pour les écoles. Il eut beaucoup à souffrir de la part de son troupeau et des Turcs. Philippes, p. 103-104. Païsios (1759-1766), Chrysanthos (1767-1810) et Cyprien (1810-1821) furent exposés aux plus odieuses vexations. Les gouverneurs turcs avaient appauvri l’ile par leur rapacité. Le nombre des chrétiens était allé toujours en diminuant. Les archevêques essayaient bien d’obtenir de la Sublime Porte une diminution d’impôts, mais leurs tentatives échouaient devant le système fiscal de la bureaucratie et du despotisme musulmans. Aux débuts de la domination turque, ils avaient cherché à rappeler dans l’ile les Latins. En 1601, il y eut des pourparlers entre l’archevêque de Nicosie et François Akhidas de Rhodes, chargé d’une mission secrète par le duc de Savoie Charles-Emmanuel I er. L’archevêque proposait au duc de Savoie de s’emparer de l’ile, tandis que les Grecs lui en faciliteraient l’occupation en massacrant la garnison turque bien réduite en nombre. Il posait comme conditions que la hiérarchie grecque aurait toujours la suprématie dans l’île, dont l’entrée serait fermée aux protestants et aux jésuites. Ces appels à la maison de Savoie, qui joignit à ses titres celui du royaume de Chypre, furent renouvelés plusieurs fois, mais restèrent toujours sans écho. Sakellarios, t. i, p. 571. Abandonnés à eux-mêmes les archevêques de Leucosie étaient devenus les chefs spirituels et temporels de leur peuple. Quelques-uns acquirent même une grande influence auprès de la Sublime Porte, et tinrent parfois en échec les gouverneurs. Sous Sélim III, leur autorité atteignit l’apogée. Mais ces succès éphémères ne conjurèrent pas la tourmente qui s’abattit sur eux en 1821. A cette époque l’ile comptait 80 000 chrétiens et 20000 musulmans. Lorsque les Grecs arborèrent l’étendard de la révolte, le comité révolutionnaire invita les Cypriotes à grossir les rangs des insurgés. Ceux-ci refusèrent leur concours. Cependant, ils donnèrent de l’argent pour soutenir la révolution. Sakellarios, p. 580. Mais la neutralité des Cypriotes ne désarma point le gouvernement turc, résolu à apaiser le mouvement insurrectionnel grec par un massacre systématique. Le gouverneur de Chypre, Kutchuk Mehmed, décidé à prévenir dans l’ile toute velléité de révolte, s’entendit avec les aghas musulmans pour supprimer les Cypriotes les plus influents et les plus riches. Il donna d’abord aux chrétiens l’ordre de remettre les armes qu’ils avaient chez eux. Cet ordre fut exécuté le 23 avril 1821. Puis, par une suite d’intrigues abominables, on convoqua à Leucosie les personnages les plus influents de l’ile. On y avait réuni une garnison turque de 4 000 sold.ils. Le 9 juillet 1821, les portes de Leucosie furent fermées, et la place publique devint le théâtre de scènes effroyables de carnage. Les trois métropolites, Chrysantos de Paphos, Mélétios de Kilimn, el Laurent de Oérines, tombèrent

les premiers sous le glaive du bourreau. L’archevêque, ’le vieux Cyprien, lut pendu à un mûrier, son archi 11. - 77