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CHYPRE (EGLISE DE ;


et de tenir des synodes. A ces privilèges, Zenon ajouta des marques d’honneur qui devaient contribuer à rehausser le prestige de la métropole de Chypre. L’archevêque était autorisé à porter des vêtements de soie et de pourpre, et un sceptre au lieu de crosse, à signer son nom avec le cinabre en lettres rouges et à prendre le titre de Béatitude : MaxapnôrosLes historiens byzantins qui racontent cet événement, datent de cette époque l’autonomie de l’Église cypriote, et son indépendance à l’égard d’Antioche. Théodore le Lecteur, P. G., t. lxxxvi, col. 184 ; Cédrénus, Hist. comp., P. G., t. cxxi, col. 673 ; Joël, Chron., P. G., t. cxxxix, col. 264. Nicéphore Callisle dit clairement que l’Église de Chypre était d’abord soumise à celle d’Antioche, t xa -JnÉxetTo itpdtepov, et que son indépendance coïncide avec la découverte du corps de saint Barnabe. Hist. ecch, P. G., t. cxlvii, col. 499. Cependant les canonistes grecs, Balsamon, Zonaras, Aristène, paraissent ignorer cette ancienne sujétion de Chypre au patriarcat d’Antioche.

En 688, l’empereur Justinien II Bhinotmétos rompit la paix qu’il avait conclue avec Abd-al-Melek, calife de Damas. N’étant pas à même d’assurer la sécurité de ses sujets de Chypre, il eut la malencontreuse idée de les forcer à quitter leur île et à s’établir sur les bords de l’Hellespont. Cette mesure aboutit à un désastre. Beaucoup de fuyards, en traversant la mer, furent surpris par la tempête et périrent engloutis dans les Ilots. Les survivants, en butte à mille privations et à l’inclémence du climat, moururent en grand nombre décimés par les fièvres. Théophane, Citron., P. G., t. CVIII, col. 741. Cet exil forcé dura sept ans, au dire de Porphyrogénète, De adm. imp., P. G., t. lxiii, col. 365. L’archevêque Jean de Constantia se rendit à Constantinople avec une partie de son troupeau. L’empereur leur assigna une localité près de Cyzique, à laquelle il donna, au dire de certains historiens, le nom de Nouvelle-Justinianopolis. L’archevêque de Constantia devint ainsi archevêque de Neajus.tinianopolis. L’empereur lui conféra des privilèges, sanctionnés par le canon 39 du concile Quinisexte. Il obtint ainsi les droits du siège de Constantinople, celui de consacrer les évêques de la province, et même l’évêque de Cyzique. Toutefois on n’est pas d’accord sur la portée des privilèges accordés au nouveau siège. Il est peu vraisemblable que l’archevêque de Neajustinianopolis ait eu les mêmes droits que le patriarche de Byzance. Le canon du concile (Juinisexte ou bien est fautif, et il faudrait lire Koovct-TïvTivo-jTtôXew ; au lieu de tïj ; KtovcrTOcvrivétov irdXeto ;, variante que l’on trouve dans un manuscrit, Hefele, t. ii, p. 335-336 ; ou bien il faut entendre ce canon dans le sens que l’archevêque de cette ville avait sur la province de l’Hellespont et sur Cyzique les droits que le patriarche de Byzance y exerçait depuis des siècles. Cette dernière hypothèse nous semble la meilleure. En elfet, les canonistes grecs entendent ainsi le texte du concile. Balsamon, P. G., t. cxxxvii, col. 648-619 ; Zonaras et Aristène, ibkl., col. 652 ; cf. t. cxxxviii, col. 224. Ils reconnaissent que depuis In fondation de leur Église, bs Cypriotes nommaient et consacraient eux-mêmes leurs évêques. P. G., t. cxxxvii, col. 365. Les raisons sur lesquelles s’appuyait l’Église d’Antioche pour les soumettre à sa juridiction, étaient tirées de la dépendance de Chypre vis-à-vis de la métropole du diocèse d’Orient au point de vue administratif. Jbid., col. 368 ; Pargoire, L’Église byzantine de 5t’7 ù 847, Paris, 1905, p. 156-157.

A partir de cetle époque l’Église de Chypre n’eut plus .1 subir aucune atteinte contre s<>n autonomie jusqu’au patriarcat de Joachim VI (1585-1587 ; 1592-1613), d’après Backett, p. 20-2, Joachim VII. Kyriacos, Geschichle (1er Orientalisclien Kirchen, Leipzig, 1902, p. 6 !). Les Cypriotes se bornèrent à demander à Antioche le saint

chrême pour la consécration des évêques. Cette coutume persista jusqu’à l’an 1860. Les massacres de Damas l’interrompirent brusquement. En 1864, Macaire, archevêque de Chypre, demanda le saint chrême à la Grande Église de Constantinople, et cela se pratique encore aujourd’hui. Philippes, p. 29.

3° Du concile d’Éphèse (431) jusqu’à la conquête latine (1191). — Durant le long cours de sept siècles, l’histoire de l’Église de Chypre n’offre pas d’événements importants. Les Cypriotes eurent à subir des calamités sans nombre, exposés qu’ils furent pendant trois siècles aux invasions des Arabes, forcés à plusieurs reprises de quitter leur pays dévasté par les bandes musulmanes. Toutefois leur Église n’était pas morte. Ses représentants intervinrent toujours dans les grandes assemblées de la chrétienté. Au brigandage d’Éphèse (449) on remarque la présence d’Olympius, archevêque de Constantia. Mansi, t. VI, col. 609. Parmi les membres du concile de Chalcédoine, on voit Épiphane de Soli, Épaphrodite de Tamassos, et Soter de Théodosiana. Mansi, t. VI, col. 568, 577. Dans la querelle monothélite, Serge, archevêque de Constantia, combattit énergiquement l’hérésie nouvelle, et dans un synode particulier, condamna l’ecthèse d’IIéraclius. Le décret anathémisant les hérétiques fut envoyé par Serge au pape Théodore I er (642-649), accompagné d’une lettre où il exaltait la primauté romaine. Hackett, p. 35 ; Mansi, t. x, col. 913-916. Les iconoclastes rencontrèrent un champion intrépide de l’orthodoxie dans la personne de Georges, archevêque de Constantia, que le soi-disant concile œcuménique de 754 frappa d’anathème avec saint Germain de Constantinople et saint Jean Damascène. Lequien, Oriens christianus, t. ii, col. 1051. Georges ne se borna pas à combattre les iconoclastes de vive voix. On lui attribue une NovŒai’a yépûVTo ; ^sp tôjv af ! 0)v Etxôvtov, conservée dans le codex 197 de la bibliothèque synodale de Moscou. Vladimir, Sistemalitchesroe Opisanie rukopisei Moskovslwi sinodalnoi biblioleki, Moscou, 1894, p. 228. Ce document a été publié naguère par Mélioransky et offre des données intéressantes pour l’histoire des iconoclastes. Gheorghii Kiprianin, iJoann Jerusalimianin, dva maloizvicstnykh bortza zapravoslavie, v vin viekie, Saint-Pétersbourg, 1901 ; Khristiairskoe Tchtenie, août 1901, p. 293-298. Au VIP concile œcuménique (787) qui sanctionna d’une manière définitive le culte des saintes images, nous trouvons plusieurs évêques de Chypre, Constantin de Constantia, Eustathe de Soli, Spiridion de Chytri, Théodore de Kitium, Georges de Trimithus, Alexandre d’Amathus. Lequien, Oriens christianus, t. ii, col. 1041-1042 ; Mansi, t. XII, col. 994-985. A la V » session, l’archevêque Constantin joua un rôle important. Durant le règne de l’empereur Constantin Copronyme (741-745), l’île de Chypre était devenue le lieu de déportation des moines, qui en dépit d’une persécution atroce exercée contre eux, persistaient à approuver le culte des images. Théophane, P. G., t. CVIH, col. 897.

Pendant la domination arabe, l’Église de Chypre, qui avait eu jusqu’au vu » siècle un épanouissement merveilleux de vie chrétienne, eut à subir des malheurs sans nombre. La première invasion des musulmans dans l’île remonte à l’an 632. Le calife Abou-bekhr s’empara de Kitium. Porphyrogénète, Th. orient., 15, P. < :., t. cxiii, col. 104-105 ; Phrankoudes, Kûitptç, , Athènes, 1890, p. 275. En 647-648, le calife Moavieh, avec une ilotte de 1 700 vaisseaux, établit sa domination sur l’île. Theophanes, Chron., P. G., t. cviii, col. 71)| ; Vasiliev, Vizantiia i Araby, Saint-Pétersbourg, I900, t. i, p. 53. Beaucoup d’indigènes furent massacrés et l’église de la métropole Constantia, élevée par saint Épiphane, fut détruite et profanée. Cédrénus, P. (’, t. CXXI, col. 825 ; Paul Diacre, I. MX, P. L., I. XCV, col. 1049. La ville elle-même ayant été réduite en ruines,