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CHRÊME (SAINT)


col. 693. Il fallut renouveler cette décision, en 398, au III’concile de Carthage, can. :  !. Mansi, t. iii, col. 869. En Espagne, à la même date, le I er concile de Tolède constate que certains prêtres se permettaient de consacrer le saint chrême, à rencontre de l’usage presque universel de l’Église, et leur défend d’entreprendre ainsi sur le droit épiscopal. Can. 20, Mansi, t. iii, col. 1002. Innocent I er, dans sa lettre à Decentius, rappelle que le chrême employé par les prêtres dans l’onction postbaptismale doit être bénit par l’évéque. Denzinger, Enchiridion, n. 60. Mais les abus continuèrent à s’aggraver. Monlan, qui présida en qualité d’archevêque de Tolède le IIe concile tenu en cette ville, l’an 535, s’indigne de la présomption inouïe de ces prêtres qui consacrent le chrême, entreprise abominable qui ne s’était jamais vue depuis le commencement de la foi catholique. Episl., I, 2, P. L., t. lxv, col. 52.

A ces condamnations, le IIIe concile de Braga, en 572, dut ajouter une peine sévère, la déposition ecclésiastique. Can. 4, Mansi, t. ix, col. 839. Cette censure fut renouvelée par différents conciles, spécialement contre les chorévêques, au concile de Meaux, en 845, et sanctionnée par plusieurs capitulaires de Charlemagne. Mansi, t. xiv, col. 829 ; Baluze, Capitul, reg. Francor., Paris, 1780, t. i, col. 327. En 868, le concile de Worms insiste longuement sur cette violation des droits pontificaux. Hœc omnia illicila esse presbyteris cognoscuntur, quia pontificatus apicem non liaient ; quai tanien omnia episcopis auctoritate canonum concedantur. Can. 8, Mansi, t. xv, col. 871. Dès le début, la liturgie n’était pas moins formelle. D’après les Constitutions apostoliques, VII, 42, P. G., t. i, col. 1044, la consécration du chrême est réservée à l’àp/iépev ;. Le Sacramentairc gélasien, i, 40, P. L., t. lxxiv, col. 1099, le Sacratnentaive grégorien, Liber sacram., P. L., t. lxxviii, col. 82, VOrdo romanus X, P. L., t. lxxviii, col. 1009, ne connaissent d’autre consécrateur du chrême que l’évéque. Cf. Amalaire de Metz, De eccles. of/tc., I, 12, P. L., t. cv, col. 1011 ; Raban Maur, De cleric. inslil., i, 28, P. L., t. cvii, col. 313 ; Rupert, De divin, offic., v, 16, P. L., t. clxx, col. 140. Même dans le cas où l’administration du sacrement de confirmation serait permise à un simple prêtre, les prescriptions canoniques spécifient que le chrême employé à cet usage aura été consacré préalablement par l’évéque. Innocent I", Epist., xxv, ad Décent., iii, 6, P. L., t. xx, col. 554 ; Innocent III, c. Cum venisset, De sacra unct., dans Vlnstructio pro simpliv.i sacerdote sacramentum confirmationis administrante, reproduite en appendice dans le Rituel romain. Le décret d’Eugène pro Armenis prescrit que le chrême soit bénit par l’évéque. Clirisma confeetum ex oleo et balsamo ai episcopo benedictum. Denzinger, Enchiridion, n. 592. Cf. Bingham, Origines sive anliquitates ccclesiasticw, Halle, 1727, t. iv, p. 356362.

Mais, par délégation, et comme ministre extraordinaire, un simple prêtre pourrait-il opérer validement cette consécration ? Saint Thomas, Sum. theol., III a, q. lxxii, a. 3, ad 3° iii, semble réserver exclusivement au Chris ! ou à l’évêgue représentant du Christ dans l’Eglise le pouvoir de conférer au saint chrême cette consécration spéciale’|ui en fait l’instrument de la grâce. Suarez adopte celle opinion comme plus probable, en raison des icxtes conciliaires qui réservent ce droit à l’évéque, comme une prérogative inhérente à la dignité 1 épiscopale. De conftrni., disp. XXXIII, sect. ii, n. 14, édit. Vives, t. xx, p. 645. De même Arcudius, De concordia Ecclesisc denlalis ri <, iieni<il>*, ii, I i. Paris, 1626, p.’.M ; Beyer, Tract, du sacram. confirm., -. Anvers, H>.">S, p. 70. Cependant l’opinion contraire’tait déjà soutenue par Scot, In IV Sent., l.lV.dist. Vil, q. i, 1639, p. 361. Chrisma santi/ii-aïuni specialiler ab episcopo, vel ab alio cm talis sancti/icatio paient comnrilli, Hollzclau, De sa crant, confirm., n. 164, dans la T/ieologia dogmatica dite de Wurzbourg, Paris, 1889, p. 255. Les textes des conciles cités plus haut n’ont rien en effet d’absolument exclusif : ils réservent le droit des évêques, sans le déclarer incommunicable. Le I" concile de Tolède, en 398, constate que de simples prêtres s’étaient permis de consacrer le saint chrême ; il se contente de déclarer que désormais les seuls évêques pourront exercer ce ministère. Placuit ex hac die nullum nisi episcopum clirisma facere. Can. 20, Mansi, t. iii, col. 1002. D’autre part, l’administration du sacrement de confirmation revient aussi de droit divin aux évêques en vertu de leur charge ; mais un simple prêtre peut être délégué pour cet office. Dès lors, s’il lui est donné par induit d’administrer le sacrement lui-même, pourquoi ne pourrait-il être investi du pouvoir de procéder à une cérémonie préparatoire, de bénir l’huile de l’onction, simple matière du sacrement ? Une telle dispense ne serait pas d’ailleurs, semble-t-il, inouïe dans l’Eglise. Le diacre romain Jean, dans sa lettre à Senarius, rapporte que l’autorisation de consacrer le chrême a été concédée par plusieurs papes à des prêtres africains. Epist. ad Senar., 8, P.L., t. lxxv, col. 404. Cf. Mabillon, Musseum italic., Paris, 1724, t. I, p. 73. D’après Wadding, le pape Eugène IV concéda également à Fabien de Bachia, lors de son départ pour les Indes, en 1444, la faculté d’administrer le sacrement de confirmation et de consacrer le saint chrême. Annales ord. fr. minor., Boine, 1734, t. xi, p. 209. Benoît XIV relate aussi ces faits, sans se porter garant de leur authenticité ; mais il est clair qu’il en admet la donnée comme vraisemblable et que la possibilité d’une dispense ne lui paraît nullement inacceptable. De sgnod. diœces., vii, 8, Louvain, 1763, p. 70 sq. Toutefois une simpe délégation épiscopale ne serait pas suffisante, du moins aujourd’hui ; la plupart des théologiens estiment que le souverain pontife s’est réservé le droit de déléguer à la consécration du chrême non moins qu’à l’administration du sacrement de confirmation. Théologie de Wurzbourg, loc. cit., p. 256. Mais rien n’autorise à penser que le pape ne puisse se dessaisir de ce droit. Cf. Vilasse, lue. cit., col. 873.

Rite.

Il était naturel que l’huile chrismale allectée aux usages liturgiques les plus saints et destinée à devenir l’instrument de la grâce, reçût une bénédiction spéciale. Dès l’origine, elle revêt un caractère sacré et porte dans les canons des conciles, comme on l’a vii, le nom de saint chrême. Terlullien dit expressément que c’est une huile bénite, benedicta unctione, De bapt., 7, P. L., t. i, col. 1206, et saint Cyprien ajoute qu’elle était sanctifiée sur l’autel, oleo in altari sanctificato. Epist., lxx, ad Januar., 2, P. L., t. iii, col. 1041 ; édit. Hartel, t. ii, p. 768. A celle bénédiction présidait la prière, suivant le témoignage de saint Basile, svXoyo-ju. ev… tô D.aiov tt, î Xpf<rEh>ç, et cette consécration a pour elle l’autorité de la tradition apostolique. De Spir. Sancto, 27, P. G., t. xxxii, col. 188. Saint Cyrille de Jérusalem met en relief le caractère de cette prière consécratoire : c’était une invocation qui faisait descendre sur l’huile mystique l’Esprit-Saint, [iet’èn(xXv]0’tv toû âyt’ou Uveôivorroî. Cal. myst., ni, P. G., t. xxxiii, col. 1092. Saint Optât de Milève, De scltism. donal., 7, P. L., t. xi, col. 1089, et après lui les Constitutions apostoliques, vu, 42, P. G., I. i, col. 1044, nous apprennent que cette invocation se fait au nom du Christ. Enfin saint Augustin a complété ce détail en spécifiant que le spiie de la croix était requis dans cette consécration. Quod signwm nisi adhibeatur… sive oleo quo chrismate unguntur… nihil eorum rite perficitur. Tract. m Joa., 118, P. /… t. xxxv, col. 1950. Toutes lis données liturgiques essentielles sont déjà rassemblées.

Mais la solennité de la bénédiction chrismale ne larda pas à revêtir une importance exceptionnelle, surtout dans l’Église orientale. Théodore AnagnosteS, Hist.