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CHINOIS (RITES)


le 9 février 1703 et se rendit d’abord dans l’Inde, où il devait remplir une mission analogue à celle qui lui était confiée pour la Chine ; il arriva à Pondichéry, sur le vaisseau du roi de France, le Maurepas, leQ novembre 1703, et n’en repartit que le Il juillet 1701 pour les Philippines, d’où il arriva le 2 avril 1705 à Macao, le 6 du môme mois à Canton, et le 4 décembre à Péking.

Nous ne racontons pas ce qui se passa durant son séjour dans cette capitale. Il suflit de dire que l’empereur, après avoir d’abord très bien accueilli le légat, changea de dispositions dès qu’il comprit qu’un des buts de sa mission était de supprimer la pratique des rites nationaux parmi les chrétiens chinois. Le patriarche était revenu à Nanking, quand il apprit que Kang-hi ordonnait à tous les missionnaires, sous peine d’expulsion, de venir lui demander un pian ou diplôme, conférant la permission de prêcher l’Evangile, et qu’il ne l’accordait qu’à ceux qui promettaient de ne pas combattre les rites. Le légat crut le moment venu de faire connaître la sentence déjà rendue, mais non publiée, contre ces rites. En effet, il savait que le Saint-Office avait fini par donner ses réponses sur le mandement de Ma r Maigrot, et que le pape les avait approuvées, le 20 novembre 1 70 i-. Le texte même de ces réponses ne lui était point parvenu, il est vrai, mais il en connaissait le sens, quand, le 25 janvier, il lança un décret ou mandement, dictant aux missionnaires les réponses à faire quand ils seraient interrogés par l’autorité chinoise au sujet des rites. Il les obligeait sous peine d’excommunication latæ sentent iæ de déclarer qu’il y avait « plusieurs choses », dans la doctrine et les coutumes chinoises, qui ne s’accordaient pas avec la loi divine, et que tels étaient, notamment, les « sacrifices de Confucius et des ancêtres » et « l’usage des tablettes des ancêtres » ; de même, que C/iang-ti et Tien n’étaient pas « le vrai Dieu des chrétiens ».

S’ils sont interrogés, continuait-il, pourquoi ils jugent ainsi de ces choses, ils répondront que c’est parce qu’elles ne s’accordent pas avec le culte du vrai Dieu, et qu’il a été ainsi décidé par le souverain siège, qui est la règle infaillible des chrétiens dans les choses de la foi. S’ils sont interrogés sur la date de cette décision : que tons sachent qu’elle a été rendue le 20 novembre 1704. Si enfin on leur demande, comment en ètes-vous certains ? Ils répondront : Niais en sommes certains par la déclaration que nous « n a faite le patriarche d’Antioche notre supérieur, qui porte en lui-même tes oracles du souverain pontife en vertu de ses pouvoirs (quioracula summi pontifteis in se habet vigoresuarum facultatum), et nous sommes tenus de le croire (et tenemur ci credere).

M’J r de Benavente, de l’ordre des augustins, évéque d’Ascalon in partibus infidelium et vicaire apostolique du Kiang-si, et plusieurs missionnaires à sa suite, en appelèrent au souverain pontife de cet acte autoritaire qui, dans les circonstances, leur paraissait manifestement dépasser, sinon les pouvoirs du légat, du moins les intentions de celui qui l’avait envoyé. En attendant que le papeeùtfait connaître sa volonté, ils se croyaient en droit, voire obligés de demander et de recevoir le piao, même aux conditions interdites par le décret de Nanking, pour empêcher la destruction complète de la mission. Quand l’empereur Kang-hi eut connaissance de ce décret, il fit reconduire Ma’de Tournon à Macao, avec défense d’en sortir avant le retour des envoyés (des missionnaires jésuites) qu’il chargeait lui-même de porter au pape ses objections contre l’interdiction des rites.

Le 30 juillet 1708, on vit revenir à Paris M » ’Maigrot, expulsé de Chine par ordre de Kang-hi ; plusieurs autres missionnaires du séminaire des Missions étrangères ou dominicains, franciscains, etc., avaient dû également sortir de l’empire ; cependant, des religieux d’autres ordres que la Compagnie, en assez grand nombre, avaient demandé etobtenu le/n’no, et parmi eux, l’évéque

DICT. DE TlllLOL. CATIIOL.

de Péking, Mu r délia Chiesa, franciscain. Enfin, dans les derniers mois de l’année 1708, on reçut à Rome le décret de Nanking, puis de longues relations de Mo’de Tournon et de ses compagnons de détention à Macao. L’émotion de Clément XI et des cardinaux, à toutes ces nouvelles, fut vive, on le conçoit. Une question Tournon s’ajoutait à celle des rites, elle-même singulièrement aggravée par l’intervention de Kang-hi. Clément XI, avant tout, s’efforça, par des moyens diplomatiques, de rendre moins aiguë la situation à laquelle les procédés trop brusques de son légat n’étaient pas étrangers. Il adressa donc, dès le 2 mars 1709, une assez longue letlre à l’empereur, qui la reçut, mais seulement en octobre 1712. Elle débutait par de grands compliments ; puis, le pape, tout en réclamant avec une dignité apostolique le droit pour les chrétiens de pratiquer leur religion dans sa pureté, et couvrant franchement le patriarche, qui avait, disait-il, notifié aux missionnaires le sentiment du saint-siège concernant certains rites chinois, promettait de lire avec attention les documents nouvellement apportés à Rome par des missionnaires de Péking, et espérait ensuite s’expliquer plus amplement. Cette promesse vague, qui n’était, dans la pensée de Clément XI, qu’une satisfaction olferte à l’ainourpropre du souverain chinois, confirma néanmoins celui-ci dans l’illusion que le pape finirait par se convaincre, sur son témoignage, de l’innocuité des rites, et les permettrait aux chrétiens dans le sens de la déclaration impériale. En attendant, il maintint ses mesures contre les missionnaires opposés aux rites, et déclara même qu’il n’en laisserait plus entrer en Chine aucun nouveau, avant d’avoir reçu de Rome une réponse satisfaisante.

Clément XI ne voulait nullement laisser croire qu’il pourrait revenir sur les décisions données, ou désavouer le cardinal de Tournon (il l’avait créé cardinal le 1 er août 1707), pour ce qui concernait le fond de son mandement de Nanking. Il le prouva en faisant publier aussi, en mars 1709, les réponses du Saint-Office approuvées le 20 novembre 1704. Il le montra encore plus, en faisant rendre par la même S. C, le 25 septembre 1710, un nouveau décret, confirmant l’acte du cardinal-légat, enjoignant à tous de l’observer sous les peines qu’il marquait, et rejetant les appels qui y avaient été opposés. Mais le pape déclarait en même temps que le mandement de Nanking devait être entendu dans le sens des réponses de 1704, sans rien y ajouter ni rien en retrancher. Il annonçait aussi qu’il faisait rédiger une instruction, à envoyer au cardinal de Tournon ou à son successeur et aux évéques et vicaires apostoliques de Chine, laquelle réglerait toutes les difficultés pendantes « de manière à procurer à la fois l’exécution des décrets apostoliques, l’union des missionnaires, le progrès de la prédication évangélique et le bien des àmes ». Enfin, pour opposer une digue au torrent d’écrits que les deux partis ne cessaient de produire sur cette matière, avec plus de scandale poulies fidèles que de profit pour la solution de la controverse, Clément XI défendait de publier, désormais, quoi que ce fût sur les rites chinois, sans une permission spéciale du Saint-Siège, à obtenir de la S. C. de l’Inquisition, « Tout cela, dira Clément XI dans sa constitution Ex illa die, après avoir rappelé, ses décrets de 1701 et de 1710, aurait dû suffire pleinement et abondamment, pour que la zizanie, semée par l’homme ennemi dans le champ de la mission de Chine, fut arrachée jusqu’à la racine, et que tous les fidèles se rendissent aux ordres du saint-siège avec l’humilité et l’obéissance requises ; d’autant plus qu’à la suite des réponses confirmées et approuvées par NOUS, comme il a été dit. il était déclaré en termes clairs et nets que la cause était finie. « Cependant, continue le pape..Vuis l’avons appris non

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