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CHINOIS (RITES)


des anciens Chinois. Elles se trouvaient, partie dans les Nouveaux mémoires sur Vêlai présent de la Chine, publiés par le premier de ces jésuites à son retour de Chine, 3 in-12, Paris, 1696-1700, partie dans l’ouvrage du second intitulé : Histoire de l’édit de l’empereur de la Chine en faveur de la religion chrestienne, avec un éclaircissement sur les honneurs que les Chinois rendent à Confucius et aux morts, in-12, Paris, 1698. La censure fut prononcée le 18 octobre 1700, après trente séances d’une discussion animée. Voir Journal historique des assemblées ternies en Sorbonne, pour condamner les Mémoires de la Chine, etc., in-12, [Paris, | 1701.

A Rome, néanmoins, on ne se croit pas en droit d’aller aussi vite qu’à Paris, dans la décision de cette controverse qui, agitée depuis si longtemps, reste toujours si épineuse. Les délibérations du Saint-Office, interrompues par la mort d’Innocent XII (27 septembre 1700), sont bientôt reprises et activées par les ordres de Clément XI (élu le 23 novembre 1700) ; malgré tout, elles n’aboutiront pas avant trois ans. La difficulté vient du désir qu’on a de résoudre péremptoirement la question de fait, c’est-à-dire d’établir le véritable caractère des rites discutés, et de l’affirmer dans le décret même de manière à couper court à toute nouvelle tentative d’en éluder l’application. Mais quelle rude tâche pour le Saint-Office, que de se faire d’abord sa conviction et de formuler ensuite un arrêt inattaquable, sur les coutumes et les idées d’un peuple, non moins éloigné de l’Europe par la distance des lieux, que par le genre de son esprit et de sa civilisation, alors que les juges n’ont d’autre ressource humaine, pour cela, que de chercher à démêler le vrai dans une masse de témoignages contradictoires !


Et pourtant les jésuites, après beaucoup d’autres documents de réelle valeur qu’ils avaient déjà présentés au saint-siège pour la défense de leur pratique contre Ma r Maigrot, en avaient ajouté un qui leur paraissait décisif : c’était le témoignage de l’empereur de Chine lui-même et des principaux lettrés de son empire. On sait quelle bienveillance Kang-hi (1662-1723) montra longtemps aux missionnaires, surtout à ceux de la Compagnie ; il la poussa jusqu’à faire publier, à leur prière, en 1692, un édit proclamant la liberté de la religion chrétienne dans ses vastes États. Les jésuites de Péking crurent donc devoir profiler de sa faveur pour lui demander, à titre d’information désirée par les savants d’Europe, une déclaration authentique concernant le sens et la portée des cérémonies chinoises. A cet effet, ils lui soumirent, le 30 novembre 1700, un exposé conçu entièrement suivant leurs idées, où les honneurs rendus à Confucius et aux ancêtres étaient dépeints comme choses purement civiles et politiques. L’empereur donna sa pleine approbation par un acte officiel, qu’il permit de publier dans tout l’empire. Les missionnaires s’empressèrent d’envoyer leur exposé et l’approbation de Kang-hi au souverain pontife, par quatre voies différentes, le 3 décembre 1700. Ils lui adressèrent de nouveau lis mêmes pièces, accompagnées des adhésions de plusieurs grands mandarins et lettrés chinois, le 12 novembre 1701. Brevis relalio eurum quae spectant ad declaralionem Sinarum Imperaloris Kam Hi circa Cumfucii </ avorum cultum, datam anno il 00. Accedunt primatum doctissimorumque virorum, et antiquissimx traditionis testimonia. opéra PP. Soeietatis Jesu Pekini pro Evangelii prnpagalione labnrantium, in-K", imprimé à Péking, en latin et chinois. A la Bibliothèque nationale, Fonds chinois, n. 925, et lal., Nouv. acq., n. 145.

Dans les lettres dont ils accompagnaient ces envois, ils avaient soin de déclarer qu’ils ne s’étaient adressés à l’empereur que pour savoir de lui, chef des lettrés el souverain législateur de la Chine, le vrai sens des lois et

coutumes chinoises ; et tout en exprimant leur conviction, fortifiée par ce témoignage capital, touchant le caractère purement civil des rites qu’ils jugeaient devoir encore tolérer, ils n’en protestaient pas moins de leurs sincères efforts pour les remplacer peu à peu par les cérémonies de l’Eglise ; et ils observaient que c’était déjà fait, en grande partie, dans les funérailles des chrétiens, où l’on portait solennellement la croix à travers les rues de Péking.

Les missionnaires paraissent avoir espéré beaucoup de cette déclaration impériale, pour prouver la justesse de leur opinion concernant les rites ; mais il ne semble pas qu’à Rome on en ait jugé comme eux. Leurs adversaires affectèrent de dire que l’empereur n’avait fait que leur donner un témoignage de complaisance : il n’est pas vraisemblable, cependant, que le souverain chinois, simplement pour complaire à des étrangers, ait pu répondre contrairement aux idées et aux traditions de ses sujets, en une matière si importante à leurs yeux. D’autres reprochèrent aux jésuites d’avoir porté au tribunal d’un prince païen une cause qu’il n’appartenait qu’au saint-siège de juger : le reproche n’est pas équitable, car on ne demanda qu’un témoignage à Kang-hi, et non une décision.

Les délibérations du Saint-Office sur les rites chinois étaient encore loin de leur terme, quand Clément XI forma le projet d’envoyer en Chine un visiteur apostolique avec pouvoirs de légat a latere. En annonçant son dessein, dans son allocution consistoriale du 5 décembre 1701, le pape assignait pour but à cette légation d’établir l’union entre les ouvriers apostoliques, de pourvoir à diverses autres nécessités de cette vaste mission de Chine, enfin, de renseigner exactement le saint-siège sur la situation générale et sur les travaux des missionnaires. Il ne parlait pas explicitement de la question des rites ; mais l’intention de Clément XI était de charger aussi le légat de V exécution des décisions attendues sur cette grave affaire. En effet, son secrétaire d’État, le cardinal Paulucci, écrivait au nonce à Paris, le 6 décembre 1701, avec ordre de le redire au cardinal de Noailles : « Cette expédition apostolique ne retardera point la décision de la controverse, qu’on examine au Saint-Office ; bien plutôt elle donnera lieu de l’accélérer, afin que le visiteur apostolique puisse être l’exécuteur de ce que décidera Sa Sainteté. » Papiers Gualterio à Londres, British Muséum, Addit. mss., n. 20247, fol. 230 ; cf. fol. 291, où est une copie de l’allocution. Malgré le désir du pape d’en finir, l’affaire ne fut conclue au Saint-Office que dans les derniers mois de 1704. Voici le résumé et, pour les plus importantes, le texte même des réponses approuvées par Clément XI, dans la congrégation tenue le 20 novembre 1704.

Sur l’art. 1 er des questions que nous avons indiquées plus haut, le terme T’ien-lchou, « Seigneur du ciel, » est permis pour désigner le vrai Dieu ; les autres. Tien et Chang-ti, sont prohibés, « de peur que les missionnaires, en les employant, ne donnent occasion aux païens de penser que le Dieu des chrétiens n’est pas autre chose que Je ciel matériel ou la vertu qui y est contenue. »

Sur le 2e article, concernant l’inscription King-tien, « Honorez le ciel, » que l’empereur Kang-hi avait écrite de sa main pour une église de Péking, el qu’on avait ensuite placée dans d’autres églises ou chapelles de la mission, il est décidé, en conformité avec l’art. 1°’, que l’inscription doit être enlevée de foutes les églises, toujours à cause du scandale possible.

Sur le l 1 " article, la S. C. réprouve d’abord toutes les

oblations et cérémonies, soit « solennelles », soit oins

solennelles », faites dans les o temples ou salles » de Confucius et des ancêtres. Puis elle continue : « Enfin il ne faut plus permettre aux chrétiens de faire les olilations, rites ou cérémonies usités en l’honneur de morts. comme ils sont rapportés dans les queeeita, devant