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CHERBURY — CHÉRUBIN DE MAURIENNE


Les théories philosophiques de Cherhury sont exposées dans son De verilate, prout distinguitur a rerelalione, a verisimili, a possibili et a falso. Cf. Sidney Lee, The autobiography, p. xxxviii sq.

La vérité existe ; elle est permanente et universelle, l’esprit humain est capable de la percevoir. Cet esprit peut être considéré comme composé d’une infinité de « facultés » correspondant chacune à quelque objet. Lorsque cet objet vient en contact avec la faculté correspondante, cette faculté entre en activité, se conforme immédiatement à l’objet, et cette harmonieuse conformité de la faculté connaissante avec son objet, intellectus cognocenlis cum re cognita congruentia, est « la vérité du concept », p. 9-47.

Toutes ces facultés mentales peuvent être divisées en quatre groupes auxquels Cherhury donne les noms de « instinct naturel, sens interne, sens externe, raisonnement (discursus) ». De l’instinct naturel dérivent en l’homme ces premiers principes, ces notions communes, noiitise communes, qm existent en toute âme saine ; ces notions ne sont pas le produit de l’expérience ou de l’observation ; elles ne sont pas acquises ; elles nous viennent directement de Dieu, qui les a déposées dans l’âme humaine lors de sa création, p. 47-126.

Les trois autres classes de facultés sont soumises à la direction de cet instinct naturel ; le sens interne distingue le bien du mal ; le sens externe perçoit les objets extérieurs ; le raisonnement, ou faculté raisonnante, compare et groupe les notions acquises par les autres facultés. C’est la plus trompeuse de nos puissances ; Cherburyla rend responsable de presque toutes nos erreurs, p. 126 sq. Cf. Rémusat, Lord Herbert de Cherbury, c. il, m. Descartes, dans une lettre au P. Mersenne, appréciait ainsi le système : « Il (lord Herbert) veut qu’il y ait en nous autant de facultés qu’il y a de diversités à connaître, ce que je ne puis entendre autrement que comme si, à cause que la cire peut recevoir une infinité de figures, on disait qu’elle a en soi une infinité de facultés pour les recevoir ; ce qui est vrai en ce senslà. Mais je ne vois point qu’on puisse tirer aucune utilité de cette manière de parler ; et il me semble plutôt qu’elle peut nuire, en donnant sujet aux ignorants d’imaginer autant de diverses petites entités dans notre âme. » Rémusat, op. cit., p. 232.

Le De causis errorum parut en 1655, comme appendice au De verilate. Il est destiné à le compléter, en énumérant les principales causes d’erreurs qui arrêtent notre esprit dans sa recherche de la vérité ; elles sont divisées d’après les quatre facultés principales que reconnaît l’auteur.

Le Eeligio laici, publié la même année, contient les principales idées religieuses de Cherhury. L’homme est naturellement religieux ; cette religion, débarrassée de ses caractères accidentels, et réduite à ses vérités essentielles, consiste en cinq principes qui n’ont jamais été pour les hommes causes de divisions et de guerres : existence d’un Dieu providence ; obligation de l’honorer par un culte ; la piété et la vertu sont le culte le plus digne de lui ; les fautes doivent être expiées par le repentir ; certitude d’une justice divine qui, après la vie, récompensera chacun selon ses œuvres, p. 31. Ces principes dérivent « le l’instinct naturel ; il n’est pas raisonnable d’en admettre d’autres ; tous les dogmes des diverses Kgliscs, qu’elles prétendent révélés de Dieu, sont l’œuvre des prêtres qui les ont créés pour assurer par la crainte ou l’espoir leur influence sur les foules, p. 9 sq. Cherbury insiste sur cette influence pernicieuse du sacerdoce dans une conclusion violente intitulée : Ad sacerdotes de religione laici. Il observe d’ailleurs que la religion chrétienne est supérieure aux autres, parce qu’elle peut, plus facilement qu’elles, se ramener aux cinq vérités essentielles, et qu’elle les a mieux conservées dans les masses ; mais elle fait injure a la pro vidence en prétendant jouir d’une révélation exclusive de Dieu.

Le De religione gentilium a pour but de montrer, sous toutes les erreurs des païens, la persévérance des cinq principes dans lesquels seuls consiste pour Cherbury la religion naturelle ; il le prouve en examinant successivement le culte rendu aux astres, aux éléments, aux héros divinisés.

Les ouvrages historiques de Cherbury ne parurent qu’après sa mort (1649 et 1656). Son autobiographie fut éditée par Horace Walpole au xviiie siècle (1764). On conserve encore manuscrit un mémoire adressé par lui à Charles I er pour établir la suprématie royale sur l’Eglise.

I. Œuvres. — Les traités De veritate ; De causis errorum ; De religione laici, et quelques pièces de vers latins furent édités ensemble à Londres en 1656. Le De religione gentilium fut réédité à Amsterdam en 1700. — Parmi les attaques faites contre ces ouvrages on peut signaler : Musæus, Examen Cherburianismi, sive de luminis naturx insufficientia ad salutem, contra E. Herbertum de Cherbury, Iéna, 1675 ; C. Kortholt, De tribus impostoribus (Cherbury, Hobbes et Spinoza), Keil, 1680.

II. Travaux.

H. Walpole, The life of Edward, lord Herbert of Clierbury, Strawberry, 1764 ; Guttler, Herbert von Cherbury, Munich, 1897 ; Rémusat, Lord Herbert de Cherbury, sa vie et ses œuvres, Paris, 1874 ; Sidney Lee, The autobiography of Edward, lord Herbert of Cherbury, Londres, 1886 (la vie de Cherbury est continuée par l’éditeur, de 1624, époque à laquelle s’arrête l’autobiographie, jusqu’en 1648) ; Vigouroux, Les Livres saints et la critique rationaliste, Paris, 1886, t. H, p. 4-7 ; article de Sidney Lee dans le Dictionary of national biograpliy. Dans les articles Thcism de l’Encyclopssdia britannica, et Deismus du Kirchenlexikon et de la Realencyklopàdie fur prot. Theol., on trouvera de bonnes indications sur les rapports des théories de Cherbury avec celles des déistes anglais du xviir siècle qui le firent oublier.

, T. DE LA SERVIÈRE.

    1. CHERCHEURS##


CHERCHEURS. Secte religieuse hollandaise, qui admet la vérité de la religion de Jésus-Christ, mais prétend en même temps que cette religion n’est professée dans sa pureté par aucune Église, par aucune communauté du christianisme ; ses membres ne se rattachent donc à aucune communion, mais ils se bornent à chercher dans les Ecritures afin d’y découvrir la religion authentique de Jésus-Christ. Cette secte se répandit aussi en Angleterre.

Stoup, Traité de la religion des Hollandais ; Glaire, Encyclopédie catholique, Paris, 1854, t. vii, p. 155 ; Ch. Saint-Laurent, Dictionnaire encyclopédique, Paris, 1845, p. 265.

V. Ermoni.

    1. CHÉRUBIN DE MAURIENNE##


CHÉRUBIN DE MAURIENNE, capucin, dans le monde Alexandre Fournier, naquit à Saint-Jean-de-Maurienne, le 24 mars 1566. Le 7 septembre 1583, il entrait au noviciat des capucins de la province de Gênes. On dit qu’il fut dans la suite reçu docteur à Avignon ; le fait est que sa science était profonde et Dieu l’avait préparé pour la mission à laquelle il le destinait. Le P, Chéfubin fut en effet le premier des collaborateurs de saint François de Sales pour la conversion du Chaînais. Il n’avait point la douceur du saint, mais sa véhémence, que l’on a exagérée, était tout apostolique et venait d’un zèle ardent. Il avait projeté l’établissement de la Sainte-Maison de Thonon qui devait être collège, séminaire, université, école d’arts et de métiers, refuge pour les nouveaux convertis. Le projet était trop vaste pour être réalisable, et le P. Chérubin n’en vit qu’un faible commencement d’exécution, malgré tous ses efforts auprès de la cour de Rome et celle des ducs de Savoie. Parmi ses travaux apostoliques dans le Cbablais et le Valais, nous rappellerons les Quarante-lleures célébrées à Annemasse en 1597, à Thonon en 1598, le jubilé obtenu par son zèle pour la ville de Thonon en 16U2, qui furent une occasion de conversions nombreuses. Le P, Chérubin mourut à Turin, au couvent des capucins du Monte, le 20 juillet 1610, â l’âge de 44 ans. Le duc